Produits caractéristiques
L'un des piliers de la gastronomie si cosmopolite de Singapour porte le nom de cuisine peranakan ou nyonya. Le terme « baba-nyonya » désignait initialement l'union entre des marchands chinois et des femmes malaises ou indonésiennes. Les Chinois de cette communauté ont en partie adopté les coutumes malaises afin de mieux s’intégrer aux populations locales ; une situation commune à d’autres régions à dominante chinoise à l’ouest de la Malaisie comme à Malacca ou sur l’île de Penang. Ainsi le lait de coco, le galanga, les feuilles de pandan, le belacan (pâte de crevettes), la pulpe de tamarin, la citronnelle, les feuilles de citron kaffir (combawa) ainsi que les piments et les échalotes, traditionnellement utilisés en Malaisie, sont associés à la sauce soja, aux nouilles de blé ou de riz, à la sauce d’huître, au cinq-épices, au gingembre et autres légumes-feuilles venus de Chine.
Les épices sèches utilisées en Inde et au Moyen-Orient – cumin, poivre, curcuma, cannelle, cardamome ou graines de coriandre – sont largement employées également. Le cuisine singapourienne peut être douce comme très pimentée selon les plats et on sert souvent en garniture du sambal, une brûlante purée de piment – qui se décline en plusieurs dizaines de variétés –, souvent complétée d'ail, d'échalote, de pâte de crevettes ou de sauce soja. Le pays englobe de nombreuses communautés avec certains interdits alimentaires : les Malais musulmans ne mangent pas de porc dont les Chinois raffolent alors que les Indiens ne consomment pas de bœuf. Poulet, canard, agneau, mouton, ainsi qu'une foule de poissons et de fruits de mer variés, sont consommés.
Avec une population chinoise à 75%, il va sans dire que le Nouvel An chinois est la célébration la plus importe de l'année. Lanternes, feux d'artifice, banderoles et autres assortiments de fruits censés porter chance et prospérité sont présents à tous les coins de rue. Côté cuisine on retrouvera également de nombreux plats de fête, même si le loh hei ou yusheng est la grande spécialité du Nouvel An chinois dans la région. Cette salade se compose de poisson cru signifiant le renouveau de la vie. On y ajoute du jus de citron, des légumes finement émincés (laitue, radis blanc, carotte, concombre, igname), de la pulpe de pomelo chinois, du gingembre frais, des graines de sésame, des cacahuètes concassées et des crackers bien dorés, symbole de richesse. La salade est assaisonnée avec une sauce sucrée à la prune, du miel, de l’huile, du poivre, de la cannelle et du cinq-épices.
Les ingrédients, disposés séparément, sont ajoutés un par un dans un grand plat, avant que les convives se lèvent et mélangent tous ensemble la salade avec leurs baguettes. L’objectif est de soulever le plus haut possible les différents composants afin d'assurer la prospérité. Chaque ingrédient possède une signification particulière. L'Aïd el-Kebir chez les Musulmans et Diwali chez les Hindous sont deux autres célébrations majeures dans le calendrier singapourien.
Au-delà des spécialités régionales, on trouve dans le pays presque tout ce dont on peut rêver en matière de cuisine du monde. Singapour compte également 55 restaurants étoilés Michelin en 2023. Pourtant parmi ses lieux réservés à une clientèle fortunée, on notera aussi deux établissements qui sortent du lot. En effet, le pays est connu pour ses nombreux hawker centres. Ces food courts permettent de choisir une sélection gigantesque de plats parmi de nombreux stands, souvent pour moins de 5-10€, avant de les dévorer dans une ambiance joyeusement bruyante. Ils sont tellement indissociables de la culture de la ville, qu’en 2016, le Hong Kong Soya Sauce Chicken Rice & Noodle et le Hill Street Tai Hwa Pork Noodle ont obtenu chacun une étoile Michelin. Ces établissements ont beau être les restaurants étoilés les moins chers du monde, ils témoignent de l’excellence de la cuisine de rue de Singapour.
Les classiques de la cuisine singapourienne
Parmi les plats les plus emblématiques de Singapour, on peut citer le féroce chili crab, baignant dans une sauce avec tomate, ail, vinaigre de riz et beaucoup de piment. On testera aussi le black pepper crab, nappé d'une sauce épaisse à base d'ail, gingembre et poivre noir moulu, qui a un léger effet anesthésiant. Autre plat très épicé, le curry de tête de poisson est un plat d'inspiration indienne préparé à partir d’une grosse tête de poisson, le plus souvent un vivaneau (red snapper), que l'on fait mijoter dans un riche bouillon aigre-doux parfumé au tamarin, le tout garni de légumes (aubergines, gombos, etc.).
On retrouve aussi des plats chinois comme le classique canard laqué ou le porc char siu cuit au barbecue et délicieusement fondant. Les satay sont de petites brochettes de viande (poulet, bœuf, porc ou agneau), finement épicées, très populaires et servies avec sauce crémeuse à la cacahuète. La plupart des Singapouriens d'origine chinoise viennent du sud-est de la Chine : Guangdong, Fujian ou l'île d’Hainan. On notera ainsi l'incontournable riz au poulet de Hainan préparé avec un poulet poché dans un bouillon aromatique et accompagné avec un riz lui-même cuit dans ce bouillon. Le tout est servi avec de la sauce soja sucrée (kecap manis), du sambal et une sauce au gingembre et au vinaigre de riz.
Le poulet kapitan est un curry au lait de coco avec du jus de tamarin et de la pâte de crevettes. Il doit son crémeux à une poudre de noix des Moluques, appelées « candlenuts » à Singapour. L'ayam buah kelual est un plat en sauce, aussi à base de poulet, parfumé avec des noix de pangi fermentées, au subtil arôme de cacao et d'olive noire. On y ajoute également piment, pâte de crevettes et citronnelle. Il existe une variante au porc (babi buah keluak). Autre plat typique, l'ayam pongteh se compose de poulet et de pommes de terre mijotés avec taucheo (pâte de soja fermenté), ail, échalote et sucre de palme. Enfin le itek sio est un canard rôti mariné dans un mélange de sauce soja, tamarin et échalote.
Les nouilles et vermicelles sont évidemment très consommés. La recette la plus commune est sans doute les hokkien mee, des nouilles aux œufs épaisses, sautées avec fruits de mer, œuf dur et viande de porc. Notons aussi le char kuey teow, composé de nouilles de riz plates sautées dans de la graisse de porc, avec sauce soja, piment, germes de soja et crevettes. Le xing chow bee hoon est quasi-identique mais avec des vermicelles de riz. Le laksa est une soupe onctueuse, à base de lait de coco et de divers aromates, que l'on garnit de nouilles, de crevettes, de gâteau de poisson, de calamar, de germes de soja et de tofu frit.
Il ne fait aucun doute que le riz est très apprécié à Singapour et on le sert à tous les repas, mais il peut aussi être plus travaillé. Le nasi lemak est cuit dans du lait de coco. On y ajoute ensuite du poisson séché, des œufs, du sambal, des concombres et des anchois en garniture. Le très populaire nasi goreng, littéralement « riz frit », est un plat de riz sauté à l'huile, assaisonné de kecap manis, d'échalote, d'ail, de tamarin, avec parfois œuf dur, poulet et crevettes.
Impossible de passer à côté du lumpia, équivalent local du nem, que l'on garnit abondamment de légumes et/ou de viande, avant d'être frit ou non. Il porte parfois le nom de « popiah ». Assez proche, le loh bak est un rouleau frit à base de peau de tofu fourrée de porc braisé mariné. L'otak-otak est une papillote à base de pâte de poisson marinée avec piment et épices, roulée dans un feuille de bananier avant d'être cuite au charbon de bois. Malgré son nom, le carrot cake (chai tow kway) est en fait un gâteau dense à base de radis blanc râpé. Cuit à la vapeur, le gâteau est ensuite coupé en cubes et il est souvent frit avec de la sauce soja, des œufs, des oignons nouveaux et des légumes au vinaigre.
Très apprécié le matin, le roti john est inspiré des œufs brouillés, servi avec du pain, consommés par les Britanniques au petit-déjeuner. Les Singapouriens eurent l'idée de faire un sandwich composé de pain imbibé d’œuf battu et poêlé façon pain perdu. Le tout est ensuite garni de crudités, viande, poisson avec diverses sauces. Le terme « roti » désigne divers types de pains plats ou crêpes consommés en Asie du sud. Le roti prata est une galette fine, élastique et un peu huileuse, dégustée nature, parfois fourrée d'œuf ou de viande, ou accompagnée d'un petit bol de sauce au curry.
Desserts et boissons
Il existe une multitude de petites tartes ou de gâteaux, portant le nom générique de « kueh », à base de noix de coco, de sucre de canne et de riz gluant. Ils sont souvent multicolores, aussi beaux que bons. Les gâteaux de lune (yuèbing) fourrés de pâte de lotus, de haricots rouges ou de jaune d’œuf de canne salé, sont consommés pour la Fête de la Lune, en automne. On testera aussi le pandan chiffon cake, un gâteau ultra léger et moelleux, parfumé aux feuilles de pandan, donnant un léger goût de vanille et de noix de coco. Les apom berkuah sont des petits pancakes à la farine de riz teints en bleu avec des fleurs de pois papillon, servis avec une sauce à la banane. On notera aussi les tangyuan – des billes de pâte de riz fourrées de fruits secs – servis dans un léger bouillon sucré, d'origine chinoise, ainsi que les gulab jamun, de petits beignets à la cardamome, imbibés d'un sirop à l'eau de rose, venant d'Inde.
Le simple mango pudding – un entremets fondant à la mangue et au lait concentré – est très commun, tout comme le cendol, une sorte de milk-shake au lait de coco garni de nouilles de riz au pandan et de purée de haricots azuki. L'étonnante grass jelly est une gelée noire à base de feuilles de mesona, une cousine de la menthe. Au petit-déjeuner on ne résiste pas au kaya toast, des toasts garnis d'une confiture à base de lait de coco, d’œuf et de sucre (kaya). C'est en-cas typique des kopi tiam, des cafés locaux où l'on peut grignoter une sucrerie avec une boisson chaude.
A Singapour, s'il existe une culture du café, que l'on appelle « kopi », on ne consomme pas traditionnellement d'expresso et autre cappuccino bien mousseux, bien que la tendance change auprès des jeunes Singapouriens. On préférera plutôt un café très allongé. Vous pouvez le demander nature (kopi o kosong), avec du sucre (kopi-o), avec du lait (kopi-c) et avec du lait mais sans sucre (kopi c-kosong). Pour un café plus serré, vous prendrez un kopi-o-kosong-gau. Bien sûr le thé (teh) est très répandu dans le pays et on le préfère noir et assez corsé, mais on retrouve du thé vert « à la chinoise », très léger. On adore le teh tarik, du thé noir avec beaucoup de lait concentré sucré, mais aussi le bubble tea, glacé avec du lait de soja et des billes de tapioca.
Si les Singapouriens ont un comportement plus décomplexé vis-à-vis à l’alcool que leurs voisins malais et indonésiens, la législation reste assez stricte et on ne peut pas consommer d'alcool dans les lieux publics entre 22h30 et 7h du matin. De plus, pour limiter les problèmes d’alcoolisme, le gouvernement applique des taxes élevées qui font bondir le prix des boissons alcoolisées dans les bars. De ce fait, il est souvent plus cher de boire un bière en terrasse que de manger un en-cas dans un hawker center. Du fait de son rôle de plate-forme portuaire, il est évident que vous trouverez tout type de boissons alcoolisées sur place, même si on consommera surtout de la bière et notamment la marque locale, la Tiger beer, créée en 1932, ainsi que la Anchor beer. Vous trouverez sans problème des vins, généralement australiens, mais aussi européens. Pour une touche de raffinement, direction le Long Bar du célébrissime Raffles Hotel, fondé en 1887. On pourra y siroter un Singapore Sling, confectionné à base de jus d’ananas, de gin, de jus de citron vert, de grenadine, de Grand Marnier, de Bénédictine (liqueur herbale) et de quelques gouttes d'Angostura Bitter. Créé en 1915, il est devenu le cocktail signature de cet hôtel, le plus emblématique de Singapour.