3 FONTEINEN

Dans le centre de Beersel, place Herman Teirlinck, en face de l'église, vous tombez sur le restaurant 3 Fonteinen. Quelques mètres plus loin sur la Hoogstraat, dans un bâtiment un peu en retrait de la chaussée, Armand Debelder avait relancé une activité brassicole en 1999. Son père Gaston y assemblait des lambics depuis 1953. L'autre fiston, Guido, a pris les rênes du restaurant. Pendant une trentaine d'années, Armand Debelder va faire des 3 Fonteinen une brasserie de gueuzes de renommée mondiale. À l'instar d'un Cantillon ou d'un Frank Boon, il a connu les vaches maigres, dans les années 1980 et 1990 lorsque le lambic, une bière à l'acidité marquée, était délaissé pour des produits plus sucrés. Le public se montre plus curieux dans les années 2000, mais le sort s'abat sur la brasserie 3 Fonteinen au printemps 2009. La température dans la chambre de fermentation de l'entrepôt dépasse les 50 °C au lieu des 16°C requis, à cause d'un thermostat défectueux. Plus de 100 000 bouteilles ont été victimes de cette surchauffe. Armand Debelder ne se déclare toutefois pas vaincu. Il choisit de distiller le contenu de ces bouteilles pour en faire une eau-de-vie de gueuze à 40 % vol., l'Armand Spirit. Les ventes de ce digestif ont permis de combler quelque peu les pertes mais Armand a dû tout de même interrompre temporairement son activité de brassage à la suite de l'incident pour ne plus se consacrer qu'à celle d'assembleur de lambics. Après avoir un temps pensé tout arrêter en raison de cette avarie et de problèmes de santé, il a trouvé une nouvelle motivation et a pris sous son aile un jeune associé, Michaël Blancquaert. Ce dernier, accompagné de Werner Van Obberghen, va faire passer l'entreprise à la vitesse supérieure. Les installations de production et de vieillissement sont transférées en 2016 sur un nouveau site à Lot. Beersel, à 3 kilomètres de là, est conservé comme lieu de brassage. Trois ans plus tard, un vaste plan d'investissement est présenté, devant permettre de doubler la superficie pour accueillir un espace de conférences et un verger où seront plantés des cerisiers pour la confection de la kriek. Armand Debelder définitivement à la retraite, les deux jeunes entrepreneurs ont aussi mis sur pied un réseau d'une quinzaine d'agriculteurs opérant dans un rayon de 25 km autour de la brasserie, qui leur fournissent les céréales (orge et froment) nécessaires à leurs brassins.

D'autres matières premières locales, comme des cerises de Schaerbeek, sont utilisées pour la confection de la Oude Kriek notamment. Si la maison travaille avec la Proefbrouwerij de Lochristi pour élaborer une Beersel blond et une lager classiques, la carte de bières du local de dégustation à Lot, le « lambik-O-droom », fait la part belle à des breuvages en édition limitée qui ne sont pas à la portée de toutes les bourses. Peut-être une façon de justifier le surnom de champagne de Bruxelles, parfois attribué à la gueuze. L'héritage d'Armand Debelder, décédé en mars 2022, est plus florissant que jamais.