Diversité religieuse
Multiethnique, multilingue, l’île Maurice abrite sur un petit territoire une grande diversité religieuse et se caractérise par une forte ferveur populaire qui se manifeste notamment au moment des fêtes religieuses. Un véritable arc-en-ciel de religions cohabite dans une paix relative mise en avant par le pape François, lors de sa visite à Maurice en septembre 2019, et qui loua des populations ayant « appris, peu à peu, à s’enrichir de la différence des autres et à trouver les moyens de vivre ensemble, en cherchant à construire une fraternité soucieuse du bien commun ». S’il existe quelques tensions entre la majorité hindoue et les musulmans, ces tensions sont le fait d’une petite minorité. La constitution de la République de Maurice proclame la liberté religieuse comme un droit fondamental (article 3). L’article 11 de la constitution, intitulé « De la liberté de conscience », est très précis au sujet des droits et libertés liés à la religion. Ainsi, il est indiqué clairement que toute personne peut changer de religion ou qu’il est possible de distribuer du matériel religieux aux personnes qui ne sont pas adeptes d’une religion. Les autorités de Maurice assurent donc la protection de toutes les communautés religieuses, sans trop intervenir dans la pratique.
Hindouisme
Environ 50 % des Indiens vivant à Maurice sont de religion hindoue. C’est la raison pour laquelle l’île compte autant de temples, partout, dont les plus tape-à-l’œil sont les temples tamouls, avec leurs couleurs vives et leurs statuettes bigarrées. Plus souple qu’en Inde, l’hindouisme mauricien n’en est pas moins un moteur essentiel de l’organisation sociale, qui rythme la vie quotidienne et génère une forme de tolérance et fatalisme assez omniprésents.
On distingue les hindous, descendants des immigrants venus de l’Inde du Nord (plusieurs castes représentées), des Tamouls, dont les ancêtres arrivèrent du Sud-Est de l’Inde. Ces derniers sont minoritaires, mais néanmoins respectés des autres castes.
Leurs fêtes religieuses sont très impressionnantes, à l’image des marches sur le feu qui ont lieu en janvier et février. Lors de celles-ci, les fidèles pratiquent une longue période de jeûne, faite de récitations et de prières, à la mémoire de sainte Draupadi. Ils s’infligent des sévices corporels sous forme d’aiguilles piquées sous la peau. Le jour de la célébration, ils se rendent en cortège à la rivière pour procéder à des ablutions. Ils marchent au rythme des tambours, en portant sur la tête de hauts vases recouverts de feuillages et de guirlandes. Ils sont suivis par une foule bigarrée, constituée d’hommes, de femmes et d’enfants de tous âges. Arrivés devant le temple, et sous les incantations de la foule, les pénitents traversent un à un une longue allée de braises ardentes, afin de se purifier. L’autre rituel tamoul, le Cavadee ou Thaipoosum, donne lieu à une fête tout aussi impressionnante, célébrée en l’honneur de Moourouga, fils de Shiva. La dévotion s’exprime dans une procession où les pénitents en transe portent sur leurs épaules le cavadee, arche en bois évoquant le temple de Mourouga. Des pots de lait sont suspendus à cette arche couverte de fleurs. Les fidèles défilent le corps transpercé d’aiguilles, la langue et les joues percées de broches.
Les hindous sont tout aussi pratiquants et les prières comme les offrandes font partie de leur quotidien. Celles-ci connaissent une recrudescence en février ou mars, lors de la fête du Maha Shivaratree ou grande nuit de Shiva, plus grand rassemblement religieux hindou en dehors de l’Inde. Quelques jours avant la célébration, des milliers d’hindous s’engagent, à pied, sur les routes, en direction de Grand Bassin, dont l’eau est sacrée comme celle du Gange. Les pèlerins, pour la plupart vêtus de blanc, portent des temples miniaturisés ornés de fleurs (que l’on nomme kanwars) et forment de magnifiques et interminables cortèges. Cette longue marche, qui nécessite beaucoup d’efforts, est censée les purifier. Parvenus à Grand Bassin, ils y puisent un peu d’eau bénite qu’ils versent ensuite, le jour de la fête, sur le Shiva linga de leur village, pour rendre hommage à la puissance et la fécondité du dieu Shiva.
L’autre grande fête hindoue célébrée à Maurice est Holi, la fête de la joie, du feu et des couleurs. Selon la légende, Holika, qui s’était alliée aux démons pour immoler le pieux Bhakta Pralad, a péri par le feu alors que sa victime est sortie indemne du bûcher. La nuit qui précède la fête, les hindous allument de grands brasiers dans lesquels ils précipitent un personnage en paille symbolisant Holika. Le lendemain, hommes et femmes descendent dans les rues et s’aspergent d’eau colorée et de poudre dans la liesse générale. On échange des vœux et, le soir, on se réunit en famille autour d’un bon repas. Holi annonce le Nouvel An hindou qui a lieu 14 jours plus tard.
Catholicisme
Historiquement, c’est la première religion à s’être implantée à Maurice. C’est la religion des Franco-Mauriciens, descendants des colons français, ainsi que celle des Créoles dont les ancêtres se convertirent au temps de l’esclavage. Certains Créoles ont gardé de leurs ancêtres la culture du Vaudou, mêlant à leur foi chrétienne la crainte des esprits et des superstitions. Des Sino-Mauriciens sont également catholiques.
Le catholicisme a connu son véritable essor à Maurice au XIXe siècle, grâce à l’action du père Jacques-Désiré Laval. Ce missionnaire vécut dans l’île de 1841 à 1864. A la fois médecin et curé, il apprit le créole et se fit un petit catéchisme compréhensible par tous. Grâce à sa ferveur, son charisme et son dévouement absolu au peuple mauricien, plus de 70 000 personnes se convertirent au catholicisme ! Béatifié par le pape Jean-Paul II en 1979, le père Laval fait aujourd’hui l’objet d’une procession qui a lieu jusqu’à son tombeau (sanctuaire près de Port Louis), tous les 9 septembre. Celle-ci rassemble des pèlerins de toutes confessions et renforce la bonne assise dont jouit le catholicisme à Maurice. Autre renfort de taille, le pape François. Le 9 septembre 2019, le chef de l’Eglise catholique a fait escale à Maurice où les spiritualités se côtoient harmonieusement. Le service religieux dans les églises catholiques est en français.
A Rodrigues, plus de 90 % de la population de l’île est de confession catholique. Sur cette île, les musulmans et plus encore les hindous sont largement minoritaires.
Islam
Les Mauriciens de confession musulmane sont des descendants non pas d’Arabes (qui ont sans doute découvert l’île sans jamais l’avoir colonisée), mais d’Indiens de l’Ouest et du Bengale. Leur pratique de l’islam est beaucoup plus souple et tolérante que celle des pays africains ou asiatiques (on croise peu de femmes voilées sur l’île, même si l’on entend depuis peu parler d’islamisme radical).
Par ailleurs, les fêtes musulmanes ne donnent pas lieu à des manifestations publiques, comme c’est le cas pour les autres religions. La seule célébration bénéficiant d’un jour férié à Maurice est celle de l’Eid el Fitr, qui marque la fin du ramadan. Elle se célèbre en vase clos, dans les familles islamiques, où l’on se rassemble pour prier et déguster du biryani. La plus grande mosquée de Maurice, celle de Jummah, se trouve dans le centre de Port-Louis.
Bouddhisme
Le bouddhisme s’est installé dans l’île au milieu du XIXe siècle. La pagode Kwan Tee à Les Salines est non seulement la plus ancienne de Maurice, mais aussi de tout l’hémisphère sud. Sa grande cloche en or, datant de 1869, constitue un véritable trésor. Le fondateur de cette pagode, Ahime Choïsanne, propriétaire d’une boutique sur la route Royale, dédia ce lieu de culte à Guan Di, divinité chinoise symbolisant la bravoure et la droiture. L’île Maurice compte 11 pagodes situées à Port-Louis et plus ou moins grandes, mais toutes orientées vers le nord, les divinités tournées vers la mer. Beaucoup de membres de la communauté chinoise se sont convertis au catholicisme au cours du XXe siècle.
La foi Bahá’íe
Le bahaïsme ou foi bahá'íe est un courant religieux né en Iran au XIXe siècle, qui a la particularité d’être sans clergé. Il a été introduit à Maurice en 1953 et reconnu au même titre que les autres religions par les autorités en 1972. Les Bahá’ís de Maurice – ils seraient 7 000 tout de même –, portent le message divin reçu par leur fondateur Bahá’u’lláh d’établir l’unité des peuples de la terre. Un message adapté à la société multiethnique mauricienne. Les Bahá’ís sont actifs dans leurs Assemblées spirituelles locales et font du prosélytisme, notamment dans les quartiers populaires.
Croyances populaires
Si les religions « officielles » ont une emprise très forte sur les esprits à Maurice, il n’en demeure pas moins que les descendants d’esclaves comme de coolies ont gardé dans leur mémoire des pratiques ancestrales tournées vers le culte des esprits. La loi mauricienne punit ce qu’il faut bien appeler « la sorcellerie » ou le charlatanisme, mais certaines personnes, notamment en zone rurale, cherchant des solutions rapides et radicales à leurs problèmes, font appel à des « traiteurs » que l’on appelle aussi des « longanis ». Ces sorciers, marabouts mauriciens sont nés des croyances animistes malgaches et africaines mélangées aux différentes religions de l’île. Toutes les communautés peuvent faire appel aux longanistes pour débloquer des situations qui semblent insurmontables. Les « sorciers » locaux reçoivent ainsi des amoureux éconduits et même des politiciens en quête d’électeurs… Que l’on croit ou pas à ces pratiques, attentions aux nombreuses escroqueries.