L'Église catholoique : une place prépondérante
La place et le degré d’influence du catholicisme sur la société ont fluctué au gré de l’histoire du pays. C’est avec la fin de la Seconde Guerre mondiale et un peu plus tard avec la chute du communisme (1989) que l'Église catholique retrouve une place prépondérante en Pologne. Des médias, en passant par l’éducation ou encore la vie politique, elle est présente partout. De nombreux événements, tels que des cérémonies religieuses et des processions, sont organisés tout au long de l'année, attirant des milliers de fidèles. On retrouve dans les manifestations les plus marquantes Pâques, la Toussaint, Noël ou encore la Fête-Dieu. Częstochowa et Licheń, deux hauts lieux de pèlerinage, attirent chaque année des milliers de fidèles. Częstochowa est d’ailleurs le cinquième lieu de pèlerinage au monde. Au 15 août, il accueille plus de 5 millions de personnes venant célébrer la Vierge noire.
Les figures religieuses engagées
La religion et la spiritualité qui en découle sont imprégnées dans la société polonaise depuis des générations. De grands personnages religieux ont marqué le pays de par leurs engagements et leurs positions. La figure polonaise incontournable est sans conteste le pape Jean-Paul II. Il naît à Wadowice sous le nom de Karol Józef Wojtyła et gravit les échelons ecclésiastiques en devenant prêtre, évêque, archevêque de Cracovie puis cardinal. Le 16 octobre 1978, il est élu pape de l’Église catholique sous le nom de Jean-Paul II. Il succède alors à Jean-Paul Ier, élu lui aussi en 1978, et dont le pontificat fut court. Il est le premier pape non italien à accéder à cette fonction en quatre cent cinquante-cinq ans. Jusqu’à son décès le 2 avril 2005, Jean-Paul II occupe ses fonctions et endosse les responsabilités inhérentes à sa position. Il est considéré comme l’un des hommes les plus influents du XXe siècle, mais aussi comme l’un des plus aimés. Fervent défenseur des droits de l’homme, de la liberté religieuse et de la paix, ce n’est pas moins de cent vingt-neuf pays qu’il va visiter au cours de son pontificat. Son rôle dans la chute du communisme en Europe de l’Est et par extension dans celle du mur de Berlin est déterminant. Il apporte en effet son soutien à la cause du syndicat polonais Solidarność (Solidarité), qui contribue par son action pacifique à combattre le despotisme communiste. De par ses actions, Jean-Paul II tend aussi à améliorer les relations entre l’Église catholique et les autres religions, notamment le judaïsme et l’islam. Enfin, il est connu pour sa forte opposition à l’avortement, à la contraception et à l’euthanasie. Le 1er mai 2011, le pape Benoît XVI, successeur de Jean-Paul II, le béatifie. Le 27 avril 2014, sa canonisation est prononcée par le pape François, et il est désormais commémoré le 22 octobre, jour de son intronisation.
Dans les années 1980, des figures religieuses s’engagent dans la lutte contre l’idéologie communiste. C’est le cas du prêtre Jerzy Popiełuszko, enlevé par la police politique à Varsovie, le 19 octobre 1984. Torturé, son cadavre fut jeté dans la Vistule et retrouvé une dizaine de jours après sa disparition, le 30 octobre. Celui qui promouvait les « messes pour la patrie » était très populaire à travers le pays et incarnait farouchement la volonté de résistance du peuple. Il entretenait, tout comme Jean-Paul II, des liens étroits avec le syndicat Solidarność. Son courage, ses engagements et sa fin de vie tragique en firent un martyr.
Stefan Wyszyński, archevêque de Gniezno et de Varsovie, cardinal en 1953, était la personnalité ecclésiastique la plus célèbre opposée au régime communiste. Il fut incarcéré pendant trois ans de 1953 à 1956, à la suite de ses actions de résistance.
Catholicisme, influence et autres cultes
Cette prépondérance de l'Église catholique en Pologne peut cependant être source de tensions. La question de l'avortement, par exemple, est très controversée dans le pays. Effectivement, l'Église catholique y est fermement opposée, peu importent les circonstances. En 1953, elle a réussi à faire adopter une loi restrictive, qui condamne l’avortement même en cas de viol, d'inceste ou de malformation du fœtus. Cette loi a évolué au fil des années, elle s’est assouplie pour se durcir de nouveau en 2020 (cf. « Le pays aujourd’hui «). Ces positions sont bien sûr contestées par une partie de la population et des manifestations concernant la question de l'avortement ont lieu régulièrement dans le pays. La jeune génération, plus ouverte sur le monde, tend à faire bouger les lignes. Néanmoins, il existe toujours une dualité entre la partie conservatrice du pays (sur laquelle l’Église a une grande influence) et la partie progressiste, plus libérale.
Par ailleurs, le sujet de la laïcité est lui aussi au cœur des débats en Pologne. Selon ses défenseurs, l'Église catholique et son influence viennent perturber la neutralité de l’État, portant atteinte à l'objectivité des lois et des questions sociétales débattues dans le pays. Cette hégémonie si puissante aurait alors un fort impact sur les discriminations dont sont victimes les minorités religieuses et les personnes non croyantes.
Bien que le catholicisme ait toujours une place importante dans la société polonaise, il est évident que l’augmentation de l’expatriation et de l’immigration vient quelque peu bouleverser son équilibre, en la rendant plus cosmopolite. Désormais, le pays est un lieu de coexistence entres plusieurs religions, telles que le judaïsme, l'islam ou l'orthodoxie. Ces communautés restent minoritaires, mais elles jouent un rôle déterminant sur l’ouverture du pays au reste du monde, l’évolution des mentalités et sur sa richesse culturelle.
L’histoire juive en Pologne
C’est au XIe siècle que les premières communautés juives se sont implantées en Pologne. À cette époque, les Juifs sont chassés des pays d’Europe centrale, principalement à cause de leur confession religieuse. Alors en plein essor, la Pologne a besoin de main-d’œuvre qualifiée pour renforcer son développement économique. C’est avec ferveur que le pays ouvre ses portes aux Juifs, en leur offrant une terre pour s’établir, mais surtout une protection inédite à l’époque. La « charte de Kalisz » signée de la main du roi, les protège en effet des persécutions dont ils pourraient être victimes. Au Moyen Âge, le pays est considéré comme le point névralgique de la vie juive en Europe. Des cités prospères comme Cracovie, Lublin ou Poznań émergent, grâce à l'installation des Juifs en leur sein. Ces villes sont toujours aujourd'hui empreintes d’un héritage culturel important, bien que la diaspora juive y soit réduite. Dans le quartier de Kazimierz, à Cracovie, historiquement le quartier juif de la ville, est organisé tous les ans un festival pour mettre en valeur le patrimoine culturel juif. Au cours des siècles suivants, la communauté juive et la noblesse polonaise (« szlachta ») signent des accords fructueux. Cette prospérité est balayée d’un revers de main au XVIIIe siècle, lorsque le partage du pays entre la Russie, la Prusse et l’Autriche est publié à Varsovie, le 5 août 1772. Les Juifs sont de nouveaux victimes de persécutions, similaires à celles subies durant les siècles précédents en Europe centrale. C’est à cette période que le mouvement de pensée « Haskala », comparable à celui des Lumières, voit le jour. Son but principal est d’enseigner aux Juifs les fondements d’une culture générale axée sur les sciences, et non plus exclusivement la religion. Des personnages clés ont porté ce courant de pensée, et sont encore aujourd’hui reconnus comme des figures importantes de la culture juive : c’est le cas, par exemple, du poète Isaac Leib Peretz. La création de ce mouvement a engendré de vives tensions entre les Juifs conservateurs et les Juifs plus libéraux. Un peu plus tard, au cours du XIXe et au début du XXe siècle, les persécutions persistent et s’intensifient, poussant ainsi une partie de la communauté à immigrer en masse aux États Unis. Pour ceux restés en Europe, la Première Guerre mondiale signe leur départ au front, comme pour le reste de la population. L’entre-deux-guerres est synonyme de répit pour les Juifs polonais, qui prospèrent de nouveau dans leurs affaires, avant de connaître les heures les plus sombres de leur histoire. Le 1er septembre 1939, l’Allemagne envahit la Pologne, déclenchant de ce fait la Seconde Guerre mondiale. Les crimes perpétrés par l’Allemagne nazie à l’encontre de la communauté juive européenne conclut à leur quasi-extermination. Parqués dans des ghettos, à l’image de celui de Varsovie, ils sont affamés, exploités et tués. Plus de trois millions mourront assassinés dans les camps. Le camp d’extermination de Treblinka, situé non loin de Varsovie, et le tristement célèbre camp de concentration d'Auschwitz, situé dans le sud du pays, ont été le théâtre de ces meurtres de masse. Le traumatisme sans précédent subi par la population juive entraîne un nouvel exode vers Israël et vers l’Amérique du Nord dès l’après-guerre. Aujourd'hui, la communauté juive est toujours présente dans le pays, mais elle est bien sûr drastiquement réduite en comparaison avec l’époque. Ils sont quelques milliers à vivre sur le territoire, et sont majoritairement présents à Varsovie, où est implantée la plus grande synagogue du pays. Cette minorité travaille à la préservation de l'héritage culturel et religieux des Juifs polonais, afin de reconstruire les liens avec les communautés juives dans le monde entier.
Les minorités religieuses en Pologne, l’essentiel à savoir
Les principales minorités religieuses en Pologne se comptent au nombre de quatre : la communauté des chrétiens orthodoxes, la communauté protestante, la communauté juive et la communauté musulmane.
Les chrétiens orthodoxes forment la deuxième plus grande communauté religieuse du pays, avec environ 600 000 fidèles Ils sont principalement installés dans l'est et le sud-est du territoire, et sont pour la plupart issus de la minorité ukrainienne qui vivait en Pologne avant la Seconde Guerre mondiale.
Les protestants, malgré leur longue histoire dans le pays, ne représentent qu’une petite minorité religieuse. Présents depuis la Réforme protestante, ils sont principalement regroupés dans les régions de Silésie, de Poméranie, de Mazurie et de Wielkopolska (Grande-Pologne).
La communauté musulmane est de son côté relativement petite dans le pays, mais reste cependant en croissance. En effet, l’immigration progresse en Pologne et les travailleurs musulmans viennent de plus en plus s’y installer. Pour la plupart, ce sont des Tatars musulmans qui s’expatrient, leur communauté ayant des liens historiques avec le pays depuis des siècles. On compte trois communautés religieuses musulmanes dans le pays. La plus importante d’entre elles réunit près de 5 000 fidèles.
Les mythes et légendes en Pologne
Au-delà de ses croyances religieuses fortement ancrées, la Pologne regorge d’une multitude de légendes et de mythes à découvrir. Ces croyances populaires sont souvent liées à des villes polonaises spécifiques ou à des héros mythiques et se transmettent de génération en génération. Elles représentent une part importante dans le patrimoine culturel du pays et nourrissent l’imaginaire des Polonais. Dans une société profondément croyante, elles façonnent, à leur manière, une vision collective de l’histoire, elles sont ainsi vectrices de morales et de valeurs importantes. Ces mythes et ces légendes permettent aussi une promotion de la culture locale, à travers des festivités organisées pour célébrer les contes et les héros qui ont contribué à l’histoire polonaise.
L’une des légendes les plus connues est sans conteste celle de la sirène de Varsovie. Aussi connue sous le nom de Syrenka, elle vivait dans le fleuve qui traverse la ville, la Vistule. Elle était arrivée par la mer Baltique, où elle résidait jadis avec sa sœur, la célèbre petite sirène de Copenhague ! Discrète, ce sont les pêcheurs qui découvrirent son existence, après avoir constaté leurs filets endommagés, et la fuite des poissons près de la rive. Leur colère, bien que tenace, laissa vite place à l’admiration quand ils découvrirent la beauté et la douce voix de la sirène. Un jour, alors qu’elle chantait sur les bords de la Vistule, un marchand étranger l’entendit. Envoûté par la belle créature, il décida de la capturer pour la ramener dans son pays, afin de l’exposer dans sa boutique. Les habitants s’opposèrent à cet enlèvement et, avec l’aide des pêcheurs, la sirène fut sauvée. Pour honorer la bravoure dont le peuple a fait preuve pour la délivrer, Syrenka décida de rester à Varsovie pour protéger la cité. Aujourd'hui, elle est l'emblème de la ville et est présente sur de nombreux drapeaux, monuments et sculptures. Une fontaine est d’ailleurs érigée en son honneur en plein cœur de la vieille ville.
À l’instar de Varsovie, Cracovie possède aussi sa légende. Selon le mythe, un dragon vivait dans une grotte, sous le château du Wawel, et terrorisait les habitants de la ville. En effet, il avait pour habitude de s’y balader chaque jour, brûlant sur son passage les habitations, dévorant les moutons et les habitants. Le roi, impuissant face à son peuple terrorisé, envoya ses soldats pour le combattre, en vain… Il promit même la main de sa fille à l’homme plein de bravoure qui éliminerait l’effroyable créature. C’est alors qu’un jeune apprenti cordonnier trouva le stratagème pour tuer la bête. Après avoir rempli un mouton de soufre, il le posa sur le chemin du dragon, qui le dévora en une bouchée. La proie empoisonnée ne mit pas longtemps avant d’assoiffer le cracheur de feu. Pour s’abreuver, il but en grandes quantités l’eau de la Vistule et finit par exploser ! Le roi tînt sa parole et le jeune homme épousa la fille du souverain. Le dragon, tout comme la sirène de Varsovie, est aujourd'hui l’un des symboles de la ville. Une statue à son effigie est dressée à l’entrée de la grotte où il aurait vécu. Elle a la particularité de cracher du feu toutes les cinq minutes environ, et il est même possible de déclencher sa flamme en envoyant un SMS. Au moins 2 500 demandes par messages sont faites par jour, afin de générer sur commande le souffle du dragon ! Il suffit d’envoyer « Smok » au 7168. La légende est commémorée tous les ans lors d’une grande fête, durant laquelle une marionnette géante de la créature parade dans les rues.
Il existe une multitude d'autres mythes fascinants en Pologne : la légende de Poznań et de sa colombe qui sauva la ville de l’envahisseur, l’histoire du violoniste de Gdańsk et de sa belle musique qui, après avoir ému aux larmes les soldats suédois venus piller la ville, les fit déserter… Certains de ces mythes sont encore utilisés aujourd’hui pour apprendre aux enfants des grands principes de vie. C’est le cas de l’histoire du roi tyrannique Popiel qui, après avoir gouverné avec violence la région de Gniezno, mourut avec sa famille suite à une attaque de souris. Ce mythe a pour but de faire prendre conscience aux jeunes Polonais que chaque action a ses conséquences. La légende de la princesse Wanda est quant à elle utilisée pour inculquer l’esprit de résistance et la notion de sacrifice à la patrie.