Mosaïque dans le monastère Gelati © Grisha Bruev - Shutterstock.com.jpg
20_pf_187002.JPG

L’art des fresques

L’art des peintures murales s’est développé très tôt en Géorgie. On trouve un exemple des premières fresques du VIIe siècle dans la représentation de la Cène conservée au monastère de David Garedja. À l'origine, les fresques couvrent le chœur et les absides, puis occupent très rapidement tous les espaces muraux des églises ainsi que les colonnes et les voûtes.  Les normes byzantines imprègnent ces premières illustrations de la vie des saints. Elles se caractérisent par des coloris sobres et des lignes nettes. Les techniques évoluent progressivement. La monumentalité des fresques du XIe siècle cède peu à peu la place à des formes plus décoratives et moins figées. Certaines fresques ayant survécu aux invasions successives, à l’érosion et aux intempéries sont miraculeusement parvenues jusqu'à nous. Signalons la mosaïque du XIe siècle du monastère de Gelati montrant la Vierge Marie, Jésus et les archanges Michel et Gabriel, les grandes fresques des Xe et XIe siècles du monastère d’Ateni Sioni, près de Gori, les fresques du XIIe siècle de Vardzia qui composent savamment avec les irrégularités des murs de l’église troglodyte.

Pendant les invasions mongoles, l'art de la fresque ne disparaît pas, et de nombreux maîtres byzantins viennent travailler en Géorgie, mêlant avec brio les influences byzantines et géorgiennes. Le XIIIe siècle puis la chute de Constantinople (1453) marquent le début d'une période de création peu originale avec un retour aux modèles du passé. Au XVIe, on assiste à une renaissance de la fresque murale, fortement influencée par les traditions géorgiennes, comme on peut le voir dans l'église Saint-Georges de Guelati, à Gremi et à Nekressi.

À noter qu'aujourd'hui, les églises se remplissent à nouveau de fresques exécutées par des artisans qui reproduisent minutieusement les fresques médiévales. Aussi des intérieurs semblant dater du XIe siècle dateront parfois de 2006 !

Sculpture décorative

Principalement d'époque médiévale, les sculptures décoratives embellissent les façades des cathédrales sous la forme de figures en relief et de ciselures ornementales. C'est particulièrement dans les bas-reliefs que les maîtres ont donné libre cours à leur talent. Limitées à l'origine aux tours des fenêtres et des portes, les sculptures prirent de plus en plus d'espace. Les motifs choisis étaient dans les premiers temps des animaux parmi des fleurs et des végétaux. Très fréquent aussi, le motif de la vigne, symbole géorgien par excellence.

Entre le VIIIe et le Xe siècle, une évolution se ressent dans le style. Aux côtés des motifs géométriques épurés surgissent de nouvelles formes originales (fin du Xe siècle).

Les thèmes du Christ et de l'Ascension sont relativement fréquents et placés au-dessus des portes. Les modèles issus de l'étranger se mêlent aux motifs traditionnels, comme on peut le remarquer sur les chapiteaux de l'église de Bolnissi. C'est au début du Xe siècle que le relief se raffine dans le rendu des visages, et les plis des vêtements ciselés dans la pierre.  À la différence des églises russes et byzantines, où la partie sacrée de l'église était séparée des croyants par un mur recouvert d'icônes (l'iconostase), en Géorgie médiévale on note la présence d'un muret de pierre surmonté de colonnes et d'arcades. Ce n'est que plus tard que les espaces entre les colonnes furent occupés par des icônes. Un nombre très restreint de ces clôtures est parvenu jusqu'à nous ; l'église de Djvari à Mtskheta en conserve un fragment ainsi que l'église de Dzveli Chouamta en Kakhétie.

Les miniatures géorgiennes

À l'origine, les moines copistes embellissent les manuscrits en soulignant les lettres de l'alphabet géorgien par le recours aux encres teintées. Par la suite, les moines passent maîtres dans l'art de l'enluminure. Le premier ouvrage enluminé parvenu jusqu'à nous est le Tétraévangile d'Adichi (région de Svanétie) daté de 897. Deux méthodes sont ici utilisées : dans l'une, les contours sont tracés à l'encre, puis l'intérieur est recouvert d'une couche de couleur ; dans l'autre, plusieurs couches de couleurs sont appliquées sur un dessin esquissé au préalable.

Le XIIIe siècle témoigne d'une volonté de renouvellement : les personnages débordent sur les marges du texte, qui est lui-même orné de motifs. Avec l'arrivée, aux XVIe et XVIIe siècles, de missionnaires italiens, les influences occidentales font leur apparition dans le travail des artistes géorgiens. Parallèlement à l'enluminure religieuse se développe également une variante profane influencée par l'Iran. Un manuscrit d'astrologie, représentant les signes du zodiaque, est daté de 1188. La pièce maîtresse de la littérature médiévale géorgienne, Le Chevalier à la peau de tigre, a fait, à de nombreuses reprises, l'objet d'enluminures, la plus ancienne étant due au talent de Mamouka Tavakarachvili.

Peinture

Au XVIIIe siècle, l'art géorgien établit des liens avec l'art de l'Europe occidentale. Les arts monumentaux cèdent la place à la peinture de chevalet, à l'art graphique et à la sculpture. La peinture de chevalet connaît un rapide essor. Un émouvant témoignage de l'introduction des normes occidentales en peinture est représenté par la collection d'art qadjar du musée de Tbilissi, au sous-sol : il s'agit de portraits exécutés par des artistes de l'Empire iranien, dont certains étaient géorgiens, continuant à peindre des motifs orientaux à la manière et avec les proportions européennes. Cet art de transition est unique, et la collection de Tbilissi est l'une des plus riches (elle a été immortalisée dans le film de Paradjano Achik Kérib). Ensuite, l'école des portraitistes de Tbilissi du milieu du XIXe siècle rencontre un immense succès (notamment l'école de Hakop Hovnatanian ou de Maïssouradze). Elle mêle au réalisme des compositions les aspects traditionnels de la peinture médiévale. Le musée des Beaux-Arts de Tbilissi compte de nombreuses œuvres dues à ces peintres spécialisés dans les portraits de la famille royale et des représentants de la haute noblesse. À signaler, deux remarquables tableaux classés anonymes, mais vraisemblablement d'Hovnatanian : les traits des personnages sont ici rendus avec précision, de même que les poses solennelles. Pour l'anecdote, Hovnatanian perdit son gagne-pain avec l'arrivée de la photographie et il partit plus loin à l'est, en Iran, pour fuir cette malédiction des portraitistes.

Dans les années 1880, le portrait domine dans la peinture de chevalet, mais on note une évolution chez de jeunes peintres ayant étudié à l'Académie des beaux-arts de Saint-Pétersbourg. Ils tentent de rendre non seulement l'aspect extérieur, physique, mais également le monde intérieur et la psychologie des personnages. Leurs sujets appartiennent à différents types sociaux de la société géorgienne. Ainsi, Le Kakhétien à la cruche de Romanoz Gvelessiani ou Le Vieillard souriant d'Alexandre Beridze.

La Géorgie a connu une effervescence artistique à la fin du XIXe siècle avec des peintres comme Karabadze (1889-1952), Lado Gudiashvili (1896-1980) et, le plus célèbre d’entre eux, Piromanachvili (1862-1918), auteurs de portraits et de scènes au style naïf très particulier réinterprétant la tradition iconographique. De nouvelles tendances apparaissent. Les études de mœurs prennent le pas chez Guiorgui Gabachvili et ses scènes de village. Un genre où excelle le peintre autodidacte Niko Pirosmanichvili, dit Pirosmani, dont les tableaux font le portrait du « petit » peuple géorgien, mais également des princes livrés à l'une de leurs occupations favorites : le banquet. Plusieurs d'entre eux connaîtront le Paris des années 1920 et son dynamisme culturel où se mêlaient tendances nouvelles et influences les plus diverses. Une salle est consacrée à Pirosmani à la National Gallery de Tbilissi, dont on peut également apprécier le travail dans sa maison-musée de Sighnaghi.

De 1945 à nos jours

Au cœur de Tbilissi, l’imposant bâtiment du musée des Beaux-Arts regroupe 3 500 œuvres créées par cent artistes géorgiens au cours des soixante-dix dernières années. Collages, peintures à l'huile, dessins et sculptures sont présentés dans l’ordre chronologique sur trois niveaux. Le visiteur couvre à travers ce parcours le réalisme socialiste, la période du rideau de fer et de la guerre froide, l’effondrement du régime soviétique, la guerre civile et l’indépendance de la Géorgie.

La photographie s’est imposée très tôt en Géorgie, notamment sous la forme d’albums de famille. Nous recommandons en particulier ceux de Barbara Dadiani (1903-1999). Des témoignages de la Révolution de 1917 à la photographie mise au service de l’idéologie socialiste, cet art a documenté tous les bouleversements du pays. En 1933, le collectif Georgian Photo a permis aux meilleurs photographes géorgiens de prendre part aux concours internationaux. Leurs images montrent les travailleurs, les fermes collectives, les paysages industriels d’alors. Les amateurs ne manqueront pas d’explorer les salles du musée géorgien de la Photographie. Pour compléter la visite, la collection de la galerie Fotografia est classée en trois parties : conceptuel, contemporain et documentaire. On peut admirer des œuvres de grande qualité comme le travail sur les effets anthropomorphiques du bois de Nata Sopromadze.

Le street art n’a émergé que récemment en Géorgie. Désormais, des artistes réputés tels que Jérôme Mesnager et son célébrissime bonhomme blanc ornent les rues du pays. Hormis dans le cœur historique de Tbilissi, on en trouve des traces un peu partout, des amples messages politiques aux pochoirs poétiques ou humoristiques. Trois adresses raviront les chasseurs de street art. Fabrika, installé dans une ancienne usine de couture, est devenu un centre artistique animé, doté de bars et de restaurants, d’un espace de coworking, de boutiques et d’ateliers artistiques disposés autour d’une cour débordante de vie. Impossible de rater Fabrika. De loin, les murs colorés délimitent les rues environnantes. Les locaux et les touristes se retrouvent dans ce lieu pour partager, apprendre, s’inspirer, se relaxer ou se restaurer. Le passage souterrain de la place des Héros a été paré par les graffeurs en 2017 à l’initiative de la ville dans le but de le rendre plus sûr et plus plaisant. Vous le trouverez en vous rendant au monument dédié aux soldats géorgiens. Un autre monument, cette fois en hommage aux héros de la Seconde Guerre mondiale, vous fera découvrir le passage souterrain de Vake Park qui mène également à une zone de shopping.

Depuis peu, Tbilissi Art Fair (TAF) propose aux professionnels de l’art un aperçu exclusif sur la scène artistique émergente. La foire d’art contemporain de Tbilissi ouvre ainsi ses portes à la scène artistique internationale en mettant l’accent sur ses pays frontaliers. Attachée à miser sur de jeunes talents et à les promouvoir, TAF inscrit la Géorgie parmi les pays promis à un bel avenir culturel.