SITORI-I-MOKHI KHOSA,  LE PALAIS DE LA LUNE ET DES ETOILES 

La résidence d’été des khans de Boukhara est située dans un immense parc de plus de 6 ha, à 5 km de la ville. Un premier palais entouré de jardins fut construit par l’émir Akhad Khan à la fin du XIXe siècle. Alim Khan, son fils, y ajouta un nouveau bâtiment en 1914. Le dernier khan de Boukhara avait fait ses études à Saint-Pétersbourg, et son mode de vie s’en ressentait. Il commanda un palais qui se voulait sans doute à la pointe de la modernité, mêlant l’architecture russe au style décoratif d’Asie centrale. Le résultat est surprenant. La visite comprend trois différents corps de bâtiments, transformés en musées : les appartements et salles de réception d’Alim Khan, le palais octogonal et le harem. Les pièces de réception de l’émir Alim Khan, construites en enfilade, à l’occidentale, sont un apport des architectes russes travaillant à la cour de l’émir. La salle blanche est une œuvre unique, ses murs sont entièrement couverts de gantch blanc finement ciselé sur un fond de miroirs. La construction de ce palais des glaces version boukhare dura trois années, pendant lesquelles l’architecte refusa au khan l’entrée du chantier. Quand Alim Khan put enfin admirer le résultat, il fut subjugué et, reprenant les bonnes vieilles habitudes ancestrales, décida de faire tuer l’architecte afin qu’il ne puisse faire profiter de son art à d’autres. Heureusement, Chirin Muradov, l’architecte de la salle blanche, fut prévenu à temps et réussit à s’enfuir. A l’entrée, un haut boudoir est décoré de niches à stalactites dans lesquelles sont peints d’insolites et superbes bouquets de fleurs multicolores. Les murs et le plafond de la salle de jeux et de la salle d’attente sont entièrement décorés de panneaux dorés, couverts d’une extraordinaire et un peu oppressante mosaïque de miroirs. La salle de banquet est la plus originale et la plus somptueuse, elle comprenait quatre parois décors, un pour chaque saison, que l’on changeait grâce à un mécanisme dont personne ne se souvient mais, de toute façon, les trois autres décors ont disparu après la révolution. Dans ces salles sont exposés divers cadeaux offerts à l’émir, dont un original réfrigérateur tout en verre. Le mirzo-khona, ou salle des secrétaires, est la plus sobre des pièces, son miroir à trois battants est, paraît-il, magique. En s’y regardant, on doit faire un vœu, qui se réalise dans les 40 jours… Au bout du bâtiment, la véranda expose une belle collection de vases anciens de toute provenance. Le palais octogonal est un musée consacré au costume national, où vêtements d’apparat, khalat multicolores ou sombres parandja sont exposés au milieu de photos de la famille princière. Les vêtements étaient habituellement confectionnés par des femmes, mais les motifs en fils d’or étaient brodés uniquement par les hommes. La salle octaèdre destinée aux invités était initialement décorée à la feuille d’or ; après la révolution, l’or aurait été remplacé par du bronze et emporté en Russie. Le harem abrite le musée de la Broderie. Les différentes techniques décoratives y sont illustrées par l’une des plus belles collections de suzani d’Ouzbékistan. Devant le harem se trouve un grand plan d’eau. On raconte que l’émir s’installait dans l’estrade à coupole qui borde ce bassin pour regarder ses femmes se baigner, et choisissait l’élue de son cœur en lui lançant une pomme.