Découvrez l'Inde : Environnement

Dans un pays en proie à la pollution de l’air et aux amoncellements de déchets, l’État du Kerala fait figure d’exception. Non content d’être l’État indien avec le plus haut taux d’alphabétisation, ou la plus longue espérance de vie, ses compteurs sont aussi au vert, quand il s’agit d’environnement. C’est déjà l’un des États indiens qui développe le plus l’agriculture biologique, mais aussi l’un de ceux qui comptent le plus d’aires protégées. La population fait d’ailleurs souvent preuve d’une mobilisation sans faille pour faire perdurer ce havre de paix. C’est par exemple en protestant contre la construction d’un barrage hydroélectrique dans un environnement préservé en 1970, qu’elle a mené à la création du Silent Valley National Park. De la même manière, au début des années 2000, le village de Plachimada s’est levé contre l’usine Coca-Cola qui épuisait et polluait l’eau des réserves. La mobilisation sans faille des villageois a mené à la fermeture de l’usine.

Les années noires de la Révolution verte

À la proclamation de l’indépendance de l’Inde, en 1947, se profilait un défi colossal : nourrir cette population en pleine explosion. Nehru, alors à la tête du pays, déclarait alors : « Tout le reste peut attendre, mais pas l’agriculture ». L’Inde a réussi à déjouer toutes les prévisions des experts internationaux, qui voyaient déjà la famine s’abattre sur le pays. Pour cela, elle a dopé son agriculture à base de monoculture, pesticides, herbicides, industrie lourde et OGM. Aujourd’hui, elle paye le prix fort de cette période appelée la Révolution verte. Les sols sont infertiles, les cours d’eau pollués, les forêts décimées, les nappes phréatiques desséchées. La situation est telle, que depuis trois décennies, l’Inde observe une vague de suicides chez les agriculteurs, poussés dans des situations de plus en plus précaires.

Le Kerala, particulièrement, a fait les frais de cette Révolution verte. Entre 1970 et 2011, l’Endosulfan, un pesticide toxique, a été massivement utilisé dans le district de Kasaragod, notamment sur les cultures de noix de cajou, de thé, ou de coton. On estime que plus de 10 000 personnes ont été intoxiquées, avant que les médias ne révèlent la tragédie, au début des années 2000. L’usage du cocktail chimique a mené à de nombreux cas d’infertilité, de handicaps, de malformations, voire à des décès. Ces effets ont également été observés sur la vie sauvage, qui a largement souffert de l’épandage aérien du pesticide. En 2005, le Kerala bannit à son échelle le pesticide, puis, en 2011, la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, a mené à une interdiction internationale du produit toxique. Depuis, les habitants du Kerala demandent réparation à l’État, qui a dédommagé 5 000 d’entre eux en 2017. Mais les dégâts sur l’environnement mettront bien plus de temps à s’estomper…

Champion de l’innovation écologique

Décidément pas comme les autres, le Kerala n’hésite pas à s’improviser comme leader écologique de son pays, voire du monde ! L’État indien possède en effet le premier aéroport au monde alimenté à 100 % aux énergies renouvelables. L’aéroport international de Cochin, le plus important du Kerala, et le quatrième d’Inde fonctionne intégralement aux énergies solaires, grâce à sa propre ferme solaire.

Jamais en manque de bonnes idées, le Kerala s’est lancé un défi : abriter le premier village neutre en carbone d’Inde ! En plus d’un vaste programme de plantation d’arbres, le village implémente l’agriculture biologique, organise des programmes d’éducation à l’écologie, remplace le bois de chauffage par l’utilisation du gaz, et bien d’autres mesures, qui promettent, en plus, de booster l’économie locale. Au-delà du bénéfice que les 30 000 habitants de Meenangadi en tireront sur leur santé, l’idée est aussi d’inspirer les plus grandes villes indiennes, étouffées par leur pollution, en leur montrant des solutions concrètes pour la réduction du CO2. Cette prise de conscience est d’autant plus importante, que selon l’agence d’analyse de la qualité de l’air IQAir, sur les 50 villes à l’air le plus pollué au monde entre 2017 et 2022, 39 étaient indiennes.

Entre mousson et sécheresse

Les inondations meurtrières et dévastatrices se multiplient au Kerala, et deviennent de plus en plus fréquentes. Ces catastrophes climatiques, qui se produisent lors des moussons, entraînent, en cascade, d’autres drames, comme des glissements de terrain, et même, en 2020, un crash aérien causé par l’inondation de la piste d’atterrissage, coûtant la vie à 18 personnes.

Si les moussons sont des phénomènes saisonniers normaux en Inde, leur durée et leur intensité ont été largement perturbées par le réchauffement climatique. De plus, à cause de la déforestation et de l’urbanisation, les sols sont de moins en moins capables d’absorber cette eau, menant à des inondations qui frappent tout le pays.

Malgré tout, l’Inde est en manque d’eau. Quand la mousson s’amenuise, la sécheresse prend sa place. À cause du réchauffement climatique, le phénomène a lieu de plus en plus tôt, et est toujours plus intense. Face au manque d’eau, les cultures sont de plus en plus maigres. Au printemps 2022, cette situation dangereuse avait mené l’Inde à interrompre totalement ses exportations de blé, pour protéger la sécurité alimentaire de son pays, compromettant celle du monde, déjà privé du blé venu d’Ukraine.

Plusieurs programmes de reforestation tentent de rendre aux sols leurs capacités d’absorption de l’eau. Là encore, le gouvernement travaille souvent main dans la main avec des initiatives citoyennes, telles que celle de Greenvein, une association qui a permis de planter plus de 30 000 arbres dans le Kerala en 2014. GreenFriends, de son côté, renouvelle les opérations coup de poing, en coopération avec le Département Forestier de l’État du Kerala. Chaque mois de novembre, cette ONG lance une vaste campagne de plantation, appelée Amrita Vanam, qui a déjà permis la plantation de centaines de milliers d’arbres. Si le chemin à parcourir reste encore long pour atténuer les phénomènes climatiques extrêmes, les efforts sont indéniables.

L’Inde face à ses déchets

L’Inde, devenu récemment le pays le plus peuplé au monde, croule sous ses propres déchets. Face au manque d’infrastructures, nombre d’entre eux finissent dans des décharges à ciel ouvert, causant des problèmes de santé publique, et intoxiquant l’eau des nappes phréatiques par ruissellement. Si le gouvernement du Premier ministre Narendra Modi tente depuis 2014 d’améliorer la situation, et notamment d’organiser une collecte des déchets plus efficace, le chemin à parcourir reste long. Trop long, visiblement, pour certains habitants du Kerala, qui une fois de plus, pas n’hésitent pas à se mobiliser pour endiguer le problème. C’est ainsi qu’en 2017, des dizaines de pêcheurs ont décidé spontanément de nettoyer les océans. Les 800 kg de déchets remontés chaque jour ont servi à construire des routes en plastique recyclé, une technique utilisée mondialement, dans laquelle le Kerala est pionnier. Depuis la fin du nettoyage des océans, le Kerala continue ses routes en plastique recyclé, connues pour être plus imperméables et résistantes, cette fois en collectant le plastique chez les habitants.

La mobilisation des habitants contre la pollution

Lorsqu’il s’agit de défendre son droit à un environnement sain, la population du Kerala n’est pas avare en élans de solidarité et protestations. L’affaire de l’usine Coca-Cola de Plachimada, un village de l’est du Kerala, est l’illustration parfaite de cette mobilisation à toute épreuve. Au début des années 2000, les villageois ont remarqué que l’eau de leurs puits se dégradait, quand ceux-ci ne s’asséchaient pas carrément. Non seulement la santé publique en était gravement compromise, mais l’agriculture, dont vit un grand nombre d’habitants, a chuté de 90 %, faute d’eau d’arrosage.

Il ne leur fallut pas bien longtemps pour faire le lien avec l’usine Coca-Cola, récemment construite à proximité. Ce qui n’était au départ qu’une poignée de villageois mobilisés, principalement des femmes adivasis, population aborigène de l’Inde, se transforma vite en une foule soutenue par les médias, les ONG locales et internationales, les universitaires et les environnementalistes du monde entier. Sous la pression, en 2003, l’usine Coca-Cola ferma ses portes. Pourtant, deux décennies plus tard, les habitants restent dans l’attente d’une compensation.

Les parcs nationaux du Kerala

Le Kerala compte 6 parcs nationaux. Parmi eux, Eravikulam National Park, fondé en 1978, fait office de doyen. Le parc abrite la plus grande population de Thar des Nilgiri (Nilgiritragus hylocrius), endémiques de l’Inde du Sud. Alors que seule une centaine d’individus de ces chèvres des montagnes en danger d’extinction persistait au début du XXe siècle, on en dénombre aujourd’hui plus de 3 000, grâce aux efforts de conservation, et à la protection que leur offre le parc.

Plus au sud, le parc national Periyar n’est pas le havre de paix des chèvres, mais des éléphants d’Asie et des tigres du Bengale ! En plus de ces géants, vivent parmi les forêts tropicales et savanes du parc, des plantes endémiques au Kerala, comme Habenaria periyarensis, une petite orchidée blanche.

De son côté, le Wayanad Wildlife Sanctuary, couvre une impressionnante superficie de 350 km2. Ce riche écosystème composé de forêts tropicales luxuriantes fait partie intégrante de la biosphère Nilgiri, protégée par l’Unesco. Vivier écologique fascinant, le sanctuaire accueille des paons, des éléphants, des singes, des léopards, des serpents, et même une population de tigres parmi les plus élevées d’Inde !

Organisez votre voyage avec nos partenaires en Inde
Transports
Hébergements & séjours
Services / Sur place
Envoyer une réponse