Découvrez Espagne - Navarre/Pays Basque/Rioja : Musiques et Scènes (Danse / Théâtre)

Sur le plan artistique, évoquer le Pays basque convoque à l’esprit des images de l’incontournable musée Guggenheim de Bilbao ou bien d’Hemingway durant les Sanfermines (à Pampelune) que l’écrivain adorait. Mais le Pays basque, c’est aussi un monde de danses, de chants et de folklore. Un patrimoine riche, autant marqué par la pratique de nombreux instruments traditionnels – comme l’étonnant txalaparta – que par l’héritage du chant a capella, symbole ultime de l’univers musical basque. Mais la musique traditionnelle basque c’est aussi et surtout le choix du chant en langue basque. Grâce à la vague de nouvelle chanson qui a déferlé sur la région dans les années 1960 et la popularité des bertsolari, ces bardes rois des vers improvisés, la langue est non seulement maintenue vivante, mais continue à séduire les jeunes générations. Tout le caractère et la singularité du Pays basque sont à retrouver dans sa musique.

La musique traditionnelle

La région entretenant une identité culturelle très marquée, on trouve sans surprise un monde de musiques folkloriques variées au Pays basque. Une des particularités les plus frappantes de la région est la place accordée à la voix. Fort d’une longue tradition orale – certaines mélodies répertoriées remontent au XVIIe siècle –, le Pays basque pratique toujours énormément le chant a capella et les chœurs basques jouissent d’une renommée internationale. Lorsqu’ils ne sont pas purement vocaux, les chants traditionnels peuvent s’accompagner du txistu, la fameuse flûte à trois trous qui se joue à une main (l’autre s’occupant généralement d’un instrument à percussion).

Mais la tradition basque la plus spectaculaire est sans conteste le bertsularisme, une improvisation chantée en basque, véritable pilier de la culture de la région. Dans cet art qui nécessite une grande agilité intellectuelle, on voit un improvisateur, le bertsolari versifier sur un thème imposé, en respectant rythme et mélodie. Phénomène aussi social que culturel, les championnats de bertso – qui existent ici depuis 1935 – peuvent attirer jusque plusieurs dizaines de milliers de spectateurs ! Une tradition toujours plus populaire qui joue un rôle fondamental dans la transmission orale du basque. Un nom à suivre est Maialen Lujanbio Zugasti, première femme à remporter le Bertsolari Txapelketa Nagusia en 2009.

Plus localement, en Navarre et en Rioja, il existe une variante de la jota, connue comme la « jota de l’Ebre ». Les paroles des chansons sont des poèmes populaires qui font référence à la vie rurale, comme les vendanges ou le travail dans les champs et les morceaux sont orchestrés par une rondalla (groupe musical en habits folkloriques).

Aussi, quelques artistes maintiennent vivante la pratique de certains instruments typiquement basques comme le txalaparta sorte de xylophone joué en couple avec des pilons tenus verticalement ou la trikitixa, un accordéon diatonique dont le musicien Kepa Junkera est devenu un maestro et un nom très couru à l’international.

À Bilbao, ce grand rendez-vous de la culture basque qu’est le Basquefest propose de goûter à cette dernière durant quatre jours via la littérature, la gastronomie, le sport et bien entendu la musique. Autrement, le Mundaka Festival se tenant dans la ville du même nom programme quantité de concerts pour accompagner ses dégustations et autres ateliers gastronomiques. Pour quiconque voudrait approcher de plus près l’art des bertsolaris, il est conseillé de se rendre à la Sala BBK de Bilbao, ancien cinéma reconverti en plateforme culturelle très dynamique ou au Doka Kafe Antzokia de San Sebastian, un des meilleurs lieux artistiques de la ville. À noter que le dernier samedi de juin à Ondarroa a lieu le Zapato Azule (samedi bleu) grande fête où les participants arborent la traditionnelle vareuse des marins de couleur bleue et on l’on voit beaucoup de bertsolaris.

La musique classique

Si le Pays basque français a porté quelques jolis noms de la musique classique comme Maurice Ravel (né à Ciboure) le côté espagnol a lui aussi été le berceau de grands compositeurs. Parmi eux, citons les éminents Felipe Gorriti (1839-1896) ; Jesús Guridi (1886-1961) l’auteur de la fameuse zarzuela basque El caserio ; Raimundo Sarriegui (1838-1913), créateur de la Marcha de San Sebastián, toujours jouée lors de la Tamborrada de San Sebastián ; ou encore Pablo Sarasate (1844-1908) violoniste virtuose. Moins célèbres, mais tout aussi importants, Juan Crisóstomo de Arriaga (1806-1826) fut surnommé le Mozart espagnol, José María Usandizaga (1887-1915) fût considéré comme un des pères de l'opéra basque ou encore José María Iparraguirre (1820-1881) signa Gernikako Arbola, l’hymne basque. Plus récemment, citons aussi les Basques Carmelo Bernaola et Luis de Pablo, membres du groupe d’avant-gardistes espagnols Generación del 51 et Pablo Sorozábal, un des auteurs les plus courus de la musique symphonique et lyrique du XXe siècle.

Côté arts lyriques, étant donné l’amour que la région porte aux voix, on trouve évidemment quelques grands noms. À commencer par Julián Gayarre, ténor navarrais né à Roncal en 1844 (et mort en 1890) qui enchaîna les plus grandes scènes (dont Paris et La Scala de Milan) ou plus récemment la grande soprano Ainhoa Arteta. L'Orfeón Donostiarra, chœur formé en 1897 à San Sebastián et dont l’ambition est de conserver et diffuser la tradition des chants basques, demeure un des ensembles vocaux les plus prestigieux au monde.

Dans l’ensemble, la musique classique est entre de bonnes mains au Pays basque. Par exemple, des entités telles que l'Orchestre Symphonique d'Euskadi, dirigé par le jeune américain Robert Treviño, veillent à la création et à la diffusion de la musique savante basque. Jouissant d’une excellente réputation, ce dernier est chez lui dans les meilleurs auditoriums de la région : Palacio Euskalduna, Baluarte et Palais Kursaal. Le premier, imaginé par les architectes Dolores Palacios et Federico Soriano qui lui ont donné cette âme industrielle, est à Bilbao et programme de grands opéras et les concerts de l’orchestre symphonique de la ville. Il accueille aussi Musika-Música, prestigieux festival international de musique classique. Le second, installé à Pampelune, est un immense bâtiment contemporain (2003) dessiné par l’architecte navarrais Francisco Mangado. Il propose bon nombre de concerts et spectacles de qualité, notamment de l’Orchestre symphonique de Navarre. Le dernier, le Palais Kursaal est à San Sebastián et adopte une ligne artistique très proche des deux lieux frères précédemment mentionnés. C’est ici que se déroule chaque année au mois d’août, la Quincena Musical, grand festival de musique classique fondé en 1939 (le plus ancien d’Espagne).

La musique populaire

On le sait, mais on l’oublie souvent : Luis Mariano était basque. Et à l’instar du célébrissime chanteur d’opérette, la région entretient depuis des générations un penchant pour la chanson. Au XXe siècle, l’icône du renouveau du genre est Mikel Laboa (1934-2008), véritable patriarche dont l’album El Diario Vasco est généralement considéré comme le meilleur album basque de l’Histoire. Sous son impulsion toute une scène – que l’on pourrait qualifier de folk basque – est née, mariant l’usage de la guitare aux canons de la musique basque (et ses harmonies a cappella). C’est ici qu’apparaissent des compositeurs comme Ruper Ordorika ou Benito Lertxundi, considérés comme les grands rénovateurs de la chanson locale. Aujourd’hui, la chanson basque vit avec son temps et se voit incarnée par des stars de la pop très grand public comme Amaia Montero.

Le rock

C’est un fait depuis les années 1980, le Pays basque est une terre fertile pour le rock. Né dans un contexte de crise économique à la fin du franquisme, le rock, par son engagement et sa radicalité, épouse parfaitement l’esprit indépendantiste (tous les textes sont chantés en euskera) et révolté des Basques de l’époque. Pionnier parmi les pionniers, le groupe Hertzainak lance le mouvement suivi de près par Kortatu. Ce dernier, formé dans les années 1980 par Fermin Muguruza (une future personnalité musicale importante) et son frère Iñigo, mélange langue basque, musique festive et militantisme. De quoi devenir le symbole de toute une génération. Moins engagé, plus porté sur la recherche formelle, Itoiz est l’autre grand groupe de rock basque de l’époque. Trois grandes entités qui vont ouvrir la voie à des groupes qui deviendront importants, tels Fito & Fitipaldis, Kaotiko, Gatillazo ou encore Eskorbuto, l'un des groupes les plus influents de la scène punk espagnole.

Si le Pays basque ne manque pas d’adresses pour écouter du rock, deux sortent du lot par leur esprit. Le premier est le Zentral, situé à l’intérieur du marché de Santo Domingo, en plein centre historique de Pampelune. L’endroit à ne pas manquer pour profiter des meilleures soirées de la ville. Le second, Le Bukowski porte plutôt bien son nom et demeure depuis sa création dans les années 1980, l’épicentre de la culture underground de San Sebastián. Joli cadre vintage et bonne programmation.

La danse

Omniprésentes lors des fêtes et célébrations, les danses traditionnelles sont un des éléments parmi les plus importants du folklore basque. Et s’il existe autant de danses qu’il y a de villages au Pays basque et en Navarre, certaines traditions sont visibles dans l’ensemble de la région. C’est le cas des soka-dantza, des danses en cercles ouverts exécutées en couples. Traditionnellement, les danseurs forment une chaîne humaine en se tenant par la main puis tournent dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Le conducteur de cette chaîne est appelé aurresku – nom qui par extension désigne parfois la danse. À l’autre extrémité, à la dernière place on trouve l’atzesku, c’est celui-ci qui comme l’aurresku exécute la plupart des solos de danse. D’ailleurs, il est désormais fréquent que des spectacles ne mettent en scène que les danses effectuées par l’aurresku.

Parmi les autres danses très pratiquées, on citera le dantzari dantza, exécuté au son du txistu et originaire de Durango ainsi que le Kaxarranka, originaire de Lekeitio, où le danseur réalise sa chorégraphie perché sur une caisse. Dans la Rioja, une des danses les plus surprenantes est la Danza de los zancos d’Anguiano, réalisée perchée sur des échasses en bois de 45 cm de hauteur, généralement à l’occasion de la Sainte-Madeleine. D’autres bonnes occasions d’assister à des danses folkloriques sont des rendez-vous comme la Sanfermines de Pampelune, le Festival International de Folklore de Portugalete en juillet ou encore le championnat de danse Dantzari Eguna de Vitoria, une rencontre des danseurs de toutes les provinces basques.

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