Découvrez Cuba : Le tabac cubain

Lorsque Christophe Colomb débarque à Cuba pour la première fois, en 1492, il est surpris de voir les habitants de l'île fumer d'étranges bâtons de feuilles séchées, ignorant qu'il vient de faire une découverte qui va profondément transformer les us et coutumes des sociétés européennes : le tabac ! Plus de 500 ans plus tard, Cuba produit toujours les cigares les plus cotés de la planète. Chaque année, plus de 100 millions de havanes sont fumés de par le monde, et deux fois plus sur l'île ! Ce prestige s'explique par un environnement climatique (climat tropical, pluviométrie relativement élevée et température moyenne de 22°C) et géologique (terre rouge-brun mélangée de sable et petits cailloux) idéal pour la culture de plants de tabac, doublé d'un savoir-faire transmis de génération en génération. Penchons-nous ici sur l'histoire du cigare cubain, ainsi que son méticuleux processus de fabrication.

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Présentation et production actuelle

« Petit rouleau constitué de feuilles et de fragments de tabac, destiné à être fumé », voilà la définition du cigare selon le Larousse. Une fois les feuilles roulées (selon un mouvement en spirale), on obtient un cylindre composé de deux extrémités : l'une est le « pied », c'est celle que l'on allume, l'autre est la « tête », que l'on coupe puis que l'on porte à la bouche. Un cigare peut se consommer soit en inhalant la fumée produite par la combustion, soit en la gardant simplement en bouche. Pour une consommation optimale, un bon cigare ne doit être ni trop sec, ni trop humide, raison pour laquelle ils sont conservés dans des humidificateurs adaptés. Si vous êtes fumeur et que vous souhaitez goûter à un bon havane, vous pourrez par exemple vous rendre au salon Cohiba Atmosphère, dans la capitale, et vous adonner à une séance de dégustation en bonne et due forme.

Étymologiquement, il semblerait que le mot cigare nous vienne de l'espagnol cigarro, mot qui lui-même viendrait de cigarra (« cigale » en espagnol) ou du mot maya zicar, qui signifie « fumer ». D'après les chroniques historiques d'Hernández de Boncalo, qui fut le premier à importer des graines de tabac en Europe (1559), les premières plantations espagnoles se trouvaient dans une zone des environs de Tolède, Los Cigarrales, ainsi nommé en raison des fréquentes invasions de cigales !

Historiquement, le tabac a commencé à être cultivées dans d'autres coins de la Caraïbe à partir de la moitié du XIXe siècle, notamment en Floride, lors de premières migrations des planteurs cubains. Plus tard, la vallée du Connecticut (États-Unis) deviendra également une importante zone de production. Puis ce sera au tour du Mexique, de la République dominicaine et du Honduras de se tourner vers cette culture. Pour ce qui est de Cuba, 80 % de la production nationale actuelle se fait dans cinq des huit provinces où l'on cultive le tabac (le pays abrite quatorze provinces) : Semi Vuelta, Partido, Remedios, Oriente et Vuelta Abajo, cette dernière, à 150 km de La Havane, étant le fief du tabac cubain. Là-bas, dans les vegas (plantations de tabac) des vallées environnant Pinar del Río, on produit pas loin de 40 000 tonnes de tabac à l'année ! Si l'industrie du tabac est un monopole d’État, ce sont des petits exploitants indépendants qui en assurent la culture. Chaque agriculteur est en droit de détenir 60 hectares, le rendement maximal étant de 40 000 pieds de tabac par hectare ! Toutefois, l'essentiel des revenus générés par cette production revient à l’État. La production cubaine annuelle est estimée à 300 millions de havanes, dont la moitié est destinée à l'exportation !

Biographie d'un havane

Avant de pouvoir déguster un bon cigare, le fumeur exigeant doit se montrer patient : des semailles à la dégustation, 171 étapes et plusieurs années rythment la vie d'un havane ! Les vegueros - agriculteurs spécialisés dans la culture du tabac – entourent les précieuses feuilles de toute leur attention et transmettent d'une génération à l'autre les secrets du havane. Voici les principales étapes de la vie d'un cigare cubain :

Du semis à la récolte. Quelques temps avant l'arrivée de l'automne, les planteurs mettent les minuscules graines de tabac à germer dans des pépinières. Six semaines plus tard, des pousses de 18 centimètres sont obtenues, puis repiquées dans les plates-bandes méticuleusement préparées. À compter de ce moment, les vegueros n'ont pas un moment de répit : prendre soin des plants de tabac est un travail aussi exigeant que la culture de la vigne.

Effeuillage. Le travail de récolte s'étend sur trois mois, de fin-décembre à fin-mars. Chaque plant de tabac fait l'objet de plusieurs récoltes successives : celles du bas d'abord (qui serviront à faire la tripe, l'intérieur du cigare), celle du haut ensuite (plus grandes et fournissant de superbes capes, enveloppes extérieures des cigares). L'importance de cette étape d'effeuillage tient dans le fait que l'arôme du tabac récolté est directement lié à la qualité de la sève retenue par les feuilles.

Séchage. Une fois la récolte effectuée, toutes les feuilles sont mises à sécher dans de vastes hangars : les casas de tabaco. Le processus de séchage, qui dure environ deux mois, permet aux feuilles de se faner. Tout au long de cette étape de fermentation, la difficulté consiste à débarrasser les feuilles des matières azotées et des résines, tout en mettant en action des bactéries, un peu à la manière de la moisissure d'un fromage. Une fois la deuxième fermentation terminée, les liasses de tabac sont mises à égoutter. C'est à ce stade que les écoteuses entrent en jeu. Ces travailleuses ont pour mission d'arracher la nervure centrale de chaque feuille. Juste après cette étape, les feuilles sont stockées dans des caisses pour entamer une troisième fermentation, qui peut durer plusieurs années ! Pour apprécier au mieux ces trois premières étapes, rendez-vous dans la Vallée de Viñales : le village est entouré à perte de vue de plantations de tabac ouvertes à la visite, comme par exemple celle de Dalia et Millo.

Confection du havane. Pour que le puro, pur cigare de La Havane, obtienne sa forme définitive, il doit passer entre les mains artistes des hommes et femmes qui les confectionnent. Chaque marque de cigare travaille avec des spécialistes qui sélectionnent les feuilles de différentes variétés de tabac. Il convient de mentionner que pour chaque cigare, pas moins de cinq espèces sont requises : trois pour la tripe, une pour la sous-cape (qui lie la tripe à la cape) et une pour la cape. C'est dans les tabacaleras (manufactures de tabac) que la magie opère.

Avec une dextérité qui force le respect, les torcedores (rouleurs de havanes) effectuent leur tâche à une vitesse folle en ne se trompant rarement de plus d'un dixième de gramme. Ils choisissent les feuilles, les roulent, les coupent puis les assemblent par paquet de 25 ou 50. En moyenne, un torcedor peut confectionner 120 à 150 havanes par jour, qui sont ensuite stockés dans des armoires spéciales pendant deux à trois semaines, le temps nécessaire pour qu'ils perdent l'excédent d'humidité. Enfin, les puros sont contrôlés, classés par couleur et conditionnés dans des boîtes en cèdre. Pour assister à ce passionnant chapitre de la vie d'un cigare, il vous suffira de vous rendre dans l'une des nombreuses fabriques que compte Cuba. La Havane en concentre les principales, comme celle de Partagás par exemple.

Conservation et humidification des havanes. Tout comme le vin, le puro se bonifie avec le temps. Il exsude généralement au cours des deux premières années de sa vie une très faible quantité d'huile nommée la fleur. À l'abri du soleil et du froid, il opère une lente et discrète métamorphose. En lui offrant des soins adaptés, un bon havane peut se conserver une bonne quinzaine d'années, et même bien plus selon le cigare. Pour quelques emplettes, pensez aux fabricants officiels (Upmann, La Corona, Partagás, Romeo y Julieta) ainsi qu'à la boutique Casa del Habano (Habana Vieja mais aussi Varadero), recommandée également.

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