Découvrez le Kirghizistan : Architecture (et design)

Des steppes sauvages à perte de vue, des lacs aux eaux tranquilles et merveilleuses, des montagnes aux pics légendaires et infranchissables… la nature kirghize est aussi belle que fascinante. Mais observez bien ces paysages, car au cœur de chacun d’eux se cachent les témoins d’une architecture étonnante, reflet des soubresauts de l’Histoire. Des vestiges des anciennes cités commerçantes jalonnant la mythique route de la soie, aux reliquats de l’Empire soviétique dont l’urbanisme et l’architecture ont durablement marqué le pays, en passant par l’habitat traditionnel profondément imprégné de la culture nomade kirghize encore très présente, le Kirghizistan offre de nombreux visages à celui qui prend le temps de l’explorer. Aujourd’hui devenu une destination touristique appréciée, le Kirghizistan tente de trouver un équilibre entre tradition et modernité afin de préserver cette architecture mosaïque que l’on vous invite à découvrir sans plus tarder.

Vestiges d’un passé légendaire

Les sites pétroglyphiques témoignant d’une présence humaine millénaire ont nourri bien des légendes. Tout comme la dynastie Karakhanide qui régna sur les plaines d’Asie centrale entre le IXe et le XIIIe siècle. De ce peuple bâtisseur et conquérant subsistent de superbes témoins, notamment dans la ville d’Uzgen. Une médersa (école coranique), une mosquée, un minaret et les mausolées de trois khans y sont encore visibles. Leur structure de brique est décorée de motifs géométriques et calligraphiques réalisés en terre cuite. Coupoles, façades et portiques richement décorés confèrent au lieu toute sa splendeur. Autre témoin de la puissance des Karakhanides, la Tour Burana, située dans la vallée de Tchouï. La silhouette de ce minaret domine un site comprenant également les traces d’un fort, de mausolées et de terrassements, tous vestiges de Balasagun, cité karakhanide fondée à la fin du IXe siècle. Autre site de légende, le caravansérail de Tach Rabat, la « forteresse de pierre » culminant à 3 500 m d’altitude. Selon les historiens, il s’agirait à l’origine d’un monastère chrétien bâti au Xe siècle, puis transformé au XVe pour accueillir les voyageurs et caravanes de marchands circulant sur la Route de la soie. Des vestiges étonnants qui sont loin d’avoir révélé tous leurs secrets.

Habitat traditionnel

Comme tous les grands peuples d’Asie centrale, les Kirghizes sont des nomades dont l’habitat traditionnel est la yourte, tente à ossature de bois amovible. La yourte kirghize se caractérise par une structure élancée permise par l’emploi de perches en bois cintrées à chaud remontant dans l’axe du mur avant de se rejoindre vers la clé de voûte du toit. La forme arquée des perches – qui sont le plus souvent au nombre de 40 comme le nombre de tribus composant le pays – permet de libérer davantage d’espace à l’intérieur. Tous ces éléments en bois sont le plus souvent peints en rouge, couleur de la protection divine. Après le montage de l’ossature générale, comprenant également une porte toujours orientée vers le sud, les murs sont complétés par des nattes de paille recouvertes ensuite de couvertures de feutre et d’une toile imperméable. Le village de Kyzyl-Tuu, sur les rives du lac Issyk-Kul, est réputé pour son savoir-faire en matière de fabrication de yourte.

En ville, les maisons kirghizes sont généralement de plain-pied et possèdent un vaste sous-toit servant d’espace de stockage. La maison est souvent intégrée à un ensemble plus vaste et clôturé comprenant également des granges et hangars, une cuisine extérieure et un jardin. La ville de Karakol est réputée pour ses maisons de bois aux porches décorés de superbes motifs taillés et colorés. Dans toutes les maisons, planchers et murs sont recouverts de tapis et de tentures en tissus, ce qui n’est pas sans rappeler l’intérieur des yourtes. Enfin, notons l’architecture spécifique du massif du Pamir dont les maisons sont construites de pierre et de plâtre et dont le toit sert au séchage du foin et du bois. Les maisons ne possèdent que très peu de fenêtres, éclairage et ventilation étant permis par un puits percé dans le toit, assurant ainsi chaleur ou fraîcheur selon les saisons.

Influences russes et soviétiques

Le plus beau témoin de la présence russe est sans conteste la cathédrale orthodoxe de la Sainte-Trinité à Karakol. Reconstruite en 1895 après un tremblement de terre, cette église possède une structure en bois ancrée sur une base de pierre. Elle est caractéristique de l’architecture religieuse orthodoxe avec ses coupoles surmontées de dômes en forme d’oignon, eux-mêmes surmontés de croix. Le jeu de couleur entre l’émeraude des toits et les dorures des croix est superbe.

Dès leur arrivée dans la région, les Soviétiques ont opéré une sédentarisation forcée des tribus nomades afin de les obliger à participer à l’effort national de production. Les Kirghizes étaient alors logés dans de grandes barres de béton sans âme. On comprend aisément la difficile relation qu’entretiennent les Kirghizes avec ce patrimoine largement laissé à l’abandon. Pourtant les Soviétiques ont proposé certaines avancées notables, notamment en matière d’urbanisme, faisant la part belle aux places et parcs. La place Ala Too de Bishkek en est un bel exemple. On y trouve ce mélange de classicisme et de modernité propre à l’architecture soviétique : colonnes antiques, coupoles dorées et grandes arches entourent l’austère bâtiment principal. Au loin, on aperçoit la monumentale Maison Blanche, palais présidentiel, impressionnant par la géométrie et la sobriété de ses formes. L’ensemble des bâtiments administratifs conservent cette allure de palais classiques tous à la gloire du régime soviétique. À travers tout le pays, ils ont également laissé de nombreuses infrastructures : barrages, aéroport, usines… quasiment tous tombés en désuétude. Les seules structures à être encore utilisées sont les sanatoriums, témoins de la politique utopique et hygiéniste soviétique. Le sanatorium Aurora, sur les rives du lac Issyk-Kul, est l’un des plus prisés.

L’architecture aujourd’hui

Le pays tente de trouver le juste équilibre entre préservation de ses traditions et entrée dans la modernité. Le complexe architectural Dasmia, au cœur de la capitale, en est l’exemple le plus frappant. Cet ensemble, dont la construction a duré plus de 15 ans, regroupe des yourtes permanentes bâties dans un assemblage de bois et de béton, de feutre et de métal. Gigantesque et richement décoré, le complexe a des allures de décor hollywoodien… rien d’étonnant quand on sait que son créateur travaillait pour des studios de cinéma !

Autre réalisation : le centre culturel de Ruh-Ordo. Construit en 2002, non loin de Cholpon Ata, il regroupe 5 chapelles pour chacun des 5 grands courants religieux. Leur similarité et leur proximité symbolisent l’unité de la foi. Édifié sur un ancien site sacré, il témoigne de la grande spiritualité du peuple kirghize.

Aujourd’hui destination touristique prisée, le Kirghizistan n’en oublie pas pour autant sa culture et ses racines. Ainsi, à côté d’infrastructures plus modernes qui se construisent dans les villes (centres commerciaux, hôtels), le pays développe également un écotourisme de qualité, permettant aux visiteurs de découvrir les richesses des cultures nomades.
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