La faune
La culture et la littérature indiennes prônent la non-violence et le respect de toutes les formes de vie terrienne. Faune et flore bénéficient d’une protection particulière depuis des millénaires, inculquée au travers de la religion. Beaucoup de dieux du panthéon hindou sont associés à des animaux : Vishnou et le cobra, Shiva avec le taureau, ou encore Ganesh, un dieu mi-homme, mi-éléphant. Le jaïnisme et le bouddhisme se répandent à travers l’Inde au VIe siècle av. J.-C. et promeuvent une hygiène alimentaire basée sur le végétarisme. Les premières lois de conservation apparaissent trois siècles plus tard, quand l’empereur Ashoka fait interdire l’abattage de certaines espèces sauvages et limiter le défrichage des forêts. Cette tradition s’est abîmée avec l’avènement du colonialisme. La chasse intensive pratiquée par les aristocrates anglais et les maharajas indiens, l’abattage de forêts pour l’agriculture et l’aménagement du territoire, ont sérieusement entamé le capital naturel de l’Inde. Il faut attendre 1936 et la fin du Raj britannique pour que soit créé Jim Corbett, le premier Parc national. Quelques années plus tard, la Constitution indienne érige la protection des animaux en devoir fondamental. En 1972, Indira Gandhi fait passer une grande loi qui interdit la chasse et le braconnage, l’empoisonnement et la mutilation des animaux. Un an plus tard, un plan national de sauvegarde du tigre est mis en place. Le Project Tiger est destiné à empêcher l’extinction de l’espèce gravement menacée. L’Inde est devenue l’un des rares pays où l’on peut observer le félin évoluer en liberté. Il est la tête de file d’une immense variété faunique, avec plus de 500 espèces de mammifères recensées. Parmi celles-ci, 41 sont menacées d’extinction.
Les mammifères emblématiques
Le tigre. Emblème national, le tigre du Bengale est surtout présent dans le nord du pays. On le retrouve de l’Assam au Rajasthan, en passant par le plateau central du pays. Le recensement de 2022 dénombre un peu plus de 3 000 individus, quand il n’en restait que 268 en 1973. Le tigre est présent dans 53 réserves indiennes. Le territoire d’un mâle est estimé à 130 km² et y résident sous sa protection, mais aussi sa menace, deux à trois femelles et leurs petits. Ranthambore (Rajasthan), Corbett (Uttarakhand), Bandhavgarh (Madhya Pradesh) et Kanha (Madhya Pradesh) sont les plus beaux parcs pour voir le félin.
Le lion d’Asie. Plus petit que son cousin africain et avec une crinière moins volumineuse, le lion d’Asie subsiste dans la région de Sasan Gir (Gujarat). Dans les années 1960, le nawab de Junagarh transforme sa réserve de chasse privée en parc naturel et sauve l’espèce de l’extinction. Le dernier recensement fait était de 600 individus et d’une population croissante. Il est question de déplacer des groupes dans d’autres parcs nationaux du pays.
L’éléphant d’Asie. Il a besoin de vastes zones forestières et de savane pour trouver ses 150 kg de nourriture quotidienne. Le mâle adulte pèse près de 4 tonnes, quand la femelle pèse 2,7 tonnes. Les éléphants se déplacent en hardes, des cellules familiales menées par des femelles. Les mâles sont chassés du groupe vers l’âge de 11 ans. L’éléphant d’Asie peut être facilement observé dans les Parcs nationaux de Manas ou de Kaziranga (Assam) ou dans le Sanctuaire de Wayanad (Kerala).
Le rhinocéros indien. Il ne restait que 150 individus au début du siècle dernier. Le rhinocéros unicorne a bénéficié d’une protection dès 1910 et sa population serait d’environ 3 700 individus actuellement. Ils sont concentrés dans les Parc nationaux d’Assam, où l’on peut les observer très facilement.
Le gaur. Massif, le bison indien peut atteindre 2 mètres au garrot et peser 1 500 kg. Sous ces airs placides et avec ses « chaussettes » blanches, le plus gros bovidé de la planète s’avère très dangereux et règne sur la jungle indienne.
L’ours lippu. Sous ses airs débonnaires, l’ours lippu est le seul animal à oser défier le tigre. Il se nourrit essentiellement de fourmis et de termites. Il se caractérise par une taille relativement petite, un pelage noir marqué d’un collier blanc en forme de croissant, et de longues griffes acérées. Il se déplace surtout la nuit.
Les singes. Macaques rhésus et langurs gris sont les espèces les plus communes en Inde. On les retrouve sur tout le territoire : dans les forêts mais également aux abords des zones habitées dont ils s’approchent pour chaparder de la nourriture. D’autres sous-espèces plus rares, comme le macaque à queue de lion ou le macaque à bonnet, peuvent être observées dans les parcs nationaux et sanctuaires. Le macaque à queue de lion possède une face noire et une imposante crinière grisâtre ressemblant à un halo. Ce primate arboricole peuple les forêts des Ghâts occidentaux, cependant il est rare de l’observer.
Le dhole. C’est le nom local donné au chien sauvage. Il se déplace en bande organisée et hiérarchisée et fait régner la terreur sur la jungle. Ils sont connus pour avoir dépecé des tigres ou des léopards. Le dhole n'aboie pas, ni ne hurle, met émet des jappements caractéristiques. Physiquement, il ressemble à un croisement entre un chacal et un loup.
La panthère des neiges. Mystérieuse et énigmatique, la panthère des neiges est très difficile à pister. Elle se déplace dans les hautes montagnes du Ladakh et de l’Uttarakhand, entre 2 500 et 5 000 mètres d’altitude. Elle est menacée d’extinction et une estimation plutôt hasardeuse fixe le nombre d’individus à 500 en Inde. Son aura dans le monde animalier lui a valu l’exclusivité d’un documentaire filmé par Vincent Munier en 2021.
Le léopard. Timide et nocturne, le léopard est assez difficile à apercevoir dans les parcs nationaux. Mais il est bel et bien présent ! Il privilégie un habitat de forêt clairsemée et se cache souvent en haut des arbres, où il peut dormir en toute sécurité.
Le nilgaut. Avec un corps de cheval et une tête de vache, il s’agit pourtant d’une antilope. Assez commune dans le nord de l’Inde, on la repère à sa robe grise-bleutée.
Le barasingha. Ce cervidé à douze bois (barah veut dire « douze » en hindi) a pratiquement disparu du sous-continent indien. Il ne peut être aperçu que dans le Parc national de Kanha (Madhya Pradesh).
Les autres mammifères
On peut observer des espèces de cerfs et d’antilopes variées, même celles-ci sont pour la plupart réparties dans des zones protégées, à cause de la compétition avec les animaux domestiques et des risques de transmission de maladies. On peut citer les gazelles indiennes (chinkara), les antilopes indiennes (blackbucks), les sambars, les plus grands cerfs de l’Inde, les cerfs aboyants (muntjac) et le minuscule cerf-souris. Vous pourrez aussi voir des buffles sauvages, des hyènes rayées, des sangliers sauvages (wild boar), des chacals, des renards, des loups dans les zones forestières. Parmi les mammifères plus petits, on trouve les mangoustes, connues pour tuer les serpents, et les écureuils géants.
Reptiles, amphibiens et insectes
L’Inde compte plus de 900 espèces différentes de reptiles et d’amphibiens, représentant à peine plus de 5 % de la variété mondiale. Sont présentes différentes variétés de serpents comme le cobra royal ou le python, mais aussi le crocodile et son cousin le gavial à la gueule longue et aplatie, la tortue d’eau douce, le caméléon, le varan, plusieurs sortes de lézards, le gecko, la grenouille… La plupart de ces espèces sont rarement visibles. Votre meilleure chance de croiser un cobra est sur un marché ou une foire, manipulé par un charmeur de serpent… et c’est bien mieux comme ça ! Les serpents hibernent sous terre en hiver, en revanche, en période de mousson, il faut regarder où l’on met les pieds. Quant aux grenouilles, l’Inde compte 337 espèces différentes. Vous les entendrez coasser bruyamment à la nuit tombée. Le pays compte également une multitude d’araignées, comme la salticidae ou araignée sauteuse, ou encore la vénéneuse theridiidae. Sans oublier de mentionner une multitude de sortes d’insectes, avec notamment plusieurs variétés de papillons colorés. Plusieurs insectes sont vecteurs de maladies ou de parasites, les plus communs sont les moustiques, qui peuvent transmettre la malaria ou la dengue, principalement dans les zones reculées et sauvages.
Les oiseaux
En 2021, on recensait 1 371 espèces d’oiseaux différentes dans le pays, dont 81 sont endémiques et 212 sont en danger d’extinction. Le plus emblématique est le majestueux paon bleu, l’oiseau national indien. Symbole d’immortalité, de fertilité et de beauté, jadis vénéré par les maharajas, vous apercevrez ses magnifiques plumes d’un bleu profond un peu partout dans le pays. Il faut savoir que le paon refait son plumage tous les ans. Il perd ses plumes pendant la mousson. Elles repoussent à partir de l’automne pour atteindre leur majesté à la fin de l’hiver, période des parades. Parmi les autres espèces remarquables, signalons le martin-pêcheur, avec son long bec, dont il existe 12 variétés. Le martin-pêcheur commun est aisément reconnaissable à son dos bleuté et son ventre roux. Vous l’apercevrez à proximité des cours d’eau douce, perché sur une branche d’où il pêche des alevins. Le corbeau, appelé également corneille de l’Inde, est omniprésent et le plus souvent en grand nombre. Le territoire abrite également des aigles, le vautour indien, le calao de Malabar, le rossignol à moustache rouge, le pivert, la sauvagine, l’oriole à capuche noire, la grive rieuse, le drongo à rames, avec ses deux longs filaments… De nombreuses espèces d’oiseaux migrateurs traversent l’Inde et y font halte en hiver. La plupart des espèces viennent d’Asie mineure et centrale et traversent la chaîne de l’Himalaya pour trouver un climat plus favorable. Les réserves ornithologiques de Keoladeo Ghana (Rajasthan) et le Kumarakom Bird Sanctuary (Kerala) recensent des centaines d’espèces en hiver.
La flore
La flore indienne comprend environ 45 000 espèces différentes. Avec sa topographie variée et un climat subtropical à tropical, cette grande diversité de plantes s’exprime partout dans le pays. Seuls les hauts sommets de l’Himalaya sont parfaitement stériles. Par conséquent, les paysages indiens sont très divers : forêts à feuilles persistantes au Nord-Est ; forêts à feuilles caduques dans les plaines, les étendues marécageuses du Bengale et du Madhya Pradesh ; vergers du Cachemire ; forêts de pins dans les contreforts de l’Himalaya ; plantes xérophiles dans le désert du Thar, principalement l’acacia, le babul (Mimosa arabica) ; forêts sempervirentes des Ghâts occidentaux ; cocoteraies des côtes du Malabar et du Konkan… Le centre de l’Inde et la lisière himalayenne ont été largement déforestés pour laisser la place à l’agriculture. Les zones encore boisées ont pour la plupart été transformées en zones protégées pour la faune et la flore. Les paysans qui vivaient dans ces zones ont été déplacés en abord de ces réserves.
La flore emblématique
Le banian. Souvent immense et aisément reconnaissable à ses racines aériennes, il dispense une ombre généreuse sur les places. Le jardin botanique d’Acharya Jagdish Chandra Bose à Howrah (Bengale occidental) abrite un exemplaire qui couvre une surface de près d’un hectare et demi ! Cela en fait le plus grand arbre au monde.
Le tek (Tectona grandis). Cet arbre peuple les forêts de l’Asie du Sud et du Sud-Est. Il peut atteindre 40 mètres à maturité. Son tronc droit et son bois dur sont très appréciés dans la construction. En Inde, il est largement utilisé pour les tours de fenêtres et les portes, il sert de poutres maîtresses et de colonnes dans les maisons, et est aussi utilisé pour la fabrication de mobilier. Le tek présente l’avantage de résister à l’attaque des termites et autres insectes, ainsi qu’à l’eau.
Le sal (Shorea robusta). L’utilisation de cet arbre au bois très dur et longiligne était privilégiée par les Britanniques pour la construction des voies de chemin de fer. Ils ont pratiquement laminé les forêts de sal, autrefois partout présentes au nord du sous-continent. On en trouve encore de beaux exemplaires dans les forêts du centre du pays.
L’illipé (Madhuca longifolia), appelé mauha en hindi, est un autre arbre caractéristique du pays. Il se trouve sur l’ensemble du sous-continent, autant dans les zones tropicales que sur le plateau central. En fin de journée, l’arbre rejette l’eau engrangée dans la journée, donnant l’impression qu’il pleuvine lorsqu’on est abrité sous ses feuilles.
Le manguier (Mangifera indica). C’est l’arbre chéri des Indiens du nord. Robuste, il vit suffisamment longtemps pour s’élever à 18 mètres de haut. Son fruit savoureux est très attendu pour devenir pickles, lassi, jus ou à croquer. Il est souvent planté au milieu d’un champ, car son feuillage persistant procure une ombre bienfaitrice durant les chaudes journées d’été.
Le cocotier (Cocos nucifera). Arbre emblématique du sud de l’Inde, son fruit est intégralement utilisé. La chair est utilisée fraîche ou séchée en cuisine ; elle est aussi pressée pour extraire du lait ou de l’huile. La coque est séchée et les fibres récupérées pour produire matelas, paillassons, cordes.
Le bambou. Il s’épanouit sous forme de 148 espèces différentes en Inde. Cultivé ou sauvage, le bambou pousse essentiellement dans le sud et le nord-est, car il a besoin d’eau pour grandir. Les bambous les plus gros et les plus résistants sont utilisés pour la construction de maisons sur pilotis, notamment dans le nord-est. L’Inde est devenue le premier producteur mondial de bambou, notamment pour alimenter son industrie textile.
Le lotus est la fleur nationale. Il est utilisé abondamment dans l’architecture ancienne des temples et des maisons. La fleur est reprise de façon stylisée dans les piliers supportant arcades et plafonds. Elle est symbole de bons auspices.
L'œillet d’Inde. Comme son nom ne l’indique pas, cette variété d'œillets provient de Bolivie et du Mexique. Son nom lui a été attribué quand les Antilles étaient encore appelées les Indes occidentales. La fleur s’est très bien acclimatée au nord de l’Inde et elle est largement utilisée dans la confection des guirlandes qui serviront d’offrandes dans les temples ou de geste d’accueil et de bienvenue.
Le neelakurinji. Cette fleur endémique des Ghats occidentaux ne pousse que dans la forêt de Shola, intégrée au Parc national d’Eravikulam (Kerala). Elle possède la particularité de ne fleurir que tous les 12 ans. Elle tapisse alors les collines d’une splendide couverture mauve. Sa dernière floraison remonte à 2018. Il faut donc attendre 2030 pour la prochaine… Patience.