Découvrez la Corse : Littérature (BD / Actualité)

Lorsque l’on parle de littérature corse, on a tendance à ne penser qu’à la littérature en langue corse, à tort puisque aujourd’hui nombreux sont les auteurs à écrire en français ou même en italien. Néanmoins, c’est dans le corse que la littérature insulaire puise ses racines, et par son intermédiaire qu’une identité littéraire locale a pu se dégager. Inversement, la littérature corse a joué un rôle majeur dans l’affirmation d’une langue menacée de disparition. La question de la diglossie (situation dans laquelle un peuple pratique deux langues qui n’ont pas le même statut hiérarchique) et de la lutte pour la reconnaissance est donc centrale dans cette construction. Aujourd’hui, fière d’un prix Goncourt et d’auteurs reconnus sur le continent et au-delà, la littérature corse s’ouvre et nous montre sa capacité à être contemporaine. La découvrir, c’est aller à la rencontre d’une culture ancienne et capable de se réinventer.

La littérature corse, deux siècles d’histoire

La littérature corse est aux origines imprégnée de comique. C’est dans une œuvre en toscan de Salvatore Viale publiée en 1817 (La Dionomacchia) qu’on retrouve les premiers vers édités en langue corse, avec un poème intitulé U serinatu di Scappinu qui décrit la sérénade burlesque composée par le berger Scappinu pour la femme qu’il aime. Mais ce n’est que plus tard, en 1896, que se développe plus amplement la littérature insulaire, avec la naissance du journal A tramuntana. Son fondateur, Santu Casanova, est aussi écrivain, et souvent considéré comme le père de la littérature corse. À partir de la Première Guerre mondiale, de nouvelles revues et journaux comme A Cispra, A Muvra ou l’Annu Corsu apparaissent, permettant aux écrits d’auteurs et poètes corses de se diffuser. Le premier roman en langue corse est publié en 1930. Il est intitulé Pesciu Anguilla et écrit par Sebastianu Dalzeto, poète, romancier et journaliste marxiste, ainsi que fondateur de l’association Lingua Corsa (1956). Après la Seconde Guerre mondiale, la littérature corse connaît des temps difficiles, pour ne renaître que dans les années 1970.

« À leva di u settanta », la génération des années 1970 à la redécouverte de la langue corse

Cette période, aussi appelée le « Riacquistu » (la ré-acquisition), est marquée par une nouvelle génération d’auteurs qui font revivre la production littéraire insulaire, avec pour figures de proue Ghjuvan’Teramu Rocchi ou Rinatu Coti. Il s’agit-là d’un mouvement de réappropriation non pas seulement littéraire, mais aussi politique, sociale et culturelle, qui s’inscrit dans un contexte historique particulier : celui d’une société en quête de repères. Pour ces auteurs, l’autonomie et la préservation de l’identité corse ne passent pas seulement par des mesures politiques, mais aussi par la préservation, la valorisation et le renouvellement du patrimoine artistique et culturel insulaire. Ainsi paraît en 1971 L’Intrecciate e cambierine, premier manuel de grammaire et d’orthographe en langue corse. La revue Rigiru (le Renouveau) joue également un rôle important dans cette période d’effusion créative et d’expérimentation. La réouverture de l’Université de Corse en 1981 contribue à parachever ce mouvement, révélant des poètes talentueux comme Ghjacumu Fusina et Ghjacumu Thiers. Enfin, le monde de l’édition connaît lui aussi un essor, avec l’apparition de maisons comme La Marge, Edition Albiana et Alain Piazzola et la création du Prix du Livre corse qui vient récompenser les meilleurs ouvrages.

Une littérature contemporaine diversifiée, de Jérôme Ferrari à Francesca Serra

Grâce à cette période de réaffirmation nécessaire, on voit aujourd’hui en moyenne trois romans en langue corse être publiés chaque année. Cela a également permis à la littérature de Corse de s’ouvrir dans les années 1990 et 2000 et de dépasser le rapport diglossique pour explorer des thématiques et des genres inédits, notamment le polar (qui a aujourd’hui son propre festival à Ajaccio), les fictions historiques ou des livres sur les traditions et savoir-faire comme Tempi-fa. Une littérature corse écrite en langue française a ainsi émergé, accessible à un public plus large. De nouvelles figures d’ampleur nationale sont apparues, comme Marcu Biancarelli, aussi poète et dramaturge, Marie Ferranti, publiée chez Gallimard et récompensée par le grand prix du roman de l'Académie française pour son roman La Princesse de Mantoue en 2002, ou encore l’incontournable Jérôme Ferrari, qui reçoit le prix Goncourt en 2012 pour son livre Le Sermon sur la chute de Rome. Cette ferveur se prolonge aujourd’hui avec une multitude de jeunes auteurs dont les travaux, dans des styles très différents, sont remarqués et récompensés. On pense à Jean-Yves Acquaviva, Julien Battesti, Jean-Marc Graziani, Laure Limongi ou encore Francesca Serra, qui reçoit le prix littéraire « Le Monde » 2020 pour son livre Elle a menti pour les ailes. Cette jeune auteure nous offre ici un ouvrage très contemporain traitant de l’impact des réseaux sociaux sur les adolescents à travers une écriture à la fois grave et pleine d’humour. Elle témoigne de la vivacité de la littérature corse d’aujourd’hui et de sa capacité à s’inscrire dans un paysage plus global. À l’exception des maisons d’édition insulaires qui doivent faire face à des difficultés croissantes, la production littéraire corse se porte donc bien, avec une offre stable, créative et critique qui n’annonce que de bonnes choses pour l’avenir.

L’Antulugia, le nouvel ouvrage de référence sur les littératures corses

En 1973 était publié un ouvrage fondamental pour la littérature insulaire : l’Antulugia de Mathieu Ceccaldi. Mais depuis, comme nous l’avons expliqué, les années ont passé et un pan majeur de la création littéraire corse n’est plus représenté par ce livre. C’est sur ces bases que le projet de la nouvelle Antulugia, a Corsica Literaria, publiée au printemps 2020 par les éditions Albania, a vu le jour. Cet ouvrage massif de 1 912 pages constitue une ressource précieuse et presque exhaustive de la création littéraire corse depuis les origines. On y trouve des textes en langues corse, française, mais aussi italienne, accompagnés de commentaires et analyses scientifiques riches et solides. Un Graal pour qui souhaite approfondir sa connaissance de la littérature corse !

Littérature jeunesse et BD, une autre manière de découvrir la Corse pour petits et grands

Du côté de la littérature jeunesse et de la bande dessinée également, la Corse fait montre de créativité. Parmi les maisons d’édition les plus actives, impossible de ne pas mentionner Corsica Comix Édition, créée en 2010 par Frédéric Federzoni. Cet Ajaccien est lui-même dessinateur et s’est donné pour défi de permettre à des auteurs et dessinateurs corses d’être édités sur place. Une sorte de label « BD corse » en somme, qui met en valeur les talents de l’île de Beauté. La mascotte de cette maison est Petru Santu, un personnage créé par Frédéric Federzoni et le scénariste Desideriu, caricaturant avec humour et tendresse un « ancien » qui observe avec plus ou moins de méfiance l’île et ses habitants changer avec le monde. Du côté de la littérature jeunesse, voici quelques idées d’œuvres à glisser dans la valise de vos enfants pour leur faire découvrir l’île sous un autre angle : Comptines et berceuses corses, un album doux et coloré édité par Didier Jeunesse, l’intemporel Astérix en Corse, ou encore Cui Cui et Bustelle de Marine Rivoal, une très jolie traduction en français des poésies du fameux Ghjuvan’Teramu Rocchi.

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