Du roman au baroque
Le centre historique de Porto vous plonge dans l’urbanisme typique d’une cité médiévale dont vous arpenterez les ruelles étroites, les passages voûtés, les volées d’escalier et les places, telle la Praça Da Ribeira aux contours inchangés depuis le XIIe siècle. Au XIVe siècle, la ville et le port ont été protégés par les imposantes « murailles fernandines », dont on peut voir les vestiges. Roman et gothique s’affichent fièrement dans les cathédrales et églises, qui sont autant de symboles de la reconquête idéologique. Dans le Douro et le Minho, la plupart des églises conservent une grande sobriété propre au roman, tandis que dans les grandes villes, les églises gagnent en hauteur et en richesse décorative. A Porto cette évolution est bien visible : la cathédrale, aux allures de forteresse, porte les atours du roman, tandis que l’église San Francisco et sa superbe rosace révèlent la richesse gothique. Indissociable du Portugal médiéval, ne manquez pas dans les environs de Porto, les châteaux de Lamego et Guimaraes aux imposantes silhouettes crénelées. A Porto, la Renaissance s’exprime dans un vocabulaire maniériste comme le montre bien l’église De Grilos avec sa façade, certes austère, mais très scénographiée. A Vila Nova de Gaia, le monastère Da Serra Do Pilar, lui, impressionne par l’originalité du plan circulaire de son église et de son cloître aux 36 colonnes ioniques. La ville se transforme ensuite en foisonnante et exubérante cité baroque. Sous les coups de crayon de l’architecte toscan Niccoló Nasoni, Porto se pare d’or et de faïence. Partout s’affichent les célèbres azulejos - comme sur la façade de l’église Saint-Ildefonse - et les exemples de talha dourada, sculptures sur bois doré entourées de colonnes torses et baldaquins. La Torre dos Clerigos et son église, œuvres de Nasoni, ont même valu à Porto le qualificatif de « plus baroque des villes portugaises ». Aux alentours de Porto, ne manquez pas la Casa Mateus, le petit Versailles de Vila Real ; et la superbe église Bom Jesus de Braga, avec ses magnifiques jardins et son monumental escalier.
Du néoclassicisme à l’Art déco
Sous l’influence anglaise, Porto se fait néoclassique. Parmi les grands bâtiments de l’époque, l’Hôpital de Santo Antonio est sans doute le plus beau, mais le plus connu reste la British Factory, vaste édifice néo-palladien. Pour découvrir l’architecture liée aux vins de Porto, rendez-vous dans la vallée du Douro qui abrite de superbes quintas, ces grandes propriétés aux façades immaculées trônant fièrement au milieu des vignes, elles-mêmes aménagées en terrasses et gradins grâce à une ingénieuse architecture de pierre ! Puis, renouant avec son sens de la mise en scène, la ville va orner ses façades d’azulejos, et transformer ses rues en « calçada portuguesa » aux pavés noirs et blancs agencés de façon à créer d’étonnants motifs. Au tournant du siècle, la ville se dote de joyaux de l’architecture métallique. Le Ponte Dona Maria - dessiné par Gustave Eiffel - et le Ponte Dom Luis I - avec son double tablier et son arche métallique de 170 m - en sont les célèbres représentants. Et ne vous fiez pas aux sages lignes néoclassiques du Palacio da Bolsa, car en son sein il renferme la superbe Cour des Nations surmontée d’une étonnante verrière supportée de piliers métalliques apparents. Le début du XXe siècle se fera sous les courbes et les entrelacs de l’Art nouveau dont vous pourrez admirer de très beaux exemples rue Santa Catarina et rue du 31 de Janeiro. Le Café Majestic avec sa façade richement ornementée et ses plafonds décorés, et la Librairie Lello avec sa superbe verrière et sa façade mêlant éléments gothiques et modernistes en sont les plus fiers représentants. Quelques années plus tard, c’est l’Art déco qui va marquer la ville. Le grand architecte de l’époque est José Marques Da Silva à qui l’on doit la Casa Serralves. Sa silhouette rose, mêlant courbes et lignes droites, évoque celle d’un paquebot. Un style que l’on retrouve dans d’autres édifices célèbres de la ville, tels le cinéma Batalha ou le Colisée de Porto, que l’on reconnaît à leurs hublots et leurs silhouettes qui font penser à des mâts et des ailerons !
Porto contemporain
Le Tribunal da Relaçao do Porto est un bon exemple de ce mélange grandiloquent de modernisme et de classicisme très prisé durant la dictature de Salazar. Durant l’après-guerre, la ville va également se doter de nombreux logements et bâtiments de service adoptant les volumes simples et austères hérités de Le Corbusier. Mais très vite, deux personnalités vont venir casser ces codes modernistes, proposant une architecture à taille humaine, tout en lumière, en sobriété et en élégance : Alvaro Siza et Eduardo Souto de Moura. Les deux hommes ont travaillé ensemble au renouveau de la ville, comme le montre la rénovation de l’Avenida dos Aliados, à la perspective épurée. Ils ont également laissé leur empreinte dans les stations de métro de la ville. Souto de Moura en a réalisé 14, là où Siza s’est « contenté » de la Station Sao Benta, lumineux mélange de verre, acier et béton. Siza a également réalisé l’Ecole d’Architecture de la ville, très bel exemple de rationalisme esthétique, et la Fondation Serralves consacrée à l’art contemporain, étonnante structure de béton et d’acier. Dans les environs de Porto, Souto de Moura a imaginé le stade de la ville de Braga, qu’il a adossé à la paroi rocheuse de la carrière environnante, une illustration parfaite de son minimalisme et du soin apporté au lien avec l’environnement. La Casa da Música est, elle, l’œuvre de Rem Koolhaas, qui a imaginé une structure ultra moderne mais truffée de références à l’histoire architecturale du pays : les orgues sont ornés de talha dourada, comme à la grande époque baroque, et les décorations en azulejos rappellent les façades du XIXe siècle. Le très futuriste terminal passager de l’aéroport Leixoes, œuvre de Luis Pedro Silva, a, quant à lui, reçu le prix du meilleur building de l’année en 2017 ! Aujourd’hui, Porto vibre au rythme de ses jeunes architectes - dont les élégantes créations sont autant de clins d’œil aux œuvres de Siza et Souto de Moura -, et de ses designers qui trouvent dans l’industrielle et industrieuse cité un merveilleux terrain d’expérimentation pour faire dialoguer art et artisanat !