De l’art religieux à la peinture profane
Aux XVIIe et XVIIIe siècles, la religion étant le fondement de la société québécoise, l'art est essentiellement sacré. Chaque village possède son église, qui fait l'objet de grands efforts décoratifs (sculptures, dorures, autels, retables, baldaquins, orfèvrerie, etc.) dans le style baroque. La famille Baillairgé a ainsi acquis sa renommée à Québec et dans toute la région en embellissant bon nombre d'églises au XVIIIe siècle, comme la célèbre basilique-cathédrale Notre-Dame de Québec, emblème de la ville.
Il faut attendre le XIXe siècle, époque où l'économie de la province est devenue florissante, pour que se dégage un art profane. Les artistes, pour la plupart formés en Europe, exécutent des portraits et des paysages que leur commande la nouvelle bourgeoisie canadienne-française. Le plus connu est sans conteste Antoine Plamondon (1804-1895), suivi de Théophile Hamel (1817-1870) et de Joseph Légaré (1795-1855), le premier à se lancer dans la peinture événementielle. Durant tout le XIXe siècle, l'influence européenne reste dominante du fait de l'arrivée au Québec d'artistes d'outre-Atlantique comme l'Irlandais Paul Kane (1810-1871), célèbre pour l'intérêt ethnologique de ses tableaux d'Amérindiens, ou le Hollandais Cornélius Krieghoff (1815-1872), peintre de la vie quotidienne des nouveaux habitants du continent. Tout comme nombre des œuvres de ces artistes, on peut admirer la toile de Krieghoff Québec vue de la pointe de Lévy au Musée national des beaux-arts du Québec, qui donne un bel aperçu de ce qu’était la ville au XIXe siècle.L’art moderne
Au XXe siècle, Montréal finit de s’affirmer comme le cœur artistique du Québec, mais la capitale québécoise profite elle aussi de son rayonnement. L'influence de l'École de Paris continue de se faire sentir chez les peintres québécois d'inspiration impressionniste, comme Suzor-Côté (1869-1937), auteur de belles natures mortes, chez le fauve James Wilson Morrice (1865-1924) et chez le pointilliste Ozias Leduc (1864-1955), originaire de Mont-Saint-Hilaire. Pour faire pendant au Groupe des Sept, composé de paysagistes de Toronto (Harris, Jackson, MacDonald, Carmichael, Lismer, Varley, Johnston, Thompson) qui se voulaient les seuls représentants d'un art véritablement canadien, les artistes montréalais se rassemblent autour de Marc-Aurèle Fortin (1888-1970) pour créer une école d'art paysager purement québécois, complètement dégagé de l'influence européenne. Fortin peint des tableaux ayant pour sujet son Québec natal, en particulier le fleuve Saint-Laurent, la faune et la flore de la province, dans un style personnel influencé par l'Art déco. On retrouve souvent l’île d’Orléans, voisine de la ville de Québec que vous aurez peut-être l’occasion de visiter, dans ses paysages.
Après la Seconde Guerre mondiale, la peinture est dominée par le groupe des Automatistes, un mouvement d'artistes dissidents, actifs entre 1945 et 1954, composé notamment des peintres Marcel Barbeau, Jean-Paul Riopelle, Pierre Gauvreau, Fernand Leduc, Jean-Paul Mousseau et Marcelle Ferron. Puis dans les années 1950-1960, c'est au tour des Plasticiens, un mouvement qui réagit au courant créé par les Automatistes et la gestuelle spontanée mise en avant à la fin des années 1940, en prônant l'abstraction géométrique. Les quatre plus grands plasticiens d’alors qui se sont fait connaître localement puis sur la scène internationale sont Guido Molinari, Claude Tousignant, Yves Gaucher et Charles Gagnon. Là encore, on peut admirer les œuvres de la plupart de ces artistes au Musée national des beaux-arts du Québec.L’arrivée de la photographie
La photographie arrive très rapidement au Québec, seulement un an après son invention en 1839. Elle est introduite par deux photographes américains de passage à Québec. Mais le premier photographe québécois, Joly de Lotbinière, entame dès 1839 sa carrière, faisant ainsi partie des pionniers du genre. Il documente ses nombreux voyages en Grèce, en Syrie, en Palestine, en Égypte ou en Turquie. Il serait ainsi le premier à avoir photographié le Parthénon. Malheureusement, ces clichés ont aujourd’hui disparu. En parallèle de la photographie documentaire, souvent associée à la photographie de voyage, se développe une photographie plus sédentaire : la photo studio. À Québec, c’est la famille Livernois qui domine cet art pendant plusieurs générations. Mais en plus de leur activité au studio, ils documentent aussi la ville et les paysages locaux avec habileté, si bien que déjà, avant la mode de la carte postale, les passants s’arrêtent pour acheter des clichés de Québec et sa région. Au tournant du siècle, avec le développement d'appareils photographiques plus performants et plus faciles d’utilisation, le genre se popularise et le nombre de photographes professionnels et amateurs augmente considérablement. Le Québec compte ainsi nombre de photographes modernes talentueux, à l’instar de Conrad Poirier (1912-1968), pionnier du photojournalisme au Québec, Gabriel Desmarais (1926-1991), connu sous le pseudonyme de Gaby, portraitiste de renom, ou encore Antoine Désilets (1927), grand photo-reporter.
Au fil du XXe siècle, la photographie perd peu à peu son rôle purement décoratif ou documentaire, et se complexifie, prenant une dimension plus artistique. Pour admirer les travaux de photographes contemporains, il existe à Québec un centre d’artistes autogéré du nom de VU qui propose régulièrement des expositions de grande qualité.L’art contemporain
Actuellement, l'art contemporain québécois jouit d'une belle notoriété et plusieurs artistes se démarquent tant au Québec que sur la scène internationale. C'est notamment le cas de Rafael Lozano-Hemmer qui s'illustre dans le multimédia, qualifié « d'architecte de la lumière ». Pour découvrir les noms de l'art contemporain, actuels ou passés, on trouve plusieurs galeries et centres d'art contemporain, comme Engramme, La Chambre Blanche, Lacerte Art Contemporain, Regart ou encore la Galerie des arts visuels de l'Université Laval. On peut admirer également les nombreuses installations et sculptures qui ponctuent les rues du centre-ville, comme L’Envol de Jules Lasalle dans les Jardins de l’Hôtel de Ville, l’Invitation au voyage de Maurice Savoie à l’angle des rues Saint-Paul et John-Goudie, ou encore Do Ré Mi Fa Sol La Si Do de Joseph Fafard, dans le parc de Notre-Dame-de-la-Garde.
Le street art plus en vogue que jamais
On le retrouve dans plusieurs villes du Québec, notamment dans la capitale. L’œuvre incontournable de l’art urbain québécois est sans aucun doute la grande fresque des Québécois dans le quartier Petit Champlain, qui illustre la vie des premiers arrivants au début de la colonie. Pour faciliter la découverte des peintures murales, certaines ont été regroupées dans des parcours touristiques, comme les « Circuits des fresques de la ville de Québec », qui permettent de découvrir l’histoire du développement de la capitale et de ses différents quartiers à pied, à vélo ou en voiture, de Cap-Rouge à Beaupré, en passant par Lévis. Vous trouverez la brochure « Notre histoire racontée murs à murs » sur le site officiel de la ville (capitale.gouv.qc.ca/decouvrez-la-capitale/circuits-des-fresques). Idéal pour ceux qui veulent découvrir l’art et l’histoire des lieux sans s’enfermer entre quatre murs !
L’art autochtone
Les diverses communautés autochtones du Québec se sont efforcées de mettre en valeur leur patrimoine culturel. Celui-ci est avant tout un patrimoine vivant, détenu par les anciens, un héritage spirituel reposant sur le respect des coutumes ancestrales ainsi que des lieux sacrés ou profanes. Ces communautés ont créé des musées, des boutiques d'artisanat, des galeries d'art, des centres d'interprétation ou encore des reconstitutions de villages traditionnels. À Québec, les Amérindiens vivent principalement dans la communauté de Wendake, qui regroupe divers lieux culturels accessibles aux visiteurs tels que le Carrefour artistique de Wendake, le Musée Huron-Wendat ou le Site Traditionnel Huron. Les communautés amérindiennes organisent aussi une grande fête culturelle d'été (ouverte au public) appelée « pow wow » et consistant en des célébrations folkloriques, des chants au tambour, des danses, des rites et des cérémonies, des expositions d'art et d'artisanat et diverses autres activités. Le Pow Wow de Wendake a lieu habituellement à la fin juin ou début juillet, un évènement à ne pas manquer !
Les artistes amérindiens ont su renouveler l'art traditionnel en employant d'autres matériaux et de nouveaux procédés artistiques, tout en continuant à puiser leur inspiration dans leur patrimoine culturel, inventant un nouveau langage dans la tradition des chamans. On assiste aujourd'hui à l'émergence d'un art amérindien d'avant-garde, en véritable explosion dans les domaines de la musique, du spectacle, de la sculpture et de la peinture. Dans la région de Québec, le Salon du livre des Premières Nations « Kwahiatonhk ! » promeut chaque année à l'automne plus d'une vingtaine d'artistes locaux.
Et on ne pourrait passer sous silence le sublime art inuit. Les témoignages les plus anciens de cet art sont des pétroglyphes gravés sur le roc des collines de stéatite trouvés à Kangiqsujuaq, dans le détroit d'Hudson. Déjà, le peuple Thulé, ancêtre des Inuit, venu du Groenland, fabriquait des peignes et des statuettes, supports de ses croyances et de ses pratiques religieuses. Au début du XIXe siècle, les Inuit sculptaient de nombreux objets miniaturisés en stéatite, mais aussi en ivoire de morse et en os de baleine, en échange de produits de base, comme le sel et les armes que leur fournissaient les Européens. Aujourd'hui, l'art inuit contemporain est essentiellement représenté par les sculptures en stéatite ou pierre à savon, roche tendre, facile à travailler et très abondante dans les régions septentrionales du Canada. Mais d'autres roches, plus dures, sont également à l'honneur, comme la serpentine verte, la dolomite ou le quartz. Les sculptures modernes, qui peuvent atteindre des tailles impressionnantes, représentent presque toujours la faune et les hommes du Grand Nord. Les Inuit pratiquent aussi la sculpture sur bois de caribou, la gravure sur pierre et la broderie. Afin de protéger les artistes des revendeurs, des coopératives locales se sont créées dans les années 1960, regroupées depuis 1967 en Fédération des coopératives du Nouveau-Québec. Si les centres artistiques les plus réputés sont les villages de Povungnituk et Inukjuak sur la baie d'Hudson, on trouve dans le Vieux-Québec la galerie d'art inuit Brousseau, qui joue un rôle important dans la qualité de la commercialisation de l'art inuit au Québec.