Découvrez Flandre Occidentale : Musiques et Scènes (Danse / Théâtre)

On connaît mal ses voisins. Au même titre qu'en Wallonie, on ignore souvent la richesse et l'étendue de la musique des Flandres. Bien sûr, on a certainement entendu parler d'Arno, le Gainsbourg flamand, de Soulwax, grand duo de l'électronique, de dEUS, les rois de l'alternatif ou peut-être même de Wim Mertens, quand on aime le piano contemporain. Mais passées ces quelques vedettes, la Flandre n'en reste pas moins une terre de musique et de danse. Noyau de l'harmonie moderne durant la Renaissance, la région est aussi un haut lieu du rock en Europe (et dans le monde) ainsi qu'un vivier pour la danse contemporaine depuis que Maurice Béjart y fonda son école (Mudra) dans les années 1960. Outre les grands noms de la chorégraphie que sont Anne Teresa de Keersmaeker ou Sidi Larbi Cherkaoui, la Flandre est une région où l'on danse énormément. Une raison qui explique la densité de grands festivals comme Tomorrowland, Pukkelpop ou Rock Werchter.

La musique classique

L'âge d'or, l'époque des plus grandes gloires de la musique classique des Flandres – et plus généralement de Belgique – est sans conteste la Renaissance. Au XVe siècle, tandis que les Flandres font partie des Pays-Bas bourguignons, apparaît la fameuse École franco-flamande. Cette dernière bouleverse l'histoire de la musique en développant la polyphonie – base de l'harmonie moderne – puis en la propageant rapidement dans toute l'Europe de l'Ouest grâce à l'invention de l'imprimerie (dont Anvers était un centre important) et des compositeurs voyageurs. Parmi eux, les plus illustres demeurent Johannes Ciconia (1370-1412), pionnier et grand maître de l'Ars Nova, Gilles Binchois (1400-1460) compositeur officiel du duché de Bourgogne, Pierre de La Rue (1460-1518) qui fait carrière à la cour de Maximilien d'Autriche ou le fameux Josquin des Prés (1450-1521) qui connaît le succès en Italie avant de finir comme chanoine à Sainte-Gudule de Bruxelles. Autre Flamand illustre de la même ère, Adrien Willaert – né à Bruges en 1480 – est l'auteur de messes, motets et madrigaux mais reste gravé dans l'histoire pour avoir été maître de chapelle de l'église Saint-Marc de Venise. Au XVIIe siècle, c'est Henri Du Mont (1610-1684) qui devient maître de chapelle de Louis XIV et œuvre pour la Chapelle Royale de Versailles tandis que Léonard de Hodémont (1575-1636) adopte et importe les innovations italiennes telles que la monodie.

Au fil du XIXe siècle, une vague de compositeurs des Flandres s'inscrit dans la liaison entre romantisme tardif et impressionnisme (très influencés par Debussy) et élaborent une salve d'œuvres où s'exprime l'âme populaire flamande. Parmi eux, se distinguent Peter Benoit (1834-1901), célèbre pour ses opéras et poèmes symphoniques pétris d'Histoire, Lodewijk Mortelmans (1868-1952) qui a mis en musique des poèmes, notamment de Baudelaire, Arthur Meulemans (1884-1966) auteur de quinze symphonies et trois opéras ou encore Jozef Van Hoof (1886-1959), compositeur d'œuvres symphoniques mais aussi de pièces pour piano ou orgue. Au XXe siècle, les Flandres n'ont pas tari en talents. Citons les baroqueux Philippe Herreweghe (chef d'orchestre) et Sigiswald Kuijken (violoniste et chef d'orchestre) ou le très contemporain et minimaliste pianiste et compositeur Wim Mertens, comparable à un « Philip Glass flamand ».

Véritable passion locale, le classique ne manque pas de scènes dans les Flandres. C'est à Bruges que l'on trouve la plus grande institution de la région, le Concertgebouw (vraie curiosité architecturale) dont la programmation vaudrait presque celle de son homonyme néerlandais. C'est notamment ici que se déroulent la Bach Academie et surtout le MA Festival, rendez-vous spécialisé en musiques anciennes aussi pointu qu'ouvert à tout public. À Gand, si De Bijloke compose une bonne programmation dans un joli lieu (l'enceinte de l'abbaye), c'est l'Opéra qui attire les mélomanes du monde entier. Datant du XIXe siècle, il a conservé tout son lustre, très italien, tout en dorures et velours rouge, et on y vient de loin écouter Verdi et Puccini ainsi que de grands opéras contemporains. Il fait partie du Vlaamse Opera, institution publique flamande créée en 1996, au même titre que l'Opéra d'Anvers. Très prestigieux, ce dernier a, comme son cousin gantois, pris le parti d'une programmation audacieuse et de mises en scènes contemporaines. Un succès, les représentations affichent complet des mois à l'avance ! À noter qu'à Anvers, on trouve également deSingel, centre d'art programmant des concerts classiques et contemporains.

La chanson

En Belgique, quel que soit le côté de la barrière linguistique, on aime la chanson. Et la star du genre chez les Flamands, c'est bien sûr Arno. Bien connu des Français puisqu'il chante dans leur langue, Charles Ernest Hintjens (de son vrai nom) est un peu le Gainsbourg du pays, une gueule et une plume à fleur de peau mais avec ce je-ne-sais-quoi de plus mélancoliquement belge. Très prolifique, Arno est devenu en une dizaine d'albums l'artiste culte de la chanson belge contemporaine. Moins connue du monde francophone, une large scène de chanteurs (exerçant souvent en flamand ou anglais) se cache derrière Arno. Les plus célèbres sont sans doute Will Tura, une machine à tubes depuis un demi-siècle, Raymond Van Het Groenewoud, réputé pour la qualité de ses textes, Wannes Van de Velde, figure emblématique du folk anversois et grand novateur du genre ou encore Ferré Grignard dont le folk révolté et dégingandé devint culte auprès de la scène rock belge du début des années 2000.

Musiques actuelles

Oubliez tous les stéréotypes sur le plat pays : l'une des grandes spécialités locales est… le rock. Plutôt alternatif et indé, le rock belge explose dans les années 1990 côté flamand avec les fameux dEUS, K's Choice, Hooverphonic, Zita Swoon, Ozark Henry ou An Pierlé avant de réapparaître peu après en Wallonie incarné par Sharko, Girls in Hawaii, Ghinzu ou Hollywood Porn Stars. Sans surprise, l'un des plus grands festivals de rock en plein air d'Europe, le Rock Werchter, est belge (il a lieu dans la ville du même nom). Chaque année, le programme est de haute tenue et la billetterie affiche complet plusieurs semaines à l'avance.

Si l'un des liens les plus connus entre rock et musique électronique est belge – incarné par le duo gantois Soulwax –, c'est peut-être parce que le pays a longtemps maintenu une frontière poreuse entre les deux genres. Le groupe Telex (très inspiré par Kraftwerk) dans les années 1970 en est un bon exemple. Durant la décennie suivante, la musique électronique explose dans le pays avec l'irruption de l'EBM (« Electronic Body Music ») venue d'Allemagne. Dure, noire, industrielle et répétitive, elle est une héritière radicale de la new wave dont les Belges Front 242 (d'Aarschot) ou Snowy Red sont devenus des légendes. À la fin des années 1980, début 1990, la Belgique développe un genre électronique qui lui est propre : la « New Beat ». Réponse à la techno naissante (à Détroit), imprégnée d'EBM, elle est popularisée dans le pays par la massification de l'ecstasy. D'abord cantonnée à une niche, des pionniers tels que Confetti's, Lords of Acid (d'Anvers), Amnesia ou Technotronic (d'Alost) ont acquis rétrospectivement une aura d'avant-gardistes. Depuis les années 1990, la Belgique est un acteur majeur de la musique électronique mondiale, les pionniers de la house et de la techno ayant ouvert la voie aux superstars actuelles : Amélie Lens (d'Anvers) et Charlotte de Witte (de Gand). Dans un genre hybride, entre musique électro, grime et garage, KRANKk (d'Anvers) ont fait sensation en 2020 avec leur album Dark.

Et puis, il y a évidemment le hip-hop. Les pionniers de 't Hof van Commerce ont tracé le sillon du rap en flamand. L'Anversois multi-récompensé Tourist LeMC lui aussi rappe dans la langue de Vondel. Également venant d'Anvers, le collectif blackwave. surfe quant à lui plus dans la tendance funk du hip-hop.

Superstars toujours, c'est aussi dans les Flandres que l'on trouve l'un des festivals les plus connus (et courus) au monde : Tomorrowland. Installé dans la province d'Anvers, ce rendez-vous créé en 2003 accueille des festivaliers des quatre coins de la planète ainsi que les DJs les plus connus – Avicii, David Guetta, Steve Aoki, Dimitri Vegas & Like Mike, Calvin Harris – dans une ambiance de fête foraine XXL. Localement, quelques adresses ont le vent en poupe grâce à leur programmation. À Anvers, le Café Local est un incontournable pour les amateurs de musique world, salsa et disco. Autrement, à une dizaine de kilomètres d'ici on trouve La Rocca, un lieu historique puisqu'il fut le premier club belge à être passé dans l'ère de la musique électronique. Si vous cherchez un lieu intimiste, passez votre chemin puisqu'il accueille plus de 1 500 personnes chaque week-end dans ses deux salles. À Gand, le Vooruit est un incontournable, célèbre aussi bien pour sa salle de spectacle que pour son café populaire. DJs (souvent bons) tous les week-ends. Autre institution de la ville, le Charlatan propose une programmation variée comprenant régulièrement des artistes réputés.

La danse

Dès que l'on s'aperçoit que des pontes de la danse contemporaine comme Anne Teresa de Keersmaeker ou Sidi Larbi Cherkaoui sont originaires de la région, on comprend quel amour la Flandre porte à la chorégraphie. Une discipline dont la renaissance dans le pays a – sans chauvinisme aucun – été initiée par un illustre Français : Maurice Béjart. L'incontournable chorégraphe marseillais (mort à l'âge de 80 ans, en 2007) s'installe à Bruxelles en 1960 et suscite, avec la création de son Ballet du XXe siècle ainsi que l'école Mudra, l'éclosion d'une génération de grands danseurs et chorégraphes en Belgique. Parmi eux, la plus illustre est sans conteste la brillante Anne Teresa de Keersmaeker.

Originaire de Malines, Anne Teresa de Keersmaeker bouleverse, dès ses débuts dans les années 1980, le monde de la danse avec Fase, Four Movements to the Music of Steve Reich, proposition posant les bases de sa grammaire chorégraphique singulière, écho à la musique minimaliste de Steve Reich. Toujours animée par ce même désir d'explorer en profondeur le dialogue entre danse et musique, elle fonde en 1983 sa compagnie de danse Rosas avec laquelle elle impose sa pratique unique, inspirée par la géométrie et la pensée mathématique. Entre 1992 et 2007, alors en résidence avec Rosas au théâtre de La Monnaie à Bruxelles, de Keersmaeker crée des pièces comme Dans Drumming (1998) et Rain (2001) qui vont définitivement faire rayonner son identité et son talent dans le monde entier. Des partis pris esthétiques forts et un degré extrême de sophistication qu'elle transmet via l'école P.A.R.T.S. (Performing Arts Research and Training Studios) depuis sa fondation en 1995. Comme son maître Béjart avant elle, Anne Teresa de Keersmaeker fait éclore dans son sillon de nombreux talents chorégraphiques internationaux tels que Saskia Hölbling, danseuse et chorégraphe autrichienne qui travaille énormément autour du corps nu, Akram Khan, devenu une référence et connu du grand public pour sa création lors de la cérémonie d'ouverture des Jeux olympiques de Londres (2012) ou encore Noé Soulier, un des chorégraphes français les plus en vue (désormais directeur du Centre national de danse contemporaine d'Angers). Mais l'élève le plus connu de P.A.R.T.S – et le plus applaudi – est sans aucun doute Sidi Larbi Cherkaoui. Vibrant chorégraphe, il décloisonne les genres et travaille aussi bien avec Beyoncé qu'avec le Ballet royal de Flandre (qu'il dirige) ou l'Opéra de Paris pour revisiter le Boléro de Ravel. Une philosophie portée sur l'audace et des thèmes forts (immigration, exclusion, etc.) hérités d'une de ses grandes influences : Alain Platel. Ce chorégraphe gantois a fondé en 1984 les Ballets C de la B (pour Ballets contemporains de la Belgique) via lesquels, depuis plus de trente ans, il repousse les limites de la danse, du théâtre et de la musique tout en explorant les diverses facettes de la fragilité humaine. Autre chorégraphe incontournable de la région, l'Anversois Jan Fabre, également metteur en scène et plasticien, a beaucoup fait parler de lui pour ses œuvres controversées. Autrefois collaborateur de ce dernier, citons également Wim Vandekeybus, chorégraphe qui a acquis une reconnaissance mondiale dans les années 1990 avec sa compagnie UltimaVez.

Côté danse classique, le seul grand ensemble de la région (et du pays) est le Koninklijk Ballet Van Vlaanderen. Fondé par la baronne Jeanne Brabants, une pionnière de la danse en Belgique, l'ensemble est aujourd'hui dirigé par Sidi Larbi Cherkaoui et se produit au Ballet Royal de Flandre, magnifique salle du centre d'Anvers. Dans la même ville mais plus portés sur la création contemporaine, Toneelhuis ainsi que deSingel sont deux des lieux les plus courus de la région. Une qualité que l'on retrouve également dans la programmation du Concertgebouw de Bruges.

Organisez votre voyage avec nos partenaires à Flandre Occidentale
Transports
Hébergements & séjours
Services / Sur place

Découvrez Flandre Occidentale

Envoyer une réponse