Musique traditionnelle
À Kuala Lumpur ou à Borneo, la musique reflète la multi-culturalité du territoire. Ce dernier a beau n’être pas très vaste, il est marqué par des influences diverses (thaïlandaises, philippines, chinoises, portugaises et indiennes, entre autres).
En Malaisie, que ça soit à Kuala Lumpur ou à Sabah et Sarawak sur Bornéo, la musique syncrétique, résultant de ce certain métissage, ne se mélange souvent pas aux orchestres de musique traditionnelle. Cette dernière résulte de rituels cultivés par de nombreuses ethnies, dans lesquelles on retrouve des instruments typiques de la Malaisie : orgue à bouche kediri (ou koloreh, ou sumpotan selon les tribus), guimbarde odeng, flûte nasale, sifflet, hochet, luth sape, gongs… La musique traditionnelle est jouée lors de cérémonies funéraires, retours de chasse, rituels chamaniques ou patriotiques.
De tous les instruments, le plus emblématique est sans doute le gamelan. On reconnaît surtout, à travers le monde, sa pratique indonésienne. L’instrument se retrouve dans l’ensemble du territoire, que ce soit à Brunei, en Malaisie et en Indonésie. Le gamelan est, dans tous les cas, composé de plusieurs percussions telles que le saron (métallophone), le gambang (xylophone) ou les gendang (tambours). C’est le répertoire qui diffère d’une culture à l’autre : une douzaine de pièces est régulièrement jouée depuis des décennies en Malaisie. Mais depuis peu, des compositeurs malais abreuvent ce patrimoine, permettant d’agrémenter les festivités comme les cérémonies royales par exemple. En Indonésie, chaque village possède sa propre variante de gamelan et son propre usage. Des orchestres entiers sont construits autour du gamelan, mais parfois, il accompagne simplement de la danse ou du théâtre.
À Kalimantan, le territoire indonésien de Borneo, le kendau est l’esthétique musicale qui prédomine. Ce chant polymorphe s’exécute par les hommes lors de cueillettes, par un chœur ou pour accompagner une danse.
Côté Malaisie, le nobat, qui est une musique de la cour royale exécutée par six musiciens (jouant du tambour, du gong, du nafiri et du serunai qui sont des sortes de hautbois) ; le ghazal, poésie chantée et romantique d’origine perse et indienne, mise en lumière par des artistes comme le joueur de cithare Samuel J. Dass et la chanteuse Kamariah Noor ; mais aussi le keroncong, dérivé du ukulele, arrivé en Malaisie au XVe siècle, qui a donné naissance à un style à part entière reposant sur des chants traditionnels accompagnés de cette petite guitare, mais aussi d’un gamelan, parfois d’un violon, d’une flûte ou encore d'un violoncelle. Le keroncong a eu une fonction nationaliste et populaire à travers la portée de ses chants. Dans les années 1950, l’ensemble Orkes Keroncong Fajar Baru Kajang a marqué le public et est considéré encore aujourd’hui comme l’un des groupes les plus connus de Malaisie. Le dondang sayang se fait aussi remarquer au XVe siècle par la cour royale : parmi les musiciens, un violoniste donne la réplique à un chanteur. Enfin, l’asli réunit des chants malais et des rythmes joués sur des instruments parfois traditionnels, parfois occidentaux, parfois les deux. C’est ce mélange des genres qui caractérise l’asli, grande spécialité de la chanteuse Rosiah Chik (surnommée Mal We), rendue célèbre dans les années 1960.
À Brunei, des instruments traditionnels sont conservés et continuent de se pratiquer, comme le gela (variante du violon fabriqué avec une peau de poisson) ou encore le kledi (trompette réalisée en bambou et noix de coco). Parmi les esthétiques traditionnelles du sultanat, l’Adai-adai, chant des pêcheurs en mer, est emblématique du pays.
La musique traditionnelle se croise à diverses occasions sur le territoire : à l’Istana Budaya à Kuala Lumpur, durant le Rainforest World Music Festival, à Kuching, à Sarawak, sur l’île de Bornéo, qui fait la part belle aux musiques du monde et notamment aux musiques locales.
Musique classique
En Malaisie, la musique philharmonique tient une place importance dans le cœur de la population. Ces dernières années, l’intérêt pour la musique classique a même été croissant chez le public, avec une attention affirmée pour le piano et le violon. La musique contemporaine est aussi un domaine qui se développe, bien plus que la musique classique d’ailleurs : plusieurs artistes malais partent faire carrière à l’étranger. C’est le cas de Chong Kee Yong, Yii Kah Hoe ou encore Adeline Wong. Ng Chong Lim, originaire de Kuala Lumpur, est également un pianiste de renom. Saidah Rastam, compositrice, signe de nombreuses œuvres, allant de l’opéra aux pièces traditionnelles. Si beaucoup de figures musicales malaises parviennent à se faire un nom, c’est aussi que de nombreuses structures permettent aux jeunes talents de faire leur place et se produire. C’est le cas du Malaysian Philharmonic Orchestra, qui a vu faire leurs armes de multiples artistes, et de la salle Philharmonique Petronas, au sein des Petronas Towers, à Kuala Lumpur.
À Brunei, des concerts de musique classique sont programmés à la Brunei Music Society depuis plus de 40 ans.
Musiques actuelles
Si l’Indonésie souffle une vague résolument rock à l’ensemble de ses territoires, on écoute aussi, à Borneo, du kroncong (forme de hip-hop indonésien) ou encore le dangdut (musique populaire tout à fait singulière, parfois revendicatrice).
Côté Malaisie, c’est le style asli qui donne le top départ à l’émancipation de la musique des courants plus traditionnels. Inspirés de la musique pop occidentale et aussi des principes de l’opéra malais, les premiers titres de musique populaire de Malaisie émergent dans les années 1930, comme « Tudung Periok » de Momo Latiff.
P. Ramlee fait, par la suite, particulièrement parler de lui : originaire de Kuala Lumpur, la star se fait connaître à travers des concours de musique populaire et le cinéma malaisien. Le pays suit ensuite les mouvances musicales occidentales : l’arrivée solaire des années 1960, incarnées encore aujourd’hui par le titre « Suzana » de M. Osman ; l’élan de liberté des années 1990, avec l’essor d’icônes comme Sheila Majid, Jamal Abdillah (véritable star de la pop malaisienne) ou encore Zainal Abidin et plus tard, Yuna (artiste pop-R&B particulièrement visible sur la scène internationale).
Si tous les signaux semblent être au vert, le gouvernement malais reste vigilant sur les sorties musicales et n’hésite pas à censurer tous les sujets jugés non « décents » par la politique en place. Ainsi le rock et le rap peinent plus à faire leur place. Quelques groupes de rap se sont quand même fait remarquer dès les années 1980 comme Krash Kozz ou SonaOne.
Des concerts de tous styles sont programmés quotidiennement à Kuala Lumpur, notamment dans les nombreux clubs ou salles de concerts. Ils sont plus rares à Bornéo mais l’île n’est toutefois pas inactive en matière de musiques actuelles. De gros festivals ont lieu à Kuching, côté Malaisie, comme le Borneo Sonic, réunissant les talents locaux et les artistes internationaux sur la même scène.
Danse
À Borneo, plusieurs danses traditionnelles se côtoient sur le territoire. Le kendau puise sa source dans la partie indonésienne de l’île et décline sous plusieurs formes, avec ou sans chants pour accompagner les mouvements. Les communautés Kedayan de Brunei portent les couleurs de l’Aduk-Aduk, qui est une danse cérémonielle qui a lieu à la fin de la saison des récoltes, accompagnées de percussions. La Malaisie et Brunei se partagent la pratique de la danse jipin, exécutée par six hommes et femmes, interprétant une chorégraphie rythmée par des gongs.
Les Malais de Kalimantan revendiquent également de nombreuses danses, dont le mandau, réalisée avec des couteaux et des boucliers.
Théâtre
Emprunté à la Thaïlande et puisant sa source aussi en Indonésie, le théâtre d’ombres wayang kulit est incarné par des marionnettes articulées. Cette forme artistique très ancienne se pratique aussi largement en Malaisie et elle considérée comme un art majeur en Indonésie. Divertissant, le spectacle repose sur des marionnettistes, appelés dalang, qui requièrent une dextérité maitrisée et doivent fabriquer eux-mêmes leurs marionnettes en cuir de chèvre (ou de buffle). Devant l’orchestre, le dalang joue tous les rôles et manipule les différents personnages tout en racontant l’histoire, généralement puisée dans la légende indienne du Ramayana. Les dalang sont considérés comme des artistes à part entière et tentent de faire perdurer leur activité.
Selon les territoires, des variantes musicales sont observées.
En Malaisie, d’autres formes théâtrales sont répandues, notamment le mak yong, qui est une forme de spectacle hybride : elle combine art dramatique, musique vocale et instrumentale, gestuelle et costumes élaborés. Cet art royal, devenu populaire et même associé aux rituels de guérison, est encore exécuté aujourd’hui par quelques troupes, bien que devenu beaucoup plus rare que dans la première moitié du XXe siècle. Durant en moyenne trois heures, la pièce repose sur un récit, lui-même ponctué par un orchestre, de la danse, des monologues, et des sessions de chants. Le bangsawan (appelé aussi mendu) est une sorte d’opéra malaisien, alliant musique, danse et pratique dramatique. Cet art, devenu extrêmement populaire avec l’arrivée de la radio et de la télévision, est alors considéré comme le divertissement par excellence de la population. Le cinéma a ensuite éclipsé cette pratique, bien qu’il soit encore possible d’en voir de temps à autres à l’affiche de salles de spectacles, comme le Kuala Lumpur Performing Arts Centre (KLPAC), qui propose une pluralité de formes de spectacle vivant, mais aussi de certains festivals comme le Kuala Lumpur festival qui met en avant chaque année les arts vivants traditionnels de la Malaisie.
À Brunei, le théâtre plaît également beaucoup à la population. Cette dernière peut voir des pièces au National Theatre Festival qui a lieu chaque année à Darussalam.