Des produits d’excellence

Ce qui marque particulièrement la gastronomie locale est l’abondance d’ingrédients d’exception en Émilie-Romagne avec pas moins de 44 produits bénéficiant d’une appellation protégée, IGP (Indicazione geografica protetta) ou DOP (Denominazione di origine protetta), équivalent italien de l’AOP.

On y produit entre autres le roi des fromages italiens, le Parmigiano Reggiano DOP, à base de lait de vache entre Parme, Bologne et Reggio Emilia, d’où son nom. Il nécessite un affinage particulièrement long et méticuleux, d’où un prix qui peut aisément dépasser les 1 000 € pour une meule entière dont le poids oscille entre 35 et 60 kg. Il peut être fresco, affiné moins de 18 mois, vecchio, entre 18 et 24 mois, ou stravecchio, entre 24 et 36 mois. On n’oubliera pas son proche cousin le Grana Padano DOP, moins prestigieux, mais tout aussi savoureux, qui est produit dans la région ainsi que dans d’autres provinces du nord de l’Italie. Sinon le Formaggio di fossa di Sogliano, au lait de brebis, s’apparente au pecorino. La squacquerone, assez proche d’une ricotta, ou encore le provolone complètent le tableau.

La charcuterie d’Émilie-Romagne est exceptionnelle, ne serait-ce qu’avec l’immanquable jambon de Parme ou prosciutto di Parma DOP, produit pendant des siècles autour de la ville de Langhirano. La cuisse de porc est frottée dans un mélange de sel, de poivre et d’épices avant d’être affinée entre 10 et 12 mois. Et si le jambon de Parme n’est encore pas assez prestigieux, le cran au-dessus est le Culatello di Zibello DOP. Préparé avec le cœur de la cuisse, on le sale et on le conserve dans une vessie avant un séchage d’environ 14 mois. A savourer en très fines tranches. Spécialité de Bologne, la mortadella bénéficie d’une IGP. Elle contient généralement des pistaches. La Coppa Piacentina DOP et la Coppa di Parma IGP sont deux charcuteries de viande de porc séchée, idéales en antipasti, comme la savoureuse Pancetta Piacentina DOP.

Ce tour d’horizon ne serait pas complet sans le vinaigre balsamique ou aceto balsamico. Préparé à base de moût de raisin cuit (vincotto), il est maturé en batterie de fût pendant 3 à 5 ans, même si certains vinaigres très rares peuvent être vieux de plus d’un siècle. Il existe deux types de vinaigres balsamiques d’appellation contrôlée, le vinaigre balsamique de Modène IGP et le vinaigre balsamique traditionnel DOP de Modène et de Reggio Emilia.

Au royaume des pâtes et du pain

Dove c’è Barilla, c’è casa (Avec Barilla c’est comme à la maison) : le slogan du leader mondial des pâtes sèches résonne à travers l’Émilie-Romagne. Fondé à Parme en 1877, Barilla représente presque la moitié du marché italien et possède des usines aux quatre coins du monde. Il faut dire que les pâtes sont le point fort de la cuisine locale. En Italie, presque chaque région se vante de la création des fameuses pâtes. Certains les pensent originaires de Chine alors que d’autres clament leur origine romaine ou étrusque. Aujourd’hui le pays se targue de pas moins de 300 variétés, des plus communes comme les spaghetti, les farfalle, les cannelloni ou les penne, aux plus rares comme les trofie, les ditalini ou encore les conchiglie

La variété emblématique d’Émilie-Romagne serait bien sûr les tagliatelle, des pâtes aux œufs typiques de Bologne. Leur nom dérive du verbe tagliare (couper). Les passatelli, plus rares, sont composées de pain émietté, de parmesan et d’œuf. Elles sont ensuite pressées en forme de gros vermicelles. Et bien sûr chaque forme de pâte a son usage. Pour les sauces plus légères mais un peu huileuses, on privilégiera des pâtes longues et fines, alors que les riches jus de viande confits se marieront bien avec des pâtes larges et rubanées. Enfin, les pâtes en forme de tubes sont idéales pour les sauces plus liquides. A noter d’ailleurs qu’en Italie les pâtes constituent un primo – comprendre une entrée – alors que la viande ou le poisson sont servis en tant que secondo, c’est-à-dire en plat principal.

L’inventaire ne serait pas complet sans les innombrables pâtes farcis. Ravioli, agniolli, tortelli, pansotti et bien sûr les immanquables cappelletti. Ces petits tortellini sont propres à l’Émilie-Romagne et sont généralement farcies de viande (bœuf, porc, volaille, etc.), plus rarement on y met de la ricotta, du parmesan ou de la mortadelle. Traditionnellement on les sert dans un bon bouillon chaud (une sorte de pot-au-feu à base de poulet, bœuf et légumes). On peut également citer les tortelli alla piacentina, farcis de bœuf et délicatement plié en forme de chaussons, les tortelli verdi, garnis d’épinard, ou les tortelli zucca mantovani, une spécialité de Mantoue, fourrés de crème de potiron.

Impossible évidemment de parler de pâtes en Émilie-Romagne sans évoquer la sauce bolognaise ou ragù alla bolognese. La recette est tellement iconique de la cuisine italienne qu’elle fut même reconnue en 1982 par l'Accademia Italiana della Cucina qui en dresse une liste d’ingrédients très stricte : purée de tomate, bœuf, pancetta, oignons, carottes, céleri, vin rouge, lait ou crème, huile d'olive, sel et poivre. Contrairement à ce que l’on pense souvent, la sauce ainsi obtenue contient assez peu de tomate et surtout elle nécessite plusieurs heures de cuisson. Autre spécialité savoureuse venant de la région, les lasagne al forno, en réalité originaires de Naples. Toutefois la version que l’on connaît tous à base de sauce bolognaise nappée de béchamel vient bien d’Émilie-Romagne, les Napolitains préférant la napper de ricotta.

La région possède également de nombreuses spécialités de pain et de viennoiseries salées comme le pasticcio di maccheroni alla ferrarese, une tourte garnie de rigatoni en sauce. Un peu bourratif. Plus léger, la piadina est un pain plat assez fin que l’on peut fourrer de garnitures diverses : mozzarella, tomates, charcuterie, roquette, etc. Une fois farcie, la piadina prend le nom de cresciona. Enfin l’erbazzone est une savoureuse tourte paysanne garnie d’épinard ou de blette, originaire de la province de Reggio Emilia.

Les classiques de la cuisine d’Émilie-Romagne

Plus que la Toscane ou la Ligurie, voisines, l’Émilie-Romagne fait une usage abondant de viande et de charcuterie. Ainsi parmi les classiques de la région on retrouve le savoureux zampone e lenticchie, préparé avec des lentilles et du Zampone modenese IGP, une spécialité de pied de porc farci de chair à saucisse que l’on fait longuement mijoter avant de le découper en rondelles. Le Cotechino di Modena IGP est une épaisse saucisse parfumée que l’on accompagne souvent de légumes secs. On le roule dans de fines tranches de bœuf pour réaliser le Cotechino in galera avant d’être rôti au four. On peut citer aussi les Fave stufate ou fèves à la mortadelle et les rognons à la parmesane (Rognoni alla parmigiana) sautés avec de l’ail et du persil.

Typique de la cuisine juive de Ferrare, le hamin est une variété de tcholent, c’est-à-dire un plat que l’on laisse mijoter toute la nuit, la veille du shabbat, pour être servi au déjeuner. Il se compose de viande et de saucisse de bœuf, d’œufs durs et de haricots secs. Autre plat de bœuf, le stracotto alla piacentina est un ragoût où la viande confit longuement dans une sauce à la tomate et au vin. On retrouve quelques rares recettes de poissons et fruits de mer comme la Seppia con piselli alla romagnola, des seiches dans une sauce à la tomate et aux petits pois.

Desserts et boissons chaudes

Comme pour la plupart des régions d’Italie, l’Émilie-Romagne brille moins par ses desserts, en général peu sophistiqués. Les plus gourmands trouveront toutefois des spécialités répandues comme l’immanquable gelato ou encore le tiramisù que les Italiens adorent. Parmi les desserts les plus connus de la région on peut citer la Zuppa inglese. Cet entremets se compose d’une alternance de biscuits à la cuillère imbibés d’alkermès, une liqueur rouge, de crème pâtissière et de crème au chocolat.

On retrouve aussi d’autres douceurs comme le rustique Castagnaccio, un gâteau dense à la farine de châtaigne agrémenté de pignons et d’amande, le Bracciatello, une couronne briochée préparée pour Pâques, ou encore la Ciambella romagnola ou Brazadela, une longue brioche citronnée couverte de sucre perlé. Le Bombolone romagnolo est un simple beignet au sucre, qui est ensuite généreusement fourré de crème pâtissière, de chocolat ou même de Nutella. Autre douceur très gourmande, la Torta tenerina est un délicieux fondant au chocolat. Ces spécialités sont à déguster avec du café, les Italiens étant passés maîtres dans la préparation du délicieux breuvage. Petit inventaire du café italien. L’espresso ou ristretto ne contient que quelques centilitres très concentrés au fond d’une tasse, souvent bien moins que ce que l’on sert en France. Le macchiato "taché" est servi avec une goutte de lait. Le lungo est légèrement allongé d’eau, alors que l’americano est un café noir long. Sinon le corretto est "corrigé" avec un trait de grappa. Le classique cappuccino doit son nom de "petit capucin" en référence à la capuche brune des moines (cappuccio). C’est un grand café recouvert de lait mousseux et saupoudré de cacao. Plus riche, le caffè con panna est nappé de crème fouettée.

Boissons alcoolisées

Le vin (vino) est cultivé dans toute la péninsule italienne depuis des temps immémoriaux et l’Émilie-Romagne ne déroge pas à la règle. Cette région riche et fertile est l'une des plus prolifiques du pays avec plus de 55 000 ha. Environ 15 % du vin produit en Émilie-Romagne bénéficie de 20 DOC, sans oublier ses deux DOCG (Albana di Romagna et Colli Bolognesi Classico Pignoletto). La grande diversité des paysages explique aussi une variation notable de terroirs et de crus avec les Apennins qui s’étirent à l’ouest alors que les délicates plaines centrales de Parme, Modène et Bologne ondulent jusqu’au littoral adriatique. Les cépages dominants étant Malvasia et Lambrusco (tous deux sous leurs différentes formes), Trebbiano, Barbera, Bonarda et bien sûr Sangiovese. Un grand pourcentage de ces raisins est utilisé pour produire des vins mousseux, frizzante ou spumante, dont les plus notables sont issus des cinq DOC Lambrusco : Salamino di Santa Croce, di Sorbara, Grasparossa di Castelvetra, Modène et Reggiano. Bien que l’on trouve des cépages déjà très connus en Émilie-Romagne avec du chardonnay, du pinot blanc ou du cabernet-sauvignon, la spécificité de la région provient de ses rares vins DOC locaux. La Cagnina di Romagna en rouge et la Pagadebit di Romagna en blanc en sont des exemples.

La bière (birra) est traditionnellement moins consommée que le vin mais comme dans bien des pays d’Europe du Sud elle croît en popularité. La bière locale (Nastro Azzurro principalement) connaît un succès grandissant. On la consomme alla bottiglia (en bouteille) ou alla spina (à la pression). On n'oubliera pas quelques liqueurs renommées comme l’excellente Nocino, une liqueur de noix de Modène, ou l’Anicione, à l’anis.