4000 av. J.-C

Culture talayotique

Avant l'âge du bronze, Minorque était déjà habitée, probablement par des peuplades venues de la péninsule ibérique et de Sardaigne. C'est en tout cas ce que laissent supposer les vestiges mégalithiques de l’époque préhistorique. Des monuments mégalithiques issus de la culture talayotique se retrouvent aujourd'hui encore aux quatre coins de l'île (un patrimoine protégé par l'Unesco depuis 2023).

Poblat talaòtic de Torre d'en Galmès © AGÈNCIA MENORCA TALAIÒTICA .jpg

1 500 av. J.-C

A cette époque débutent les échanges commerciaux avec le bassin méditerranéen : Grecs, Ibères et Phéniciens font des haltes aux Baléares pour proposer leurs marchandises. Cette ouverture vers le reste du monde de l’époque va entraîner les premières constructions sur Minorque. On dit que les Grecs l'appellent alors « île de Meloussa » (« terre de bétail ») tandis que les Phéniciens la nomment « île de Nura » (« terre de feu »).

1100 av. J.-C

Les récits des marins de passage alimentent les imaginaires locaux. Les descriptions des premières cités structurées (Athènes et Carthage notamment) influencent les îliens, si bien que les villages se forment à mesure que les grottes se vident. Au cœur de ces modestes agglomérations, des tours de pierre et de bois assemblées sans mortier sont érigées : il s'agit des talayots. Jusqu’ici peu organisées et visiblement pacifiques, les tribus dressent les premières fortifications.

645 av. J.-C

Ces modestes systèmes de défense ne suffiront pas à arrêter les Carthaginois qui se rendent maîtres des Baléares en 645 av. J.-C. Ils détruisent les tours, bâtissent leurs propres villes et fortifications et surtout exploitent les richesses de l’archipel : les marais salants et le murex (mollusque carnassier dont est tirée la pourpre, un colorant très recherché dans l’Antiquité). En 205 av. J.-C., le général carthaginois Magon Barca fonda la ville de Mahon et lui donna vraisemblablement son nom.

123 av. J.-C

Il ne faut que quelques années aux Romains pour comprendre alors l’intérêt de Carthage pour les Baléares. En 123 av. J.-C., le consul Caecilius Metellus intègre l’archipel à l’Empire romain. Il crée Palma et développe le port de Mahon, alors nommé « Portus Magonis », qui devient un lieu stratégique en même temps qu'une ville prospère. C'est aussi lui qui fait tracer des voies de circulation à Majorque et Minorque. Néanmoins, l’Empire romain n’a pas laissé des traces profondes de sa domination. Il faut dire que 300 ans après s’être installé, l’empire n’est plus que l’ombre de lui-même. Sa chute, vers 400 de notre ère, plonge Minorque et les Baléares dans une période de repli.

425 apr. J.-C

L’archipel est dévasté et rattaché en 427 aux terres des Vandales d'Afrique du Nord. Une civilisation paléochrétienne subsiste bon an mal an durant cette période.

534

Minorque est conquise par Flavius Belisarius, de l'Empire byzantin.

553

Après la conquête du général Bélisaire (Flavius Belisarius) en 534, sous le règne de Justinien, empereur de Byzance, les Baléares sont intégrées en 553 à l’Empire d’Orient. Au VIIe siècle, les Wisigoths chassent les Byzantins, mais ce sont les Maures qui deviennent rapidement les maîtres des lieux.

902

Les Arabes font leurs premières incursions dès le VIIe siècle, sans que l’on puisse parler de véritable invasion. Malgré quelques pillages, ils cherchent surtout à commercer, profitant ainsi de la position privilégiée des îles sur les grandes routes maritimes. Charlemagne tente de rétablir durablement une domination chrétienne sur Majorque, mais ses efforts sont réduits à néant en 902, lorsque le calife de Cordoue, Issam al-Jawlani, s’empare sans effort de l’archipel. A sa mort, en 1031, plusieurs suzerains maures d’Espagne se succèdent et entretiennent avec les chrétiens des rapports tolérants. Si aujourd’hui peu de vestiges sont visibles, les apports culturels, techniques (en agriculture notamment) et architecturaux des Maures sont à l’origine d’un sursaut de l’archipel. La passion actuelle des Minorquins pour les chevaux et les très nombreuses fêtes populaires de l'île mettant le cheval à l'honneur est d'ailleurs l'un des effets encore visibles de l'influence des Maures. La ville de Ciutadella, à l'extrême ouest de Minorque, est rebaptisée « Jamma » et devient la capitale de l'île.

1077

Les îles demeurent terres musulmanes, mais pour la première fois depuis des siècles, elles deviennent un royaume indépendant. Entre 1113 et 1114, Ramon Berenguer, comte de Barcelone, très attiré par la situation géographique des Baléares, à la croisée des routes commerciales de la Méditerranée, s’allie à des corsaires de Pise pour occuper Palma. Traînant en longueur, la conquête laisse aux musulmans le temps de se réorganiser, et la tentative de reconquête échoue. L’archipel retrouve sa situation antérieure : la domination arabe.

9 septembre 1229

Animé d’un véritable sentiment de mission divine et profitant des dissensions entre les différents suzerains arabes de la péninsule Ibérique et des Baléares, Jacques Ier d’Aragon (dit Jacques le Conquérant) prend prétexte d’attaques permanentes des pirates arabes contre les bateaux de commerce pour tenter de chasser les musulmans des Baléares. En septembre 1229, il envoie une puissante flotte. Le 9 septembre, le jeune roi (21 ans) sort vainqueur du principal affrontement entre les deux armées. Les Maures se sont toutefois réfugiés à Medina Majorica, le nom arabe de Palma. Jacques Ier devra patienter trois mois. La ville tombe enfin entre ses mains et c’est le début du royaume de Majorque.

17 janvier 1287

Alphonse III le Libéral boute le dernier chef du califat, Abu Umar, hors de l'île et incorpore Minorque au royaume d'Aragon. La population musulmane minorquine est réduite à l'esclavage, déportée peu à peu, avant d'être remplacée par une population catalane. A partir de cette conquête, l'histoire de Minorque est intimement liée à celle de Majorque.

[1298 -1343]

Royaume des Baléares

Minorque est rattachée au Royaume des Baléares. Jusqu’à sa mort, en 1276, le souverain Jacques I Le Conquérant contribuera avec succès au développement de l’économie des Baléares. A sa mort, il lègue Majorque à son fils cadet, Jacques II, avec le titre de roi des Baléares, tandis que l’aîné obtient le royaume d’Aragon. Avec ce partage, les îles constituent alors un royaume indépendant pour la dernière fois de leur histoire. Il le reste jusqu’en 1343, malgré les pressions de la branche aragonaise de la famille pour récupérer les Baléares. Ces tensions atteignent un premier sommet lorsque Sanche, fils de Jacques II et sans héritier mâle, désigne son neveu, le futur Jacques III, pour lui succéder, alors que l’Aragon réclame l’archipel. Le conflit est évité grâce au soutien qu’apporte la France à Jacques III mais, à l’avènement de Pierre IV d’Aragon, le conflit rebondit, et le royaume de Majorque est délaissé par le roi de France, plongé en pleine guerre de Cent Ans.

1343

Après s’être assuré du soutien de la population locale par la promesse de maintenir tous ses privilèges, Pierre IV s’empare du royaume de Majorque en écrasant l’armée de Jacques III.

XVe siècle

Au début du XVe siècle, Minorque affronte une guerre contre les Allemands. Elle est également sujette à des luttes intestines entre deux classes de citoyens : ceux dits « nobles » et les « paysans ». Comme au temps des premières incursions arabes, la piraterie dévaste à nouveau l’archipel ce qui conduit à un dépeuplement quasi total de l'île. Au cours de la seconde moitié du XVe siècle, du fait de l'union de la Couronne d'Aragon avec celle de la Castille, Minorque est incorporée au Royaume d'Espagne.

XVIe siècle

Incursions pirates

Au cours du XVIe siècle, les incursions pirates dans les Baléares sont monnaie courante. En 1534, le pirate turc Barbarossa saccage ainsi la ville de Maó. En représailles de la conquête de Tunis par Charles Quint en 1535 (que l'Empire ottoman reprendra en 1574), des corsaires berbères attaquent également Minorque. Autre événement tragique resté dans les mémoires, l'invasion de Ciutadella par le pirate Mustafa PiSali le 9 juillet 1558. Ce dernier transforme la ville en un tas de ruines et fait 3 500 prisonniers qui sont réduits à l'esclavage.

XVIIe siècle

Au début du siècle suivant, le roi Philippe II décide de la construction du fort Sant Felip à l'entrée du port de Maó, mais aussi d'un certain nombre de tours de défense sur la côte. Dans l'ensemble, le XVIIe siècle a été une période de déclin pour Minorque. La peste, la sécheresse, les incessantes menaces pirates et les luttes internes au sein même de l'île la fragilisent fortement.

XVIIIe siècle

Le XVIIIe siècle est une période tumultueuse de l'histoire de Minorque. L'île va tour à tour être colonisée par l'Angleterre et la France avant de passer sous domination franco-espagnole.

1713-1756

Domination anglaise

En septembre 1708, un escadron anglais sous le commandement du général Laeke parvient à ravir Minorque aux Espagnols. En 1713, le traité d'Utrecht entérine cette conquête : Philippe V cède Minorque à la Grande-Bretagne. Cette colonisation durera jusqu'en 1756.

1756

Au tout début de la guerre de Sept Ans, la France et l'Angleterre se livrent une bataille pour le contrôle de l'île. Les Français remportent la bataille de Minorque (ou bataille du Port Maó) et conserveront l'île tout au long de la guerre. En 1763, avec la signature du traité de Paris, les Anglais récupèrent la mainmise sur Minorque (ainsi que sur l'Inde et le Canada), jusqu'en 1782. C'est la seconde phase de domination anglaise.

1782

Les troupes franco-espagnoles, dirigées par le général Crillon, récupèrent Minorque. Mais les Anglais ne démordent pas et parviennent une troisième fois à occuper l'île, de 1798 à 1802, avant de la céder une bonne fois pour toutes à l'Espagne (traité d'Amiens). Au cours de deux premières périodes de l'occupation britannique, Sir Richard Kane, un militaire irlandais qui fut gouverneur de l'île, décida de déplacer la capitale de Ciutadella à Maó. Durant toute cette période, en raison du commerce avec l'Angleterre, l'économie de Minorque est en très bonne santé.

1802

L’Espagne ne regagne la souveraineté de Minorque qu’en 1802 par le traité d’Amiens qui rendra les Baléares à l'Espagne.

XIXe siècle

Après la guerre opposant l'Espagne à l'empire de Napoléon, quantité de Catalans trouvent refuge sur l'île. Puis, dès 1825, en raison de très mauvaises récoltes et une forte mortalité du bétail en raison de la raréfaction des pâturages, de nombreux Minorquins émigrent. Ils émigrent vers l'Amérique du Nord, la Caraïbe ou l'Amérique du Sud, mais aussi et surtout vers l'Algérie.

1852

Sous le règne d'Isabelle II, la forteresse de la Mola est édifiée à l'entrée du port de Maó. Assez vite, elle sera convertie en prison militaire, et ce jusqu'en 1968.

1936-1939

Pendant la guerre civile, entre 1936 et 1939, les militaires présents à Majorque et à Ibiza se rallient presque immédiatement au général Franco, seule Minorque reste fidèle aux républicains jusqu’à la Seconde Guerre mondiale. En février 1939, à la fin de la guerre, elle est reprise par les franquistes.

1960-1970

Après des années de semi-autarcie, le gouvernement espagnol franquiste accélère le processus d’ouverture et les premiers touristes arrivent dans les Baléares.

1970-1975

Minorque, bien qu'elle soit une destination de vacances depuis les années soixante, a toujours maintenu les autres secteurs économiques (industrie fromagère, de la chaussure et de la bijouterie) bien actifs. Le tourisme de masse y est arrivé plus tard qu'à Majorque et Ibiza. Un tourisme mieux maîtrisé à Minorque qu'ailleurs.

1981

La fête de Sant Antoni, saint patron de l'île, devient la Fête du Peuple de Minorque.

1983

Au début des années 1980, les îles connaissent une véritable révolution avec l’accession à l’autonomie – tant désirée par Minorque – et la création d’un gouvernement autonome des Baléares le 25 février 1983. Un parlement voit le jour. Régulièrement, depuis cette date, les électeurs baléares sont appelés aux urnes pour élire leurs députés. Un gouvernement est constitué, avec à sa tête un président : Gabriel Cañellas Fons.

Gabriel Cañellas i Fons (1941-)

Gabriel Cañellas i Fons fut le premier président de la Communauté autonome des Baléares, et ce jusqu’en 1995. Après de multiples réélections à ce poste (1987, 1991 et 1995), il est contraint de démissionner.

7 octobre 1993

Minorque est déclarée Réserve de biosphère par l'UNESCO. Cela signifie une reconnaissance des valeurs et caractéristiques environnementales uniques de l'île, qui rassemble la plupart des écosystèmes méditerranéens et préserve également un riche patrimoine artistique et culturel.

30 juillet 1999

Joana M. Barceló Martí prend la présidence du Conseil Insulaire de Minorque.

2022

La reprise

Après deux années difficiles, le tourisme repart à la hausse à Minorque et dans les trois autres îles, sans pour autant atteindre les très hauts niveaux de fréquentations pré-pandémiques. Le tourisme est tout de même devenu le principal moteur de l'économie de l'île, même si les secteurs de la chaussure et des bijoux ont été relancés. La production de fromage également tient bon malgré l'abandon ou la transformation de nombreux « llocs » (fermes) en hôtels ruraux de charme.

18 septembre 2023

L'ensemble architectural talayotique de Minorque entre officiellement sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco.