LES MOSQUEES ET LES BIENS  WAQF  : JARDINS ET HAMMAMS

La ville ancienne compte plus de cinquante mosquées, dont cinq sont coiffées de dômes ou de coupoles. Les mosquées les plus anciennes ont une toiture en terrasse, et ce n’est qu’avec la première occupation ottomane que fut introduit le nouveau style architectural, avec ses motifs et ses coupoles.

La plus représentative des mosquées yéménites est sans doute la Grande Mosquée de Sanaa. Elle fut édifiée du vivant de Mohammed, et sur ses instructions précises. Certains de ses éléments, comme les colonnes à décorations et chapiteaux en bois, provenaient de la cathédrale détruite quelques années auparavant et l’on aperçoit encore des croix sur certains chapiteaux, d’autres plus anciens se trouvent dans la galerie sud et sont des vestiges des temples sud-arabiques. Elle fut agrandie au VIIIe siècle, et un plafond de bois à caissons fut ajouté au IXe siècle, dont la restauration en cours laisse apparaître de splendides couleurs, dont certaines seraient d’inspiration sassanide.

Au XIe siècle, elle fut restaurée par la reine Aroua, qui ajouta l’aile est, avec son plafond peint et sculpté. Les deux minarets furent rénovés à la fin du XIe siècle et la cour pavée au XVIIe siècle. L’imam Yéhia, en 1936, fit construire l’aile nord et ajouta, au sud, une bibliothèque au-dessus du niveau du sol. Les sondages du sol montrent d’ailleurs que le premier niveau du sol doit être situé à 80 cm au-dessous de l’actuel niveau. Lors de réparations, en 1973, les ouvriers eurent la surprise de découvrir, dissimulés, dans des niches antérieures cachées par des parois de stuc plus récentes, de très anciens manuscrits coraniques et des chroniques historiques. On regrette que sa visite soit problématique pour les non-musulmans, alors que d’autres pays comme l’Egypte permettent sans problème à tout un chacun de déambuler dans les mosquées, en se montrant discret et respectueux, bien évidemment.

La mosquée Al Talha, située à proximité de la Grande Mosquée, est remarquable par son minaret assis sur une puissante base de pierre.

Les mosquées Jana et Madhab, près du souk de l’argenterie, se partagent un seul et même minaret à six pans et dénué de frises de briques.

La mosquée Al Taous, dans le quartier Talha, est l’une des plus anciennes de Sanaa. Elle a reçu son nom d’un disciple yéménite de Mohammed, Abd Al Rahman Al Taous, mort en 724 à La Mecque. Elle est éclairée par des fenêtres d’albâtre. Un « sabil », citerne d’eau publique, fut placé contre le mur extérieur de la mosquée. Les mosquées, en règle générale, ne peuvent être visitées par les non-musulmans.

Il est une sorte de biens, que l’on nomme « waqf », dont les mosquées ont la gérance : il s’agit des dons que les croyants ont faits à Dieu et qui, dès lors, sont inaliénables.

Parmi ces biens de natures fort diverses, il y a des jardins potagers et des vergers, dont les produits sont vendus au souk ou dans le voisinage. La ville ancienne possède encore quarante-neuf jardins différenciés à l’heure actuelle. Ils ne sont plus laissés à l’abandon : on les a protégés en élevant des murs tout autour. Ces jardins sont arrosés par des puits appelés « mirnas », dont l’eau est extraite par l’action d’un dromadaire harnaché. C’est l’objet d’une déambulation dans la vieille ville que de découvrir tous ses jardins.

Parmi les plus faciles d’accès, on notera la jardin Borom, près de la muraille sud et surmontant la Saela, Al Abhar à l’ouest de Bal Al-Yemen, Al Taqoua de l’autre côté de la Saela, sur le chemin vers la place Tahrir.

Les « sabils » sont des réservoirs d’eau destinés à étancher la soif des passants. Ils se trouvent au centre de petites constructions surmontée d’un dôme, que des gens pieux faisaient édifier pour accomplir une œuvre charitable.

Les « hammams », ou bains publics, sont souvent rattachés aux mosquées en tant que biens « waqf ». Ils sont composés de trois à six salles couvertes de dômes. La salle du bassin principal, qui comporte quelquefois une fontaine, se trouve au niveau du sol, tandis que la salle chaude est en contrebas, partiellement enterrée, et donne accès à la salle très chaude, sous terre. La chaufferie est placée tout au fond, en retrait, tandis que les canalisations d’eau chaude et froide passent dans les murs de toutes les salles. Les chaudières fonctionnent au mazout, mais il n’est pas rare que l’on y brûle des pneus usés ou autres déchets. Pour l’accès aux hammams, une partie de la semaine est réservée aux femmes, et l’autre aux hommes. Le hammam Maydan, construit en 1597 par les Ottomans en même temps que la mosquée Al Bakiriyyah, est l’un des plus vastes de la ville. Sa restauration est prévue, ainsi que le remplacement du mazout de chauffage par le gaz.