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Produits caractéristiques et terroirs

La cuisine des Baléares fait appel aussi bien aux produits du terroir qu’à ceux de la mer. S'il existe des spécialités locales typiques sur chaque île, on retrouve certains produits dans tout l'archipel. C'est le cas de la sobrassada, une saucisse de porc emblématique des Baléares. De couleur rouge, elle est parfumée avec du paprika – doux ou fort – et des herbes aromatiques (thym, origan, etc.). Autre embotit – terme catalan pour désigner la charcuterie –, le camot ou cuixot (également appelé camaiot, camallot ou varia negra dans le reste des Baléares) est fait de viande de porc hachée plus ou moins grossièrement avec du sang, des épices (poivre noir, paprika, anis) et du sel. Cette farce est placée à l'intérieur de la peau de la cuisse du porc, puis cousue, cuite et enfin séchée. Les botifarres, comptent différents types de saucisses typiques du monde catalan. La botifarra blanca de Menorca se compose d'un mélange de viande, d'abats et de gras de porc, finement épicé. Le carnixulla est un saucisson typique de Minorque.

Ces saucisses étaient souvent préparées en hiver lors de la mantaça, un événement majeur dans la vie des insulaires où était abattu le cochon. Tout l'animal était utilisé et ce rituel réunissait traditionnellement les familles et les voisins pour préparer les différentes découpes de porc. Certains abats comme le foie, très fragile, étaient cuisinés immédiatement avec des oignons et quelques légumes d'hiver. On retrouve cette charcuterie régulièrement présentée sous forme de fiambres – comprendre « assiette anglaise » – avec du fromage, par exemple un queso Mahón ou Maó en catalan, nommé en l'honneur de la ville du même nom. L’étiquette AOP Queso Mahón-Menorca désigne une variété de fromages, dont certains ont une fine croûte orangée – colorée au paprika – quand ils sont jeunes. Plus âgés, ils deviennent bruns et possèdent un goût naturellement plus puissant. Minorque est connue pour sa production de lait et on retrouve des écrits vieux de plus de 1 500 ans témoignant de la fabrication de fromage dans la région.

Riche en légumes de toutes sortes, la cuisine de l'île fait un usage généreux de tomates, aubergines, poivrons, pommes de terre, artichauts, courges et courgettes, sans oublier divers légumes-feuilles et autres légumineuses comme les lentilles, fèves, pois chiches et haricots. Sans surprise, l'olivier est un arbre providentiel – comme dans le reste de la Méditerranée – dont on utilise largement l'huile. Cette huile est d’ailleurs à la base d'une des préparations les plus fameuses de Minorque. En effet, même si sa paternité est âprement disputée, la mayonnaise serait originaire de l'île, et plus spécifiquement de la ville de Maó, dont elle aurait au passage emprunté le nom. C'est sous occupation française, entre 1756 et 1763, que la mayonnaise aurait été emportée en France. Même si les histoires divergent, on notera toutefois l'importance de cette sauce à base d'huile et de jaune d’œuf dans la cuisine de la région.

Les classiques de la cuisine minorquine

Produit phare de la cuisine locale, la sobrassada s'associe particulièrement bien à la douceur de l'ensaïmada, mais peut aussi accompagner des escargots mijotés pour composer la fameuse tapas cargols amb sobrassada. Autre saucisse de renom, la carn i xua, à base de porc maigre et de lard, est considérée comme la plus ancienne saucisse fabriquée à Minorque. Si le porc est largement consommé dans l'île (saindoux autant que charcuterie), les viandes bovines ne sont pas pour autant délaissées. Deux races, frisonne et autochtone, sont élevées sur les terres minorquines, offrant de beaux morceaux de viande mais aussi des produits laitiers typiques de l'île. Enfin, l'agneau de race minorquine, le lapin et la bécasse sont très appréciés. Le cega amb coc, un sandwich à la bécasse trempé dans du lait et cuit au four, est par exemple un classique de Minorque. Influence anglaise oblige, un autre plat commun sur l'île est le macarrons amb grevi, une recette de pâtes – généralement des penne ou des macaronis – cuites dans un « gravy », une sauce épaisse de viande venant de l'Angleterre. Le perol menorquí est un gratin qui se compose de couches de lamelles de pommes de terre et de tomates, recouvertes de tranches de pain ou de chapelure, le tout parfumé d'ail et de persil. Malgré son nom, l'arròs de la terra ne contient pas de riz, mais du blé cassé, garni de saucisses, côte de porc, tomates et oignons avec une pointe de safran.

Côté mer, de nombreux plats sont cuits à partir de mollusques comme les coques (escopinyes), de crustacés comme la fameuse langouste rouge, ou d'une grande variété de poissons blancs, gras ou de roche. Pensez à goûter au plat le plus typique de l'île, la caldereta de llagosta, sorte de bouillabaisse mitonnée dans un petit chaudron à base de langouste. Notons également la borrida de ratjada, de la raie pochée accompagnée d'une sofregit (sauce tomate au poivron et à l'ail) et agrémentée de picada, une préparation d'amandes pilées avec du persil et du piment. Le guisat de fesols amb sèpia est un ragoût de seiche aux petits pois. Aussi, la morue en sauce, ou burrida, fait bien des heureux.

On retrouve également à Minorque des viennoiseries salées, dont les plus communes sont les coques, sorte de pizzas briochées locales. Après avoir été badigeonnées d'huile d'olive aillée, elles peuvent être garnies de poivrons (amb pebres), d'un mélange tomate-oignon-poivron (amb trempó), d'épinards-pignons-raisins secs (d'espinacs), de saucisse pimentée (amb sobrassada) ou de sardines (amb pinxes).

La cuisine de l'île étant une cuisine de subsistance, les Minorquins ont toujours su, encore aujourd'hui, profiter des ressources qu'ils ont à portée de main, tout en se régalant. Cueillis ou ramassés sur les chemins, champignons des bois, asperges, mûres, herbes aromatiques et câpres s'invitent ainsi dans la gastronomie minorquine, accompagnant des viandes (terrine de lapin en sauce et petits légumes, rôti de gigot d'agneau aux olives) ou formant des entrées (courgettes farcies au four, soupe de tomate – ou oliaigua – au sorbet de figues).

Desserts et boissons

La pâtisserie la plus connue des Baléares est probablement l'ensaïmada, une viennoiserie sucrée en forme de spirale que l'on déguste à l'heure du petit-déjeuner, trempée dans du chocolat chaud épais. Initialement garnie de beurre, on le remplace après la Reconquesta par du saindoux, pour juger de la ferveur des juifs et musulmans convertis au christianisme. Le greixonera de brossat est d'ailleurs un pudding à base d’ensaïmada, parfumé de citron et de cannelle. La coca bamba est une brioche à base de pomme de terre, bien moelleuse, alors que le rubiol est un chausson sablé fourré de chocolat, de fromage frais ou de marmelade.

Beaucoup de pâtisseries locales sont dédiées à des fêtes religieuses. Les bunyols de Tots Sants sont de petits beignets confectionnés pour la Toussaint, alors que les crespells, des sablés parfumés à l'orange et au citron, fourrés de confiture ou de fromage frais, sont préparés pour la Semaine sainte. Inévitables à Minorque, les carquinyols sont de petits biscuits croquants de forme carrée aux amandes. Enfin les orelletes, beignets fins et très croustillants, sont dévorés pour le carnaval.

Toutes ces douceurs sont généralement accompagnées de chocolat chaud (xocolata calenta), bien épais, à l'espagnole. Le café est normalement noir. Additionné de lait chaud, il est baptisé Amb llet. Le café tallat est un espresso coupé avec du lait froid. Il peut être en sobre (en poudre) ou de màquina (espresso). Le cigaló est un café allongé d'un trait de rhum ou de cognac, ou d'une autre liqueur locale.

Si l'archipel des Baléares n'est pas la région la plus réputée d'Espagne pour ses vins, on y retrouve une production notable qui gagne à être connue. Il existe deux dénominations d'origine contrôlée (denominació d’origen) dans l'archipel, toutes deux situées à Majorque – Binissalem en rouge et Pla i Llevant en blanc – alors qu'à Minorque on retrouvera de très nombreux vignobles – tels Vinyes Binitord, Finca Sa Marjaleta, Hort de Sant Patrici, Torralbenc, Bodegas Menorquinas et tant d’autres.

Côté bière, vous rencontrerez sur l’île principalement la marque catalane Estrella. Se rapprochant de notre panaché, la clara est un mélange de bière et de Schweppes citron. À Minorque, on mentionnera aussi la bière artisanale Cervesa Illa, la plus ancienne de l'île. Enfin, vous trouverez également la Grahame Pearce. Produite à Sant Climent, près de Maó, par Roger Vila, la Grahame Pearce a gagné le prix de la meilleure bière artisanale d’Espagne en 2022. Pour les plus curieux, il est possible d’assister au processus de fabrication, l’usine organisant des visites guidées.

Les Anglais ne sont pas restés à Minorque plus de 90 ans au total, mais en partant ils ont laissé un goût sûr pour le gin et son intense arôme de baie de genièvre. On le fabrique ici avec du raisin, le rendant plus fruité et moins amer que son équivalent britannique produit à partir de céréales. On pourra apprécier notamment le gin Innat et le Glop élaborés par la famille Quintana chez Licors Biniarbolla, et le gin Xoriguer qui se targue d'être le plus vieux gin produit en Méditerranée. Arrosé de jus de citron, le gin s’appelle alors pomada. L’immanquable xupito est le nom du petit verre de liqueur offert souvent par la maison après le dîner. On le retrouve également lors des fêtes des saints patrons de chaque municipalité minorquine.

Les liqueurs herbales ou herbes sont très prisées et chaque île produit la sienne. Souvent préparées de manière artisanale, leur taux d'alcool varie de 20 à 30° environ. On retrouvera dans la région le calent et l'estomagale de Minorque.