VILLAGE MINIER DE BUSTIELLO

Faire de ce lieu un phare moral où vivrait une élite minière servant de contre-exemple aux comportements subversifs et dangereux des mineurs de la région, c'était l'objectif rêvé et réalisé par le marquis de Comillas, président de la Société Houillère Espagnole. Construit entre 1890 et 1925 sur des terrains achetés par le marquis, ce village minier mêle divers éléments architecturaux : cités ouvrières britanniques, cités-jardins à la française, touches de modernisme catalan et éléments traditionnels asturiens, mais il donne surtout à voir et à comprendre la mise en place et le fonctionnement d'un projet illustrant le paternalisme industriel chrétien, avec son ordre et ses hiérarchies. Maisons uniformes, église néo-romanes, ancien casino (fonctionnant comme une anti-taverne), résidences des ingénieurs : tout est conçu pour trancher avec le chaos des villages miniers proches. Les terrains seront aussi aménagés avec de petits monticules : l'église et les édifices publics au niveau le plus haut, les maisons d'ingénieurs au deuxième niveau et celles des travailleurs au troisième niveau, le plus bas. Logées dans des pavillons mitoyens abritant deux familles et dotés de jardins indépendants, ces quarante familles étaient sélectionnées parmi des milliers d'autres (le plus souvent des contremaîtres ou des surveillants). Ils payaient un loyer et les produits de l'économat, et la culture de leur jardin les dispensait de sortir du village, sortie qui n'était possible que par un pont, surveillé systématiquement par un gardien. Vivant dans des conditions plutôt confortables, ils étaient par ailleurs bien traités, en application des principes chrétiens du marquis, mais ils ne pouvaient ni boire d'alcool ni lire un autre journal que celui publié par le marquis. Dans les années 1970, ces maisons ont été vendues à leurs locataires. Aujourd'hui, l'ancienne école abrite une auberge de jeunesse et la maison occupée par l'ingénieur en chef est devenue un centre d'interprétation, avec une vue panoramique et vigilante sur les 40 maisons des travailleurs.

La visite du village peut continuer dans la Vallée de Turón abritant toute une archéologie industrielle (ponts, tunnels, tourelles) illustrant aussi l'histoire minière de la région et qui fait partie du paysage protégé des bassins miniers (cuencas mineras), avec des passages dans les lieux les plus emblématiques comme les puits Pozu Espinos, Pozu Fortuna San José ou Santa Bárbara. Ce dernier est en cours de restauration.