Le seuil du Poitou
Ce plateau calcaire du jurassique, sorte de détroit fossile ouvrant le passage entre le Nord et le Midi, fait également jonction entre deux très anciens massifs : l'Armoricain, qui démarre à Ménigoute, et le Central. La Vienne occupe la majorité de cette vaste plaine dominée par le horst de Champagné-Saint-Hilaire (195 mètres, au sud), que recouvraient il y a quelque 150 millions d'années environnements marins puis lagunaires. Ces mers protohistoriques nous ont laissé quantité de souvenirs, sites (protégés) piqués d'ammonites, de gastéropodes et autres fossiles marins : Faluns d'Amberre et falunières du Moulin-Rochas dans le 86 ; carrières de Ricou (Azay-le-Brûlé) et réserve nationale du Toarcien (Thouars) dans le 79. Avis aux géologues et paléontologues en herbe : participez l'été aux animations de l'Homme et la Pierre (www.lhommeetlapierre.com). Autre héritage issu de cette mer retirée il y a 25-35 millions d'années : d'importants cours d'eau ayant généreusement redessiné le territoire, formant falaises de calcaire et de tuffeau propices à l'habitat troglodytique. Rendez-vous autour de la vallée du Clain, à Saint-Remy-sur-Creuse (Grand Châtellerault) ou à Berrie (Loudunais), sinon à Tourtenay, unique spécimen deux-sévrien. Vous admirez les plus hautes falaises de la région à Angles-sur-l'Anglin, où se pratique l'escalade (site de la Guignoterie).
Le Marais poitevin
Il s'ouvre aux portes de Niort, à l'extrême ouest des Deux-Sèvres, pour se déployer vers les façades atlantiques vendéenne et charentaise. Ses 100 000 hectares en font la plus vaste zone humide de France après la Camargue. Le Parc naturel régional (PNR) du Marais poitevin n'est que l'ombre de son ancêtre, le golfe des Pictons, avancée océanique formée il y a environ 20 000 ans, progressivement résorbée au gré de phénomènes sédimentaires. A partir de l'an Mil, de prodigieux aménagements (engagés notamment par la coalition des abbayes de Saint-Michel, L'Absie, Saint-Maixent, Maillezais et Niel à l'origine du canal des Cinq-Abbés, achevé en 1217) accélèrent son assèchement. L'ensemble que vous admirez aujourd'hui, c'est-à-dire trois grands milieux, trouve sa forme à la fin du XVIIe siècle : le marais mouillé et son emblématique Venise Verte, ses méandres et ses nappes de lentilles vert acidulé ; le marais maritime et sa célèbre baie de l'Aiguillon (à l'embouchure de la Sèvre niortaise) ; le marais desséché. Ce melting-pot d'ambiances, ces visions enchanteresses d'une faune libre et d'une nature sauvage, vous vous en régalez à pied, à vélo, et bien sûr à bord d'une barque maraîchine. Pour en savoir + : www.parc-marais-poitevin.fr
La vallée du Thouet
Terre généreusement arrosée, le Poitou, constellée de fleuves et de rivières issus du bassin de la Loire. Rien qu'en Deux-Sèvres, qui doit son nom aux Sèvre nantaise et niortaise (fleuve côtier se jetant dans l'Atlantique, en la baie de l'Aiguillon), on recense plus de 1 300 cours d'eau. Délicieusement sinueux, calmes et bucoliques, le Thouet et sa vallée comptent parmi les plus belles destinations poitevines. La rivière prend sa source en Gâtine pour se dérouler tranquillement vers Saumur et se jeter dans la Loire. Difficile d'imaginer, au regard des panoramas vierges et de cette faune grouillante, que le Thouet fut jadis lourdement chargé de marchandises, entre autres d'alcools et de charbon (en amont, bassins houillers de Faymoreau ; en aval, vignobles de la vallée de la Loire). Suivez son cours à la découverte de ses places fortes médiévales, Parthenay, Thouars, Airvault, Saint-Loup-sur-Thouet, des 350 kilomètres de balades, le tout accessible via la Vélo Francette (itinéraire cyclable Caen-La Rochelle) et le chemin de Compostelle (via Turonensis, GR 655 et 36). La vallée du Thouet, l'un des grands bassins fauniques du Poitou, dissimule plusieurs espaces naturels sensibles et zones Natura 2000, refuges de dizaines d'espèces menacées dont la loutre et l'outarde canepetière. Modes de déplacement doux, hébergements écoresponsables, patrimoine, pêche, activités nature, le site Internet du Syndicat mixte de la Vallée du Thouet vous dit tout : www.valleeduthouet.fr !
Parmi les autres cours d'eau à découvrir : la Sèvre niortaise et ses méandres (Niort, Echiré, La Crèche et les îles Candé) ; la Gartempe, qui vous mènera de La Roche Posay à Montmorillon avant de se perdre en Limousin.
Chizé et Moulière, forêts légendaires
Le Poitou, pas si boisé (majorité de petites surfaces privées, très morcelées, et de taillis, relativement peu exploités), possède deux forêts légendaires à même d'éclipser la célèbre Brocéliande. Mélusine y fit halte à la recherche d'un point d'eau : des sept glands qu'elle disposa à terre, naquirent sept vigoureux chênes reliés entre eux, au centre desquels une eau fraîche et limpide jaillit. Cette baignoire de Mélusine, vous la découvrez au cœur de la forêt domaniale de Chizé, située à 20 minutes de Niort. Ses 3 435 hectares majoritairement feuillus (hêtres et nombreux spécimens de chênes remarquables) sont le reliquat de la sylve d'Argenson. De 1951 à 1967, près de la moitié de sa surface fut occupée par l'OTAN et une base militaire américaine, site désormais établi en réserve biologique intégrale (où se trouve le CEBC, laboratoire de recherche écologique associé au CNRS). Station de trail, GR 36, chemins de rando : en marge de votre bol d'air frais, vous rencontrez la faune sauvage européenne à Zoodyssée (www.zoodyssee.fr).
Moulière et ses 6 800 hectares. Elle fut l'un des théâtres de la guerre de Cent Ans, témoin de la chevauchée dévastatrice du Prince Noir, Edward de Woodstock. Situé à quelques minutes de Poitiers, le massif forestier est très fréquenté des locaux, qui aiment s'y mettre au vert. Elle conserve jalousement ses étrangetés, nécropoles mérovingiennes (jamais fouillées mais toujours pillées), trou souffleur (jusqu'à 50 km/h) ou encore tombe à l'enfant. Un introuvable trésor continue d'attirer une poignée de passionnés, de même que ses créatures : gare au voyageur épuisé, tenté d'accepter l'invitation de cette superbe monture harnachée, le cheval Mallet... Un rapide road trip autour de Moulière vous conduira à de très jolies découvertes, Montamisé, La Chapelle-Moulière, Bonneuil-Matours et Dissay. De fin septembre à fin février, il sera peut-être l'occasion de croiser un équipage de chasse à courre.