Il y a des livres qui vous happent dès les premières lignes comme une tempête d'altitude, et Prisonniers au Tibet rouge est de ceux-là. À travers ce récit haletant, Sydney Wignall nous emporte à 7 728 mètres d'altitude sur les pentes interdites du Gurla Mandhata, à une époque où l'Himalaya n'était pas encore ce terrain de jeu balisé que l'on connaît aujourd'hui, mais un monde encore sauvage, politique, et dangereux.
En 1955, alors que la plupart d'entre nous auraient eu du mal à situer le Tibet sur une carte, Wignall, lui, partait y planter un drapeau gallois - un rêve d'alpiniste et d'aventurier. L'expédition bascule vite en cauchemar : arrêtés pour espionnage par l'Armée populaire de libération chinoise, Wignall et ses compagnons deviennent, bien malgré eux, les héros d'une odyssée de survie d'une intensité rare. Tortures, maladies, privations... tout y est. Et pourtant, dans ce huis clos oppressant au coeur des montagnes, ce qui frappe, c'est la force de l'humour, de l'ingéniosité, et de la solidarité humaine. On sent, à chaque page, ce lien invisible entre camarades d'infortune, ce courage désespéré qui fait tenir quand tout vacille.
Wignall écrit avec une simplicité presque britannique : précise, pudique et, parfois, étonnamment drôle. On grimace, on rit jaune, on serre les dents avec lui. C'est cette honnêteté brute, sans fard ni héroïsme facile, qui donne à son témoignage toute sa puissance. Cerise sur le sommet : la postface signée Cédric Gras, grand amoureux des alpinismes d'ailleurs, éclaire cette aventure avec la finesse qu'on lui connaît. Un récit captivant pour tous ceux qui rêvent aussi de terres lointaines, de défis insensés et de grands espaces où la liberté se paie au prix fort.
Prisonniers au Tibet rouge de Sydney Wignall. 324 pages - 21 € - Sortie le 23 avril 2025.