Produits caractéristiques
Le climat largement aride du Rajasthan limite l'agriculture. Cet État représente en effet moins de 1 % de la production nationale de riz, même s'il est le 5e producteur de blé du pays. Le millet, céréale peu gourmande en eau, y est largement cultivé. Lentilles, haricots, tomate, aubergine, courge, oignon et autres légumes complètent le tableau. On notera également quelques plantes du désert comme le ghaf, ou sangri, un arbre dont les longues gousses sont appréciées comme légumes, ou encore le ker, un cousin du câpre, dont on consomme les baies. Situées à la lisière de la plaine du Gange, Agra et New Delhi possèdent traditionnellement une plus grande diversité de produits, qui font aussi écho à leur rôle passé et présent de capitale, ainsi qu’à un climat plus humide et propice aux cultures les plus variées.
« Inde » et « épices » semblent souvent être des synonymes, tant leur usage est omniprésent dans la cuisine du pays. Poivre, curcuma, cardamome, cumin, cannelle, safran, laurier, coriandre et bien sûr piment sont partout. L'ajowan, cousin du cumin, l'asa-fœtida ou hing, connue pour son odeur âcre, et le fenugrec, aux graines amères, sont également des aromates populaires. Les cuisines du Rajasthan et de Delhi sont loin d'être les plus pimentées du pays, mais certains plats peuvent être redoutables. Demandez des plats « not spicy » au restaurant pour éviter quelques désagréments. Ghee et dahi sont deux fondamentaux de la cuisine du nord de l'Inde. Le ghee, ou beurre clarifié, résiste très bien aux températures de cuisson élevées et remplace souvent l'huile. Selon l’hindouisme, il conserve davantage la pureté des aliments que l’huile ou l’eau. Utilisé dans la majorité des plats, le dahi, ou yaourt, pallie, lui, l’âpreté de certaines épices. Servi nature, ce yaourt peut être mélangé aux fruits ou aux légumes du plat qu’il accompagne. Il sert aussi de base à certaines boissons fraîches ou autres accompagnements. Le paneer est un fromage semblable à la mozzarella mais qui ne fond pas à la cuisson.
Les pains tiennent une place essentielle dans la cuisine indienne, particulièrement dans le nord du pays où on notera par exemple le khooba roti, un pain plat typique du Rajasthan reconnaissable à ses empreintes caractéristiques. Autre pain local, la bajre ki roti est une galette de farine de millet. On citera aussi d'autres pains comme le naan, bien sûr, qui trouve ses origines en Perse. À base de blé et de levain, les naans sont cuits sur les parois brûlantes d'un tandoor, un four en terre cuite enterré rempli de braises. La chapati est une galette sans levain souvent au blé complet populaire dans tout le pays. Très savoureux, la missi roti est un pain plat parfumé aux graines d'ajowa, de fenugrec et de poudre d'asa-fœtida. Très apprécié, le bhatura est un pain frit soufflé qui forme une poche grâce à la vapeur à l'intérieur. Enfin, la bakarkhani roti – typique de la cuisine moghole – est un pain plat croquant aux graines de nigelle.
Entre le Rajasthan et la région de Delhi, la consommation de viande est assez différente. En effet, elle est considérée comme impure par les brahmanes. Par dévotion, d'autres castes hindoues ont pris l’habitude de ne pas en consommer, même s'ils n'y sont pas obligés. Les yogis déconseillent aussi les régimes carnés « rajastiques », c’est-à-dire qui peuvent donnent à la pensée un caractère agressif ou déséquilibré, au contraire des aliments « satviques » (fruits, légumes, laitages, etc.), qui apporteraient la sérénité et l'harmonie. Les restaurants purement végétariens qui servent une cuisine rajasthani portent le nom de « marwari bhojnalaya ».
On notera par ailleurs que la vache est sacrée en Inde, et, évidemment, une écrasante majorité d'hindous ne songeraient même pas à en consommer sous quelque forme que ce soit. Avec quelque 89 % d'hindous dans le Rajasthan, sa consommation y est donc rarissime, sans compter le fait que la population est également majoritairement végétarienne. La consommation de bœuf est plus courante chez les musulmans, mais l’abattage d'une vache cause toujours de graves discordes entre les communautés. Certains restaurants musulmans affichent donc l’écriteau « No beef » sur leur devanture pour ne pas choquer les hindous. La consommation de poulet ou de mouton est beaucoup plus courante et ne donne lieu à aucun conflit.
Les maharajas, grands chasseurs, ne se privaient cependant pas de manger du gibier. On notera également que beaucoup de recettes à base de viande datent des invasions musulmanes et ont été introduites notamment par les Moghols. Cette dynastie d'origine turco-mongole venait en effet d'Asie centrale où l'alimentation comprend une proportion significative de viande et de laitages. Bien que fortement imprégnés de la culture persane, les Moghols conservèrent leurs traditions culinaires – tout en les sophistiquant –, et, en Inde du Nord, beaucoup de plats à base de viandes, notamment grillées, trouvent leurs racines chez la communauté musulmane.
Sur les marchés et dans les petits restaurants où l'hygiène est parfois aléatoire, évitez les crudités, souvent lavées avec une eau douteuse, et les fruits non pelés. Bannissez aussi les jus de fruits coupés à l'eau (demandez sans glaçons et sans eau), et les glaces vendues dans la rue. Se laver les mains régulièrement est d'autant plus important qu'en Inde, on mange traditionnellement avec la main droite, la gauche étant considérée comme impure. Mais on retrouvera des cuillères dans la plupart des restaurants. Pour ceux qui seraient un peu sensibles à la puissance de la cuisine indienne, on trouvera sans problème des plats plus occidentaux – d'une qualité variable – dans les centres commerciaux des grandes villes et autres sites touristiques.
Les classiques de la cuisine du Rajasthan
Les locaux sont friands de chaat, des en-cas salés souvent frits, comme les kachori, des beignets feuilletés généralement garnis de lentilles. Au Rajasthan, on mange des pyaaz kachori (originaire de Jodhpur) farcis d'un mélange d'oignons épicés avec fenouil, cumin, curcuma et piment. Habituellement, les kachoris sont servis avec de la coriandre et de la menthe ainsi qu’un chutney de dattes et de tamarin. Le chutney lasun ki est une compotée très aillée avec piment et noix de coco râpée, très populaire. Le mirchi vada est un piment farci d'une purée de chou-fleur ou de pomme de terre, enrobé de pâte à beignet et frit. Les bikaneri bhujia sont des crackers épicés en forme de nouilles à la farine de haricots et de lentilles. Très apprécié en été, le curry de pastèque se compose de gros cubes de ce fruit juteux dans une sauce épicée au jus de pastèque.
Le dahi baray ou dahi vada se compose de vada (beignets épicés à la farine de lentilles) nappés d'une sauce au yaourt plus ou moins relevée. Assez proche, le gatte ki sabzi est un curry de boulettes de farine de pois chiches (cuites à la vapeur et légèrement frites) avec une sauce piquante avec tomates, babeurre et épices. Le dal baati se compose d'une part d'un dal (curry de lentilles épicé) et de baati, des petits pains durs sans levain imbibés de ghee. Ce plat est accompagné de churma, réalisé avec des baati réduits en miettes. Le papad ki sabzi est un curry à base de papads (fines galettes de lentilles) brisées grossièrement dans une sauce au yaourt agrémentée de farine de pois chiches, de piment, de curcuma et de coriandre. Enfin, le kadhi est préparé avec la même sauce yaourt-pois chiches mais il est garni de pakora (beignets de légumes).
Dans cet état majoritairement végétarien, le plat de viande le plus célèbre est le laal maans. Traditionnellement préparé avec du sanglier ou du cerf, de nos jours il se compose de mouton, cuit dans une riche sauce aux piments rouges, à l'ail, aux oignons et au lait fermenté. Plus doux, le safed maas est un ragoût de mouton délicatement épicé avec yaourt, lait et purée de noix de cajou et d'amande. Le ker sangri est un plat de gousses de sangri – ghaf – et de baies de ker, connues pour leur saveur piquante et poivrée. Cette recette est particulièrement symbolique de la cuisine du Rajasthan car on raconte que des villageois, pendant un sévère épisode de sécheresse, purent survivre à la famine grâce à ces deux plantes, qui étaient les seules à avoir survécu au manque de pluie. Le raab est une soupe épaisse à base de farine de millet (bajra) légèrement sucrée, avec poivre, cumin et graines d'ajowan.
La gastronomie moghole de Delhi
Portant également le nom de « cuisine mughlaï », les spécialités de Delhi – et d'Agra, toute proche – comptent de nombreux plats indiens internationalement connus. Les en-cas salés, ou chaat, se composent de samosa et de pakora. Le papi est une petite galette frite garnie de pois chiches, pommes de terre, yaourt et chutney de tamarin. Le puri est également une galette, frite et soufflée, servie avec des légumes. Moins gras, l’idli est un petit pain vapeur à la farine de riz. Cette spécialité de l’Inde du Sud, servie au petit déjeuner avec du chutney, est devenue un classique dans tout le pays. Le terme « thali » désigne une assiette complète avec du riz au centre, entouré de petites portions de curry, viande, légumes, sauces, etc.
Grand classique de Delhi, le murgh makhani ou poulet au beurre est un plat de poulet cuit dans une sauce riche et épicée à base de tomate, oignon, beurre, crème et yaourt. Arrivée avec les invasions mongoles en Asie du Sud et en Perse, la kofta désigne une boulette de viande épicée. En Inde, elle a été adaptée en version végétarienne (base de pomme de terre, pois chiches et/ou chou-fleur). On retrouvera ainsi la délicieuse malaï kofta à la pomme de terre, servie dans une sauce au yaourt épicée. Autre élément turco-mongol, le kebab est très commun en Inde. Rien à voir avec notre döner kebab, ici c'est une brochette de viande hachée et grillée, appelée aussi shikh kebab. On en retrouve des versions végétariennes au paneer (fromage). On notera d'ailleurs le shahi paneer, un curry de paneer avec tomates, oignons, purée de noix de cajou, beurre clarifié et crème. Le terme « shah » (empereur) nous rappelle qu'il était servi à la cour moghole.
Venu du Cachemire, le korma est emblématique de la cuisine mughlaï. Généralement à base de poulet ou d'agneau, parfois de légumes, ce ragoût se compose d'une sauce très crémeuse à base de purée d'amande ou de noix de cajou, de yaourt et d'épices variées. Si le four tandoor serait originaire du Penjab, au nord du Rajasthan, le poulet tandoori est devenu depuis longtemps un plat très apprécié dans la région. On le laisse mariner une nuit dans une préparation à base de yaourt et d’épices, puis il est passé au four. Le poulet tikka possède une marinade et une cuisson similaires, mais la viande est coupée en cubes. À noter : le poulet tikka masala (en sauce) que l'on retrouve en Occident est probablement une invention anglaise, et en Inde vous en retrouverez principalement dans les restaurants pour touristes. C'est également le cas de nos chutneys, sorte de confitures épicées en Europe, qui, en Inde, sont bien généralement préparées avec des ingrédients frais, quoique parfois cuits aussi, sans excès de sucre. Enfin, le raïta, yaourt avec concombre, menthe, tomate, etc., servi très frais, est idéal pour apaiser son palais après un plat très pimenté.
Desserts et boissons
Parmi les douceurs les plus populaires du Rajasthan, on citera le ghevar, un biscuit frit et croustillant, imbibé de sirop et de lait concentré sucré, puis décoré d'amandes hachées, originaire de Jaipur. Les balushahi sont de petits beignets moelleux au sirop. Les churma ladoo sont de petites boules de miettes de biscuits liées avec du caramel et roulées dans des graines de pavot. Le mawa kachori est un kachori sucré, c'est-à-dire un beignet friable, ici garni de noix et de pistaches. Les chhena malpua sont des pancakes au fromage frais ou au paneer imbibés de sirop à la cardamome. Très nourrissant, le doodhiya kheech est un porridge de blé au lait, parfumé au safran et la cardamome, parsemé d'amande et de noix. Les dilkushar sont des mithaï – des bouchées fondantes à mi-chemin entre un gâteau et du nougat – à base de farine de pois chiches, de caillé de lait, d'amande, de cardamome, et sont garnis de pistaches. Très proche, le alwar ka mawa est légèrement plus spongieux.
Mais on retrouvera également d'autres classiques de la pâtisserie indienne, notamment à Delhi. On citera les gulab jamun, des beignets au caillé de lait imbibé d'un sirop à l'eau de rose et au safran, ou encore les barfi, des mithaï au lait concentré sucré. Les kaju ki barfi, en forme de losange, sont à base de noix de cajou et généralement décorés de varq (feuille d'argent). Les modak sont des bouchées vapeur en forme de bulbe ou de poire, fourrées de noix de coco, de jaggery (sucre de palme), de muscade et de safran. Le kheer est un riz au lait parfumé avec cardamome, raisins secs, safran, noix de cajou et pistaches. Le aam shrikhand est un pudding à base de yaourt parfumé à la mangue, alors que le gajar ka halwa est une compotée de carotte râpée avec lait concentré et noix. D'origine moghole, le shahi tukda est un riche pain perdu infusé au safran. Enfin, le kulfi est un dessert glacé au lait concentré, parfumé de safran, cardamome, pistache et amandes.
Les jus de fruits frais sont délicieux et s'achètent à chaque coin de rue dans des fresh juice shops. Assurez-vous que votre jus ne soit pas coupé avec de l'eau courante. Le lassi est un yaourt battu jusqu'à devenir mousseux. Il peut être agrémenté d'une pointe de sel ou de fruits, comme la mangue ou la banane. Le thé – noir – ou chaï est LA boisson nationale en Inde. Mélangé à du lait et du sucre, puis agrémenté d'épices (gingembre, cardamome, cannelle et poivre), il devient alors un masala chaï. Vous le trouverez absolument partout : dans la rue, à la carte du moindre restaurant ou dhaba, dans les gares, dans le train, etc. Le thé est cultivé en Assam, à Darjeeling (Bengale-Occidental) et dans le Kerala. Les Indiens ne sont pas de grands consommateurs de café et il est souvent assez médiocre, même si de plus en plus de locaux, souvent jeunes, apprécient des cafés plus goûteux que l'on retrouve dans de grandes chaînes occidentales.
Côté alcool, la bière est la boisson alcoolisée la plus consommée dans le pays, notamment la Kingfisher, la plus célèbre bière indienne. On trouvera également du vin, produit dans l'état du Maharashtra, d'une qualité variable. Certaines familles royales du Rajasthan faisaient produire leurs propres liqueurs, et si beaucoup de recettes se sont perdues avec le temps, la marque Royal Heritage Liqueur a tenté de faire revivre cette tradition ancienne. Leur liqueur signature, le Chandra Haas, est un mélange concocté pour la première fois en 1863 avec près de 80 herbes, dont le safran, la rose, le bois de santal blanc, la noix de muscade et l'anis. On notera que dans certaines villes sacrées du Rajasthan comme Pushkar et Nathdwara, la consommation d'alcool est prohibée.