Le Sahel évoque encore pour la plupart des Occidentaux une vaste zone désolée de l'Afrique, dont on garde en mémoire les tragiques images de famines qui ont accompagné les grandes sécheresses des années 1968 à 1973. Mais le Sahel est avant tout une région carrefour fascinante, pleine de vie, aux frontières mouvantes du Sahara. Région aride, la savane y rencontre les sables du grand désert. Le paysage n'est donc pas dunaire ni désertique. Il est semi-désertique et caractérisé par la disparition des grands arbres au profit des buissons. Les palmiers sont plus présents et quelques dunes de sable percent ici et là, sans toutefois dominer le paysage. Les peuples Peul, Touareg et Bella y sont dominants, ayant réussi à adapter leur mode de vie à ces conditions très sèches. Nomadisme et pastoralisme constituent les piliers de leurs organisations.
Comme partout ailleurs au Burkina Faso, ces peuples font preuve d'une grande générosité et hospitalité, renforcées peut-être par l'absence de propriété privée liée à la terre. Le Sahel appartient à celui qui foule son sol, les frontières administratives sont ici plus virtuelles qu'ailleurs. Au gré des saisons, les campements se déplacent suivant les déambulations des cheptels de zébus en quête permanente de pâturages ou de points d'eau. Face à la désertification qui avance inexorablement vers le sud, les nomades peuls sont poussés à descendre toujours plus bas avec leurs troupeaux, et occupent déjà presque l'ensemble du territoire national.
Quelques sédentaires vivent néanmoins dans cette région : il s'agit des descendants des Songhaï, dont le nom rappelle l'immense et prestigieux empire que leurs ancêtres avaient autrefois fondé dans cette région de la boucle du Niger (nord du Mali, du Burkina Faso et Niger). A la chute de celui-ci au XVIe siècle, les nomades peuls arrivèrent sur ces terres et instaurèrent le royaume de l'émir du Liptako. Au XIXe siècle, ils sont eux-mêmes vaincus par les Touareg Udalen, qui donnèrent leur nom Oudalan à l'actuelle province sahélienne du Burkina. Les Touareg, qui s'enturbannent le crâne et le visage d'un long chèche trempé dans l'indigo (le tâgulmust) sont les célèbres Hommes bleus du désert. Leurs habits et leurs tentes sont dominés par cette couleur qui les distingue sur les marchés du Sahel burkinabé. Leurs anciens esclaves, les Bella, étaient chargés de garder leurs troupeaux et de les servir. Récemment libérés de cette soumission, de nombreux Bella continuent de fait à vivre selon cette organisation. Il est donc fréquent de voir leurs campements toujours proches des Touareg, même s'il ne fait nul doute que, pour ces deux peuples, la modernité modifiera peu à peu leur relation et leur mode de vie. Le processus sera certainement lent car ce territoire, anciennement sous le contrôle des Touareg, dernier bastion à résister à l'armée coloniale, semble particulièrement peu touché par les changements conduits par la capitale. Ici, la vie s'écoule silencieusement au rythme des lois naturelles plus fortes que les lois humaines.
Un voyage au Sahel implique un dépaysement total et est, pour cela, hautement recommandé. Dans cette région, on oublie le temps, ou plus exactement on prend le temps d'une lente balade à dromadaire, d'une contemplation silencieuse des paysages et du ciel, ou encore d'un thé à la menthe interminable. Un tour dans le Sahel est incontestablement un moment fort de tout voyage au Burkina Faso et peut même faire l'objet d'un séjour entier.
Attention, en 2011, à la suite d'enlèvements d'Européens au Mali et au Niger, revendiqués par la branche d'Al-Qaida au Maghreb islamique (AQMI), la France a classé le Sahel burkinabé en zone orange. Lors de notre enquête, les Touareg auprès desquels nous nous sommes renseignés nous affirmaient que de tels événements ne pourraient avoir lieu au Burkina Faso, la région sahélienne étant petite et pauvre. Il est toutefois recommandé de faire preuve de vigilance, de ne pas rouler dès la nuit tombée et de prévenir l'ambassade de son pays. Les autorités burkinabées souhaitent également que les étrangers qui se déplacent dans cette zone se signalent aux forces de police ou de gendarmerie de Dori. Cette mise en garde a entraîné une baisse radicale du nombre de touristes dans la région et la qualité de l'offre hôtelière s'en ressent, les gestionnaires n'ayant plus les moyens d'entretenir les lieux correctement.