Mythologie et religion
Dans la Grèce antique, mythologie et religion étaient intimement liées. Mais la religion ne se résumait pas à la mythologie.
Origines. La mythologie prend forme lors des « Siècles obscurs », entre les XIIe et VIIIe siècles av. J.-C. Les habitants se retrouvent alors confrontés aux vestiges des civilisations mycénienne et minoenne disparues. Sans explication face aux ruines des temples et aux murs « cyclopéens » de leurs prédécesseurs, ils inventent les récits fondateurs de la nouvelle civilisation des cités.
Polythéisme. Commune à l’ensemble des cités, la religion grecque reposait sur le polythéisme : la croyance en plusieurs dieux à la fois « spécialisés » (la mer pour Poséidon, la guerre pour Arès…) et proches des humains, puisque ayant leur apparence, leurs qualités et défauts et vivant parmi eux. La mythologie constituait ainsi une des facettes de la religion, servant notamment à illustrer la vie des dieux.
Rites. La religion était structurée autour des concepts de la piété (et non la foi) et de l’impiété, du sacré, du pur et de l’impur. Elle ne possédait réellement ni dogme ni clergé, mais des intercesseurs tels les oracles. Esclaves et citoyens étaient libres de croire ou non. Toutefois, les rites organisés en l’honneur des dieux étaient une des clés de la vie civique, en particulier les cérémonies dédiées à la divinité protectrice de chaque cité.
Raison. Les Grecs croyaient-ils en leur mythologie ? Tous ces récits n’étaient sans doute pas pris au pied de la lettre. Car les Anciens croyaient aussi au logos, la « raison ». La Grèce fut ainsi en pointe dans le développement de la philosophie et des sciences. À partir du VIIe siècle av. J.-C., avec Platon, Socrate et Aristote, Archimède, Strabon et Anaximandre s’opère une révolution dans le domaine de la pensée. Pourtant la mythologie n’a pas été remise en cause, elle est restée un socle commun, occupant une place probablement plus importante dans la culture et la vie civique que dans les croyances.
Divinités primordiales
Ce sont les premiers dieux, ceux qui étaient pour les Grecs à l'origine de la vie et des dieux de l'Olympe.
Chaos. Il est la première forme de vie. Et comme son nom ne l'indique pas, Chaos ordonne le monde en créant les cinq premières divinités : Gaïa (la Terre), Érèbe (les Ténèbres souterraines), Nyx (la Nuit), Éros (l'Amour) et Tartare (les Enfers).
Gaïa et Ouranos. Gaïa, c'est la déesse Terre, la déesse Mère. De son nom vient de « géographie » ou « géologie ». Elle engendre seule quatre divinités, dont Ouranos, le Ciel. D'ailleurs, « ciel » se dit toujours ouranos en grec.
Titans. Gaïa s'unit à son fils Ouranos pour donner naissance aux Titans, des divinités à figure humaine. Installés sur le mont Othrys (1 726 m d'altitude, au centre de la Grèce), ils sont dirigés par le plus jeune d'entre eux, Cronos, qui règne sur la Terre avec sa sœur et épouse Rhéa. Dans l'Antiquité tardive, Cronos sera confondu avec Chronos, dieu primordial régissant le Temps.
Cyclopes et Hécatonchires. De l'inceste de Gaïa et Ouranos naissent aussi six enfants difformes : les Cyclopes, trois géants n'ayant qu'un seul œil et maîtrisant la foudre, et les Hécatonchires, trois autres frères ayant 100 mains et 50 têtes. Mais Ouranos craint ses rejetons, en dévore certains et fait enfermer Cyclopes et Hécatonchires aux Enfers.
Révolte de Cronos et guerre des Titans. Ces deux épisodes ont marqué l'art gréco-romain. Ils sont à l'origine du règne des dieux de l'Olympe. Ouranos dirige alors l'Univers avec cruauté. Son fils Cronos se rebelle, libère ses frères Cyclopes et Hécatonchires, puis tranche le sexe de son père. Du flot de sang et de sperme qui coule naissent les Géants et Aphrodite. Cronos prend le pouvoir avec les Titans. Tout aussi tyrannique que son père, il provoque la révolte de ses enfants dirigés par Zeus et aidés des Cyclopes, des Géants et des Hécatonchires. La guerre éclate. Cronos et les Titans, vaincus, sont envoyés aux Enfers et Zeus s'impose.
Dieux de l’Olympe
Les Titans laissent derrière eux une progéniture innombrable. Un panthéon dominé par douze divinités qui vivent sur le mont Olympe, point culminant de la Grèce (2 917 m d'altitude), entre la Macédoine et la Thessalie.
Zeus. Son culte est avéré en Crète dès l'époque minoenne, puis se répand après les Siècles obscurs. Fils de Cronos et de Rhéa, Zeus (Jupiter pour les Romains) est le dieu suprême. Son nom grec (Dias) évoque le « ciel lumineux » car il détient le pouvoir de la foudre transmis par les Cyclopes. Protecteur, purificateur et bienfaiteur, il est craint pour ses colères (orages, tempêtes, etc.). On lui rend hommage lors de fêtes sacrificielles, les Diasia, ainsi que dans les sanctuaires de Dodone (Épire) ou de Siwa (Égypte). Marié successivement à ses sœurs Hestia, Déméter, puis Héra, il collectionne les maîtresses. De ses unions naissent quantité de dieux et de héros.
Héra. La Junon des Romains est la reine des dieux, déesse du Mariage, de la Fécondité et de l'Accouchement. Avalée par son père Cronos, Héra fut libérée par son frère Zeus et épousa celui-ci pour trôner à ses côtés sur l'Olympe. Mais elle entretient des rapports houleux avec son mari volage, cherchant un temps à tuer Apollon et Artémis nés d'une coucherie avec Léto ou enfantant seule Héphaïstos pour défier Zeus. Incarnant la jalousie, elle n'en reste pas moins aimée des Grecs qui lui dédient de nombreux temples ainsi que les Héraia, jeux réservés aux femmes.
Poséidon. Dieu des Mers, Océans, Sources et Séismes, Poséidon (Neptune à Rome) est fils de Cronos et Rhéa. Jaloux d'Athéna, il frappe Athènes de son trident dévastateur, puis s'allie avec elle contre Zeus. Il sera puni, contraint d'ériger les murailles de Troie. Autre épisode : il pousse l'épouse du roi Minos à s'accoupler avec un taureau pour donner naissance au Minotaure. Mais Poséidon sauve Apollon et Artémis de la vengeance d'Héra, donne à Castor et Pollux le pouvoir de calmer les tempêtes et offre aux hommes le cheval. Il est ainsi honoré aussi bien près des côtes (temple du cap Sounion) qu'en Thessalie, terre toujours réputée pour ses chevaux. On lui connaît une trentaine d'amants et maîtresses ainsi qu'une soixantaine de rejetons, dont quatre avec sa femme Amphitrite, divinité de la Mer.
Déméter. Déesse de l'Agriculture et des Moissons, son culte fait appel à des pratiques ésotériques, tels les « mystères d'Éleusis », dans l'Attique. Fille de Cronos et Rhéa, elle ne siège guère sur l'Olympe, restant aux champs pour transmettre son savoir. Adoptée par les Romains en tant que Cérès (qui a donné « céréale »), elle est souvent représentée à la recherche de Perséphone, sa fille adorée, enlevée par son frère Hadès, dieu du Monde souterrain.
Aphrodite. Au Louvre, son superbe déhanché vous laisse sans bras. Née de la mer, lorsque Cronos émascula Ouranos, elle est la déesse de la Beauté, de l'Amour et de la Sensualité. Vengeresse, non mariée et collectionneuse d'amants, c'est pourtant elle qui présidait à l'enseignement des jeunes filles. Vénérée par les Romains en tant que Vénus, ses origines se trouvent en Orient. D'ailleurs, lors de la guerre de Troie, elle fit partie des divinités grecques à soutenir les Troyens. Quant aux Chypriotes, ils en font leur égérie, appelant leur pays « l'île d'Aphrodite ». Mais c'est de l'île grecque de Milos que provient la célèbre Vénus de Milo exposée à Paris.
Apollon. Né avec Artémis des amours de Zeus et de Léto, c'est le dieu de l'Art, de la Beauté, du Soleil et de la Médecine. Apparu tardivement dans les écrits, il défie Gaïa en tuant son fils Python et apporte son soutien aux Troyens. Pourtant, les Grecs lui vouent un culte grandissant du fait de ses pouvoirs de guérison. Ils lui dédient ainsi leurs plus grands sanctuaires, Delphes et Délos, ainsi que les Jeux pythiques et déliens. Sa réputation restera immense : les Romains n'en changeront pas le nom, Nietzsche en fera le symbole de la raison (le logos) et c'est avec les missions Apollo que la Nasa ira sur la Lune.
Artémis. Sœur jumelle d'Apollon et appelée Diane par les Romains, c'est la déesse de la Nature, de la Chasse, des Accouchements et de la Lune. Souvent représentée en chasseresse avec son arc d'or forgé par les Cyclopes, elle apparaît davantage en Orient sous la forme d'une divinité multimammia (aux nombreux seins). C'est ce symbole de fécondité, mais aussi sa virginité qui vont assurer sa notoriété. Ainsi, à Éphèse, l'immense temple qui lui était dédié figurait parmi les Sept Merveilles du monde.
Athéna. La plus chouette des déesses. Fille de Zeus et de la nymphe aquatique Métis, Athéna (Minerve pour les Romains) est la déesse de la Sagesse, de la Stratégie militaire, des Artisans, des Artistes et des Maîtres d'école. Elle est la protectrice de plusieurs villes, dont Sparte, mais surtout d'Athènes, à qui elle donne son nom et son symbole (la chouette) et où on lui dédie le Parthénon. Chaste et pas trop portée sur la vengeance, Athéna est la grande rivale de Poséidon et la protectrice des héros.
Héphaïstos. Dieu du Feu, de la Forge, de la Métallurgie et des Volcans, il est Vulcain pour les Romains. Né de Héra seule, sa mère le juge si laid qu'elle le jette du haut de l'Olympe, le rendant boiteux. Côté amours, c'est d'abord un peu trash : repoussé par Athéna, il éjacule sur elle et donne naissance aux Athéniens. Puis les choses s'arrangent. Il se marie à Charis (« la Grâce »), divinité de la Beauté et devient l'amant préféré d'Aphrodite. Dans sa forge de l'île de Lemnos, il conçoit le trône de Zeus, les flèches d'Artémis, les cnémides (jambières) d'Héraclès, les sandales ailées de Persée, etc.
Hermès. Appelé Mercure à Rome, c'est le fils de Zeus et Maïa, fille du Géant Atlas. Avec son pétase (chapeau rond) et ses sandales ailées, il est messager des dieux… et voleur, « le meilleur métier au monde » selon lui. Il est donc dieu des Voleurs, mais aussi des Prostituées, des Voyageurs, des Commerçants et des Orateurs, gardien des routes, donneur de chance, ou encore conducteur des âmes aux Enfers. Bon envers les hommes, il leur offre ses inventions : feu, écriture, cithare, flûte, danse, poids et mesures. Et s'il ne dispose de presque aucun sanctuaire, on dresse partout pour lui des stèles hermaïques, blocs sculptés où n'apparaissent que sa tête et son sexe.
Arès, Hadès, Dionysos et Hestia. Selon les croyances, deux de ces quatre dieux siègent sur l'Olympe. Arès (Mars pour les Romains) est fils de Zeus et Héra, dieu de la Guerre et de la Destruction. Hadès (Pluton à Rome) est né de Cronos et Rhéa. Dieu du Monde souterrain, il est accompagné de son épouse Perséphone et du chien à trois têtes Cerbère et ils gardent les Enfers. Dionysos (Bacchus pour les Romains) est né des amours de Zeus et d'une de ses maîtresses, Sémélé ou Perséphone. Il est le dieu de la Folie, de la Démesure, de l'Enthousiasme, de la Vigne, du Vin et de ses excès. Grande source d'inspiration de l'art gréco-romain, il préside à des célébrations masquées qui tournent à l'orgie, mais qui annoncent aussi la naissance du théâtre. Enfin, Hestia (Vesta en version romaine) est la plus sage. Fille de Cronos et Rhéa, elle est vierge et occupe le poste de déesse du Foyer : elle supervise aussi bien le foyer domestique que le feu sacré des cités.
Héros et épopées
Les récits des exploits héroïques constituaient des contes qui, par leur morale et leur sens de la tragédie, ont façonné l’identité gréco-romaine. On les retrouve dans le monde moderne, du nom des constellations aux grandes œuvres d’art, en passant par l’informatique et la psychanalyse.
La guerre de Troie. Narrée dans l’Iliade d’Homère, elle représente la quintessence de la mythologie grecque, puisqu’on y retrouve toute une panoplie de héros et de valeurs chers aux Anciens. Située sur la côte de l’actuelle Turquie, la ville de Troie est surnommée « citadelle de Poséidon » depuis que le dieu de la mer l’a dotée d’imprenables remparts. Mais elle n’appartient pas tout à fait au monde grec et symbolise le combat éternel contre les peuples d’Orient, en particulier les Perses. Le prince troyen Pâris déclenche le conflit en enlevant Hélène, épouse du roi de Sparte, Ménélas. Ce à quoi Ménélas répond en mobilisant avec son frère Agamemnon la plupart des rois grecs, appelés ici les Achéens. Le siège de Troie dure dix ans. Il est marqué par d’innombrables retournements de situation, interventions des dieux et massacres ainsi que par la mort d’Hector, fils du roi troyen Priam et frère de Pâris, et d’Achille, plus grand guerrier grec, tué d’une flèche qui l’atteint à son unique point faible, son talon. Finalement Ulysse met au point le stratagème du cheval de Troie. Laissée devant les portes de la ville, cette grande structure en bois apparaît aux Troyens comme une offrande des Grecs. Tiré à l’intérieur des remparts, le cheval dissimule en fait un commando dirigé par Ulysse qui profite de la nuit pour ouvrir les portes au reste de l’armée grecque. La guerre s’achève ainsi par une ruse, mais aussi par la destruction de Troie. Mythe ou réalité ? En 1870, l’Allemand Heinrich Schliemann surprend le monde entier en découvrant les authentiques ruines de Troie. Mais, sur sa lancée, l’archéologue-aventurier produit toute une série de faux, dont le magnifique masque d’Agamemnon, exposé au Musée national archéologique d’Athènes. Objet de débats permanents entre historiens, la guerre de Troie est surtout un thème majeur des arts depuis l’Antiquité. Ses héros sont peints et sculptés dans tout le monde gréco-romain, donnent naissance à un opéra d’Offenbach (La Belle Hélène,1864), à des allégories théâtrales comme La Guerre de Troie n’aura pas lieu de Jean Giraudoux en 1935 et inspirent quantité de romans et de films comme Troie (2004) avec Brad Pitt dans le rôle d’Achille. L’Iliade rejaillit même dans le monde informatique, où un cheval de Troie désigne un logiciel malveillant.
Le voyage d’Ulysse. « Heureux qui comme Ulysse a fait un beau voyage ». Après dix ans de guerre à Troie, le roi Ulysse (Odysséas en grec) avait bien mérité de retrouver son île d’Ithaque, son épouse Pénélope et son fils Télémaque. Hélas, le fameux vers de Joachim du Bellay (1558) ne reflète pas du tout le mythe. Selon l’Odyssée d’Homère, le héros va mettre dix ans pour rentrer chez lui, affrontant des monstres et perdant tous ses compagnons. Malgré les embûches tendues par Poséidon, Ulysse résiste au chant des sirènes, échappe au Cyclope Polyphème, tombe de Charybde (fille de Poséidon perpétuellement affamée) en Scylla (monstre à six têtes), manque de peu d’être transformé en cochon par la magicienne Circé, mais il reste sept ans avec la nymphe Calypso qui lui a promis l’immortalité. Il faut finalement l’intervention de Zeus pour qu’Ulysse revienne auprès des siens. De toutes les adaptations de ce récit, on retiendra le roman de James Joyce, Ulysse (1922), et deux films : Le Regard d’Ulysse (1995) de Théo Angelopoulos et O’Brother (2000) des frères Cohen.
Thésée et le Minotaure. Né d’une vengeance de Poséidon envers le roi de Crète Minos, le Minotaure est un monstre à corps d’homme et à tête de taureau. Enfermé dans un labyrinthe conçu par l’architecte Dédale, il réclame qu’on lui livre tous les neuf ans sept garçons et sept filles d’Athènes pour les dévorer. Quand arrive la nouvelle échéance, Thésée, fils du roi athénien Égée, se porte volontaire dans l’idée d’affronter le monstre. En Crète, Thésée rencontre Ariane, fille de Minos, qui tombe amoureuse de lui. Thésée parvient à tuer le Minotaure et, grâce à un fil confié par Ariane, à retrouver la sortie du labyrinthe. Il repart vers Athènes en bateau avec ses compagnons et Ariane, mais abandonne celle-ci sur une île déserte. Le châtiment de Thésée ne tarde guère : en vue du Pirée, le héros oublie de dresser la voile blanche annonciatrice de sa victoire. Son père qui l’attend sur le port aperçoit à l’horizon la voile noire de la défaite. Pensant son fils mort, il se suicide en se jetant dans la mer qui, depuis, porte le nom d’Égée. Quant à Ariane, elle reste associée à l’idée d’une ligne à suivre (le « fil d’Ariane » des plongeurs, par exemple) et aussi à la fusée européenne lancée depuis 1979 en Guyane.
Le rêve d’Icare. Où l’on retrouve l’architecte Dédale, enfermé dans son propre labyrinthe avec son fils Icare. Le roi Minos les y a jetés pour avoir donné à Ariane l’idée du fil ayant permis à Thésée de s’échapper. Cette fois Minos fait surveiller l’unique issue possible. Dédale trouve la solution : s’enfuir par les airs en confectionnant pour lui et son fils deux paires d’ailes constituées de plumes collées à la cire d’abeille. Cela peut fonctionner, à condition de ne pas voler trop haut, prévient Dédale. Ensemble, ils parviennent à décoller, mais le fils, trop sûr de lui, refuse d’écouter son père. Icare se rapproche du soleil qui fait fondre la cire de ses ailes et meurt précipité au large de l’île de Samos, dans ce qu’on appellera dès lors la mer Icarienne. Le rêve d’Icare – voler comme un oiseau – a toujours hanté les hommes. Le récit est surtout une métaphore à l’adresse de la jeunesse : gare à ne pas trop repousser les limites, vous vous brûlerez les ailes.
La tragédie d’Héraclès. Appelé Hercule par les Romains, Héraclès est souvent présenté dans les arts comme le modèle du héros positif grâce à ses douze travaux. Mais son histoire est plus compliquée. Déjà, il naît sous le nom d’Alcide, conçu par Zeus et sa maîtresse Alcmène, reine de Thèbes. Il est victime dès son plus jeune âge de la jalousie d’Héra, femme de Zeus, qui cherche à le supprimer. Mais le bébé, doté d’une force « herculéenne », trucide sans peine les serpents déposés dans son berceau. Son destin apparaît ensuite tout tracé, puisque son père veut en faire un héros (mortel) aussi puissant que les dieux. Pour son éducation, Alcide est donc placé auprès du centaure Chiron. Il réalise quelques exploits, se marie et a plusieurs enfants. Tout va pour le mieux jusqu’au jour où, pris de folie, il commet l’irréparable : il tue son épouse et toute sa progéniture. Lorsqu’il retrouve ses esprits, il songe à se suicider. Thésée l’en dissuade, et alors s’opère le changement : Alcide prend le nom d’Héraclès (« Gloire d’Héra ») en l’honneur de sa belle-mère honnie et se tourne vers son ennemi Eurysthée pour qu’il le châtie en lui confiant des « missions impossibles », les fameux douze travaux : affronter le lion de Médée et l’hydre de Lerne, capturer le sanglier d’Érymanthe et le taureau de Minos, courser la biche de Cérynie, nettoyer les écuries d’Augias… En fait, toute sa vie de mortel, Heraclès cherchera à expier sa faute en combattant les monstres et l’injustice. Ce qui lui vaudra d’être accueilli sur l’Olympe où, devenu immortel, il se réconciliera avec Héra.
Jason et la Toison d’or. Fils du roi d’Iolcos (l’actuelle Volos), en Thessalie, Jason échappe de peu à la mort à sa naissance, lorsque son oncle Pélias s’empare du pouvoir. Élevé sur le mont Pélion par le centaure Chiron (comme Héraclès, Thésée, Castor et Pollux), Jason n’aura de cesse de reprendre le trône. Pélias accepte de lui rendre à condition qu'il rapporte la Toison d’or : la peau du bélier magique Chrysomallos (« Laine d’or »), fils de Poséidon sacrifié en l’honneur de Zeus, qui se trouve suspendue à un arbre en Colchide (actuelle Arménie) et gardée par le dragon et les hommes du roi Éétès. Jason se rend donc en mer Noire à bord de l’Argos avec ses compagnons, les Argonautes. En Colchide, Éétès les soumet à de nombreuses épreuves, mais aidés par la fille de celui-ci, Médée, Jason et les Argonautes parviennent à s’emparer de la Toison. Revenu à Iolcos avec Médée, Jason découvre que Pélias n’a pas tenu parole : il a tué son père et conserve le trône. Exilé pendant dix ans à Corinthe, Jason prépare son retour et a deux fils avec Médée. Celle-ci jette un sort aux enfants de Pélias qui assassinent leur père. Mais, délaissée par Jason, Médée tue leurs fils et la nouvelle femme du héros. Soutenu par les jumeaux Castor et Pollux (fils de Zeus) et par Pélée (père d’Achille), Jason achève toutefois sa quête en reprenant le trône d’Iolcos.
Le châtiment de Sisyphe. Fondateur mythique de Corinthe, Sisyphe est connu comme le possible père d’Ulysse et pour sa ruse, qui lui permet de déjouer le grand voleur Autolycos et même la mort. Mais ses ambitions démesurées vont causer sa perte : il irrite les dieux en construisant l’immense citadelle d’Acrocorinthe, effectivement toujours très impressionnante. Comme châtiment, il se voit contraint de pousser une énorme pierre au sommet d'une montagne, d'où elle finit toujours par retomber. Dans son essai Le Mythe de Sisyphe (1942), Albert Camus en fait le symbole de l’absurdité de la vie. Une absurdité qui n’empêche pas le bonheur et qui peut trouver une issue positive à condition de choisir la révolte.
Bellérophon et la Chimère. Roi mythique de Corinthe et petit-fils de Sisyphe, Bellérophon reçoit la mission d’aller délivrer la province de Lycie (Turquie actuelle) ravagée par la Chimère. Ce monstre cracheur de feu possède un corps de lion, une tête de chèvre sur le dos et une queue de dragon se terminant par une tête de serpent. Athéna conseille au héros de dompter le cheval ailé Pégase, seule créature assez rapide pour l’aider dans sa tâche. Avec sa monture, Bellérophon parvient ainsi à tuer la Chimère, puis réussit d’autres exploits, comme celui de vaincre les Amazones. Mais à l’instar de son grand-père Sisyphe, il est trop ambitieux. S’estimant digne d’être un dieu, il chevauche dans les cieux vers l’Olympe. Zeus le foudroie, l’obligeant à errer aveugle sur la terre pour l’éternité.