Guide de voyage Latchine

Latchine, ou Berdadzor, n'est qu'à 20 km à l'est de Goris, ce qui en fait la localité du Haut-Karabagh la plus proche de l'Arménie... son unique porte d'entrée aussi, depuis que la défaite arménienne dans la guerre de l'automne 2020 a permis à l'Azerbaïdjan de récupérer le district montagneux de Kelbadjar, s'étendant entre l'Arménie et le Haut-Karabagh proprement dit. Autant dire que la route de 8 km reliant la frontière désormais très sensible de l'Arménie à cette petite localité du Haut-Karabagh, à travers le territoire de l'Azerbaïdjan dans lequel la région arménienne est à nouveau enclavée comme en 1991, revêt une dimension hautement stratégique pour les Arméniens, qui ont déployé tous leurs efforts pour la contrôler dès le début du conflit en 1988. Cordon ombilical par lequel l'Arménie avait fourni une aide cruciale à ses frères du Karabagh dans leur combat pour s'émanciper de la tutelle azérie, le corridor de Latchine était devenu une route comme une autre pour les Arméniens qui avaient pris le contrôle des territoires au nord et au sud, assurant une continuité territoriale entre l'Arménie et l'Artsakh, sécurisée, sinon légitimée, par le cessez-le-feu arméno-azéri de mai 1994. Venant de Goris, à part des formalités douanières de pure forme, on n'avait d'ailleurs pas l'impression de changer de pays, en empruntant la  route conduisant à Latchine, rebaptisée Berdadzor, et au-delà Stepanakert, la capitale. Depuis 2017, une autre route au nord  lui faisait d'ailleurs concurrence, reliant Mardakert au Karabagh à Varténis en Arménie, une 3e route, au sud, devant relier Hadrout à Kapan. Cette dernière n'est pas encore achevée quand la victoire militaire azérie en novembre 2020 dépossède les Arméniens de Hadrout et Chouchi au Karabagh ainsi que des districts limitrophes qu'ils contrôlaient depuis 1994, restituant au corridor de Latchine son fragile statut d'exception. S'il était prévu que les régions azéries entourant le Karabagh retournent à l'Azerbaïdjan dans le cadre du processus de négociations internationales sous l'égide du Groupe de Minsk de l'OSCE auquel Bakou a préféré la solution militaire, les Arméniens n'entendent pas transiger sur le statut de cet axe vital, remis en état grâce aux sommes recueillies dans la diaspora par le Fonds Hayastan. C'est dire l'importance que revêt cette région du Haut-Karabagh pour les Arméniens qui craignent qu'elle ne retombe sous le joug de l'Azerbaïdjan, qui n'en accordait l'accès qu'au compte-gouttes, et qui inscrit sur sa liste noire ceux qui s'y rendent depuis l'Arménie, en affichant sa ferme intention d'en reprendre le contrôle. Sous contrôle des forces de paix russes en vertu de l'accord de cessez-le-feu arméno-azéri du 9 novembre 2020 sous l'égide de la Russie qui mettait fin à 44 jours d'une guerre sanglante, le corridor de Latchine fait depuis l'objet d'âpres négociations entre Erevan et Bakou, qui exige en contre-partie un corridor reliant l'Azerbaïdjan à son enclave du Nakhitchevan, via Meghri, dans le sud de l'Arménie.