Un pilier de la culture lao
L’éléphant fait partie intégrante de la culture et de l’histoire du pays. Il est d’ailleurs considéré comme l’animal officiel de la nation. Dans le bouddhisme, l’éléphant est considéré comme sacré. L’animal, symbole de force, de patience, de sagesse, mais aussi de prospérité, est également souvent mentionné dans les discours de Bouddha, notamment dans l’une de ses paraboles les plus célèbres, Les aveugles et l’éléphant. Des statues d’éléphants gardent parfois les pagodes, comme les deux éléphants blancs postés à l’entrée du Vat Mixay à Vientiane. L’animal est également souvent représenté dans l’enceinte des temples ou à la base des that (ou stupas), notamment au splendide Vat Xieng Thong de Luang Prabang.
Une espèce menacée
L’espèce présente au Laos est l’éléphant indien (Elephas maximus indicus), une des 3 catégories d’éléphant asiatique, plus petite que son cousin d’Afrique. À l’état sauvage il vit en petit troupeau mené par une femelle, arpentant les forêts pour satisfaire son régime herbivore. À noter que seuls les mâles possèdent des défenses. Son espérance de vie est d’environ 60 ans en milieu sauvage, et 40 ans en captivité. De nos jours il resterait environ 700 individus sur le territoire, dont les trois quarts vivrait en captivité. Il faut noter que le pays a mis en place en 1993 des zones nationales de conservation de la biodiversité. L’ensemble de ces zones représente 12,5 % du territoire, soit une superficie totale de 3,3 millions d’hectares. Sans être des parcs nationaux en tant que tels, ces zones permettent de faire contribuer le tourisme à la préservation de l’héritage culturel ; de protéger les droits des minorités et développer leurs compétences dans un souci d’éco-tourisme. Si elles ne sont pas dévolues spécialement aux éléphants, ces zones permettent de protéger son habitat naturel et jouent donc un rôle non négligeable dans la conservation de l’espèce.
Causes du déclin de la population
La population des éléphants sauvages et domestiques est en déclin et l’espèce est menacée, mais ces deux populations font face à des problèmes différents. La déforestation est la cause principale de la baisse du nombre d'éléphants sauvages. Le Laos a pratiqué une déforestation intensive, notamment pour répondre à la demande de bois de la Chine et du Vietnam. Le pays ne dispose aujourd'hui que d'environ 40 % de la couverture forestière, contre 70 % dans les années 1950. La diminution de ces forêts mène à la fragmentation de l'habitat et les éléphants sont incapables de suivre des schémas de migration normaux. La disparition de son habitat naturel conduit l’animal à se rapprocher des villages et des plantations, ce qui conduit à des conflits avec la population.
Les éléphants en captivité sont utilisés à 90 % comme main-d’œuvre pour le travail du bois, malgré les strictes restrictions mises en place par le gouvernement. L’animal et son cornac s’occupent du débardage, activité qui consiste à transporter les arbres abattus vers le lieu de dépôt ou de stockage. Le cornac est le maître et le guide de l’éléphant durant toute sa vie. Ce métier se passe de génération en génération. Les femelles sont principalement utilisées pour ce travail, car les mâles ont davantage tendance à être agressifs et imprévisibles. De plus, les propriétaires n’encouragent pas la reproduction, car la grossesse d’une femelle induit qu’elle ne pourra pas travailler pendant les 3 années de gestation et de lactation. Il y a donc très peu de naissances chez les individus domestiqués.
Le braconnage est une autre menace, qui plane aussi bien sur les animaux sauvages que domestiques. Des parties du corps de l’éléphant, comme la peau, les organes, ou les ongles, sont recherchées en Chine ou au Myanmar pour confectionner des remèdes de médecine traditionnelle, des aphrodisiaques… Une manne financière qui tente de nombreux braconniers…Programmes de conservation de l’espèce
Au Laos il existe plusieurs lieux de protection des éléphants d’Asie. Le Centre de conservation des éléphants à Sayaboury (Elephant Conservation Center) est une des références en la matière. Il abrite une trentaine d’individus et, grâce à son programme de reproduction, le centre a pu mettre au monde plusieurs éléphanteaux. Leur programme inclut la réintroduction des éléphants dans leur milieu naturel. Le centre dispose également d’un hôpital qui soigne gratuitement les éléphants malades ou blessés, à condition qu’ils soient amenés par leur cornac. L’ONG ElefantAsia (www.elefantasia.org) est associée au centre. Deux Français sont à l’origine de cette organisation qui propose plusieurs programmes. Entre autres, une clinique vétérinaire mobile pour procurer des soins aux éléphants sur leur lieu de vie, des médiations pour gérer les conflits homme/éléphant, des campagnes de sensibilisation des populations… La formation des cornacs est capitale pour l’amélioration des conditions de vie de l’éléphant. Des programmes sont organisés pour parfaire la relation entre l’animal et son cornac, et pour que les anciens fassent profiter de leur expérience aux plus jeunes. C’est grâce à ElefantAsia qu’a été créé en 2006 le Festival des Éléphants de Sayaboury. Chaque année au mois de février, ce festival met à l’honneur l’icône du pays afin de sensibiliser la population nationale et la communauté internationale à la préservation de l’espèce. Parmi les activités de ce petit événement : les traditionnelles parades des éléphants, danses typiques, baci en l'honneur des pachydermes. La fête se termine avec l’élection du plus bel éléphant. D’autres camps existent dans le pays, citons notamment l’Elephant Village Sanctuary & Resort, MandaLao, le Mekong Eléphant Camp… Tous veillent à respecter de nouveaux critères basés sur un tourisme responsable. Ils ne proposent plus de balades à dos d’éléphant mais plutôt des promenades à côté et les cornacs ont désormais l’interdiction d’utiliser des pics pour guider l’animal. Vous verrez d’ailleurs les agences de voyage communiquer sur ce sujet : « No ride, no hook ». Ils proposent des activités variées pour les touristes : s’occuper des éléphants, leur donner à manger, les laver… Paradoxalement, c’est justement avec le financement par le tourisme que ces centres peuvent fonctionner et ainsi travailler à la conservation de cette espèce menacée.