La richesse architecturale de Boston
Le chef-lieu du Massachusetts peut se targuer de posséder une histoire architecturale particulièrement dense. Les Bostoniens sont fiers de leurs monuments, tels que Faneuil Hall (1742), Old North Church (1733) ou encore Old State House (1789), qui comptent parmi les plus anciens édifices du pays. Le parcours piéton du Freedom Trail propose une promenade le long des bâtiments les plus anciens de la ville. Les seize sites que l'on découvre en parcourant les quatre kilomètres de cette ligne pavée de briques rouges ont tous trait à la révolution américaine. On trouve ainsi le Boston Common, le plus ancien jardin de la ville, mais aussi des États-Unis, inauguré en 1634 ! Le Massachusetts State House (1798), l'Old Corner Bookstore, dont la bâtisse date de 1718, la maison de l'orfèvre Paul Revere, héros de la révolution, mais encore la frégate en bois USS Constitution, et les principaux monuments historiques de la ville : Park Street Church, King's Chapel (1688) et son cimetière, le plus ancien de Boston, etc. Il ne faut pas manquer de parcourir ce tracé urbain pour découvrir la richesse architecturale de la ville : d'un bâtiment à l'autre, le visiteur pourra admirer les principaux styles qui font l'essence de la Nouvelle-Angleterre.
Les styles historiques de la Nouvelle-Angleterre : géorgien, fédéral et victorien
Les premiers Européens qui ont débarqué sur la côte Est des États-Unis, au début du XVIIe siècle, ont construit leurs habitations en utilisant les matériaux à leur disposition. Les premières maisons coloniales ressemblaient à celles que les colons avaient quittées en Angleterre. On en verra quelques exemples reconstitués à la Plimoth Plantation à Plymouth. Elles étaient en bois, rustiques et humbles tout d’abord, puis elles se sont dotées de cheminées, de porches, sont devenues plus confortables pour devenir les fameuses « boîtes à sel » (saltbox), que l’on retrouve notamment à Cape Cod et sur l’île de Nantucket. Les saltbox, typiques de la Nouvelle-Angleterre, se distinguent des autres maisons coloniales par l’asymétrie de leur façade, leur toiture plus longue à l’arrière et leur bardage de rectangles de cèdre. Elles possédaient ainsi deux étages sur la façade avant et un seul sur la façade arrière. Leur asymétrie rappelle celle des boîtes en bois dans lesquelles on conservait le sel, qui leur donnèrent donc leur surnom.
Les édifices construits entre la fin XVIIe début XVIIIe, suivent les grandes lignes du style géorgien, alors très en vogue en Angleterre. On peut par exemple citer le Old State House, la maison de Paul Revere, l’Old Corner Bookstore, Old North Church et Old South Meeting House à Boston. À Salem, The House of the Seven Gables (1668) est également un très bel exemple d’architecture coloniale, elle a été bâtie pour un propriétaire de navire marchand, John Turner, et est devenue l’un des sites historiques préférés de la région. Elle a d’ailleurs inspiré le célèbre roman gothique éponyme, rédigé par Nathaniel Hawthorne en 1851.
À partir des années 1780, les habitations se font plus imposantes et plus sophistiquées. Elles s’arrondissent, s’éloignant ainsi du style georgien très populaire en Grande-Bretagne. Le style fédéral qui voit le jour emprunte les formes du néoclassicisme pour devenir un pur produit de l’Amérique. L’un de ses précurseurs est l’architecte Charles Bulfinch (1763-1830), natif de Boston. L’architecte partagea sa carrière entre Boston – où il réalisa de nombreux bâtiments, dont le Capitole (Massachussets State House ou New State House, 1797), reconnaissable à son dôme doré – et Washington, où il prit en charge la construction du dôme. Il adopte un style néoclassique et son travail est réputé et admiré pour sa simplicité et son équilibre. À Boston, il a notamment construit le Faneuil Hall (1805), le Harvard University Hall à Cambridge (1813-1814), l’hôpital de Boston, le Massachusetts General Hospital (1818-1823), Quincy Market, la Third Harrison Gray Otis House (1806), qui accueille désormais la société américaine de météorologie, ou encore l’église Charles Street Meeting House.
Le milieu du XIXe siècle voit apparaître un nouveau courant. L’architecture victorienne, divisée en plusieurs styles, se veut plus opulente, moins symétrique. Le courant est éclectique et difficile à définir, mais en voici quelques éléments caractéristiques : une superposition de pignons, souvent à motifs, des portes et fenêtres asymétriques, des arches qui côtoient des hexagones donnent une bâtisse souvent surprenante dans ses formes et proportions. Dans le Massachusetts, les gingerbread cottages de Martha’s Vineyard offrent une vision assez extraordinaire de l’architecture victorienne. Construites par des méthodistes, ces 318 maisons ont un style unique parfois appelé Carpenter Gothic. Ouvragées à l’excès, ce qui leur vaut d’ailleurs le sobriquet de « pains d’épice », elles affichent toute une palette de tons pastel. Leurs lambrequins, balustrades et autres motifs décoratifs qu’arborent les façades les font rivaliser d’originalité.
Autre dérivé en vogue pendant l’ère victorienne, le style Stick devient populaire à partir de la seconde moitié du XIXe siècle. On le reconnaît aux pans de bois qui ornent les façades de ses bâtiments aux allures de maisons à colombages.
À Boston, les plus beaux exemples d’architecture victorienne sont Trinity Church, la Boston Public Library, le Old Boston City Hall et New Old South Church. La Mark Twain House à Hartford, dans le Connecticut, marque quant à elle le summum du style gothique victorien.
Ailleurs en Nouvelle-Angleterre
Dans le reste de la Nouvelle-Angleterre, dans le Maine comme dans le Massachusetts, la côte a été préservée de l’urbanisation de masse. Les demeures bourgeoises se mêlent harmonieusement aux luxueux hôtels, comme aux petites maisons victoriennes sur Cape Cod ou aux maisons rectangulaires « boîte à sel » (saltbox). À Newport, les demeures de milliardaires s’alignent sur Bellevue Avenue, splendides vestiges du Gilded Age (âge doré, 1865-1901) américain. En dehors de la côte, quelques motels peu esthétiques ornent le paysage, mais restent minoritaires. Dans le New Hampshire, deux villes se détachent particulièrement. Portsmouth, sur la côte, possède une histoire assez ancienne (pour le pays) et conserve avec soin ses bâtiments du XIXe siècle. Dans les montagnes, ne ratez pas la station de Wolfeboro, située au bord du lac Winnipesaukee. C’est la plus ancienne du pays. On est loin des clichés de Palm Beach et des buildings de grande hauteur.
Les habitants sont très fiers de leur « histoire architecturale » et préservent avec force leurs édifices anciens, dont certains remontent aux XVIIe et XVIIIe siècles. Dans le Vermont, par exemple, le Shelburne Museum rassemble des petites bâtisses anciennes sur un même espace. Les demeures modestes et plus bourgeoises ont été déplacées telles quelles depuis leur lieu d’origine jusqu’au site du musée.
Providence
La ville la plus représentative de l'atmosphère gothique qui règne en Nouvelle-Angleterre est sans aucun doute Providence, qui vit naître le légendaire H. P. Lovecraft. C'est aussi pour son architecture caractéristique, gothique victorienne, que la ville attira Resnais pour Mon oncle d'Amérique, dont les plans de situation ont été tournés sur place. Providence nous plonge dans l'Amérique des XVIIIe et XIXe siècles, tant elle a été bien préservée. Une virée sur le campus s'impose : la ville accueille en effet l'université de Brown, membre du club très fermé de l'Ivy League. Brown a la particularité de s'être étendue au fil du temps en acquérant des maisons victoriennes dans les environs du campus d'origine, et où elle installa ses différents départements. Il ne faudra pas y manquer la John Hay Library, ainsi que le dôme doré de l'Old Stone Bank, dont le bâtiment affiche un style Greek revival, dont la forme rappelle un temple. Parmi les joyaux architecturaux de la ville, on trouve également le Fleur-de-Lis Studio, demeure dessinée par le peintre R. Burleigh et l'architecte Edmund R. Willson en 1885, qui est un magnifique exemple de mouvement Arts & Crafts américain.
Période moderne et contemporaine
Dans les années 1900, les gratte-ciel commencent à pousser grâce aux progrès de la sidérurgie. Dans les grandes villes, l'architecture devient verticale. Dans le Financial District de Boston, les gratte-ciel se mêlent harmonieusement au Quincy Market et au Faneuil Hall. Un bâtiment fait néanmoins naître la grogne des habitants. Il s'agit du Boston City Hall. C'est le cabinet Kallmann McKinnell & Knowles qui dessina en 1969 le temple brutaliste du Boston City Hall, bâtiment encore incompris aujourd'hui. Avec la plaza qui s'étend face à lui, ils forment le Government Center, témoin du renouveau urbain que connut Boston dans les années 1960.
Pour les gratte-ciel, car il faut bien en citer, le 200 Clarendon Street (anciennement John Hancock Tower), avec ses 241 mètres, est la plus haute tour de la ville et de toute la Nouvelle-Angleterre – elle se remarque d'autant plus qu'elle se dresse dans un quartier d'immeubles bas du XIXe siècle. Le bâtiment a mauvaise réputation : ses défauts d'ingénierie ont coûté très cher en renforcements, de crainte de le voir tomber dans un coup de vent. Pas de doute, en matière d'architecture contemporaine, c'est plutôt vers Cambridge et ses facultés qu'il faut se tourner.
Les campus de Cambridge
De l'autre côté du fleuve Charles, Cambridge compte deux des plus prestigieuses universités américaines. On y trouve les campus de Harvard et du Massachusetts Institute of Technology (MIT), qui se distinguent par les réalisations des plus grands maîtres des XXe et XXIe siècles. Ainsi, Le Corbusier (1887-1965) a signé le Carpenter Center of Visual Arts à Harvard, tandis que Frank Gehry (1929-) signe le Ray and Maria Stata Center du MIT. Mais ils ne sont pas les seuls, parmi eux, le célébrissime architecte et designer finlandais Alvar Aalto (1898-1976) a dessiné une résidence étudiante, Baker House (MIT). Le Simmons Hall accueille quant à lui les résidents en licence de l'institut. C'est Steven Holl (1947-) qui est responsable de ce monstre d'architecture brutaliste, qui s'inspire d'une éponge de mer percée de centaines d'alvéoles. Derrière son enveloppe géométrique se cachent des formes bien plus organiques, des corridors agissant comme des puits de lumière en forme d'artères qui traversent le bâtiment. On doit encore le Harvard Science Center au Catalan Josep Lluís Sert (1902-1983), l'auteur du plan de la Fondation Miró à Barcelone. Ici pas de doute, ce sont bien les universités qui ont servi de laboratoire aux architectes.