CARNAVAL DE JACMEL

Les festivités carnavalesques haïtiennes se déroulent du vendredi au mardi des Cendres, mais, à Jacmel, elles se doublent d’un carnaval national qui a lieu le week-end précédent. A cette semaine de bamboche, il convient d’ajouter tous les dimanches compris entre le 6 janvier (les Rois) et le début des réjouissances officielles, les sorties dominicales donnant l’occasion aux groupes musicaux de faire connaître leur nouveau merengue.

Le carnaval jacmélien vaut surtout par l’esprit bon enfant qui y règne. L’ambiance musicale est assurée par deux groupes, rivaux comme il se doit : les Invincibles, soutenus par les habitants du quartier bourgeois du Bel-Air, et les Jouvenceaux, un jazz du bas de la ville. Les orchestres, juchés sur des chars, entraînent derrière eux des centaines de fanatiques qui se démènent dans une joyeuse promiscuité.

D’autres chars sont aussi de la fête : traditionnel, comme celui de la mairie transportant la reine, ou conjoncturel, comme celui de l’ONU en février 1998.

La couleur, qui fait tant défaut au carnaval de la capitale, est ici omniprésente. Les masques de papier mâché n’ont rien à voir avec les pauvres petits masques de plastique de nos mardis gras européens. Certains déguisements sont, en fait, véritablement des costumes d’acteur. Ceux qui les portent ne se contentent pas d’amuser la galerie par leurs gesticulations, ils jouent le rôle de personnages bien connus du public local et se livrent dans la rue à de mini-représentations.

Parmi les plus fameux, mentionnons le Charles Oscar, un commandant de la place qui tyrannisa la population au début du siècle ; le Juif errant, avec ses pantalons bouffants, sa longue barbe et toujours flanqué d’un militaire ; les lanceurs de cordes, portant cagoule et le corps enduit de suif ; le crapaud, exécutant des acrobaties, en équilibre sur deux morceaux de bois tenus par ses compères.

Il en existe bien d’autres encore, de nouveaux apparaissant chaque année, sortis de l’imagination des différentes bandes ou de celle des artisans qui confectionnent les masques.

Il y a peu, le défilé déroulait son cortège dans tous les quartiers et chacun d’eux avait droit à sa petite animation. Depuis quelques années, on a tout concentré sur l’avenue Baranquilla, qui se retrouve bordée de tribunes – stands – pour l’occasion. Le reste de la ville se trouve du coup comme hors du carnaval et l’impression de liesse généralisée s’est atténuée.

L'édition 2018 avait pour thème "K-naval chanjman : jakmèl tout moun ladan ! " (le carnaval du changement : tout le monde est là).