Découvrez NAPLES : A l'écran (Cinéma / TV)

Le cinéma arrive très tôt sur les côtes napolitaines. C’est Étienne-Jules Marey qui pose le premier son fusil chronophotographique devant les faraglioni di Capri et filme une vague qui s’y écrase. Le premier cinéma ouvre quant à lui dans la Galleria Umberto I en 1896. C’est Roberto Troncone qui réalise en 1905 le premier film de fiction, Camorra, un court-métrage qui se réclame du vérisme - mouvement littéraire italien proche du naturalisme. Après des débuts prometteurs, la production reculera un temps avant de redémarrer de plus belle. La ville est un vivier d’artistes, mais elle attire aussi les regards venus d’ailleurs. La région napolitaine, ses îles et la côte amalfitaine offrent enfin des cadres somptueux pour des films en tout genre. Naples souffre ceci dit de sa mauvaise réputation, notamment due à la présence de la Camorra, qui se répercute sur le sujet des films qui y sont tournés.

Des premières décennies en dents de scie

Vingt ans après le film de Roberto Troncone, les sociétés de production se sont multipliées et près de 350 films ont été produits. Parmi ces structures, retenons la Dora Films, montée par la première réalisatrice italienne : Elvira Notari. Malheureusement, après ces débuts convaincants, la production recule durant les années 1930 avec l’arrivée du parlant. Les salles ne s’équipent tout d’abord pas pour la diffusion sonore, et surtout les dialogues sont en napolitain, alors que le régime fasciste commence à unifier la langue à travers le pays. Qui plus est, une nouvelle réglementation est mise en place pour la distribution de visas d’exploitation, et le cinéma napolitain, jugé irrévérencieux, est souvent mis à l’amende. Il faudra attendre les années 1940 pour que le cinéma local soit à nouveau productif. Pour mémoire, citons Non ti pago ! (1942) de Carlo Ludovico Bragaglia, Catene de Raffaello Matarazzo (1949) et Carosello napoletano (1953) d’Ettore Giannini. Totò est peut-être l’un des plus célèbres acteurs napolitains. Il s’est illustré dans de nombreuses comédies, telles Totò a colori (1952) de Steno, Un Turco napoletano (1953) et Miseria e nobiltà (1954) de Mario Mattoli.

Les Italiens à Naples

D’autres grands cinéastes italiens ont tourné à Naples comme Roberto Rossellini pour Paisa (1946 - pour l’acte 2 du film qui se déroule à Naples) et Voyage en Italie (1954), où Ingrid Bergman parcourt la ville et ses souterrains et se rend à Pompéi. Vittorio de Sica avec L’Oro di Napoli (1954), un chef-d'œuvre où brille Sophia Loren, originaire de Pouzzoles. De Sica encore, dix ans plus tard, avec Mariage à l’italienne, toujours avec Sophia Loren, rejointe par Marcello Mastroianni. N’oublions pas le très engagé Francesco Rosi qui réalise La Sfida (1958) et Le Mani sulla città (1963).

Dans un registre plus historique, La Bataille de Naples retrace la libération de la ville à la fin de la Seconde Guerre mondiale : une révolte populaire éclate suite à l’exécution de matelots et finit par vaincre les Allemands avant même l’arrivée des alliés. Le film est réalisé par Nanni Loy en 1952.

Les îles et la côte amalfitaine

L’île de Capri, et plus précisément la somptueuse villa Malaparte, sert de décor au Mépris (1963) de Jean-Luc Godard. C’est l’un des plus beaux films du réalisateur, pour lequel Georges Delerue composa l’entêtant Thème de Camille. En 1994, Michael Radford tourne Le Facteur, qui raconte et romance l’exil du poète chilien Pablo Neruda sur l’île de Capri. Le film est cependant tourné sur l’île de Procida.

La côte amalfitaine a servi de décor au film Roma (1972) de Frederico Fellini mais on a pu la voir aussi plus récemment dans Wonder Woman (2017), illustrant l’île des Amazones. La côte a également été modélisée pour les circuits des franchises de jeux vidéo Forza Motorsport et Gran Turismo. La ville de Positano apparaît aussi dans le dernier film de Christopher Nolan, Tenet (2020).

Anthony Minghella installe une partie de l’action de The Talented Mr Ripley dans la région napolitaine. Les îles de Procida et Ischia, comme la péninsule de Sorrente, sont des lieux emblématiques du film. Il s’agit d’ailleurs d’une adaptation d’un film franco-italien de 1960 réalisé par René Clément : Plein Soleil. C’était Alain Delon qui incarnait alors l’anti-héros. De nombreuses scènes du film sont tournées à Ischia Ponte, et certains de ses sites sont reconnaissables : la spiaggia Maronti, le Castello Aragonese et Mongibello.

De célèbres réalisateurs napolitains

Parmi les réalisateurs napolitains qui ont connu un succès international, citons Gabriele Salvatores qui reçoit l’Oscar du meilleur film étranger en 1991 avec Mediterraneo. Massimo Troisi s’affirme en 1981 avec son film Ricomincio da tre, dont les personnages, timides et mélancoliques à l’extrême, font la conquête du public international. Citons aussi L’Amore molesto (1995), de Mario Martone. Ce dernier a réalisé Leopardi : Il giovane favoloso (2014), un biopic consacré à l’écrivain napolitain Giacomo Leopardi, et I Vesuviani (1997), une variation sur Naples dont il réalise l’un des cinq épisodes. Valeria Golino est une actrice, réalisatrice et productrice née à Naples. Le plus célèbre reste néanmoins Paolo Sorrentino, qui a également remporté un Oscar en 2014 avec La Grande Bellezza. Ce réalisateur prolifique a su donner un style baroque et flamboyant à ses films. Il obtient le prix du jury œcuménique au festival de Cannes en 2011 pour This Must Be the Place, son premier film en anglais, avec Sean Penn. Son deuxième, Youth (2015), raconte la cure de jouvence en eaux thermales de vieux hommes riches. Il réalise également un biopic satirique sur Silvio Berlusconi, Loro (Silvio et les autres, 2018), incarné par son acteur fétiche Toni Servillo. En effet ils collaboraient déjà sur Il Divo (2008), où l’acteur incarnait Giulio Andreotti, homme politique italien longtemps resté dans les sphères de pouvoir. C’est encore Toni Servillo qui jouait dans L’Homme en plus (2001), qui suit le destin de deux homonymes dans la Naples des années 1980. Réalisateur de son temps, il a créé la double mini-série The Young Pope (2016) et The New Pope (2019) où figurent notamment Jude Law et John Malkovich.

Une ville marquée par la mafia

Toni Servillo joue aussi dans Gomorra (2008), réalisé par Matteo Garrone d’après le livre éponyme de Roberto Saviano sur la mafia napolitaine, la Camorra. C’est l’histoire de six jeunes confrontés à la criminalité dans les villes de Naples, Scampia, Castelvolturno et Terzigno. En 2014, l’écrivain napolitain adapte son roman Gomorra en série. Dans la même lignée, on peut citer Fortapàsc (2009) de Marco Risi, qui retrace l’histoire du journaliste napolitain Giancarlo Siani (1959-1985), assassiné par la Camorra. Récemment révélé au Cinéma du réel, le documentaire Selfie (2019) d’Agostino Ferrente suit le quotidien de deux adolescents napolitains, Alessandro et Pietro, dans le quartier de Traiano, aux mains de la mafia. Ils tiennent toujours eux-mêmes le téléphone portable qui les filment, en mode selfie. Le film se veut aussi un contre-récit de Naples et ses quartiers populaires.

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