PLACE DU SÉNAT

Elle est l’œuvre de deux hommes : Johan Albrecht Ehrenström et Carl Ludvig Engel. Le premier, dont la tâche vise à créer un centre-ville digne d’une capitale européenne, fait appel en 1816 au Berlinois Engel, déjà à l’œuvre à Tallinn et à Saint-Pétersbourg. En l’espace d’un quart de siècle, Engel dessinera les plans d’une trentaine de bâtiments publics et d’un grand nombre de demeures particulières à Helsinki et dans d’autres villes de Finlande. Il est néanmoins tenu de soumettre ses projets au tsar Alexandre Ier et à son successeur, Nicolas Ier, qui, en toute chose, conservent leur droit de veto.

Le nord de la place du Sénat est dominé par la très blanche cathédrale luthérienne (Tuomiokirkko), l’une des plus grandes cathédrales à coupole du monde, achevée en 1852 selon les plans d’Engel. L’escalier monumental renforce encore son caractère imposant. Les sculptures sur le toit, représentant les apôtres, sont réalisées sur le modèle de l’église Isaac de Saint-Pétersbourg. Du haut de l’escalier, la vue sur le port Sud (Eteläsatama) et les rues alentour est splendide. Depuis le golfe de Finlande, embarqué par exemple sur un ferry, le panorama est encore plus saisissant. La façade de la cathédrale, surmontée du grand dôme vert et portée par de nombreuses colonnes corinthiennes, se détache alors avec netteté. A droite de la place, le palais du Gouverneur, l’un des ouvrages majeurs d’Engel achevé en 1822, abrite le Sénat et le ministère des Affaires étrangères. Le bureau du Premier ministre est situé au premier étage, à l’angle de l’Aleksanterinkatu. La colonnade coiffant l’entrée principale cache l’un des plus beaux intérieurs de style Empire. L’endroit est malheureusement interdit au public.

A gauche, la place du Sénat est bordée par le bâtiment principal de l’ancienne université de Finlande, transférée à Helsinki par décret du tsar après le grand incendie de Turku en 1827. La façade présente la même structure que le palais du Gouverneur. Une bonne partie de l’université sera cependant détruite par les bombardements de 1944, notamment la grande salle des concerts, œuvres d’art comprises (depuis 1971, la grande salle des concerts d’Helsinki a élu domicile au palais Finlandia d’Alvar Aalto). Derrière la cathédrale, dans l’Unioninkatu, la petite église orthodoxe de la Sainte-Trinité due, elle aussi, à Engel, héberge plusieurs belles icônes anciennes, dont la Vierge de Smolensk. Egalement dans l’Unioninkatu, la magnifique bibliothèque de l’université (Yliopiston Kirjasto), au plafond décoré de fresques, constitue l’un des plus beaux ouvrages d’Engel. Son faste intérieur est à la mesure de sa splendide façade jaune, ornée d’une majestueuse colonnade corinthienne.

Au centre de la place, se dresse la statue d’Alexandre II, assassiné en 1881 par un groupe anarchiste, réalisée par Walter Runeberg en 1894 (fils du célèbre écrivain Johan Ludvig Runeberg). C’est sous le règne d’Alexandre II que le duché de Finlande acquit une large autonomie, d’où la place particulière qu’il tient dans la mémoire des habitants de la ville. La place du Sénat est également bordée au sud d’anciennes résidences de la bourgeoisie marchande d’Helsinki. Parmi ces demeures du début du XIXe siècle, remarquez la jolie petite maison gris-bleu bâtie pour le puissant homme d’affaires Sederholm. Les rez-de-chaussée sont aujourd’hui occupés par des petites boutiques à l’ancienne, par des cafés charmants ou des restaurants russes. La maison Kiseleff, qui fait l’angle de l’Unionkatu, regroupe nombre de ces boutiques chics qui forment le très touristique Baazar Kiseleff. Helsinki affiche aussi parfois un petit air de Saint-Pétersbourg. La capitale finlandaise a d’ailleurs servi de lieu de tournage à certains films, dont l’action était censée se dérouler dans la ville édifiée sur ordre de Pierre-le-Grand en 1703.