Cinéma des premiers temps
On doit le premier film uruguayen au réalisateur Félix Oliver. Après avoir acheté un cinématographe aux frères Lumière, il réalise au tout début du vingtième siècle le court métrage Carrera de bicicletas en el velódromo de Arroyo Seco. Considéré comme le premier film d’Amérique du Sud, il est aujourd’hui préservé aux Archives uruguayennes du cinéma. Mais très vite l’Argentine dépasse la production locale, et la majorité des films qui sont projetés dans le pays proviennent de l’industrie cinématographique du pays voisin. Il faut attendre 1923 pour que sorte le premier long métrage de fiction national, du médecin devenu cinéaste Juan Antonio Borges. Almas de la Costa, tourné majoritairement en décors naturels sur les côtes de Montevideo, raconte l’histoire de deux amants que la maladie séparera tragiquement. Un film considéré comme perdu, puis retrouvé et restauré, et dont on peut désormais découvrir des extraits en ligne, alors qu’il fête en 2023 son centenaire.
Après une période de disette durant les années 1930 et le début des années 1940, de nouveaux investissements argentins et uruguayens permettent de relancer l’industrie cinématographique locale. Le cinéaste argentin Julio Saraceni, après avoir fait ses armes en court-métrage, trouve la voie du succès en Uruguay avec des films comme Alma de bohemio (1949). Au cours de sa carrière, il va réaliser plus de soixante longs métrages entre les deux pays, ainsi que de nombreuses collaborations avec les artistes et stars des deux côtés de la frontière. En parallèle à ces fictions, les cinéastes uruguayens captent les différentes réalités au travers du documentaire, souvent plus simple et moins coûteux à produire. Reprenant le mythe fondateur de l’Uruguay, le cinéaste Miguel Ángel Mellino réalise El desembarco los 33 orientales en 1952, avec le soutien du gouvernement. Dans les années 1960, c’est au tour de Mario Handler de reprendre le flambeau du documentaire, avec des pamphlets comme Carlos, cine-retrato de un « caminante » en Montevideo (1965) ou Elecciones avec Ugo Ulive (1967). Forcé à l’exil en 1972, il part pour le Venezuela où il poursuivra sa carrière. Membre fondateur de la Cinemateca del Tercer Mundo, groupement de cinéastes engagés d’Amérique du Sud, il revient en Uruguay à la fin des années 1990, et devient professeur de cinéma à l’Université de la République, à Montevideo.
L’exil de Handler coupe l’élan de liberté qui soufflait alors sur le cinéma uruguayen. Dans les années qui vont suivre, les cinéastes se cantonnent à des sujets moins politiques, au moins jusqu’à la fin des années dictatoriales. Il faut attendre le début des années 2000 pour qu’un vent nouveau souffle sur le cinéma uruguayen. En 2003, Juan Pablo Rebella et Pablo Stoll remportent le prix FIPRESCI et le prix Un Certain Regard au festival de Cannes avec Whisky, une comédie noire au trio atypique. Quelques années plus tôt, c’est avec 25 Watts que le même duo de cinéastes rassemble les foules autour de l’histoire de trois jeunes vivant dans les faubourgs de Montevideo, avant de rafler le prix du meilleur film au Festival de Rotterdam, puis au festival de La Havane. Plus récemment, le cinéma uruguayen s’est également développé en animation avec Anina (2013), qui remporte le prix du Public au festival de Buenos Aires. Aujourd’hui, les productions et coproductions sont en augmentation, et l’Uruguay International Film Festival permet chaque année de découvrir la diversité cinématographique du pays.
Captivants tournages sur les terres d’Uruguay
Malgré les paysages magnifiques du pays, ce sont surtout les villes d’Uruguay qui ont récemment attiré les tournages internationaux, et pas forcément pour les bonnes raisons. Ainsi, Montevideo a servi de décor à deux films majeurs de l’année 2006, Le Fils de l’Homme d’Alfonso Cuaron, mais aussi Miami Vice de Michael Mann. Si le premier est une fresque dystopique, dépeignant la fin de l’humanité avec autant de talent que de tristesse, qui n’utilise que peu la capitale uruguayenne, le second met par contre le pays en valeur au travers de nombreuses scènes. La Vieille ville de Montevideo est ainsi utilisée pour représenter les vieux quartiers de La Havane, et l’on peut également reconnaître les bâtisses d’Atlántida derrière la maison d’Isabella, incarnée par l’actrice chinoise Gong Li. Colin Farrell et Jamie Foxx, le duo portant le film, ont également pu être aperçus à Punta del Este. En 2020, et pour rebooster une production toujours fortement concurrencée par les industries brésiliennes et argentines, le gouvernement a accordé de nouvelles réductions fiscales à de gros studios internationaux. La série Conquest, produite par Keanu Reeves pour Netflix, a ainsi réalisé une bonne partie de son tournage à Montevideo. Mais, faute de financement, elle n’a jamais été terminée. Pourtant, d’autres projets restent attirés par cette région, et nul doute que l’Uruguay réapparaîtra bientôt sur vos écrans d’une manière ou d’une autre.
Voir du cinéma en Uruguay
À Montevideo, vous aurez l’embarras du choix entre les différentes salles de la ville. Des grands complexes du groupe LIFE Cinemas à la Cinemateca Uruguaya, les cinéphiles auront la possibilité de découvrir autant les dernières productions hollywoodiennes que les films hispanophones et internationaux d’hier et d’aujourd’hui. En surfant sur le site de la Cinémathèque nationale, vous pourrez en apprendre plus sur l’histoire du cinéma du pays, parcourir des extraits de films d’archives, mais aussi profiter d’un programme tout à fait actuel d'œuvres art et essai. Cette institution fait également partie des organisatrices du Festival Cinematográfico Internacional del Uruguay, qui se tient dans la capitale depuis 1982. En participant à cet événement, vous aurez l’occasion de découvrir en avant-première le meilleur des courts métrages uruguayens contemporains, ainsi que de nombreuses autres pépites qui ne manqueront pas de vous surprendre. Car des films européens, d’Amérique latine et d’ailleurs font également partie de cette large sélection qui récompense autant les jeunes étoiles montantes que des films mettant en avant les problématiques les plus actuelles. Si vous souhaitez y assister, planifiez votre séjour autour de la fin avril.