Le charme des maisons traditionnelles
La maison traditionnelle bretonne varie selon les régions. La pierre est très présente à l'ouest, notamment le granit, rose, blond ou gris : ses belles pierres de taille servent à réaliser les chaînages d'angle, les bordures de portes et de fenêtres, les cheminées, parfois les façades entières. Certaines zones lui préfèrent les petits moellons de schiste, particulièrement en centre-Bretagne. À l'est de la région, on utilise plutôt des mélanges à base de terre, tels que le pisé. Le toit, à forte pente, est recouvert d'ardoises, qui ont remplacé la chaume au XIXe siècle. Quelques belles chaumières ont été préservées, notamment à Lanvaudan, dans le Morbihan.
En campagne, la longère de plain-pied prédomine. Sur le littoral, serrées les unes contre les autres comme pour se tenir chaud, les petites maisons de pêcheurs, appelées pentys, ont des allures de maisons de poupée. Dans certaines régions, comme au sud du Finistère, elles sont enduites à la chaux et leurs volets ont des couleurs pétantes, peints à l'époque avec le reste des pots pour les bateaux.
Dans l'entre-deux-guerres, les architectes régionalistes ont repris les codes de la maison traditionnelle pour mettre au point le style néobreton : murs blancs (ou tout en pierres parfois), toit en ardoises et encadrements de granit. Alliant identité et confort moderne, les néobretonnes deviennent très populaires dans les années 1960 et prolifèrent dans les campagnes et les périphéries des villes.
Châteaux et nobles demeures à profusion
Les amateurs de belles pierres peuvent se réjouir : châteaux et manoirs se comptent par milliers. Un grand nombre de châteaux ont été érigés entre la fin du XIVe siècle et le début du XVe siècle, une période de paix et de prospérité, après la guerre de Succession. Vainqueurs, le duc de Bretagne Jean IV, ses successeurs et les grandes familles de la région bâtissent à tout-va, souvent sur la base de constructions existantes. Véritables démonstrations de puissance, ces châteaux fastueux allient la fonction militaire, avec leurs hautes murailles et leurs mâchicoulis, et la fonction résidentielle, avec leurs donjons aux airs de petits palais, dotés de pièces de réception, de grandes fenêtres, de belles cheminées... Le château de Dinan, œuvre phare de Jean IV, ceux de Fougères, Suscinio, Vitré, Combourg, La Hunaudaye ou encore Tonquédec, la tour Solidor à Saint-Malo et le Fort-la-Latte datent de cette époque.
Après le rattachement à la France au XVIe siècle, les châteaux se mettent peu à peu à la mode française. Face au gothique flamboyant qui persiste, comme à Josselin, un style Renaissance dépouillé s'impose doucement, comme au château de Kerjean et de Kergroadez dans le Léon, ceux du Rocher-Portail ou de Comper en Ille-et-Vilaine. Le classicisme s'incarne, lui, dans le château de la Bourbansais et celui, inachevé, de Quintin.
Aux XIVe et XVe siècles, fleurissent aussi de jolis manoirs gothiques, œuvres de la petite noblesse rurale, pléthorique en Bretagne. Ces résidences sans défenses ont une architecture volontiers ostentatoire : tourelles d'angles coiffées de poivrières, tour-escalier, encadrements de portes sculptés dans la pierre, salle de réception, cheminées monumentales, chapelle privative... Parmi les plus remarquables figurent le château de la Roche-Jagu à Ploëzal ou celui de Bois-Orcan à Noyal-sur-Vilaine.
Au fil du temps, la noblesse perd l'apanage du manoir, qui devient aussi celui de notables locaux et de riches marchands. À la fin du XVIIe et au début du XVIIIe siècle, la campagne de Saint-Malo voit éclore nombre de gentilhommières, érigées par les armateurs de la cité corsaire comme lieux de villégiature. Entourées de grands jardins à la française, ces malouinières aux intérieurs somptueux présentent toutes une architecture similaire, empreinte d'austérité : encadrements et chaînons de granit, toits en ardoise à quatre pentes raides, hautes cheminées, nombreuses fenêtres symétriques... Parmi la centaine de malouinières qui demeurent, certaines se visitent, comme la Chipaudière à Saint-Malo et la Ville Bague à Saint-Coulomb.
La Révolution malmène tous ces édifices, pillés, incendiés, confisqués, abandonnés, transformés en casernes ou en prisons, servant de carrières de pierres... Au cours du XIXe siècle, des châteaux extravagants et éclectiques voient le jour : Kériolet à Concarneau, Trévarez dans le Finistère ou encore Trédion dans le Morbihan.
Des cités au riche patrimoine
Plusieurs localités sont labellisées Ville d'art et d'histoire : Brest, Concarneau, Dinan, Dinard, Fougères, Lorient, Quimper, Rennes, Vannes et Vitré. Une vingtaine d'autres sont estampillées Petite cité de caractère, comme Bécherel, Locronan, Rochefort-en-terre, Tréguier... Sans compter les nombreuses villes historiques comme Auray, Pont-l'Abbé, Lannion, Morlaix, Pontivy ou Saint-Malo.
Les maisons à pans de bois font partie du patrimoine breton. Colorées, souvent dotées d'encorbellements, parfois de porches, ornées pour certaines de décors sculptés, leur construction s'est étalée sur plusieurs siècles. Rennes est la ville qui en compte le plus, devant Vannes, Morlaix, Vitré ou Dinan, l'une des cités médiévales les mieux conservées. À partir du XVIIe siècle, après plusieurs incendies ravageurs, les maisons à pans de bois sont enduites ou remplacées par de beaux hôtels particuliers en pierre. Dans certaines cités comme Quintin, Landerneau ou Pontrieux, ils témoignent du riche passé lié au commerce des toiles.
Églises et chapelles à la pelle
En Bretagne plus qu'ailleurs, le catholicisme a laissé la trace de son emprise et la région concentre un grand nombre d'églises. Elles sont souvent faites de granit, clocher compris en Basse-Bretagne, tandis qu'à l'est, on lui préfère une charpente couverte d'ardoises. La Bretagne recèle aussi une flopée de chapelles, souvent touchantes : Sainte-Barbe au Faouët, au creux d'une vallée boisée, Saint-Gonéry à Plougrescant, avec son clocheton penché, Kermaria-an-Iskuit à Plouha et sa fresque de danse macabre, Saint-Gildas à Bieuzy, lovée sous une roche, Saint-Michel-de-Brasparts, dominant les monts d'Arrée...
Dans les cités des sept saints fondateurs, les chantiers de cathédrales ont démarré dès le XIIe siècle et en ont duré plusieurs, ce qui fait qu'elles mêlent les styles roman, gothique et Renaissance. Parmi les plus belles figurent celles de Quimper, Tréguier et Dol.
Typiques des campagnes de Basse-Bretagne, les enclos paroissiaux ont fleuri aux XVIe et XVIIe siècles, âge d'or de la province, enrichie par le commerce du lin et du chanvre. Objets de rivalités entre paroisses, ces ensembles à l'architecture ostentatoire sont composés de plusieurs éléments, outre l'église : ossuaire, mur d'enceinte, cimetière, fontaine, chapelle reliquaire, porte triomphale, calvaire. Les plus jolis sont dans le Finistère : Sizun, Pleyben, Saint-Thégonnec...
Remparts et fortifications
Plusieurs villes médiévales conservent de beaux remparts, comme Saint-Malo, Dinan, Vannes, Moncontour ou Quimper. Au XVIIe siècle, sous le règne de Louis XIV, le marquis de Vauban fait édifier un vaste réseau de défense. En Bretagne, elles se concentrent sur les côtes et les îles. Sont ainsi construits ou remaniés la citadelle de Belle-Île-en-Mer et celle de Port-Louis dans la rade de Lorient, le fort de la Conchée en baie de Saint-Malo, la tour de Camaret, le château du Taureau en baie de Morlaix, les fortifications de Brest...
Autres éléments incontournables du littoral breton, vestiges du Mur de l'Atlantique érigé par les nazis lors de la Seconde Guerre mondiale, de nombreux blockhaus et bunkers rappellent la position stratégique de la Bretagne lors du conflit. Un patrimoine à découvrir au mémorial de la cité d'Alet, à Saint-Malo.
Les mues du XXe siècle
Écloses à la fin du XIXe siècle, les stations balnéaires se développent au début du XXe. Hôtels, casinos et villas extravagantes fleurissent à Dinard, Carnac, Perros-Guirec ou Bénodet, mêlant des styles variés : néogothique, orientalisme, Art nouveau, Art déco, pittoresque normand ou anglais...
Dans les Années folles, l'Art déco se propage dans toute la région, jusque dans les bourgs. Maisons bourgeoises et ouvrières adoptent ce style géométrique, qui inspire aussi nombre de constructions publiques. Le casino du Val-André, la piscine Saint-Georges à Rennes, le cinéma de Saint-Quay-Portrieux et l'immeuble Ty Kodak à Quimper font partie des joyaux du genre.
L'entre-deux-guerres voit également naître le mouvement des Seiz Breur. Initié par la graveuse Jeanne Malivel, il rassemble de jeunes artistes qui entendent sortir l'art breton de l'archaïsme, pour l'ancrer dans une modernité d'inspiration Art déco. Ils officient principalement dans les arts décoratifs (meubles, faïences, papiers peints...), mais influencent aussi l'architecture, comme au grand séminaire de Saint-Brieuc ou à la gare de Dinan.
L'époque est également marquée par l'engouement pour les mosaïques Odorico, une famille d'artisans italiens installée à Rennes. Leurs créations d'inspiration Art déco ornent les façades et les intérieurs de nombre de commerces, maisons et autres bâtisses. On peut admirer ces mosaïques en grand nombre à Rennes (piscine Saint-Georges, église Sainte-Thérèse...), mais aussi dans plus de cent villes de l'ouest.
La Seconde Guerre mondiale a fait des ravages, surtout à Lorient, Saint-Malo et Brest. Si Saint-Malo bénéficie d'une reconstruction dans l'esprit d'avant-guerre, les centres de Lorient et Brest, détruits à 90 %, changent radicalement de visage. La cité finistérienne est rebâtie sur ses gravats remblayés et, sous les auspices de l'architecte Jean-Baptiste Mathon, émerge un centre-ville nouveau, au plan rectiligne et au style inspiré par le mouvement moderne, avec de nombreux bâtiments aux façades blanches. La reconstruction de Lorient sera, elle, longue et laborieuse, sans plan ni cohérence d'ensemble. Elle suit aussi les préceptes du modernisme, mais de façon disparate, puisant dans les différentes modes de l'époque.
Les décennies suivantes voient le territoire s'urbaniser, les villes se hérisser de grands ensembles. Les plus emblématiques sont les tours siamoises des Horizons, à Rennes. Construites en 1970, elles détiennent toujours le record du plus haut gratte-ciel de Bretagne.