BETA MEDHANE ALEM

Cette église monolithique, considérée comme la plus vaste du monde, s'appelle littéralement « la maison du Sauveur du monde ». C'est la plus accessible et la plus vaste du complexe religieux, et ses dimensions sont impressionnantes : 33,5 m de long, 23,5 m de large et 11 m de hauteur. Elle se trouve dans une fosse de plus de 40 m de long qui donne une idée du travail colossal entrepris pour sa réalisation, commencée à la fin du XII^e siècle et achevée au XIII^e. On estime que pour sa construction, 15 000 m³ de roche furent enlevés de la cour et 10 000 m³ à l'intérieur. C’est depuis le point situé en haut de l’excavation qu’il faut s’imaginer le creusement des tranchées dans ce mélange de pierres volcaniques et sédimentaires mettant au jour un bloc colossal unique, tout en respectant une dénivellation indispensable à l’écoulement des eaux. Du mastodonte minéral peu à peu dégrossi se dégage enfin le sanctuaire. Un portique de trente-quatre piliers ceint l’édifice et allège la structure ; depuis les ouvertures, portes et fenêtres, les tailleurs de pierre s’infiltrent pour dégager les nefs, les piliers, les voûtes. Aucune erreur n’est permise et l’unicité monolithe de l’ensemble, simplement troublée par la reconstruction de certains piliers en blocs de pierre par une campagne de « restauration » italienne, prouve la justesse des calculs des architectes de l’époque.

On accède à l'intérieur par trois portes ouvrant à l'ouest, au nord et au sud, comme le veut le rituel chrétien. L’intérieur, qui paraît beaucoup plus réduit en raison de l’épaisseur des murs (2 m), dévoile un plan basilical à cinq nefs, dont celle du milieu, plus élevée que les autres, est surmontée d’une voûte en berceau. Le maqdas, ou saint des saints, est surélevé d’une fondation à trois degrés ; à sa gauche, trois cavités découvertes symbolisent les tombeaux d’Abraham, d’Isaac et de Jacob. L’ensemble est soutenu par 24 piliers, sans base ni chapiteaux, qui, avec les trente-quatre autres piliers du péristyle extérieur, symboliseraient les 72 apôtres. L’édifice est vierge de tout ornement et seules les fenêtres, dont les motifs très divers sont une constante des églises de Lalibela, apportent une touche décorative à l’ensemble. Le toit à double pente sculpté a malheureusement eu à souffrir de dégradations dues à l’érosion et se trouve aujourd’hui couvert d’une protection sous forme de toit. Pour certains experts, Medhane Alem pourrait être une copie de l’église originelle de Sainte-Marie de Sion à Axoum, bâtie au VI^e siècle puis détruite à l’époque des invasions de la ville.