Découvrez la Croatie : Les enjeux actuels

Jeune démocratie, la Republika Hrvatska (HR) s'est bâtie sur sa Constitution du 22 décembre 1990. Si le Parti social-démocrate (SDP), un temps au pouvoir, a montré l'aspiration des Croates à plus de justice sociale, plus de moyens contre la corruption, c'est l'Union démocrate croate (HDZ), la coalition de droite conservatrice, qui domine la vie politique croate depuis l'indépendance. En 2013, l'entrée dans l'Union européenne a nourri des espoirs sur le plan du développement économique, structurel et culturel. De grands travaux furent entrepris et Andrej Plenković, le Premier ministre, pouvait se féliciter du passage complet à l'euro et de l'intégration de la Croatie à l'espace Schengen. Son gouvernement doit cependant gérer de gros dossiers, entre autres les conséquences économiques de la guerre en Ukraine, les pressions inflationnistes, la hausse des prix, les questions sanitaires, le déclin démographique ou la transition écologique.

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Années 2015-2016, chaos au gouvernement

À partir de 2011, les divers gouvernements ont adopté une stratégie de préadhésion à l’UE. Ils ont mis en place des réformes structurelles, elles-mêmes financées sur des fonds européens (10,7 milliards d’euros). Principaux secteurs concernés, les infrastructures de transports, l’efficacité énergétique, la compétitivité des PME, la transition écologique.

Au début du mandat de Kolinda Grabar-Kitarović (HDZ), début 2015, la vie politique croate se divise sur fond de crise migratoire majeure. Le virement à l’extrême droite ramène des rhétoriques connues (valeurs traditionnelles et patriotiques, lois antiavortement, repli identitaire). Six mois après la constitution de ce treizième gouvernement radical, avec un Premier ministre ultracatholique (Tihomir Orešković) et un révisionniste à la Culture (Zlatko Hasanbegović), la grogne sociale s'amplifie. Une motion de défiance dénoncé la dérive de cette droite dure, qui proclamait la réforme de l’éducation ou la mainmise sur les médias, tout en alimentant des suspicions de conflits d’intérêts autour de Tomislav Karamarko, le vice-Premier ministre. Les députés au pouvoir et les élus du Parti social-démocrate (SDP) n’ayant réussi à s’entendre, la dissolution du Parlement fut votée le 20 juin 2016. Lors des élections législatives anticipées (11 septembre 2016), le HDZ parvient à se maintenir au pouvoir grâce notamment au ralliement d'un parti conservateur Most, proche de l’Église catholique. Au second tour de l'élection présidentielle (2019-2020), c'est Zoran Milanović, président du SDP et Premier ministre entre 2011 et 2016, qui l'emporte face à la présidente sortante.

Stabilité politique retrouvée

Andrej Plenković est nommé Premier ministre de cette nouvelle coalition (HDZ-MOST). Cet ancien diplomate et eurodéputé va s'attacher à maintenir une politique de droite, avec comme objectif de faire du pays une « Croatie normale », libérale et proeuropéenne tout en souhaitant tourner le dos à l'aile populiste et nationaliste de son prédécesseur. Sept nouveaux ministres, notamment à l'Éducation et à la Construction, suivent son programme libéral, qui reste orienté vers la restructuration de l'administration et des entreprises publiques. Certaines seront privatisées. En 2017, le gouvernement est sur tous les fronts : réforme fiscale, réduction des effectifs de l'État, révision des avantages sociaux des fonctionnaires, du régime hospitalier, crise de la démographie et droit à l'avortement. Une réforme des retraites est également adoptée en 2018. Très contestée par les syndicats de travailleurs, elle recule l'âge légal de départ à la retraite à 67 ans pour l'ensemble des salariés, au lieu de 65 ans pour les hommes et 62 ans pour les femmes auparavant.

Le tourisme, véritable manne économique

En portant l’effort sur la consolidation budgétaire et sur la stabilité monétaire, le pays était parvenu en 2020 à intégrer le mécanisme de taux de change européen (MCE II). Mais la crise sanitaire mondiale, liée à la Covid-19, et les deux tremblements de terre dans le nord du pays (mars et décembre 2020) ont accentué la récession (- 8 %), creusant du même coup le déficit de la balance courante. Avec la fermeture des frontières, la dépendance de l’économie croate au secteur touristique (20 à 25 % du PIB) s'est cruellement fait sentir. Relativement épargnée par la première vague du virus, la Croatie a connu une deuxième et une troisième vague plus sévère, comptabilisant un total de 1  265  075 cas recensés et 17 652 décès. Fin 2021, toutes les restrictions de voyages sont levées alors que les ministères du Tourisme et de la Santé créent conjointement un label de sécurité (Safe Stay in Croatia). Cette communication pérenne, pour les professionnels du secteur qui appliquent les recommandations sanitaires, rassurent les voyageurs. En novembre 2021, Emmanuel Macron s'est rendu à Zagreb pour signer un partenariat franco-croate, avec son homologue Zoran Milanović, afin d'aller vers plus de coopérations économiques, scientifiques et culturelles. Depuis l’indépendance du pays, ce fut la première visite officielle d’un président français en Croatie.

Si l'année 2022 n'a pas compensé entièrement l'impact de la pandémie sur l'économie, la reprise du tourisme redonne espoir d'un retour à la normale. Mais l'invasion de l'Ukraine par la Russie a fait revoir les prévisions de croissance à la baisse. Dès le début de la guerre (février 2022), la Croatie adopte le principe de solidarité de l’UE avec l’Ukraine, à la différence de son pays voisin, la Serbie prorusse. Atténuer l’impact de la guerre en Ukraine sur le secteur agroalimentaire est la principale préoccupation du gouvernement croate. Un certain nombre de mesures compensatoires d’urgence sont adoptées afin de garantir la sécurité énergétique et l’approvisionnement du marché en produits alimentaires.

Fin 2023, avec un PIB autour de 69,46 milliards d’euros, des prévisions de croissance ralentie et une inflation persistante, la Croatie reste, après la Slovénie voisine, l’économie la plus avancée de l'Europe du Sud-Est. Le rebond de la demande intérieure et surtout l’envolée du tourisme favorisent l'économie. Véritable manne de devises et d’investissements étrangers, les capitaux se concentrent sur le littoral adriatique, dans les archipels, la capitale et les cités historiques.

Passage à l'euro, espace Schengen, des raisons d'espérer

Cette mono-industrie présente d'autres risques. Son impact environnemental se conjugue à la faible productivité industrielle globale (bois, textile, transformateurs électriques, turbines, pièces autos, bateaux, médicaments, agroalimentaire). Alors que les importations augmentent, l'agriculture et la pêche dépendent du marché européen. Pour entreprendre les réformes nécessaires à un développement économique durable, notamment dans l'énergie et les transports, l'investissement public croate bénéficie toujours des fonds structurels européens. Avec ses 6 milliards d'euros de fonds de relance, en 2023, la Croatie est toujours le premier récipiendaire par habitant des fonds de la Communauté.

L'accord unanime des ministres de l'Intérieur européens sur l'entrée de la Croatie dans l'espace Schengen a eu pour effet de supprimer les files d'attente de véhicules aux frontières hongroises et slovènes. Circuler librement dans ce vaste territoire de l'UE devrait aussi profiter au tourisme. En contrepartie, la Croatie doit assurer un contrôle rigoureux aux frontières extérieures de l'Europe, où la pression migratoire reste élevée (route des Balkans occidentaux). Elle doit aussi s'engager à plus de coopération policière afin de lutter contre la criminalité organisée ou le terrorisme.

L'adhésion complète à la zone euro apporte un changement monétaire majeur, qui est censé offrir des avantages économiques et financiers au pays mais elle comporte des risques de pressions inflationnistes. Une hausse des prix fut immédiatement ressentie dès sa mise en place (janvier 2023). Les commerçants, les opérateurs de télécommunications, les banques, l'hôtellerie, la restauration et globalement tous les services touristiques en ont profité pour gonfler leurs bénéfices, ce qui rend nostalgiques nombre de Croates. Pour rappel, la kuna, l'ancienne monnaie locale, fut supprimée puis réintroduite en 1994 afin de garantir l'autonomie monétaire du pays, suite à sa déclaration d'indépendance en 1991.

Le chômage des jeunes toujours préoccupant

Le taux de chômage, qui avoisinait les 9 % en pleine pandémie, est redescendu à 6,8 % en 2023. Il touche plus de 20 % des jeunes de moins de 25 ans. Conséquence, alors que la population vieillit, les jeunes Croates, diplômés ou pas, émigrent massivement, en Europe du Nord notamment. La plupart de ceux qui restent au pays souhaitent s'orienter ou se reconvertir dans le secteur tertiaire, les services du tourisme, alors que le revenu mensuel brut par habitant est de 1 162,39 €, avec de fortes disparités selon les régions. Dans les prévisions de l'Exécutif, une meilleure orientation de l'emploi, des retombées touristiques plus équitables et un probable allègement de l'imposition des revenus devaient soutenir la consommation des ménages et redonner confiance en l'avenir.

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