Bentō pour tous
Situées en plein cœur de l’île de Honshu – qui compte environ 80 % de la population du pays –, les villes de Tokyo et Kyoto symbolisent assez bien la diversité de la cuisine japonaise dans son ensemble. Bien que le bentō soit généralement l’équivalent d’un panier-repas réservé aux écoliers et aux travailleurs, préparé à la maison, on en trouve de partout dans le commerce et notamment dans les gares (ekiben) pour un prix assez bas, souvent entre 5 et 7 €. Ce plat préparé dans une boîte compartimentée est généralement composé de riz, d’une petite omelette, de poulet ou de poisson, et de légumes. Un peu avant midi, il est aussi commun que des vendeurs de bentō s’installent sur les trottoirs dans les quartiers d’affaires ou devant les administrations. Le riz est un élément central que l’on retrouve dans de nombreux plats. Le donburi par exemple se compose d’un grand bol de riz généralement garni d’oignons grillés et d’omelette sur lequel on dispose toutes sortes d’ingrédients comme le katsudon (porc pané appelé tonkatsu en japonais), le gyūdon (lamelles de bœuf), l’unagidon (anguilles grillées), l’oyakodon (poulet et œufs), le kimuchidon (kimchi coréen), le tekkadon avec du sashimi de thon (ou sakedon avec du saumon) ou encore le tendon avec des tempura, généralement de crevettes.
Tempuras et autres yakitoris
Les tempuras/tenpuras sont d’ailleurs bien connues hors du Japon. Elles se composent de légumes (courgettes, carottes, etc.) ou de crevettes, poisson, huître, etc., couverts d’une fine pâte à beignet. Dans le même genre mais plus gras, le kushikatsu est à base de viande, fruits de mer et légumes, mais panés et piqués sur des pics en bois. Les yakitoris sont des brochettes de poulet, mais aussi de bœuf, de poisson ou encore de champignons, laquées avec une sauce sucrée. À noter, les yakitoris bœuf-cheddar que l’on retrouve en France sont une invention purement occidentale. Les Japonais étant très attachés à la propreté des lieux communs, manger dans la rue est assez mal vu. Cependant, durant les festivals, des rues entières peuvent être occupées par des vendeurs ambulants (yatai). Ce sera alors l’occasion de goûter également aux takoyaki (boules de pâte à base d’œufs fourrées à la pieuvre) originaires d’Osaka, aux taiyaki (espèce de crêpe fourrée de pâte de haricots rouges sucrée, moulée en forme de daurade, un symbole de chance), aux yakiimo (patates douces cuites sur un lit de pierres, un peu comme les marrons chauds) ou encore aux gyozas (raviolis farci de porc, de chou et de poireau). Sans oublier l’okonomiyaki, une crêpe de chou blanc râpée couronnée de porc (buta), de calamar (ika), de légumes (yasai) ou mixte (mikkusu), recouverte d’une sauce brune, épaisse et sucrée, de mayonnaise, de sauce soja et de copeaux de bonite séchée (katsuobushi) qui ondulent délicatement grâce à la vapeur qui s’échappe de l’okonomiyaki.
Soba, udon et rāmen
Les nouilles sont également très appréciées au Japon et constituent bien souvent un repas savoureux, rapide et peu coûteux. On retrouve trois variétés principales : les soba, les udon et les rāmen. Les soba sont des pâtes de sarrasin. Elles se consomment chaudes dans une soupe (kake soba), ou froides avec des nori (algues) et trempées dans une sauce de soja (zaru soba). Les udon sont des pâtes de blé épaisses, consommées dans une soupe de bœuf ou de porc. Elles seraient originaires de Takamatsu, sur l’île de Shikoku, à l’est d’Osaka. Les rāmen sont des nouilles d’origine chinoise et développées à Fukuoka, qu’on mange en soupe. Ces plats ont en commun d’être bon marché (moins de 1 000 ¥) et de se manger en aspirant l’air en même temps, le plus bruyamment possible. Cette technique – bien qu’étonnante pour un public occidental – permet de dévorer une soupe de nouilles rapidement tout en la faisant refroidir. Le yakisoba est un plat de nouilles sautées accompagnées de légumes, d’inspiration chinoise. Malgré son nom, cette recette n’est pas préparée avec des soba, mais des rāmen à base de farine de blé.
Les plats chauds classiques
L’oden est une sorte de pot-au-feu de divers ingrédients cuits dans un bouillon de poisson. Il est composé d’œufs, de radis, de navets, de croquettes de légumes (ganmodoki), de pâté de poisson (tsumire ou hampen), de konnyaku (gelée d’amidon de tubercule de konjac), de konbu (rouleau de varech), de pâté de poisson grillé (chikuwa), etc. Ce plat est généralement servi en hiver et demeure très populaire. Le sukiyaki est un plat de viande et de légumes cuit devant les clients, sur la table. La viande de bœuf est coupée en fines lamelles. Les légumes et le tofu sont ensuite cuits dans un bouillon de sauce de soja, de vin de riz sucré (mirin) et de sucre. Les différents ingrédients sont parfois plongés dans un jaune d’œuf cru. Le shabu-shabu, s’il s’apparente au sukiyaki, mais en diffère principalement par son bouillon moins sucré-salé. Autre classique, le robata-yaki n’est pas un plat mais un type de cuisson, sorte de barbecue offrant des ingrédients des plus variés: viande, fruits de mer, poisson, légumes, etc. qui sont grillés devant les clients à la demande. Le teppanyaki est assez similaire, mais le gril à charbon est remplacé une plaque chauffante où les aliments sont grillés à la manière d’une plancha.
Des tables pour tous les goûts
Comble du raffinement de la cuisine japonaise, le kaiseki ryōri est un repas en plusieurs services composé au moins d’une dizaine de plats aussi bien cuits que crus composés de soupe, viande, poissons et légumes, présentés avec une élégance absolue. Ce repas, généralement dégusté dans un cadre paisible, a bien sûr un coût : entre 100 et 300 €. Meilleur marché, le kaitenzushi est un type de restaurant où les sushis sont présentés sur un tapis roulant, en libre-service. Les izakaya sont à mi-chemin entre un pub et un bar à tapas où on sert de la nourriture avec de l’alcool où les Japonais se rendent généralement entre collègues.
L’art du poisson cru
Impossible de compléter cette introduction de la cuisine japonaise sans évoquer les sushis et les sashimis. Si les Japonais n’en mangent qu’occasionnellement, ils constituent néanmoins une parenthèse majeure de la gastronomie nippone et ils ont bien souvent une tout autre saveur sur place. En témoigne le marché aux poissons de Toyosu, le plus grand marché de ce genre au monde, qui a remplacé l’emblématique marché de Tsukiji en 2018, devenu trop exigu. Sans parler d’un thon rouge de 278 kg vendu au prix record de 2,7 millions d’euros à Tokyo en 2019.
Le sushi est un terme générique désignant plusieurs spécialités à base de riz vinaigré (shari). On retrouve ainsi le classique nigiri-zushi, sous forme d’une tranche de poisson cru posée sur une boule de riz enduite d’une touche de wasabi. Parfois une petite lanière d’algue (nori) entoure le canapé. Le maki-zushi est la version que nous connaissons le mieux en France constitué d’un rouleau de nori qui enserre une garniture au riz, au poisson et aux légumes. Si la garniture est de consistance molle ou semi-liquide (oursin, œufs de poissons), le chef-sushi (itamae) construira une petite collerette de nori autour du canapé de riz afin de le maintenir. Le sushi s’appelle alors gunkan-maki. Servi dans un bol, le chirashi-zushi est constitué par un lit de riz sur lequel sont disposées différentes variétés de poisson, de l’atsuyaki tamago (omelette froide épaisse) et des champignons (shiitake). Le hako-zushi est simplement préparé en pressant riz et garniture ensemble avant de partager le bloc en cubes de taille d’une bouchée. Enfin l’inari-zushi est une poche de tofu frit, remplie de riz, ainsi que de divers autres ingrédients (viande, poissons, champignons). En effet les sushis dans leur ensemble peuvent contenir des ingrédients très variés : anguille (unagi), coquille Saint-Jacques (hotate), crabe (kani), crevette (ebi), omelette (tamago), oursin (uni), maquereau (saba), saumon (sake), seiche (ika) et bien sûr thon (maguro). Sans oublier le thon gras (toro), une pièce très prisée provenant du ventre du poisson, réputé pour fondre en bouche.
Le sashimi quant à lui est un émincé de poisson, de fruits de mer ou de coquillages crus. Il est généralement servi en entrée d’un repas traditionnel, car la saveur délicate du poisson peut être troublée par le goût d’un aliment déjà cuit. Ils doivent être trempés dans de la sauce soja mélangée éventuellement à du wasabi avant de les consommer. Certains sashimis sont préparés à base de viande, comme le basashi, qui se présente sous forme de fines tranches de viande de cheval. Parmi ce festin de poisson cru, le fugu est une spécialité des plus sulfureuse. Tranchée en sashimi, la chair translucide de ce poisson envoie chaque année plusieurs Japonais à la morgue ! En effet, la plupart des organes du fugu sont toxiques et la moindre erreur peut rendre le plat mortel. Des années d’entraînement expliquent le prix faramineux de ce plat, allant jusqu’à 100 € par convive.
Desserts et boissons
Comparativement au salé, la pâtisserie japonaise (o-kashi) traditionnelle est un peu le parent pauvre de la gastronomie nippone. On retrouve en effet un nombre assez limité de spécialités qui ont souvent comme similitude l’indétrônable anko ou pâte de haricots azuki, que l’on utilise très généreusement. Le thé matcha est devenu commun dans les desserts également, même si c’est une tendance récente. Le mochi (pâte de riz gluant) est le grand classique de la pâtisserie japonaise, le plus souvent garni d’anko. La pâte de haricots rouges permet également de garnir les manjū (brioche vapeur) ou les dorayaki (sorte de pancake). Les pancakes sont très appréciés dans le pays et on retrouve des hottokeki, sorte de pancakes très épais et moelleux. C’est aussi le cas du cheesecake soufflé, créé au Japon dans les années 1940, qui est très aérien. Généralement on sert des pâtisseries dans les cafés, les restaurants se limitant surtout aux crèmes glacées. Le thé vert est la boisson nationale du Japon, depuis que les premières graines furent importées de Chine au IXe siècle par l’empereur Saga. On en boit quotidiennement et il existe de nombreuses boissons à base de thé, comme le bubble tea originaire de Taïwan, contenant des billes de tapioca gélatineuses et du lait de soja.
Apparue à la fin du XIXe siècle, la bière est très populaire au Japon. Les marques de bières nationales les plus connues sont Kirin, Asahi, Sapporo, Yebisu et Suntory, mais on en compte bien d’autres. Alcool emblématique du Japon, le saké (nihon shu) n’a rien à voir avec les digestifs servis dans les restaurants asiatiques en Europe et qui sont souvent de l’alcool de riz chinois appelé baiju qui grimpe à 40°. Le saké n’est pas un alcool fort, mais un vin de riz fermenté à 17°. Il existe plus de 2 500 variétés de nihon shu. Le nihon shu est soit karakuchi (sec) ou amakuchi (doux). Il peut se consommer chaud (atsukan) ou froid (reishu). Le shōchū est un alcool de patate douce, d’orge ou de riz à 30° souvent accompagné de soda et de jus de citron (chūhai ou chū-hi). Sinon, laissez-vous tenter par l’umeshu, une liqueur de prunes, très délicate, à seulement 10-15°. On peut la boire aussi bien glacée en été que chaude en hiver.
Si cela peut surprendre au premier abord, le whisky possède pourtant une place importante au pays du soleil levant. Bien que la production ait commencé qu’à la fin du XIXe siècle avec l’ouverture du pays sur le monde, le Japon est aujourd’hui le quatrième plus gros consommateur au monde ! Il existe plusieurs sociétés produisant du whisky au Japon, mais les deux plus connues et les plus largement disponibles sont Suntory et Nikka. Jusqu’à la fin des années 1990, la production et la consommation japonaises restent néanmoins domestiques, mais plusieurs prix récemment ont fait s’envoler la reconnaissance mondiale envers les whiskys japonais, ainsi que le prix de certaines bouteilles qui se vendent à plusieurs milliers d’euros.