Découvrez BRUXELLES - BRUSSEL : L’Art nouveau à Bruxelles

À la fin du XIXe siècle, l’industrialisation change complètement la face du monde. Devant le progrès galopant, les revendications ouvrières pour une société plus juste se font jour. Dans le même temps survient un besoin pour les artistes d’inventer de nouvelles formes. C’est alors que, « tel un puissant élan de vie entraînant dans son sillage la totalité des formes de création artistique et artisanale », surgit l’Art nouveau. Transparence et légèreté sont les maîtres mots de ce style qui emprunte à la nature ses formes aussi belles que mystérieuses que l’on retrouve dans les matériaux les plus novateurs, tels le fer ou le verre, ciselés comme des trésors d’orfèvrerie. Bruxelles est l’un des terreaux les plus fertiles de ce nouveau style et Victor Horta (1861-1947) est celui que l’on considère comme le père fondateur de l’Art nouveau. Un architecte mêlant avec génie fonctionnalisme et ornementation dans une œuvre étonnante et émouvante…tel ce nouveau style naissant qui lui va si bien.

Nouvelles inspirations pour un nouvel art

Bouillonnante, l’Europe du début du XXe siècle jouit d’une industrialisation fulgurante simultanément à d’importantes réformes culturelles et sociales. Les artistes émergeants à cette époque souhaitent, de même, sortir des modèles rigides et sclérosés et en arrivent à imaginer un nouvel art… un Art nouveau. Novateur certes, mais nourri de nombreuses influences, parmi lesquelles trois se détachent : l’œuvre de Viollet-le-Duc, l’art japonais et le mouvement Arts and Crafts. Courants qui partagent des caractéristiques que l’Art nouveau va largement reprendre : le respect du matériau, la franchise et l’honnêteté dans la construction, l’absence de distinction entre arts mineurs et arts majeurs et la nécessité de créer un tout organique. À l’art japonais, il emprunte également une relation à la nature dont l’art doit exprimer les plus subtils changements.

Mais l’Art nouveau n’en exclut pas pour autant les apports de la modernité. Là où certains détracteurs n’ont vu dans ce style qu’une surcharge ornementale sans but, se cache en réalité un art hybride mêlant tout à la fois splendeur de l’ornementation et fonctionnalisme dans des œuvres d’art totales d’une grande modernité où, de la structure même de l’édifice aux moindres détails décoratifs et utilitaires, tout est pensé pour former un tout organique et fluide. L’Art nouveau se fait ainsi précurseur en cherchant à associer forme, fonction et matériau, qui tous doivent concourir à l’effet esthétique.

Le matériau est d’ailleurs le point central de ces nouvelles formes architecturales. Les formes expressives, riches et souples, allient intimité et puissance dans le traitement et le modelage des surfaces et textures. Chaque matériau est ainsi montré dans sa beauté brute, en particulier le fer, grande nouveauté de l’époque, que l’on voit dans les structures porteuses apparentes soutenant de superbes verrières, toutes dialoguant avec le bois, le marbre ou la brique, autant de matériaux traditionnels magnifiquement travaillés et ciselés. L’iridescence des mondes végétal et animal inspire aux artistes d’étonnants jeux de couleurs où vert émeraude, ocre doré et bleu profond éclairent l’espace au gré des mosaïques et verrières qu’ils dessinent. Courbes et contre-courbes matérialisent les mouvements de l’âme de ces artistes, également profondément empreints de symbolisme. Voilà pourquoi l’Art nouveau est un style très personnel.

Bruxelles fut un terreau particulièrement fertile pour ce renouveau artistique. La capitale est à cette époque un grand centre financier et une ville progressiste. Ainsi, d’un côté les grands magnats du nouveau monde vont se faire les généreux mécènes de l’Art nouveau, commandant de nombreux hôtels particuliers où l’ornementation se fait autoglorificatrice, de l’autre les architectes vont réaliser des bâtiments utilitaires destinés au grand public (magasins, Maisons du Peuple…). Parmi les grandes figures de l’Art nouveau dont l’œuvre est représentative à Bruxelles, citons Victor Horta, Paul Hankar et Henry Van de Velde, dans une moindre mesure.

Horta impose son style

Élevé dans le culte du travail et des choses belles et bien faites, Victor Horta est fils de cordonnier. Son oncle entrepreneur en bâtiments l'emmène sur ses chantiers, et c'est là que le jeune homme se prend de passion pour l'architecture. Après avoir durement bataillé avec ses parents qui le voyaient plutôt avocat ou médecin, Horta devient élève de l'Académie des beaux-arts. Après un stage chez l'architecte-décorateur parisien Dubuysson, et une étude approfondie des grands bâtiments classiques, Horta excelle à l'Académie des beaux-arts de Bruxelles. Il attire alors l'attention de l'architecte Alphonse Balat, à qui l'on doit les superbes serres royales de Laeken. Les possibilités architectoniques du fer ainsi révélées vont profondément marquer Horta.

Celui-ci entame alors une période alternant concours et petites constructions, avant d'entrer à la loge maçonnique « les Amis Philanthropes ». Là il rencontre de riches industriels qui vont lui commander des hôtels particuliers. L'Hôtel Autrique tend encore vers un certain classicisme, tandis que l'Hôtel Tassel est considéré comme le tout premier édifice Art nouveau au monde. Le bâtiment est étroit. Mais pour contrer cette exiguïté, Horta utilise comme motif central une superbe fenêtre en arc de cercle flanquée de deux étroites surfaces en pierres ocrées et bleues légèrement arquées vers le centre. Structures, colonnes et poutrelles sont apparentes, libérant ainsi la lumière et conférant aux espaces légèreté et transparence. Horta utilise également la peinture pour prolonger les mouvements d'ondulation des autres matériaux créant une grande harmonie organique. Il innove aussi avec son superbe escalier hélicoïdal entièrement voué à l'ornementation et la verrière surplombant l'espace de circulation entre les différentes pièces de la maison. L'Hôtel Tassel est le manifeste du style Horta. Lignes inspirées des tiges et pieds de plantes (ce qui valut au style Horta d'être qualifié de style « coup de fouet »), travail du fer en volutes et arabesques, verrières lumineuses, souci du détail (Horta réalise absolument tout, du tapis au radiateur en passant par les ampoules) se retrouvent dans les plus belles réalisations du maître : l'Hôtel Solvay, l'Hôtel Van Eetvelde et bien sûr sa maison-atelier. Horta réalise également des édifices utilitaires où le fonctionnalisme l'emporte sur l'ornementation comme le montrent les images de la Maison du Peuple qui fut malheureusement détruite en 1965. Une architecture qui annonce les évolutions à venir. En effet, aussi vite qu'il est venu, l'Art nouveau s'en est allé, laissant la place à plus de sobriété et de géométrie. Horta entame alors une carrière de professeur (notamment aux USA), avant de reprendre le crayon pour imaginer de grands projets, cette fois-ci résolument classiques, comme en témoignent l'Hôpital Brugmann, le Palais des Beaux-Arts (BOZAR) et la Gare centrale de Bruxelles. Malgré ces réussites, Horta finit sa carrière critiqué… puis oublié. Avant de renaître au XXIe siècle qui voit ses hôtels particuliers bruxellois classés à l'Unesco, tandis que le Brussels Art nouveau & Art déco Festival permet d'en découvrir les superbes intérieurs. 2023 célébrait les 130 ans de l'Hôtel Tassel, et donc l'Art nouveau avec l'ouverture au public de joyaux tels la Maison Hannon (de Jules Brunfaut) et l'Hôtel van Eetvelde. Un patrimoine unique, témoin d'une époque de bouleversements étonnants.

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