CHÂTEAU DE KOLOSSI

Ce château (Κάστρο Κολοσσίου/Kastro Kolossiou) fut le premier grand bâtiment construit par les croisés à Chypre, en 1210. Remanié au XV^e siècle, il s’agit d’un puissant donjon carré de trois étages, de 21 m de hauteur, de 16 m de côté et aux murs de 2,5 m d’épaisseur. Par des salles voûtées et un escalier à vis, on accède à la terrasse crénelée pour des vues à 360 degrés du Troodos à la péninsule d’Akrotiri. La tour est cernée d’une enceinte de 40 sur 30 m abritant les vestiges d’un puits, d’écuries, d’une raffinerie de canne à sucre, d’un moulin et d’un aqueduc. Le « château de Colosse » fut érigé par les Hospitaliers, les moines-chevaliers de l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem, sur le fief de Kolossi qui leur fut offert par Hugues I^er de Lusignan, troisième roi de Chypre. Il devint alors le siège d’une « commanderie hospitalière », vaste propriété agricole de quarante villages. Venus de France et de toute la Chrétienté, les moines-chevaliers introduisirent la culture de la canne à sucre et intensifièrent la viticulture pour produire notamment le commandaria, célèbre vin doux chypriote. Objet de convoitises, le château passa en 1306 sous contrôle de l’ordre des Templiers. Mais après la dissolution de celui-ci, il revint aux Hospitaliers en 1313.

Blasons français, frontière anglaise. Endommagé par les Mamelouks et un tremblement de terre, le château fut reconstruit en 1454 par Louis de Magnac, grand commandeur des Hospitaliers à Chypre. Celui-ci fit sculpter son blason dans le marbre. On peut le voir avec trois autres au-dessus de la porte principale, dans un caisson cruciforme à moulure. L’écu central porte les armes des Lusignan. Il est entouré par les armoiries de deux supérieurs hiérarchiques de Louis de Magnac, ceux des grands maîtres Jacques de Milly, à gauche, et Jean de Lastic, à droite. Humblement, Louis de Magnac a fait figurer son écu à fleurs de lys au registre inférieur. Mais aucun autre blason n’est visible dans le reste du complexe. Le château passa pourtant entre les mains de deux autres grands commandeurs, un Anglais, puis un Italien, avant d’être récupéré en 1488 par la famille vénitienne de la dernière reine de Chypre, Catherine Cornaro. Les bâtiments annexes furent endommagés par deux séismes en 1567 et 1568, et le château fut progressivement abandonné après la conquête ottomane de 1571. Depuis l’indépendance de Chypre, il a retrouvé une sorte d’utilité : c’est lui qui garde – symboliquement – la frontière avec le territoire britannique d’Akrotiri qui passe juste à côté, à travers le parking des visiteurs.