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Origines

Le Monténégro s’est nourri d’un panachage d’influences. Tandis que la culture italienne s’est diffusée sur les côtes, les codes byzantins ont imprégné les monastères, comme Piva et Morača. C’est là que la peinture d’icône, héritée du christianisme orthodoxe, s’est épanouie. Hormis quelques peintres baroques qui peignirent essentiellement des navires et des portraits dans les bouches de Kotor, la peinture monténégrine s'est principalement inspirée des traditions religieuses jusqu'à la fin du XIXe siècle. Les œuvres des plus grands artistes monténégrins et yougoslaves des XIXe et XXe siècles sont quant à elles exposées au musée national d'Art de Cetinje.

La peinture religieuse

Les fondements de l'expression picturale nationale remontent à la tradition médiévale de la peinture d'icônes et de fresques religieuses qui connut son âge d'or au Monténégro au XVIIe siècle. L'une des premières grandes figures de la peinture religieuse du pays est Georgije Mitrofanović (XIe siècle), un frère du monastère de Chilandari (ou Hilandar), au mont Athos (nord de la Grèce). À l'origine d'une partie des peintures du monastère de Morača, il influence ses successeurs, en particulier Kyr Kozma. Originaire de Berane, le prêtre Strahinja (fin XVIe-début XVIIe siècle), très actif durant une quarantaine d’années, a notamment travaillé aux monastères de Piva, de Pljevlja, de Morača, de Gradište et dans l'église Saint-Nicolas de Podvrh. Considéré comme le peintre le plus doué du XVIIsiècle, Kyr Kozma débute sa carrière au monastère de Gradište. Là, il travaille, aux côtés du père Strahinja sur les fresques de l'église Saint-Nicolas. On peut aujourd'hui voir ses plus belles œuvres dans les monastères de Piva et de Morača. À l'origine des peintures ornant l'intérieur de l'église Notre-Dame de Škrpjela, au large de Perast, Tripo Kokolja (1661-1713) marque l'apogée du baroque dans la peinture monténégrine.

Enfin, il faut citer la famille Dimitrijević-Rafailović, qui compte onze peintres sur cinq générations. Elle exerce de la fin du XVIIe siècle au milieu du XIXe siècle, principalement dans les bouches de Kotor. On estime qu’elle a produit plusieurs milliers d'icônes et plusieurs dizaines d'iconostases, au Monténégro mais également en Herzégovine. Le Musée municipal d'Herceg Novi expose certaines de leurs icônes.

La peinture au XXe siècle

Ce n'est qu'au XXe siècle, et en particulier dans la période de l'entre-deux-guerres, que le Monténégro voit émerger des artistes locaux dont la renommée dépasse les frontières nationales. Le premier, Anastas Bocarić (1864-1944), se forme à Athènes avant de travailler à Cetinje où il se spécialise dans le portrait académique.

Après la Première Guerre mondiale, de jeunes talents monténégrins partent se former à Belgrade, le centre du nouvel État. Parmi eux, citons Petar Lubarda (1905-1974), le peintre monténégrin le plus éminent, avec Branko Filipović. Né à Cetinje, il fait ses études à l’École des beaux-arts de Paris où il gagne le grand prix de l'Exposition internationale de 1937. Après la guerre, il crée la première école d'art au Monténégro et, dès 1951, organise deux expositions à Paris. Ses compositions oniriques, mêlant thèmes expressionnistes et images postmodernes, l'ont très vite distingué de ses pairs ; de taille gigantesque, elles ornent des lieux prestigieux, comme l'ex-palais de la Fédération yougoslave à Belgrade (rebaptisé palais de la Serbie). Deux autres peintres importants de cette génération sont Pero Poček et Milo Milunović.

De la génération suivante, le peintre et sculpteur Vojo Stanić (né en 1924 à Podgorica) participe à la Biennale de Venise de 1996, le peintre Dimitrije Popović (né en 1951 à Cetinje), fortement influencé par les maîtres de la Renaissance et l’inclassable Dado, qui vécut en France dans les années 1950-1960.

Dado, un art brut

Miodrag-Dado Djurić (1933-2010) a produit une œuvre picturale d’une liberté stupéfiante. Ses fresques murales ont investi des chapelles, ses installations ont fait sensation, ses peintures ont été exposées à New York et Washington, Paris et Bruxelles. Au Monténégro, le musée d'Art national de Cetinje conserve certaines de ses œuvres de jeunesse. Né à Cetinje dans une famille aisée, il tombe très jeune dans la marmite de la création. Enfant, Dado réalise sa première fresque dans la maison familiale. Plus tard, l’artiste est repéré par Jean Dubuffet, le père de l’art brut, avec qui il se lie d’amitié. En 1960, Dado s'installe à Gisors dans un cinéma désaffecté qui devient le théâtre de son imagination galopante. Cependant, son inspiration reste enracinée dans le Monténégro. En 1991, il présente à la première Biennale de Cetinje une installation dédiée à Danilo Kiš, déplacée ensuite dans son « antimusée », devenu Atelier Dado, sur la place du Roi Nikola.

De nos jours

À Podgorica, le street art aime jouer à cache-cache et se disperser de préférence en dehors du centre-ville. La plupart des œuvres murales transmettent un message politique, la déforestation étant l’une des principales préoccupations de la jeunesse monténégrine. Quelques indices pour guider votre traque : les immeubles du Blok 5 érigés dans les années 1980 à quelques centaines de mètres de Preko Morače recueillent des graffitis et quelques fresques. Plus près du centre, des façades visibles du parc au-dessus du Kayak Club se couvrent de peintures.

L’art vivant se rencontre aussi dans les nombreuses galeries d’art du pays. La plus grande se trouve à Cetinje. La galerie Miodrag Dado Djuric joue depuis 2012 un rôle majeur dans la promotion de l’art monténégrin sur la scène internationale. À Podgorica, le CSUGC expose des artistes réputés, notamment Aleksandar Duravčević et Mario Schifano dans un espace lumineux. La découvreuse galerie Pizana diffuse l’art monténégrin à l’étranger. Au cœur de la ville, l’Al Galerija possède une collection de sculptures et de peintures signées Milo Milunović, Vojo Stanić ou encore Catherine Švabić. Ouverte dès 1994, la galerie Most est désormais un véritable centre culturel ouvert à tous les modes d’expression artistique. On peut au passage admirer des œuvres du Dado national. Dans son programme, le lieu veille à préserver la richesse de l’histoire de Podgorica, de l’occupation ottomane à nos jours. Qu’on se le dise : le Monténégro bouillonne d’énergie !