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LES LIMITANEI

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Ghirza, Libye
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Avec les esclaves qui leur étaient offerts, ces fermiers-militaires du limès, appelés des limitanei, cultivaient le palmier-dattier, les champs d’oliviers, les figuiers, la vigne, l’orge, le blé et des légumineuses. Comme les très belles frises des mausolées nous le racontent, ils labouraient leurs terres avec des dromadaires, des chevaux ou des bœufs, possédaient des troupeaux et chassaient les lièvres, les autruches, les gazelles, les antilopes et les fauves comme les lions et les léopards revendus ensuite pour les jeux des arènes dans les villes romaines. Quelques scènes des fresques des mausolées de Ghirza racontent aussi les activités guerrières des soldats-fermiers.

Bien souvent, ces fermiers n’étaient pas des Romains mais des autochtones enrôlés par les Romains, comme ce fut le cas des Berbères romanisés de Ghirza. Ces populations sédentarisées vivaient donc à la confluence de deux cultures, ce qui apparaît de façon éclatante dans les fresques décoratives des mausolées de Ghirza qui étaient financés par les enfants à la mort de leurs parents. Sur certains mausolées, une inscription latine donnait d’ailleurs leurs noms, qui sont tous d’origine libyenne et non romaine, sauf le nom de famille Marchius. Si ces mausolées de calcaire empruntent aux canons architecturaux gréco-romains, leurs motifs décoratifs témoignent en revanche d’une inspiration fortement locale dans le dessin figuratif naïf comme dans l’inspiration, utilisant en outre une symbolique romaine mais aussi carthaginoise.

Les trois mausolées-temples de la nécropole nord (au sud des fermes fortifiées), dont un particulièrement grand, sont élevés sur des podiums aux colonnes avec chapiteaux corinthiens ou ioniques entourant une cella (chambre) murée. C’est sous les podiums que se trouvent les chambres funéraires. Dans la nécropole sud (à 1,5 km au sud de l’autre côté du wadi) s’élevait l’un des plus hauts mausolées à obélisque de Tripolitaine et se trouvait un mausolée à deux colonnes par côtés qui a été transporté au musée de Tripoli.

La faune et la flore des fresques des mausolées revêtent sur ces monuments funéraires romanisants une signification symbolique non exempte de références phénico-puniques. Le palmier par exemple est lié au culte du dieu Baal Hammon, dieu de la Fertilité et des Récoltes et principale divinité carthaginoise. Le lion est quant à lui un animal sacré dans le culte de la déesse Tanit et protège les sépultures. La déesse de la Fertilité Tanit, parèdre de Baal Hammon, fut rattachée à la déesse romaine Junon. Quant à la vigne, elle est majeure dans le culte de Dionysos-Bacchus qui s’est greffé sur le culte du dieu punique Shadrapa, dieu du Vin, mais aussi dieu Guérisseur et de la Fécondité.

Le premier Européen qui vit les mausolées de Ghirza, le lieutenant anglais W.H. Smyth, en 1817, était loin d’avoir des soucis archéologiques : il venait pour y emporter d’éventuelles statues. La description qu’il fit alors ne tarit pas de critiques sur le style libyco-romain des mausolées, qu’il trouva fort laids !

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