Découvrez le Kazakhstan : Beaux-Arts (Peinture / Sculpture / Street Art / Photo)

Terre des steppes désertiques et des monts de l'Altaï, le Kazakhstan se démarque pour la qualité de ses arts appliqués. Mais il serait dommage de limiter ce pays à ses traditions. Une scène contemporaine passionnante mérite aussi toute notre attention. Par sa situation géographique, ce pays d'Asie centrale est un hybride qui a absorbé toutes les influences, venues d'Orient et d'Occident. Les premiers peintres ont ancré leur pratique dans la culture soviétique, avant de poser les jalons d'un style unique. Tout au long du vingtième siècle, les arts plastiques ont connu une histoire en accéléré. Assimilant toutes les innovations, des personnalités passionnantes de la scène culturelle dépeignent leur nation. Au cœur de la vie culturelle, Almaty bénéficie d'une multitude de musées et d'une explosion de galeries d'arts. N'oublions pas son street art facétieux et engagé. Mention spéciale à la photographie du Kazakhstan dans toute sa diversité.

Joyaux de la préhistoire

Les premières formes d'expression au Kazakhstan remontent au Paléolithique. C'est dans les montagnes du Hantau et du Karatau qu'ont été découvertes les plus anciennes silhouettes animales incisées dans la roche. Les pétroglyphes plus tardifs, du Néolithique puis de l'Âge de Bronze, se concentrent dans les grottes de Bayanaulsky (province de Pavlodar) et de Tamagaly. Sur ces parois ont été représentés des élans, des lions, un chasseur armé d'un arc, un bœuf traînant un chariot. Sur la rive nord du Lac Balkhash, des figures humaines s'affrontent dans un duel au sabre. Ces représentations sont précieuses car elles nous offrent un aperçu des coutumes des anciennes tribus.

A 170 km au nord-ouest d'Almaty, les montagnes Anrakai abritent le site de Tamgaly, nom signifiant « lieu peint », classé au patrimoine mondial de l'Unesco. Il recèle une exceptionnelle concentration de gravures. Pas moins de 5 000 pétroglyphes ont été dénombrés sur 900 hectares. Leur datation les situe sur une vaste période allant du IIe millénaire avant notre ère au XXe siècle. Grandes figures incisées, divinités solaires, scènes de chasse, danses rituelles, tâches quotidiennes, animaux… les motifs les plus courants sont les chevaux, les cerfs, symboles de pouvoir et de beauté. Les peaux de bête et la proximité des sites funéraires incitent à les associer à des rites. Ce site offre un riche catalogue de l'évolution des croyances des peuples des steppes d'Asie centrale.

Au premier millénaire avant Jésus-Christ, les tribus Saka produisent un art qui jette les bases de la culture scythe. La réalisation saka la plus célèbre porte le nom de Golden Man ou homme doré. Revêtu d'une armure, de bottes et d'un casque recouverts d'or, le Golden Man a bénéficié d'un savoir-faire admirable. Trouvé sur le site funéraire d'Issyk kurgan, une copie est visible au Kazakh Museum of archaeology à Almaty city. Symbole du patrimoine du pays, l'original a été enfermé dans une capsule temporelle pour le préserver.

Epoque médiévale

Au Moyen Âge, la voie commerciale de la Route de la Soie enrichit la culture des populations qu'elle traverse. De nouvelles techniques sont introduites. Plusieurs villes, dont Isfijab, Yangikent ou Kulan s'érigent en centres commerciaux importants, formant un pont entre l'Orient et l'Occident. À l'ère médiévale, l'activité culturelle se concentre à Otrar, Taraz, Balasagun, Sygnak et Sauran. C'est le temps des mausolées : Kozy-Korpesh et Bayan-Slu (VIIIe-Xe siècles), Alash-khan (XIIe-XIVe siècles), Dzhuchi-khan (XIIIe siècle). Sous l'influence islamique, les monuments sont ornés de mosaïque blanche et bleue, de motifs ciselés, d'inscriptions arabes et de majolique peinte.

L'essor d'une tapisserie et d'une poterie ornementées marque le Moyen Âge au Kazakhstan. Les tapis, dans les foyers, sont à la fois décoratifs et protecteurs. Parmi les motifs figuratifs les plus courants, citons les scènes folkloriques, la chasse, les oiseaux et bien sûr, le cheval, vénéré car essentiel pour se déplacer et se battre. Sacrifiés aux dieux, les chevaux étaient enterrés avec les guerriers.

Naissance de la peinture

Le mode de vie nomade constitue un frein à l'essor de la peinture sur toile. Mais l'effondrement de la culture nomade et la révolution soviétique coïncident avec la découverte de l'art russe dans ces contrées. C'est ainsi qu'au Kazakhstan, les beaux-arts au sens classique ont leurs origines au XIXe siècle, sous l'impulsion des peintres russes Vassili Verechtchaguine (1842-1904) et Nikolai Khloudov (1850-1935). Ces artistes voyagent en Asie Centrale, et peignent ce qu'ils voient. Scènes du quotidien, guerres, paysages et monuments sont montrés selon les techniques européennes. Verechtchaguine s'installe ensuite à Munich où il peint de nombreuses scènes de guerre avec un sens dramatique époustouflant qui fait sa renommée. Arrivé au Kazakhstan en 1877, Nikolai Khloudov enseigne l'art aux premiers peintres kazakhs, développant une école locale artistique. Une salle lui est dédiée au Musée central d'Etat du Kazakhstan, à Almaty. Son élève le plus célèbre, le peintre soviétique et kazakh Abylkhan Kasteyev (1904-1973) a été décoré de nombreux prix nationaux. Premier peintre professionnel, Kasteyev ajoute la créativité au réalisme de Khloudov. Il dépeint les paysages, les traditions, le peuple avec une liberté presque naïve. En 2014, le Home Museum of Abylkhan Kasteyev ouvre ses portes à Almaty.

Sergey Kalmykov (1891-1967) étudie à Moscou l'architecture, la peinture et la sculpture. Invité en 1935 pour peindre le décor du théâtre d'Almaty, celui qui est surnommé l'excentrique apporte l'avant-garde, et un fort esprit de liberté soutenu par ses théories sur la création.

Ecole d’art et style sévère

Après les années 1920 et 1930, période de l'émergence de la peinture, les années 1950 sont marquées par l'école de l'académisme soviétique. Elle évolue vers « le style sévère », propre à l'art soviétique, dans les années 1960. Né à la suite de la mort de Staline, ce style se caractérise par une liberté de traitement, une préférence pour le réalisme plutôt que pour l'idéalisme. Les deux décennies suivantes voient se former la « performance school ».

Dans les années 1950, les jeunes peintres du Kazakhstan étudient l'art à Moscou et Léningrad. Immergés dans la culture soviétique, ils apprennent à produire un art nationaliste par sa forme, et socialiste par son contenu. Les scènes narratives dépeignent une vie rurale emplie de nostalgie, glorifiant l'âge d'or des valeurs anciennes.

Les artistes majeurs se nomment, en peinture Aitbaev, Mambayev, Tansykbaev, Shardenov, et Telzhanov ; et en sculpture, Nauryzbaeva et Sergebaeva.

Tournant moderne

Dans les années 1960, les artistes tentent des explorations audacieuses. Leur rejet des normes académiques suscite l'indignation de leurs aînés. Le Rideau de Fer s'étiolant, ils entrevoient les révolutions picturales qui secouent l'Ouest comme le futurisme italien, Matisse et le fauvisme.

Une avant-garde se dessine à la fin des années 1980, avec la chute du Rideau de fer. Les codes établis sont mis à mal. La première exposition d'art intégrant les « idées interdites » a lieu en 1988. L'événement montre une grande variété de directions dans les pratiques novatrices. L'art s'imprègne de psychologie (Tulkeyev), de mysticisme (Sydykhanov), et des styles de Picasso (Akanaeva). En parallèle, un vent de renouveau souffle sur les arts traditionnels et décoratifs. Il se ressent dans toutes les écoles locales, ainsi que dans le travail de Menlibayev et Ghazaryan.

L'histoire des arts visuels est retracée au Musée d'État des arts Abylkhan Kasteyev à Almaty, fondé à partir des collections de la Shevchenko Kazakh State Gallery. À découvrir, le sculpteur Isaak Itkind, génie créatif salué pour son approche du bois par son ami Marc Chagall.

L'art contemporain occupe une place de choix dans ce musée, le plus grand du pays.

Indépendance

La déclaration d'indépendance du Kazakhstan est signée le 16 décembre 1991. Les changements se ressentent dans tous les domaines. Le pays s'ouvre aux missions diplomatiques, aux entreprises étrangères, qui offrent leur mécénat aux événements culturels, et par conséquent, aux acheteurs internationaux. Pour répondre à ce jeune marché, les galeries d'art ouvrent les unes après les autres. En 1995, est lancé l'événement « la Parade des galeries ». Depuis, tous les ans, les galeries exposent durant quelques jours un florilège de leurs découvertes. Une saine émulation qui nourrit la jeune création.

Les artistes disposent dès lors de lieux pour montrer leurs réalisations, et reçoivent des commandes. La reconnaissance ne se fait pas attendre pour, entre autres talents, Akzhana Abdalieva, Maksim Vedernikov, Dinara Dukenbayeva ou encore Carmine Barbaro.

De nos jours à Almaty, saluons l'Aspan Gallery, qui promeut les artistes contemporains sous la houlette de Merouert Kalieva.

Le symbolisme mythologique est le courant dominant du début du XXIe siècle.

Photographie

Les splendeurs naturelles du Kazakhstan offrent une source d'inspiration intarissable pour les photographes. Dans ce contexte, il n'est pas surprenant que des personnalités complexes partagent leur regard singulier sur leur pays.

Parmi les multiples talents, Sergey Khodanov se dédie à la photographie de rue. Il célèbre les centres urbains en racontant autant d'histoires et de facettes de la ville qu'il rencontre d'individus. Au lieu d'analyser Almaty, Khodanov transmet des instantanés pour mieux l'apprécier.

Sanat Ongarbaev immortalise de vastes étendues, des lieux abandonnés mais aussi des scènes prises sur le vif montrant les marginalisés tels qu'un ermite, des ouvriers, des circassiens. Partout, il trouve de la beauté et attire l'attention sur les oubliés de la société.

Basée à Almaty, Leila Turlybekova se munit de son appareil photo pour capturer des scènes du quotidien, des instants volés, que ce soit dans les transports, dans la rue ou dans des salles de sport. Par sa démarche sociale, elle alerte sur les questions de santé mentale et d'immigration.

A travers son travail de photographe et performeuse, Irina Dmitrovskaya s'intéresse à la notion de genre, d'égalité et d'identité. Elle reçoit en 2017 le Qazphoto Award pour le meilleur portrait.

Street art

L'art urbain est célébré tous les ans à l'occasion du Mural Fest Almaty.

Toute l'année, de nombreuses œuvres murales sont à admirer dans les rues de la ville. Ne pas manquer la longue fresque colorée signée Tanai et Zakir Ali de la Tigrohaud Crew, qui se déploie sur la façade de l'Almaty Gallery (Dostyk Avenue 44). Leur style rend ouvertement hommage à Matisse.

Un art de rue engagé s'affirme au Kazakhstan. Une véritable guerre par murs interposés oppose le gouvernement à un groupe de militants plasticiens. Ces derniers s'opposent à l'influence de Noursoultan Nazarbaïev, et à l'orchestration de sa succession, incarnée par la nomination de Tokaïev, après son départ du gouvernement en 2019. Les craintes de la population se traduisent par des œuvres d'art largement diffusées sur les réseaux sociaux. Certaines sont même devenues virales.

À l'intersection des rues Zharokov et Mynbaïev, des portraits stylisés de Nazarbaïev sont rehaussés de détails satiriques. Les murs sont à peine nettoyés par les autorités que d'autres caricatures surgissent. Ainsi, Nazarbaïev est réapparu affublé de surnoms comme le chiffre « 01 », ou l'ironique Forever Young (toujours jeune), en référence à sa longévité au pouvoir. Loin de s'essouffler, ce jeu de cache-cache booste l'imagination des jeunes artistes. À leur tête, le mouvement « Qazaq Koktemi » (printemps kazakhstanais), ne baissera pas les bras tant que leur ennemi ne s'effacera pas.

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