Découvrez MADRID : Musiques et Scènes (Danse / Théâtre)

Pour embrasser pleinement la production artistique espagnole actuelle, il est impératif de connaître la Movida. Mouvement qui émerge à Madrid au début des années 1980, il est à l’origine clandestin avant de prendre de l’envergure au fur et à mesure de l’avènement du système démocratique en Espagne. Les artistes, journalistes et intellectuels qui forment ce mouvement, voient dans la liberté post-franquisme l’opportunité de produire des œuvres avant-gardistes explorant des sujets fortement prohibés pendant la dictature. La rapidité des transformations, corrélée à l’énergie et la furie qui se libèrent après 40 ans de dictature, bouleverse soudainement la société espagnole touchant tous les domaines de la production artistique et intellectuelle. Aujourd’hui encore l’influence de la Movida est palpable dans les scènes rock et jazz espagnoles, où la création se fait un devoir ne pas avoir froid aux yeux.

La musique traditionnelle

Bien que Madrid et la Castille ne soient pas dépourvues de folklores, il est toujours bon de connaître les différentes musiques traditionnelles du pays. D’autant qu’à Madrid, il y a peu de purs Madrilènes et les Espagnols sont dans l’ensemble très attachés aux traditions de leur région d’origine. Parmi les plus célèbres, le flamenco est sans aucun doute la carte postale du pays. Le genre naît au XVIIIe siècle en Andalousie. Originellement joué a cappella, il s’étoffe avec le temps de claquements de mains (les « palmas ») de castagnettes et de guitare. Bien qu’elle soit appelée communément « flamenco » comme le chant et la danse, la musique qui les accompagne se nomme el toque. Inscrit par l’UNESCO au Patrimoine culturel immatériel de l’humanité en 2010, le flamenco est un trésor chéri des Espagnols et maintenu à un degré d’excellence par des maîtres tels que Paco de Lucia, Diego el Cigala ou Tomatito. Avant la naissance du flamenco, le fandango était la musique (et la danse) espagnole la plus populaire. Voluptueuse et énergique, elle est également andalouse et se reconnaît à son rythme continu de castagnettes et à son tempo accélérant constamment. Typique de la Catalogne, la cobla est l’ensemble instrumental accompagnant les sardanes (ou « sardanas ») – ces danses en cercle, liées par les mains, les bras en l’air – et jouant des airs caractéristiques de la région. En Galice, la très mélancolique muñeira révèle les influences celtes de la région et permet d’entendre la gaita, la cornemuse espagnole. Et enfin, danse bien connue en France, le paso doble est à l’origine une musique martiale espagnole jouée dans les corridas.

Pendant la dictature franquiste, les danses et musiques folkloriques ont été interdites, le régime souhaitant gommer les spécificités régionales et uniformiser le pays. À sa mort en 1975, le pays connut une vague de renaissance de la musique folklorique. Aujourd’hui, on en voit très régulièrement, surtout durant les célébrations religieuses comme les fêtes des Trois Saints en août ou la San Isidro, le saint patron de Madrid, en mai.

La musique classique

Après la Reconquista, au XVIe siècle, les échanges de l’Espagne avec la Flandre et la France vont favoriser l’éclosion d’un style de chant polyphonique. À l’époque, trois compositeurs vont, les premiers, placer l’Espagne sur la cartographie musicale mondiale : Mateo Flecha, Tomás Luis de Victoria et Francisco Guerrero. Le premier est surtout connu pour ses ensaladas (littéralement « salades »), des œuvres pour quatre ou cinq voix écrites afin de distraire la cour tandis que le second, prêtre catholique, est le plus célèbre polyphoniste de la Renaissance espagnole. Quant au dernier, Francisco Guerrero, il est l’un des principaux compositeurs espagnols de la période et a consacré son œuvre à la musique sacrée. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, outre l’influence italienne marquée par la présence de Domenico Scarlatti, Luigi Boccherini et Gaetano Brunetti, résidents de la cour de Madrid, la musique espagnole est caractérisée par la naissance et l’épanouissement des zarzuelas. Semblable à l’opéra-comique français, ce théâtre lyrique espagnol est à l’origine destiné à divertir la cour royale. Au cours du XVIIIe siècle, la zarzuela se répand dans les Provinces, s’enrichit des traditions locales et commence à intégrer des sujets issus du quotidien à son répertoire. L’Espagne du XIXe siècle affirme son identité à travers cette opérette qui évolue grâce, entre autres, à Francisco Barbieri, mélangeant un style mi-italianisant, mi-français et des accents populaires typiquement madrilènes. Au cours de la seconde moitié du XIXe siècle, ce genre connaît ses lettres de noblesse avec les chefs-d’œuvre de Bretón et de Chapí. Le musicologue et compositeur Felipe Pedrell est une autre figure importante du genre. Aujourd’hui, la zarzuela se pratique un peu moins, mais on en voit toujours beaucoup, notamment au Café de la Ópera, qui en accueille presque tous les soirs dans sa partie restaurant appelée La Cena encantada. Sur scène, le grand Teatro Calderón en programme largement et le bien nommé Théâtre de la Zarzuela lui est consacré.

Le renouveau de la musique espagnole à la fin du XIXe va passer par le mariage de la musique savante au folklore national incarné par le travail de trois hommes : Isaac Albeniz, Enrique Granados et surtout Manuel de Falla. Inscrit au Panthéon de la musique espagnole, ce dernier est le grand pianiste et compositeur du pays. Un temps installé à Paris, il fréquente alors les Debussy, Ravel et Stravinsky et s’inspire de leur modernisme pour établir une nouvelle grammaire purement ibérique et néoclassique. Un génie de la musique espagnole dont il est conseillé d’écouter Le Tricorne (musique pour ballet), les magnifiques Nuits dans les jardins d’Espagne ou son opéra La Vie Brève pour apprécier amplement son étoffe. Amoureux éperdu de son pays, l’issue de la Guerre civile le pousse à trouver refuge en Argentine où il passera ses dernières années. Durant la période franquiste, dès les années 1940, l’Orchestre national d’Espagne est créé – il est aujourd’hui l’ensemble le plus prestigieux du pays – et quelques figures comme Joaquín Rodrigo (le grand compositeur classique de la période), l’immense violoncelliste Pablo Casals (1876-1973) et la fantastique pianiste Alicia de Larrocha (1923-2009) émergent. Puis, dans les années 1960, la création va être rythmée par l’avant-garde. Cristóbal Halffter et Luis de Pablo, figures de proue du mouvement Generación del 51 sortent l’Espagne de l’isolement causé par la dictature en y introduisant de nouvelles techniques musicales comme le dodécaphonisme et le sérialisme. Depuis, la fin du XXe et le début de notre siècle ont vu une succession d’interprètes talentueux : les ténors Placido Domingo et José Carreras, le violiste et chef d’orchestre Jordi Savall, son ex-épouse la soprano catalane Montserrat Figueras. Citons aussi les très remarqués chefs d’orchestre Pablo Heras Casado (directeur du Festival de Grenade), Josep Pons (l'Orquesta Sinfónica del Gran Teatro del Liceo) et Gustavo Gimeno (Luxembourg Philharmonic Orchestra) ainsi que les pianistes solistes Javier Perianes et Luis Fernando Pérez. Disparu en 2018, Jesús López Cobos a longtemps été le visage espagnol de la direction d’orchestre dans le monde. Et si on se souvient surtout de lui pour son travail à l’Orchestre symphonique de Londres, il dirigea aussi l’Orchestre national d’Espagne et fut également directeur musical du Teatro Real, les deux grandes institutions du classique à Madrid. Le premier est très apprécié, d’excellente réputation, et peut se voir sur la scène de l’Auditorio Nacional de Música. Le second est en fait l’Opéra de Madrid qui jouit d’une programmation superbe.

Jazz

Moins mis en avant que d’autres scènes européennes, le jazz espagnol compte pourtant des rangs bien fournis marchant dans les pas de Pedro Iturralde, le grand réformateur. Célèbre pour avoir combiné flamenco et jazz, ce grand saxophoniste enregistra quelques albums pour le label Blue Note, une consécration. Il était, avec le pianiste Tete Montoliu, le duo star du jazz espagnol. Figure mondiale du hard-bop, les grands s’arrachaient ses doigts magiques et il collabora avec la crème de son temps. Citons aussi le pianiste Chano Domínguez qui sous la dictature franquiste officiait dans des groupes de rock progressif, mais explose dans les années 1990 en tant que pianiste de jazz. Aujourd’hui, la scène espagnole peut compter sur des talents tels que la saxophoniste et trompettiste Andrea Motis, le saxophoniste vétéran Gorka Benítez, Ignasi Terraza et Marco Mezquida, deux stars du piano espagnol ou la chanteuse Carme Canela i Mir. Une ribambelle de beaux noms à voir sur les scènes de la ville comme le Cafe Central, un des favoris des madrilènes depuis le début des années 1980, Clamores, autre salle mythique de la capitale où sont venus les plus grands du genre, et ce, depuis plus de 30 ans.

Rock

La mort du général Franco en 1975 déclenche quelques années plus tard la Movida, ce grand mouvement artistique des années 1980 où tout semble permis. Traversant l’ensemble des arts et prônant un mode de vie libre et intense, la Movida va trouver une incarnation musicale taillée sur mesure : le rock. D’abord underground, la scène se trouve vite des leaders comme le groupe Leño, devenu emblématique. Madrid, capitale de la Movida, voit une constellation de groupes bientôt cultes se créer comme Radio Futura (souvent décrit comme le groupe le plus important de la pop culture espagnole), la synthpop d’Aviador Dro ou encore Nacha Pop. Depuis, le rock de la Movida a fait de nombreux enfants, l’Espagne demeurant actuellement le pays européen à la scène rock la plus effervescente. Connus et appréciés hors des frontières espagnoles : le garage rock bouillant des filles de Hinds ainsi que Los Nastys ou The Parrots (des Madrilènes). Etant donnée la tradition du pays dans le genre, la capitale compte bon nombre de scènes pour écouter du rock en live. Parmi elles, La Vaca Austera est particulièrement dans son jus, Taboó (très new wave) et La Vía Láctea sont deux salles mythiques de Malasaña, le Contraclub, rock, mais pas uniquement et le Honky Tonk, une salle mythique de la Movida toujours en place.

La danse

Comme presque partout ailleurs, en Espagne, à chaque musique traditionnelle est attachée une danse caractéristique. L’exemple le plus connu est bien sûr le flamenco. Dans cette danse andalouse, les talons claquent et les robes virevoltent au sein d’un jeu de séduction intense et gracieux. Le flamenco est peut-être la danse espagnole la plus connue, mais elle n’est pas pour autant le plus répandue ou pratiquée dans le pays. A vrai dire, le flamenco est plutôt dansé sous sa forme artistique, plus pour le spectacle que par tradition. A Madrid, on peut d’ailleurs en voir quasi quotidiennement au Centro Cultural Flamenco de Madrid, au Corral de La Morería (considéré comme « la cathédrale de l’art du flamenco » en Espagne). Sinon, les meilleurs danseurs de flamenco, comme Sara Baras ou Rocio Molina (deux figures incontournables) montent régulièrement sur les planches des théâtres de Madrid tels que le Teatro Calderón. Petite sœur du flamenco, la sévillane vient de la même souche folklorique et lui est souvent associée. Une sévillane se divise en 4 moments : la rencontre, la séduction, la dispute et la réconciliation. Lui aussi andalou, le fandango est antérieur au flamenco et se danse en couple. Parmi les plus anciennes danses d’Espagne, on trouve le Boléro, genre vif et enflammé. Citons aussi la jota, danse aragonaise très physique, tout en sautillés et bien sûr la danse typique de Madrid, le chotis, mélange de machisme et de séduction sur des pas très simples. On la danse plus particulièrement lors de la San Isidro.

Organisez votre voyage avec nos partenaires à MADRID
Transports
Hébergements & séjours
Services / Sur place
Envoyer une réponse