Musiques traditionnelles
Le Nord du Viêt Nam est le berceau du ca-trù, musique poétique traditionnelle, chantée par des femmes adoptant une technique vocale singulière. Cette esthétique est apparue il y a plus de six siècles dans la province de Tonkin et est surnommée le « chant des courtisanes ». La voix vient se poser sur une base instrumentale exercée par un luth (dan day), et un tambour (trong chau) marque la ponctuation et signale le début des parties chantées. Avec l’aide de deux baguettes, la chanteuse bat elle-même le rythme en frappant un phach, planchette en bambou ou en bois, avec deux baguettes en bois. Reconnu par l’Unesco comme un patrimoine mondial immatériel depuis 2009, le ca-trù est interprété à l’origine durant les cérémonies communautaires, puis vient s’adosser à des moments rituels. Il est considéré aujourd’hui comme un divertissement à part entière.
Après la déclaration d’indépendance du Viêt Nam, le ca-trù manque de tomber dans l’oubli. La sauvegarde de ce style de musique ancestrale est permise, entre autres, par le Club de ca-trù de Hanoï, fondé en 1990, qui propose des représentations de (ca-trù, concert de musique traditionnelle) tout au long de l’année. Certains artistes comme la chanteuse Pho Thi Kim Duc ont marqué l’histoire du ca-trù.
Le chant alterné appelé quan ho vient, lui, du village de Ninh Diêm rattaché à la commune de Hoà Long. Cette pratique artistique a lieu durant les fêtes rituelles et repose sur la qualité vocale des artistes. Femmes et hommes, vêtus de costumes traditionnels, chantent en alternance a cappella. Les textes content des histoires d’amour ou bien des prières, suivant le contexte de la célébration. Ce style de musique est considéré par le public comme l’un des plus émouvants du Viêt Nam. Des artistes de musique plus populaire et actuelle comme Thuy Cai, Thuy Huong, Quy Trang ou encore Quang Vinh ont pu étudier le quan ho dans leur parcours musical.
Le hát chầu vãn est un style plus mystique, joué pour invoquer les esprits durant les cérémonies spirituelles. Des musiciens jouent de la vièle à deux cordes (dan nhi) ou d’un luth en forme de demi-lune (dan nguyet) et chantent. Cet art est très répandu dans la province de Nam Dinh, à Hà Nam et quelques autres provinces du nord du pays. Musique énergique et rythmée, elle accompagne le public vers une forme de transe. Il a fallu attendre 1986 pour que le gouvernement autorise cette pratique. L’artiste Phạm Văn Tỵ est réputé pour sa virtuosité en hát chầu vãn.
Musique classique
Il existe, au Viêt Nam, une pratique de la musique classique dont l’essor a été favorisé par la présence française en Indochine. Cette influence coloniale est visible également dans l’architecture du genre : l’Opéra de Hanoï, pouvant accueillir 900 personnes, et l’Haiphong opera house sont des répliques de l’Opéra Garnier, à Paris. Parmi les fiertés du pays, on peut citer le compositeur Nguyen Van Quy, le « Beethoven vietnamien », le pianiste Dang Thai Son, qui a remporté en 1980 le premier prix du Concours international de piano Chopin, mais aussi Lê Dung, chanteuse soprano de renom qui a contribué à la renommée lyrique du Viêt Nam à travers le monde.
Jazz vietnamien
Le Viêt Nam a vu naître un courant jazz il y a peu : c’est sans doute grâce à Nguyen Lê, artiste vietnamien de jazz établi en Europe, qui a contribué à populariser les sonorités vietnamiennes en mettant en lumière d’autres artistes locaux via des collaborations, tels que Ngô Hông Quang, Huong Thanh mais aussi le saxophoniste émérite Quyền Văn Minh, originaire d’Hanoï.
Musiques actuelles
Si le rock, la pop, le hip-hop, la musique électronique et même le métal émergent seulement depuis une poignée d’années au Viêt Nam, c’est que le régime politique a longtemps condamné la musique populaire, inspirée par l’Occident. Dorénavant, les bars et clubs ne doivent plus impérativement fermer avant minuit, la « musique rouge » (porteuse de valeurs socialistes, défendue par le gouvernement jusqu’à la chute du Mur de Berlin et la levée de l’embargo américain) n’est plus à privilégier. Le tân nhạc (« la nouvelle musique ») naît alors, et avec elle, la V-pop. À l’instar de la K-pop pour la Corée ou de la T-pop pour la Thaïlande, de jeunes artistes comme Lam Trường, Mỹ Linh, My Anh, Thanh Lam, Mai Khôi ou encore Son Tung M-TP produisent de la musique mainstream et font parler d’eux sur les réseaux sociaux. La musique traditionnelle, chantée en vietnamien et jouée par des percussions et instruments à cordes laisse la place à des sons plus électroniques, aux sonorités occidentales, avec des textes en anglais. Certains artistes s’affichent en solo, d’autres sous la forme de groupes (Monstar, Lip B ou Uni5), ceux-là appartenant bien souvent à des sociétés de divertissement. Aux côtés de la scène musicale internationale, la V-pop est notamment à l’affiche du Monsoon Music Festival, considéré comme étant le plus grand festival de musique international du Viêt Nam, et se déroulant chaque année à l’automne à Hanoï.
Danses traditionnelles
Dans le nord-ouest du Viêt Nam, la danse fait partie du quotidien. Chaque ethnie cultive sa propre pratique, associée directement à la vie spirituelle. Les danses folkloriques sont donc nombreuses et nourrissent l’identité artistique du pays tout entier.
Parmi les 54 différentes ethnies du Viêt Nam, les Thái sortent du lot avec leur danse traditionnelle nommée xòe. Ce rituel chorégraphique, symbole de solidarité communautaire et s’inspirant des activités quotidiennes de ce peuple, est reconnu comme étant patrimoine immatériel de l’humanité par l’Unesco. Hommes et femmes participent à cette pratique, ils portent des costumes traditionnels, forment un cercle en se tenant la main et tournent autour d'un feu. La danse s’exécute au rythme d’instruments tels que la cithare tinh tau (à deux ou trois cordes), des tambours et des gongs. Le xòe a lieu notamment lors de mariages, de fêtes populaires dans la région des Thái ou pendant la célébration du nouveau riz, un moment unique populaire qui survient après la récolte du riz dans les provinces montagneuses du nord du Viêt Nam.
Les Thái ont six anciennes danses xòe qui ont toutes évolué pour donner la forme qui se pratique encore aujourd’hui. On trouve, parmi les ancêtres du xòe, « Khắm khăn mơi lẩu » qui signifie littéralement « lever le mouchoir pour offrir la liqueur », mais aussi « Nhôm khăn » qui indique un « lancer des mouchoirs en l’air ». Ces formes étaient très animées, elles furent créées alors que l’artisanat du coton et du tissage était en pleine expansion. Ces danses, qui font brandir des mouchoirs aux motifs colorés et sophistiqués, mettent en avant le talent des femmes Thái.
Le xòe se transmet de génération en génération, sans distinction d’âge ou de sexe. Cette danse folklorique s’apprend parfois dans quelques écoles de la province des Thái, certains passionnés ont même ouvert des créneaux de cours ou organisent des expositions sur le sujet. Le gouvernement vietnamien a aussi mis en place des aides pour soutenir les artistes représentants de ce courant artistique, leur permettant de continuer à diffuser cette tradition culturelle.
La danse khen des Hmôngs est aussi l’image d'une communauté tout entière, celle des Hmôngs (ou Mongs), présents notamment au sud de la Chine et au nord du Viêt Nam, dans les régions les plus montagneuses. L’histoire leur attribue la réputation d’un peuple guerrier, c’est surtout l’une des communautés qui a le plus subi la guerre d’Indochine et qui reste encore aujourd’hui marginalisée. La danse est un moyen d’expression fort pour les Hmôngs. Celle-ci est interprétée par des garçons, est plutôt martiale, agile, même périlleuse. Cette danse met en scène un instrument de musique appelé le khen, qui n’est joué que par les hommes. Ces derniers se servent notamment du khen pour interpeller leurs premières conquêtes féminines. Lors de la danse éponyme, ils doivent pouvoir jouer de cet instrument et réaliser une succession de mouvements. Comme les autres danses traditionnelles, la danse khen se tient lors de fêtes de villages et autres célébrations populaires.
Théâtre
Tuong. Le théâtre a une place importante au sein de la société Vietnamienne. Les formes les plus classiques ont puisé leur source dans l’opéra chinois. La gestuelle et l’aspect cérémonieux des représentations ont donné naissance au tuong, qui évoque, sur scène, des récits historiques et est caractérisé par un maquillage très marqué des comédiens.
La légende raconte qu’un célèbre acteur chinois, Lý Nguyên Cát, fut emprisonné par les Vietnamiens. Pour purger sa peine, on lui demande d’enseigner les bases du théâtre chinois. Le premier artiste à se distinguer dans le tuong est Dao Duy Tu, qui devient l’un des dramaturges les plus respectés du pays. A Hanoï, on pourra assister à des représentations de tuong au Théâtre d’opéra traditionnel Hong Hà.
Le hàt chèo est un style théâtral autour du chant comique, apparu dans le delta du Fleuve Rouge, sous l’impulsion de la chanteuse Pham Thi Tran. Contrairement au tuong, le chèo présente un chant plus rapide, moins accentué, les personnages ne sont pas forcément issus de hauts rangs, les costumes sont moins sophistiqués. L’essence même du chèo n’est pas de raconter les prestiges historiques du pays, mais plutôt d’engager la discussion autour de sujets de société. N’importe quelle histoire, notamment la vie des paysans, trouve sa place dans du chèo, rendant ainsi la forme théâtrale très populaire au Viêt Nam.
Formés - le plus souvent dans une célèbre école à Hanoï - en danse, chant et théâtre, des artistes s’imposent encore sur la scène du chèo et parviennent à le faire rayonner. C’est le cas de Như Xuân Hinh, Quôc Truong, Thanh Ngoan ou encore Tu Long.
De nos jours, le cai luong et le théâtre moderne parviennent à éclipser davantage le hàt chèo et le tuong. Le cai luong a intégré beaucoup plus d’éléments modernes dans la mise en scène. Une forme théâtrale autour de « marionnettes sur l’eau » est devenue bien plus populaire ces dernières années au Viêt Nam que le théâtre traditionnel. Le public peut notamment aller en admirer au Thang Long Water Puppet Theater.