Les musique et danse traditionnelles
Si la musique traditionnelle jordanienne cultive des airs de famille avec celles de ses voisins, elle se distingue de ces dernières par sa forte influence bédouine. Représentant 5 % de la population locale, les Bédouins incarnent paradoxalement des figures emblématiques de la Jordanie dont la culture infuse amplement dans celle du pays. On y trouve beaucoup de poésies et de chants, certains improvisés d’autres non, souvent accompagnés de la vielle rabâb, de flûtes, de derbake (tambours) ou encore de claquements de pieds et de mains. Pratiqués a cappella, les huda et hjeyni sont des chants de chameliers destinés à encourager la monture lors des longs voyages. Accompagnés au rebâb, le dahiya (aussi appelé sahja, halaba ou encore samer) est généralement interprété par deux groupes alternés tandis que l'atâba ou le shurûqi, tous deux bâtis sur une mélodie improvisée, sont chantés en solo pour exprimer (généralement) la douleur et la tristesse. Dans la même famille, on distingue également le mawwal, chant mélismatique accompagné au tambour derbake. Côté danse, les Bédouins pratiquent la dabkeh signifiant « martèlement des pieds », une forme masculine accompagnée de chants rapides, parfois exécutés par les femmes et entrecoupés de martèlement de pieds (d’où son nom).
Si le poète-chanteur bédouin Jamal Khleif est considéré comme l’un des meilleurs joueurs de rebâb de Jordanie, c’est sans aucun doute Omar Abdullat qui emporte la palme du chanteur bédouin le plus populaire du pays. Si populaire d’ailleurs qu’il a largement contribué à faire connaître la musique bédouine. Des chants patriotiques comme Hashimi, Hashimi et Jeishana sont devenus des standards jordaniens.
Outre les esthétiques bédouines, on trouve également dans le pays des formes musicales communes au monde arabe. Par exemple, le zajal, poésie orale traditionnelle d'origine arabo-andalouse, semi-improvisée et semi-chantée. Encore très vivante dans le Levant (notamment au Liban, en Palestine et en Jordanie) cette tradition s’accompagne parfois d’ensembles jouant de la flûte shabbaba, en roseau, très typique, associée à d’autres instruments de la région comme le ney (flûte très courante dans le monde arabe), le mijwiz, instrument à vent en bois à double tuyau et à anche unique, l’arghul, similaire au précédent et utilisé depuis l’Egypte antique, le tablah, une percussion, le gerbeh, une sorte de cornemuse ou encore l’oud.
A cette esthétique populaire viennent également s’ajouter d’autres traditions du monde arabe comme le muwashshah et la qasida, deux formes poétiques, le dawr, genre de musique vocale et plus récemment l’ughniya, chant long apparu au milieu du XXe siècle pouvant durer jusqu'à une heure. Dans la cité portuaire d’Aqaba, l'ughniya s’accompagne de la fameuse lyre simsimiyya.
Un rendez-vous et une adresse à noter pour les amateurs de folklore : d’abord Pétra By Night, visite nocturne du site illuminé de 1 500 bougies et accompagné de musique traditionnelle puis ensuite le théâtre romain d’Amman, édifice construit sous le règne de Marc Aurèle au IIe siècle et creusé à même la montagne, cadre magnifique pour des spectacles de danse et de musique traditionnelle en été.Les musiques savante et classique
En musique savante aussi, les codes du monde arabe ont cours en Jordanie. En lieu et place des gammes, ici, l’écriture musicale se base (traditionnellement) sur le makam (ou maqam) un système d’organisation des échelles mélodiques et de conventions esthétiques que l’on retrouve du Maghreb à la Chine.
Aussi, on élabore ici des noubas, ces grandes compositions formées d’une suite de pièces vocales et instrumentales exécutées selon un ordre précis, base de toutes les musiques contemporaines arabes. Connaissant des variations propres à chaque pays les pratiquant, ces compositions démarrent généralement lentement, puis s’accélèrent en crescendo, guidant l’émotion jusqu’à un paroxysme de puissance et de profondeur.
Parmi les musiciens nationaux importants, Sakher Hattar est considéré comme un des plus grands oudistes contemporains tandis que le percussionniste Hani Naser fut une référence aussi bien dans le domaine du derbake que du oud.
Si la musique classique, selon l’acception occidentale, n’a pas (encore ?) prospéré sur place, elle n’est pas totalement absente. Le pays compte un ensemble philharmonique, l’orchestre symphonique d’Amman (ASO), devenu JOrchestra, inscrit dans l’ouverture actuelle du Moyen-Orient à la musique classique. L’ensemble se produit généralement au King Hussein Cultural Center, édifice moderne du centre-ville. N’oublions pas de mentionner Saed Haddad, seul compositeur jordanien notable joué par quelques ensembles et festivals prestigieux d’Europe ainsi que Zade Dirani, pianiste dont les compositions marient variété et classique, à la manière d’un Richard Clayderman (et avec qui, sans surprise, il a collaboré).La musique populaire
La variété jordanienne cultive des airs de famille très forts avec celle des pays voisins. D’ailleurs des stars comme les Egyptiens Farid el-Attrache et Amr Diab ou encore la chanteuse libanaise Fairuz sont populaires ici aussi. Les Jordaniens adorent aussi quelques célébrités locales comme Omar Al-Abdullat, chanteur bédouin, mentionné précédemment, réputé pour ses chants patriotiques, Diana Karazon, gagnante de la version arabe de Pop Idol ou Hani Mitwasi, qui a inventé le genre « hispano-Levant » mélange de guitare flamenco et de folklore, tous les trois véritables stars locales.
Les musiques actuelles
Depuis que le groupe Rum, emmené par Tareq Al Nasser (une figure locale) a fait se rencontrer Orient et Occident dans ses chansons, au début des années 2000, la scène musicale actuelle jordanienne n’a cessé de s’épanouir. Réinterprétant le folklore jordanien en y invitant des esthétiques du monde entier, le groupe a gagné une notoriété régionale et internationale qui a poussé de nombreuses autres entités à se lancer. C’est ainsi que la Jordanie a pu jouir d’une scène rock plutôt dynamique portée par des groupes comme JadaL, Autostrad, Akher Zapheer ou El Morabba3 devenus des références incontournables dans le pays. Plus récemment, une nouvelle vague de jeunes compositeurs, encore plus ouverte et voyageuse, s’est également illustrée par l’amplitude de son éventail d’influences. Sign of Thyme et sa fusion orientale-jazz-ethnique en sont la figure de proue, ainsi qu’Albaitil Ashwai, groupe installé quelque part entre rock expérimental et transe de la musique arabe. Avec sa programmation conviant des jeunes talents de Jordanie et du monde arabe, le festival Al-Balad est un excellent rendez-vous pour découvrir la jeune garde locale.