Composition ethnique et démographie
Selon les dernières estimations, il y aurait environ 3 700 000 habitants en Géorgie en 2024. 61% de la population serait urbaine et un tiers de la population vivrait à Tbilissi.
Le groupe majoritaire se compose à 87,8 % de Géorgiens et les communautés arméniennes et azerbaïdjanaises seraient chacune aux alentours de 5 %, la dernière étant un peu plus importante que la première. On retrouve de toutes petites minorités (moins de 1 %) des populations suivantes : Mingréliens, Grecs, Ossètes, Yézidis, Svanes, Kistes (Tchétchènes), Biélorusses, Assyriens, Kurdes, Judéo-Géorgiens, Daguestanais (Avars et Lezguiens), Allemands, Ukrainiens, Tatars, Kists et Roms.
Pour les deux régions séparatistes, on estime à environ – chiffre contesté – 51 000 habitants vivant en Ossétie du Sud et 241 000 en Abkhazie (un chiffre très aléatoire).
Une vraie crise démographique
Depuis 1991, date à laquelle la Géorgie retrouve enfin son indépendance, son taux de croissance démographique commence à diminuer. En vingt ans, le pays perd un dixième de sa population. La Géorgie est sujette, en effet, à une émigration massive et à une baisse de la natalité très forte. Le pays est donc passé sous le seuil critique du renouvellement de la population. Après l'indépendance en 1991, les conditions de vie en Géorgie s'étaient nettement dégradées. La Géorgie, après l'implosion de l'URSS, avait perdu 70 % de son PIB, et figurait parmi les plus pauvres des anciens pays satellites du bloc soviétique.
Des racines que l'on n'oublie pas
En Géorgie, les identités régionales sont si fortes qu'elles s'imposent même au sein de l'arbre généalogique paternel. Si une famille d'origine imérétienne ou kakhétienne est installée à Tbilissi depuis trois générations, elle n'oubliera néanmoins pas de préciser ses origines. L'est et l'ouest du pays ont leurs propres spécificités en termes de caractères de leurs habitants – et les clichés sont encore largement de mise, si ce n'est exacerbés. Ainsi, les Géorgiens mettent l'accent sur les principales caractéristiques des populations vivant à l'est ou à l'ouest du pays.
De l'immortalité et de l'absurdité des clichés
À l'Ouest, les Imérétiens sont censés être bavards, blagueurs, extravertis, excessivement bien élevés, à la limite de l'hypocrisie. On dit que les Gouriens sont intelligents, rapides et actifs.
À l'Est, les Kakhétiens ont la réputation d'être sobres et fiers, d'avoir le sang chaud, le sens de la fête – à travers le vin et les supra. Les Kartliens sont censés être rudes et durs, les habitants de la région de Kazbegi sont, aux yeux du reste du pays, de rudes montagnards, les Touches de Touchétie sont, quant à eux, des bergers de grande transhumance.
Des étiquettes indélébiles sont plaquées sur les minorités. Mais pas de stéréotypes plaqués sur les habitants de Tbilissi ou Mtskheta. À l'image de Paris, tout le monde ou presque vient d'ailleurs. Au XIXe siècle, la Géorgie connut un grand exode rural vers Tbilissi. Ainsi, les clichés des résidents de la capitale sur les régionaux sont exacerbés, et vice versa. Comme partout dans le monde, les étiquettes sont toujours difficiles à décoller. Mais les principales victimes des stéréotypes sont les minorités, qui ont déjà la vie dure, et contre lesquelles les stéréotypes s'acharnent, alors que tous ont participé à la richesse culturelle de ce pays.
Venus de partout, ils avaient rendez-vous en Géorgie
Au cours de l'histoire, la Géorgie a été une vraie mosaïque multi-ethnique. Jusqu'à l'avènement de l’État-nation, au XIXe siècle, les identités collectives étaient avant tout sociales et religieuses. La région du Caucase a connu, au fil des siècles, une histoire particulièrement mouvementée. Elle a façonné un territoire caractérisé par une population très hétérogène. Dès la fin du XIXe siècle, la Géorgie a voulu construire un État nationaliste contre l’empire tsariste puis le bloc soviétique. Au tout début du XXe siècle, les mouvements nationalistes ont donné naissance aux identités nationales et territoriales. L'identité géorgienne est née lors de l'indépendance du pays entre 1918 et 1921. En Géorgie, histoire et nationalisme ne pourraient faire qu'un ! Durant la période soviétique, la politique stalinienne, concernant les minorités, s'appuyant sur les repères ethniques, créait des espaces où les minorités se reconnaissaient plus dans leur ethnie que dans leur région. Ainsi, les Arméniens étaient poussées à aller à Erevan, les Azéris à Bakou, les Géorgiens à Tbilissi. En outre, les membres de ces minorités étaient poussés à parler en premier lieu leur langue maternelle, le géorgien n'étant enseigné que comme seconde langue. Cela ne facilite pas l'intégration de certains à l'heure actuelle qui ne parlent ni ne comprennent le géorgien.
Répartition des minorités ethniques
Les Arméniens constituent un groupe équivalent à environ 5 % de la population. Ils sont concentrés dans le sud du pays, dans la région de Samtskhe-Djavakhétie, zone frontalière de l'Arménie, mais aussi en Abkhazie, au nord du pays, sous contrôle russe. À Tbilissi, au XIXe siècle, la communauté arménienne était majoritaire. La ville conserve de larges vestiges du passé arménien. En 2020, à la suite d'une histoire très mouvementée et des exils consécutifs, celle-ci s'est réduite à seulement 7 % des citoyens. Les Arméniens ont toujours été très présents un peu partout dans le pays. Au fil des siècles, ceux-ci occupaient une place plus ou moins importante au sein du royaume, occupant des fonctions militaires ou administratives, étaient laboureurs, vignerons, commerçants. Des capitalistes célèbres prêtaient sur gages au royaume. La communauté arménienne a longtemps concentré la vie économique du pays.
Les Arméniens installés dans la région méridionale sont les descendants des émigrés poussés à fuir lors des guerres russo-turques du XIXe siècle. D'autres sont venus s'installer en Géorgie avant la Première Guerre mondiale. De nos jours, isolée par une chaîne de montagnes, cette communauté n'opère que peu d'échanges économiques ou sociaux avec les autorités de Tbilissi, ni avec le reste du pays. Beaucoup d'Arméniens ne parlant pas le géorgien se retrouvent dans un état de pauvreté généralisé. En 2008, 8 % seulement des Arméniens parlaient le géorgien.
Les Azéris sont concentrés en Kartli et Kakhétie (6,6 % de la population) à la frontière avec l'Arménie et l'Azerbaïdjan. Ils sont de confession musulmane chiite. 45 % de la population des provinces de Kvémo-Kartli est également azérie, parle l'azéri – une langue s'assimilant au turc – et parle très peu le géorgien (seulement 7 % de la population le parle couramment). La communauté est essentiellement rurale dans cette région principalement agricole et fournit Tbilissi en pommes de terre et en légumes. Cette communauté, très isolée et repliée sur elle-même, est peu intégrée au reste de la Géorgie.
Ces deux minorités, dans l'ignorance de la langue officielle, n'ont pas accès à une information adéquate dans les médias ni à l'enseignement du géorgien. Elles ne peuvent donc trouver un emploi ni être actives dans les domaines sociaux. C'est un problème se montrant nettement plus aigu dans ces deux communautés, les plus importantes du pays, que dans les autres minorités.
Les Russes ne forment plus qu'une toute petite communauté concentrée à Tbilissi et dans les grands centres urbains. En 2002, plus de 80 % d'entre eux avaient quitté la Géorgie. Ceux qui restent ne parlent pas le géorgien. C'est un vrai problème d'intégration pour eux, qui ne va pas se résoudre. Le russe, une langue autrefois véhiculaire dans le pays, disparaît peu à peu. Les jeunes Géorgiens de moins de 25 ans ne le parlent plus.
La communauté kurde yézidie réside principalement à Tbilissi, Roustavi et Batoumi. Intégrés socialement, ils n'ont qu'un faible niveau d'éducation, donc un accès difficile à l'emploi.
Des minorités très isolées
En 1991, le slogan scandé par les Géorgiens lors de leur indépendance, « la Géorgie aux Géorgiens », pour se débarrasser de l'influence soviétique, a largement égratigné ses minorités. À l'ère soviétique, les langues des minorités étaient privilégiées, et le géorgien était enseigné comme seconde langue. En conséquence, après l'indépendance, leur communication était limitée, avec pour résultat une représentation infime et un accès difficile aux postes officiels dans l'administration ou gouvernementaux.
La plupart des minorités parlent le russe comme seconde langue, non le géorgien, ce qui ne facilite pas leur intégration. Cette barrière linguistique vient s'ajouter à un manque d'infrastructures en matière scolaire et au manque de communication. Les Arméniens, les Biélorusses, les Ukrainiens, enfin les Azéris souffrent de cet isolement. L'anglais est toutefois privilégié par la jeune génération.
Si le gouvernement géorgien a fait d'énormes efforts pour intégrer ses minorités, le succès n'est pas au rendez-vous. Il existe un énorme écart entre la société géorgienne et les minorités, très marginalisées, qui privilégient toujours leur langue maternelle. Les Arméniens de Samtskhe-Djavakhétie rêvent d'une autonomie et du rattachement de leur région à l'Arménie. D'autres membres de minorités ne pensent qu’à retourner dans leur pays d'origine au lieu de s’intégrer comme citoyens à part entière en Géorgie. Le pays reste divisé en clans, en minorités, en partis politiques…
La situation économique catastrophique a poussé un large nombre de membres de minorités et de Géorgiens à regarder vers des horizons plus larges, en prenant le chemin de l'exil.