Histoire Histoire

Tour à tour au centre d’influences territoriales, l’Istrie s’est construite sur trois cultures, latine, slave et germanique. Des premières tribus illyriennes à la Pax Romana, de l’Empire byzantin aux dominations vénitienne puis autrichienne, de l’irrédentisme italien au fascisme, cette région de la Croatie porte une identité de frontières aux contours fluctuants. Après la Seconde Guerre mondiale, la Yougoslavie adopte un régime de type communiste, une période de collectivisation des terres et d’épuration politique menée par les partisans du maréchal Tito. Sa mort (4 mai 1980) précipite les pays fédérés dans une nouvelle guerre (1991-1995). La Croatie déclare son indépendance (juin 1991). Un mois plus tard, des accords de paix sont signés sur l’île de Brioni. Le 1er juillet 2013, la Croatie intègre l’Union européenne, cependant que l’Istrie revendique toujours plus fort son particularisme, au sein du mouvement Euroregia Istria.

1 million d’années av. J.C

Temps préhistoriques

Dans une grotte proche de Pula (Sandalja) mais aussi à Koper, les résultats de fouilles archéologiques attestent la présence de l’homme en Istrie dès la période paléolithique. Des outils, des céramiques et divers objets usuels retrouvés ont aussi renseigné sur la vie des chasseurs-cueilleurs et pêcheurs du néolithique (6000-2000 av. J.-C.).

900 av. J.-C. - 400 av. J.-C

Arrivée des Illyriens

À l’âge de bronze, les primo-habitants sédentaires sont des tribus indo-européennes qui vont s’installer sur l’actuel territoire croate. Les Illyriens, Dalmates, Liburnes et les Histres colonisent la côte et les archipels. Ces derniers ont légué leur nom à la péninsule.

229 av. J.-C. - 168 av. J.-C

Guerres d’Illyrie

Après une première incursion sur la côte orientale de l’Adriatique, les Romains doivent affronter les Illyriens sur leurs terres (Histria, Liburnia, Dalmatia). Ces guerres d’Illyrie correspondent à trois campagnes militaires distinctes, l’une contre la reine Teuta, la deuxième contre l’aventurier Démétrios de Pharos et la dernière contre le roi Gentius.

178 av. J.-C. - 305 ap. J.-C

L’Empire romain d’Occident

En mer Adriatique, les premières conquêtes romaines ont commencé sous le règne d’Auguste, premier empereur romain (du 16 janvier 27 av. J.-C. au 19 août 14 apr. J.-C.). Après une courte colonisation grecque, une dixième région administrative d’Italie (regio X Venetia e Histria) est créée, en 7 av. J.-C. Suit une longue période de colonisation romaine, jusqu’à la division en deux de l’Empire romain, sous Dioclétien.

Fin IVe siècle ap. J.-C

L’Empire romain d’Orient

Le territoire de l'actuelle Croatie voit l’effondrement de la civilisation romaine en Occident, à laquelle succède la période dite de l’Antiquité tardive. Une époque faste pour la région d’Histria, dominée par l’Empire romain d’Orient (byzantin). La péninsule se pare de superbes édifices religieux.

Début du IXe siècle

Invasions bulgare et slave

À partir du VIIe siècle, la région est plusieurs fois pillée par des pirates slaves (ancêtres des Slovènes et des Croates) et magyars. Le village de Sipar (Umag) est détruit, ce qui touche directement à l’autorité de Basile Ier. L'empereur romain d’Orient parviendra plus tard à réintégrer ces peuples à la Dalmatie byzantine.

1060

Division de la péninsule istrienne

La partie sud-ouest, à majorité italienne, reste byzantine. La moitié nord-est, principalement peuplée de Slovènes et de Croates, devient un margraviat (marquisat) autonome dans l’empire germanique (carolingien).

1420 - 1797

La République de Venise dans la mer Adriatique

Au début du XVe siècle, toute la côte adriatique, la plupart des cités-États dalmates et la moitié sud-est de l'Istrie tombent sous domination vénitienne tandis que l’on voit les premiers Habsbourg pénétrer la moitié nord-ouest et l'intérieur de la péninsule istrienne. Pour la Sérénissime, gagner du terrain dans ces eaux territoriales était le moyen de maîtriser les routes commerciales, entre Orient et Occident, tout en se constituant une formidable source de revenus. Les ports (Pula, Poreč, Rovinj) acceptent le protectorat militaire afin de limiter les débordements hongrois. Mais les cités doivent aussi céder leurs terres environnantes.

À partir du XIVe siècle, la cité des doges applique une véritable « vénitisation » du littoral istrien, tant sur le plan politique, économique ou maritime qu’artistique. Durant ces quatre siècles, les caractères linguistiques et culturels de l'Italie influencent durablement le paysage et les hommes. Tout le long de la côte, Venise choisit des sites surélevés, des presqu'îles pour y bâtir les bourgs portuaires, surmontés du traditionnel campanile, qui se signale de loin. Cette colonisation est à son apogée du XVIe au XVIIIe siècle et laisse derrière elle une urbanisation organisée (remparts, fortifications, pavement), un raffinement dans l’architecture et l’art civil et religieux.

De 1798 à 1814

Nouvelles dominations impériales

Après la chute de la République de Venise en 1797, l’Istrie et la Dalmatie changent de tutelle. Successivement, les deux régions seront rattachées à l’empire des Habsbourg, au royaume napoléonien d’Italie puis aux Provinces illyriennes de l’Empire français.

1809-1815

Guerres napoléoniennes

L’incursion du régime de Napoléon Bonaparte fut de courte durée en Croatie, mais pourtant pleine de répercussions. À l'issue des deux campagnes de Dalmatie, l’empereur français concède à l’Autriche les possessions du sud de l’Adriatique et fonde, en 1809, les Provinces illyriennes (Istrie, Kvarner, Dalmatie, baie de Kotor). Au congrès de Vienne en 1815, l’Autriche récupère des parties de l’Istrie et de la Dalmatie qui appartenaient à Venise. Les Austro-Hongrois reprennent les ports de Pula et Rijeka, y construisent des chantiers navals pour leur arsenal de guerre et tracent de nouvelles routes pour relier les infrastructures maritimes aux capitales (Vienne, Budapest, Zagreb).

1866

Guerre austro-prussienne

L’Italie, qui s’était alliée à la Prusse, perd la bataille navale de Lissa (île de Vis) mais récupère la Vénétie, ce qui rapproche le littoral autrichien, avec Trieste comme chef-lieu, de la frontière istrienne. Cette zone côtière austro-hongroise (Küstenland) regroupait le comté princier de Görz (actuel Frioul italien), celui de l’Istrie jusqu’à Fiume (Rijeka) et incluait le golfe du Kvarner et ses grandes îles.

1er décembre 1918

Vers le royaume de Yougoslavie

Au sein de la double monarchie austro-hongroise, l’union des pays limitrophes donne naissance au royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes. Sous le règne de Pierre Ier de Serbie, il fusionne les royaumes de Serbie et du Monténégro et les populations slovènes et croates. Sous Alexandre Ier, il est rebaptisé royaume de Yougoslavie le 3 octobre 1929, mais le 9 octobre 1934, le roi est assassiné à Marseille par Ante Pavelić, chef des oustachis croates.

28 juin 1919

Traité de Versailles

À la fin de la Première Guerre mondiale, un traité paix est signé entre l’Allemagne et les Alliés. Des sanctions contre l’Allemagne et ses alliés de l’Axe sont prises, ce qui entraîne des remaniements territoriaux et la dislocation des empires germaniques, austro-hongrois et ottoman.

12 septembre 1919

Prise de Fiume (Rijeka)

D’importants territoires croates ont été attribués à l’Italie, dont l’Istrie mais pas Fiume, qui revient au royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes. En réaction, l’écrivain militaire italien, le fasciste Gabriele D’Annunzio, occupe la ville avec ses milices près d’un an.

12 novembre 1920

Traité de Rapallo

Le royaume d’Italie et le royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes signent un traité, qui vise à assurer l’indépendance de Fiume, reconnue par les États-Unis, la France et le Royaume-Uni. Le micro-État libre ne tiendra que jusqu’au 3 mars 1922, date à laquelle il sera renversé par un coup d’État puis annexé à nouveau par l’Italie.

1941-1945

Seconde Guerre mondiale

Invasion allemande de la Yougoslavie en avril 1941. L'Istrie et une large partie de la Dalmatie sont annexées par l'Italie de Mussolini. Les forces de l’Axe installent des régimes satellites, en Croatie notamment. À Zagreb, le pouvoir est confié aux ultranationalistes oustachis. C’est le retour triomphant d’Ante Pavelić, qui met en place une politique de persécution des opposants politiques (serbes, antifascistes, communistes croates). Il introduit des lois raciales contre les Juifs et les Tziganes, ouvre des camps de déportation et/ou de concentration. Cette guerre fit près de 300 000 morts en Croatie. À l’été 1941, la résistance croate, alliée aux tchetniks (parti du royaume de Yougoslavie) s’organise. Les partizan antifascistes ont pour chef le communiste Josip Broz, dit Tito. En juin 1943, le maquis croate se dote d’un état-major civil, qui deviendra l’État fédéré de Croatie (Federalna Država Hrvatska).

29 novembre 1945

Proclamation de la première Fédération yougoslave

Après la Seconde Guerre mondiale, Tito arrive à la tête de six républiques (Slovénie, Croatie, Serbie, Bosnie-Herzégovine, Monténégro et Macédoine) et deux régions autonomes (Kosovo et Vojvodine). L’Istrie est revendiquée par la Yougoslavie et l’Italie.

31 janvier 1946

Mise en place du collectivisme

Début 1946, la République populaire fédérale de Yougoslavie (RPFY) édicte sa Constitution. Elle reprend les principes fondateurs du modèle totalitaire de l’Union soviétique stalinienne. C’est la fin de la monarchie, le début d’un système qui admet l’intervention de l’État dans tous les domaines (économique, politique, social et culturel).

10 février 1947

Territoire libre de Trieste

Sous contrôle de l’Onu, le traité de Paris crée ce territoire, ce qui aura pour conséquence de couper la ville en deux, l’une anglo-américaine, avec une majorité d’Italiens (zone A), l'autre yougoslave (zone B), incluant la ville de Capodistria (Koper), avec des Italiens, des Slovènes et des Croates. Mais une grande partie de la population de la zone B abandonne cette région, poussée par la terreur communiste et les massacres des foibe.

Entre 1943 et 1947

Massacres des foibe

L’évocation de cette période de terreur, menée par les partisans communistes de Tito contre des opposants politiques, soldats et civils fascistes, en majorité italiens, reste un sujet sensible, encore aujourd’hui, entre l’Italie et la Croatie. Ces exécutions de masse se sont déroulées après la signature de l’armistice en 1943, consécutive au départ de Mussolini. Des milliers de personnes ont été tuées dans les territoires istriens, les corps parfois vivants jetés dans de profondes fosses naturelles karstiques (foibe). Près de 250 000 exilés ont fui la région. Le film Rosso Istria, réalisé par Maximiliano Hernando Bruno (2017), raconte ces faits historiques, longtemps commémorés par les seuls néofascistes. Il a provoqué de fortes réactions sur les réseaux sociaux entre l’extrême droite et les autres partis italiens. Désormais, en Italie, le 10 février est institué journée de mémoire pour les victimes des foibe.

1952-1954

Redécoupage territorial

La Slovénie dispose désormais d'une ouverture sur la mer Adriatique comprenant la zone littorale du sud. Appartenant à la Croatie pour 90 % de son territoire, l’Istrie est toujours revendiquée par l’Italie, qui ne gardera que Trieste, coupant du même coup la ville de son arrière-pays.

19 juillet 1956

Mouvement des non-alignés

Fondé sur l’autogestion, la décentralisation, l’assouplissement du collectivisme et de la planification, le mouvement des non-alignés s’instaure par la déclaration de Brioni sur la plus grande île de l’archipel istrien, au large de Pula. De sa résidence insulaire, Tito invite les chefs d’État Nehru et Nasser. Il les engage à se protéger de l’influence des États-Unis et de l’URSS, alors en pleine guerre froide.

1975

Accords sur la mer Adriatique

L'Italie et la Yougoslavie se sont entendues sur des limites maritimes. Après 1992, ces frontières en mer, cernant des zones de pêche, seront reconnues par les États nés de la dislocation de la Yougoslavie : la Slovénie, la Croatie, la Bosnie-Herzégovine et le Monténégro.

1991-1995

La guerre dans l’ex-Yougoslavie

Après la mort de Tito (4 mai 1980), le système de présidence alternée, tous les quatre ans, ne satisfait pas les parlementaires, ne résout ni les problèmes nationaux ni les inégalités politico-économiques. Moteurs économiques, la Croatie et la Slovénie revendiquent une plus forte représentativité aux assemblées centralisatrices de Belgrade. En mai 1989, la prise de pouvoir de Slobodan Milošević relance la bataille pour la Grande Serbie. Milošević, l’ultranationaliste, abolit l’autonomie du Kosovo et de la Vojvodine, place ses partisans à la tête du Monténégro. En somme, il veut contrôler toutes les autorités yougoslaves. Le 30 mai, les élections présidentielles croates sont remportées par Franjo Tuđman, ancien général de l’armée des partisans. Trois mois plus tard, des Serbes de Croatie autoproclament la République autonome de Krajina. Le 13 juin 1991, l’armée yougoslave (JNA), dont l’état-major est désormais uniquement composé de militaires serbes, lance une première attaque sur la Croatie, alors que le Parlement de Zagreb déclare la souveraineté et l’indépendance nationale. Très vite, un quart du pays tombe aux mains des Serbes. Des terroristes serbes, infiltrés en Croatie et soutenus par la JNA, font des raids meurtriers dans les régions de la Lika, Kordun, Banija et en Slavonie orientale. Les combats font rage dans la ville de Vukovar, les massifs du Dinara-Velebit, dans la région de Krajina. Les conflits verront s’opposer Croates, Serbes et Bosniaques, ces derniers étant appuyés par des milices djihadistes venues de l'étranger. Zadar, Šibenik et Dubrovnik ont subi des tirs de roquettes et des bombardements. La chute de Vukovar, le 18 novembre 1991, est un vrai massacre. Plusieurs centaines de personnes sont tuées, au moins 20 000 civils déplacés. Le 14 décembre 1995, les accords de Dayton, signés avec les Serbes et les Bosniaques, mettront fin au conflit qui aura fait près de 15 000 morts et 50 000 blessés dans l’ex-Yougoslavie.

La région d’Istrie n’a pas été touchée par les tirs. Son économie a cependant connu une forte récession suite à la chute brutale du tourisme. La région a participé à l’effort de « guerre pour la patrie ». Il y a eu un vrai élan de solidarité. Des complexes hôteliers sur son littoral, des casernes et des résidences secondaires furent réquisitionnés pour accueillir temporairement une masse considérable de réfugiés et d'exilés fuyant les villes croates assiégées. Des entreprises istriennes ont aidé à la reconstruction d’infrastructures croates sur le territoire.

1991-1992

Déclarations d’indépendance de la Croatie et de la Slovénie

Les deux républiques deviennent indépendantes. Tout en conservant les frontières yougoslaves internes de l’Istrie (1954), les deux nouvelles démocraties seront reconnues par la communauté internationale. La Croatie rejoint les rangs de l’Onu et retrouve l’intégralité de son territoire en reconquérant la Slavonie à l’est.

Depuis juin 1999

Pacte de stabilité pour l’Europe du Sud-Est

La République croate participe à ce pacte d’entente entre pays de la zone. Il vise à aider les États limitrophes dans leurs plans de réformes démocratiques et économiques. L’entrée de la Croatie dans l’Union européenne est signée en juillet 2013. Parallèlement, les résurgences identitaires en Istrie sont toujours présentes. Le parti Euroregion Istria fait toujours parler de lui. Il œuvre pour la fusion Istrie croate-Italie du Nord-Slovénie.

5 janvier 2020

Élections présidentielles

À l'issue du second tour, Zoran Milanović, ancien Premier ministre social-démocrate, arrive en tête devant la présidente sortante Kolinda Grabar-Kitarović. Ce scrutin ramène les socialistes au pouvoir mais a vu la montée du national-populisme avec le bon score du chanteur Miroslav Škoro (24,45 % des voix au premier tour).

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