Découvrez BRUXELLES - BRUSSEL : Bruxelles, incroyable terreau du 9e art !

Jusqu’au début du XXe siècle, les enfants s’abreuvent de bulles françaises. Comment ne pas citer, par exemple, Les Pieds nickelés ou la délicieuse Bécassine qui apparaît dès 1905 dans La Semaine de Suzette, tandis que de l’autre côté de l’Atlantique les kid strips se multiplient à vive allure depuis l’apparition de la photogravure. Mais si l’expression « BD belge » frise le pléonasme, c’est que tout a vraiment commencé chez nos voisins du Nord, eux qui ont assisté à une terrible – mais vivifiante – bataille, celle qui opposa Tintin à Spirou. Car la Belgique a longtemps eu cette particularité d’adosser un périodique à une maison d’édition, le Lombard d’un côté, Dupuis de l’autre, le journal destiné aux enfants devenant ainsi champ d’expérimentation pour les futurs albums à paraître. La saine rivalité entre les deux périodiques fut féconde, en particulier dans les années 1950 et 1960, où elle donna naissance à deux courants esthétiques, la ligne claire et les gros nez, et à deux écoles, celle de Bruxelles et celle de Marcinelle (Charleroi) sur laquelle on ne s’étendra pas ici.

Le reporter le plus connu du XXe siècle

Avec ses airs angéliques, un petit blondinet va révolutionner cet univers en plein essor. Sous la plume de Georges Remi, devenu Hergé par l’astucieuse inversion de ses initiales, Tintin a pour ancêtre méconnu Totor, chef de patrouille des Hannetons, personnage que le dessinateur avait créé en 1926 pour le journal Le Boy-scout et qui, dans la foulée, devient belge.

En parallèle, il exerce comme reporter photographe et illustrateur pour Le Vingtième Siècle. Satisfait de son travail, le terrible abbé Wallez, alors rédacteur en chef, lui confie la responsabilité du supplément hebdomadaire, Le Petit Vingtième, et lui passe commande d’une bande dessinée qui dénoncerait auprès des plus jeunes les méfaits du communisme. Voilà comment Tintin vit sa première aventure Au pays des Soviets, en 1929, alors qu’Hergé l’aurait sans doute préféré évoluant dans son territoire de prédilection, l’Amérique. Néanmoins, son héros, dont seule la houppette semble se rebeller, et son fidèle compagnon à quatre pattes, Milou, le fox-terrier bavard, auront tout loisir de se rattraper. Leurs pérégrinations cartonnent, et le petit journaliste parcourt le monde en tous sens, du Congo, car décidément l’Abbé Wallez a des opinions politiques bien tranchées, jusqu’au San Theodoros, contrée imaginaire d’Amérique du Sud, un demi-siècle plus tard. Vingt-trois albums, un ultime épisode, Tintin et l’Alph-art, resté inachevé suite à la mort de l’auteur en 1983, mais aussi un périodique, lancé par Hergé et Raymond Leblanc des éditions du Lombard en 1946, en riposte au faramineux succès d’un autre titre : Le Journal de Spirou (Dupuis). Spirou, ce reporter facétieux partageant avec Tintin le goût de l’aventure.

Hergé fonde le journal Tintin

Un certain sens de la parodie aussi, bien éloigné de la ligne claire si représentative de l’école de Bruxelles, celle initiée par Hergé, chez qui « il est toujours midi ». Réalisme et lisibilité renforcés par les traits noirs qui séparent les couleurs, celles-ci n’étant jamais impactées par les ombres ou les éventuelles sources de lumière, on le comprend vite, la sobriété est de mise pour les dessinateurs qui rejoignent Le Journal de Tintin.

Le premier numéro de celui-ci paraît le 26 septembre 1946 et au sommaire figure Edgar P. Jacobs, père de Blake et Mortimer, qui fréquente de longue date Hergé et publiait précédemment dans Bravo ! Le dessinateur bruxellois met en scène deux Britanniques, le premier travaille pour les services secrets, le second est physicien nucléaire, ensemble ils luttent contre un irréductible criminel, Olrik. Une bande dessinée particulièrement réaliste, même si elle côtoie parfois l’univers de la science-fiction, ce qui lui vaut d’être interdite en France quand sa violence ne semble pas adaptée au public enfantin. Les aventures des deux amis auraient pu s’arrêter à la mort de leur créateur, en 1987, mais 13 ans après celle-ci, Bob de Moor reprend le travail resté inachevé, et les épisodes continuent aujourd’hui de s’enchaîner sous différentes plumes. Pour dessiner ses personnages, Edgar P. Jacobs s’était inspiré de deux hommes : Blake prit les traits de Jacques Laudy, l’un des fondateurs du périodique, par ailleurs auteur de La Légende des quatre fils Aymon, et Mortimer ceux de Jacques Van Melkebebe, premier rédacteur en chef qui dut rapidement quitter ses fonctions suite à une condamnation pour collaboration durant la guerre.

En 1948, toujours pour le journal Tintin, le Français Jacques Martin s’inspire de l’Antiquité romaine et l’illustre par Alix, un personnage qui deviendra rapidement populaire. Quelques années plus tard, il donne vie à Lefranc, dans un décor bien plus actuel. Paul Cuvelier, quant à lui, continue de faire évoluer le jeune Breton orphelin Corentin au cœur du XVIIIe siècle.

La rivalité n’est plus de mise

En 1955, suite à une dispute avec Dupuis, Franquin quitte Spirou pour rejoindre Tintin, cela tombe à point nommé pour le journal qui justement avait envie de rafraîchir sa ligne. Modeste et Pompon remplissent leur rôle, mais Franquin se réconcilie avec son éditeur d'origine et se retrouve très vite débordé, il se fait aider par des scénaristes, notamment Greg, le futur créateur d'Achille Talon, et René Goscinny, qu'il n'y a pas besoin de présenter, avant de se résoudre en 1959 à confier la garde des amoureux à Dino Attanasio pour retourner s'occuper pleinement d'un de ses personnages qui a bien besoin d'être secoué, Gaston Lagaffe, dont l'arrivée au journal en 1957 s'est avérée tout sauf discrète.

Le renouveau est de mise pareillement chez Tintin, qui héberge deux Français. Jean Graton qui lance sur la route Michel Vaillant en 1957 et Tibet qui a quitté le journal de Mickey et adapte à la ligne claire ses Aventures de Chick Bill avant d'inventer un héros au nom en calembour, Ric Hochet. Chez Tintin, les années 1960 riment avec humour, Zig et Puce, Cubitus et Taka-Takata ; les années 1970 avec le retour au réalisme notamment grâce aux apparitions de l'insaisissable Corto Maltese et aux péripéties de Michaël Logan, l'aviateur d'André Beautemps. À celles, plus fantastiques, de Thorgal initialement scénarisé par Jean Van Hamme qui s'est ensuite attelé à donner voix à XIII et Largo Winch. Pourtant, la décennie suivante voit les ventes décliner et Le Journal de Tintin contraint de cesser en novembre 1988. En revanche, Le Journal de Spirou continue de paraître, offrant chaque semaine une vitrine aux héros, nouveaux ou emblématiques, de l'école franco-belge de BD.

Des fresques en guise d’hommage

Au début des années 1990, naquit l'idée d'embellir quelques pignons ou pans de mur disgracieux du centre de Bruxelles, forte de son statut auto-revendiqué de « capitale de la bande dessinée ». C'était aussi une façon de rendre hommage aux nombreux dessinateurs de BD nés ou ayant grandi à Bruxelles.

Inauguré en juillet 1991, le mur « Broussaille » couvre environ 45 m². La fresque est située entre la rue Marché au Charbon et le Plattesteen. On compte aujourd'hui une soixantaine de fresques réparties dans la capitale (essentiellement le Pentagone, mais aussi au-delà). Le collectif « Art Mural » réalise 2 à 3 fresques par an depuis 1993. Ces pans de murs sont désormais tellement entrés dans les habitudes des Bruxellois que lorsque l'une de ces fresques doit être recouverte (projet immobilier), elle est généralement déplacée sur une autre surface vierge. C'est le cas de la fresque de la Marque Jaune, référence à Blake et Mortimer, repeinte dans les Marolles. Parmi les personnages emblématiques de la BD bruxelloise couvrant les rues de la capitale, on peut citer Ric Hochet, Yoko Tsuno, XIII, Thorgal, Titeuf ou encore Quick et Flupke, les ketjes de Bruxelles créés également par Hergé. Sans oublier Tintin, évidemment. Outre sa fresque à la rue de l'Étuve (toute proche de Manneken Pis), on remarque de loin sa tête flanquée de celle de son fidèle Milou au sommet de l'immeuble Le Lombard, place Bara. Parcoursbd.brussels propose 3 circuits pour les découvrir.

Le Musée de la Bande Dessinée, installé depuis 1989 dans un bâtiment Art nouveau construit en 1909 par Victor Horta, possède une envergure internationale. À la fois expo permanente de l'histoire du 9e art et incroyable centre de documentation de la bande dessinée, on y organise aussi des rencontres avec les auteurs, des cours de BD et des visites guidées.

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