Découvrez la Turquie : Les enjeux actuels

La Turquie est un pays jeune. Avec 13 millions d’individus âgés de 15 à 24 ans, la Turquie a une population de jeunes plus élevée que celle de 20 pays européens.
Cette nation complexe n’est réductible à aucune idée reçue tant sa diversité interne est riche et tant les évolutions qu’elle connaît sont rapides. Il faut sortir des poncifs pour aborder la Turquie.
Ce grand pays est passionnant, car il est à la fois proche (c’est le monde gréco-romain antique, aux sources de la chrétienté) et éloigné. Par son histoire, sa taille, sa situation géographique, son peuplement, la Turquie appartient à des mondes différents, convoqués tour à tour par ses dirigeants. Elle est tout à la fois européenne, méditerranéenne, balkanique, caucasienne, pontique et moyen-orientale, ce qui fonde sa richesse et sa vocation de pont et d’interface. Si l’on remonte aux grands-parents, plus de 50 % de sa population aurait une origine extérieure aux frontières de la Turquie actuelle.

Barrage d'Atatürk © gokturk_06 - shutterstock.com.jpg

Géographie et population

Le pays est vaste, très montagneux et très diversifié dans ses paysages : littoraux presque subtropicaux du nord-est, régions méditerranéennes, steppe continentale de l’intérieur, plus de la moitié de sa superficie se situe au-dessus de 1 000 m d’altitude. En 2022, la Turquie comptait 83 millions d’habitants. Et même si sa dynamique a ralenti pour rejoindre les taux européens, sa population atteindra sans doute les 85 millions en 2025.
Ce sont les parties de la population les plus conservatrices ainsi que la communauté kurde qui maintiennent les comportements démographiques élevés. De plus, depuis son arrivée au pouvoir, Erdoğan encourage vivement la natalité, considérant le minimum d’enfants par femme à trois enfants. Il fait du poids démographique, face aux Européens, aux Balkans ou au bassin méditerranéen, une composante de la politique du pays.
La Turquie est désormais un pays fortement urbanisé à plus de 75 %. Aux concentrations urbaines, où vit la majorité de la population et se rassemblent les activités, s’opposent de vastes zones rurales sous-peuplées et délaissées. Et ce contraste est amplifié par le manque de gestion des campagnes, l’absence d’une politique d’aménagement du territoire et l’inexistence de régions administratives.

Économie

La Turquie est entrée dans l’économie industrielle et de services depuis la fin des années 1980. Elle exporte en majorité des produits manufacturés et des services. Son agriculture en revanche peine à affronter la concurrence internationale. Ce dernier secteur n’est pas encore concerné par l’accord d’union douanière avec l’UE, pourtant effectif depuis le début de l’année 1996. 
L’économie informelle reste très présente dans le pays. C’est le fait des femmes notamment qui participent encore peu à l’économie formelle, avec le taux le plus faible de l’ensemble des 52 pays de l’OCDE.
Le dynamisme de la croissance turque repose sur les exportations, sur le développement de la production électrique et sur la consommation grâce au recours au crédit encouragé par la politique économique du gouvernement. Pourtant, depuis 2018, la Turquie connaît une succession de crises économiques et monétaires avec une inflation record en 2022 de 85 %. Les prix flambent et les Turcs ne cessent de voir leur pouvoir d'achat s'effondrer tandis que la livre turque dévisse. Elle a perdu 28 % de sa valeur face au dollar en 2022, et en 2021 elle s'était effondrée de 44 % par rapport au billet vert. 
D'autre part, la Turquie n’assume pas encore totalement sa diversité interne du point de vue politique. La question kurde est toujours dans l’impasse. Sur ce point précisément, le pays n’est pas encore pacifié. Si les gouvernements du Parti de la Justice et du Développement (AKP) qui se sont succédé ont réalisé des efforts inédits sur ce terrain, la tentation de régler le « problème » par la force reste présente. Les actions militaires des Turcs en Syrie mais aussi l’attentat du 13 novembre 2022 à Istanbul ont sapé la reprise du dialogue avec cette minorité. En outre, l’instabilité d’un certain nombre de pays aux frontières de la Turquie, de la Géorgie à la Syrie, ne favorise pas l’apparition d’une solution à ce conflit kurde chronique.

En juin 2023 auront lieu les élections présidentielles et législatives. Au pouvoir depuis 2003, le président Erdogan briguera un nouveau mandat. Seul membre de l’OTAN à ne pas appliquer les sanctions sur la Russie depuis le début du conflit en Ukraine, la Turquie a vu augmenter les échanges commerciaux avec Moscou de 40 % au cours des six premiers mois de 2022. Le pays joue un rôle diplomatique de médiation entre les belligérants. En 2022, Ankara a également rétabli ses relations diplomatiques avec Israël après douze ans de suspension.

La question européenne

La Turquie a été candidate à l’Union européenne dès 1987, mais les Européens ne reconnaissent ce statut qu’en 1999. Cette volonté de rapprochement avec les instances européennes pousse le pays à mettre en place des transformations qui vont dans le sens des droits et des libertés. Mais l’entrée du pays dans l’UE ne cesse de faire l’objet de débats récurrents depuis 20 ans, car les enjeux liés à son acceptation soulèvent des questions d’ordre à la fois historique, religieux, démographique et géopolitique. Elle interroge les frontières du continent européen, le poids de l’islam, le poids politique de ce nouvel entrant, champion démographique, et bien d’autres pierres d’achoppement géopolitiques telles que la reconnaissance de la République de Chypre.
Aujourd’hui, avec tous ses potentiels, ses contradictions et ses zones d’ombre, une possible entrée de la Turquie au sein de l’Union européenne ne semble même plus envisagée. Les nombreuses mesures et dérives autoritaires du président turc Recep Tayyip Erdoğan n’arrangent en rien la situation, et sont autant de signes interprétés comme des « agressions ostensibles » à l’encontre des valeurs prônées par l’Union. En effet, le pays a bel et bien pris ses distances avec les interlocuteurs européens : arrestations arbitraires après le coup d’État manqué de 2016, omnipotence présidentielle, interventions militaires en Syrie, dénigrement de certains partenaires de l’UE, démonstrations de force en Méditerranée orientale, etc. L’horizon de l’Union semble bien loin…

Écologie

Concernant les domaines de l’environnement et de l’écologie, la Turquie peut être considérée comme un pays en voie de développement. Repliée sur elle-même durant de longues années, c’est à l’arrivée du Premier ministre Turgut Özal, qui succède à un régime militaire en 1983, que le pays bascule dans l’économie libérale. La suite est un film accéléré : boom touristique, secteur du BTP en pleine expansion, industrialisation à outrance, privatisations en série…, le scénario est assez classique. À la même époque survient l’éclatement de l’URSS, rendant les équilibres régionaux délicats ; l’écologie n’est alors naturellement pas le premier des soucis.
Aujourd’hui encore, les lois sur l’environnement ont du mal à être appliquées et le pays est confronté à des lacunes dans l’éducation et à un défaut de moyens investis dans ce domaine. Tous ces facteurs contribuent à placer l’environnement et l’écologie à la dernière place dans la liste des enjeux prioritaires du gouvernement.
De son côté, la nature ne pardonne pas certaines négligences, comme la déforestation. L’érosion terrestre est une véritable épée de Damoclès. En effet, on estime que 85 % de la superficie du pays est concernée à divers degrés, et 58 % dans un état préoccupant ! Le projet d’implantation de centrales nucléaires sur le sol turc d’ici quelques années (à horizon très proche) est également l’un des gros challenges auxquels les défenseurs de l’écologie doivent faire face. Les barrages sont un autre point noir de la protection de l’environnement en Turquie. Or, ils se multiplient. Face à la pénurie d’électricité, l’État turc a lancé de vastes chantiers de construction de barrages, au détriment de la faune et de la flore qui sont dévastées par les infrastructures, mais aussi des villageois et des bâtiments historiques. Le tristement célèbre (et tout récent) exemple d’Hasan Keyf, dans le sud-est du pays, est un exemple criant de cette politique qui, dans la logique de l’efficacité et du profit, fait fi du passé et du patrimoine. Un barrage hydroélectrique a condamné la cité plusieurs fois millénaire. La ville historique et ses monuments ont sombré sous les eaux du Tigre en avril 2020.
Le mouvement écologiste turc est encore très jeune et ne dispose pas d’assises très solides et bien ancrées dans le paysage politique du pays. C’est seulement au début des années 1980 qu’il voit le jour. Le terme d’environnement apparaît pour la première fois juridiquement dans la Constitution de 1982 (dans l’article 56). Un an après, une loi est promulguée et plusieurs décrets suivront, qui favorisent le rôle de la Compagnie des Eaux (DSI).
Fort heureusement, tous les signaux actuels montrent un virement de cap majeur et les défenseurs de l’environnement se multiplient. Le chemin à parcourir est encore long et les inégalités régionales importantes, mais les efforts sont encourageants. Les négociations enflammées avec les instances de l’UE et la bonne volonté affichée par les autorités constituent un autre espoir dans le domaine. Jadis farouches adversaires du régime turc, les Verts sont devenus ces dernières années de solides alliés dans l’aventure épineuse de l’UE. D’autre part, on assiste par-ci par-là à des projets en faveur de l’environnement collectif, allant de la réhabilitation de plusieurs bassins, comme ceux de Gediz ou de Menderes (mer Égée), à l’accélération du reboisement. Malheureusement, le milieu maritime reste toujours l’enfant pauvre de la politique environnementale turque. Inauguré en mars 2022, le pont des Dardanelles relie Europe et Asie.
 Avec une portée de 2 023 mètres, il est le plus long pont suspendu jamais construit par l’Homme.

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