Le Ghana, poubelle textile du monde : comment agir ?
Le Ghana, poubelle textile du monde : comment agir ? © Avelino - Adobe Stock

En Afrique de l’Ouest, le Ghana est devenu malgré lui la poubelle textile du monde. Le pays reçoit par cargos entiers des vêtements usés tout juste bons à s’entasser dans des déchetteries sauvages. Revenons sur les origines de la crise, et sur les solutions pour agir.

L’origine du problème qui a fait du Ghana la poubelle du monde

Montagne de vêtements
Montagne de vêtements © annaspoka - Adobe Stock

Nous sommes beaucoup à déposer nos vêtements dans des containers dédiés, avec l’espoir de leur offrir une seconde vie. Mais que deviennent-ils, une fois atterris dans la benne ? Environ 5 % d’entre eux retrouveront une seconde vie sur les cintres de friperies locales, et 40 % seront recyclés ou transformés. Mais la majorité d’entre eux, soit 55 % des textiles usagés laissés dans des bennes de réutilisation comme celles du Relais, seront revendus et exportés. Comptez 0,50 € le kilo de vêtements usés à l’importation. Et justement, le pays d’Afrique se positionne comme l’un des plus grands importateurs de vêtements usagés, quitte à faire du Ghana la poubelle du monde.

Chaque jour, ce ne sont pas moins de 800 millions de produits textiles, qui arrivent sur les côtes ghanéennes. Dans les rangs des pays à la source de ce flux d’immondices, on compte la France, les autres pays européens, ceux d’Amérique du Nord, ainsi que plusieurs pays d’Asie comme la Chine ou la Corée du Sud. Parmi eux, la France est responsable de l’envoi de plus de 500 tonnes de vêtements par an. Ils sont alors revendus et alimentent un marché de seconde main, comme en atteste le marché de Kantamanto, dans lequel 30 000 vendeurs proposent des vieux vêtements et autres babioles, venus de l’Occident. Seulement, la qualité des vêtements est de plus en plus médiocre, et leur nombre de plus en plus important, à cause des méfaits de la société de consommation et de la fast fashion.

Le renouvellement ultra rapide des collections, les promotions à outrance et les tendances vite balayées poussent en effet à un mode de consommation dans lequel on achète des vêtements bon marché de qualité médiocre, pour s’en débarrasser presque aussitôt que la mode est passée. Résultat : le pays ne sait plus quoi faire de ces vêtements trop mauvais pour être revalorisés ou revendus, et les entasse dans des décharges sauvages, qui font du Ghana la poubelle du monde. On estime que 40 % des vêtements de seconde main importés par le Ghana sont inutilisables, et finissent dans des décharges à ciel ouvert ou dans l’océan. Si le Ghana voyait autrefois dans ces exportations une porte de sortie face à la pauvreté, ces vêtements de mauvaise qualité, qui ne sont plus que des déchets, plongent aujourd’hui les habitants dans une misère encore plus profonde.

Le phénomène est tel qu’à Accra, la capitale du Ghana, les habitants doivent cohabiter au quotidien avec les déchets. Ainsi, sur le littoral, le sable a été remplacé par des détritus textiles, au point qu’on surnomme l’endroit « la plage poubelle ». À Old Fadama, un bidonville de l’ouest de la ville, les habitants, en plus de devoir faire face à une extrême pauvreté, doivent désormais traiter avec l’insalubrité. Car en effet, les déchets textiles, en formant des montagnes d’immondices, deviennent un véritable problème de santé publique, ne serait-ce que par les nombreux nuisibles attirés par les déchetteries. Les déchets textiles, mêlés à ceux rejetés par la mer et aux déchets ménagers des habitants, posent également de grands problèmes de pollution. En effet, en plus des nombreux déchets qui finissent à la mer, les écoulements d’eau de pluie sur ces matières issues de l’industrie textile provoquent des infiltrations d’eau polluée jusqu’aux aquifères. L’eau consommée par les habitants devient ainsi polluée et dangereuse. Les prélèvements d’eau sur les côtes ghanéennes ont ainsi révélé des taux inquiétants de microfibres, qui finissent par être consommés par les poissons, eux-mêmes pêchés par les habitants.

Comment agir contre la crise des déchets textiles au Ghana ?

Jeans avec label recyclable
Jeans avec label recyclable © New Africa - Adobe Stock

Un bon déchet est un déchet qui n’existe pas. En effet, s’il existe des solutions pour endiguer le problème du Ghana en tant que poubelle du monde, la plus efficace est celle de ne pas nourrir le système consumériste de l’industrie textile. Il faut donc changer ses habitudes de consommation, de manière à offrir une plus longue vie à chacun de ses vêtements. On oublie les tendances passagères et les pulsions, et on choisit des vêtements plus durables, qui comblent un besoin réel.

De la même manière, pour réduire son empreinte écologique, on évite de se séparer de ses vêtements à la moindre contrariété. Il existe des solutions, même lorsqu’un vêtement est usé, troué, ou taché : on détourne, on rapièce, ou on envoie au pressing.

Autre mesure cruciale pour éviter de polluer : éviter à tout prix les enseignes de fast fashion ! Au-delà de mettre en place de nombreuses mesures d’obsolescence programmée pour nos vêtements, telles que des changements de collections presque constants, elles présentent une piètre qualité. Résultat : lorsque l’on doit finalement se séparer de ses habits, il est presque impossible de les recycler et d’en tirer quoi que ce soit. À la place, on fait travailler les petits créateurs, idéalement des créateurs locaux, pour réduire son empreinte carbone. On peut également se fier aux labels de mode responsable, tels que GOTS, OEKO-TEX, ou EcoCert, qui indiquent que le vêtement que vous achetez respecte plusieurs critères environnementaux, et garantissent également un certain niveau de qualité.

Néanmoins, malgré tous ces efforts, il est parfois inévitable de se séparer de certains vêtements. Dans ce cas, le meilleur moyen de le faire est, de ne pas le laisser dans une benne, où il traversera des milliers de kilomètres au mépris du réchauffement climatique, pour peut-être finir dans la décharge sauvage d’un pays en voie de développement. À la place, cherchez à participer à une économie circulaire, en réintroduisant votre vêtement dans le marché. Pour cela, pensez au don à vos proches, ou à la revente, à travers des plateformes de seconde main, comme Vinted.

Enfin, pour se faire véritable acteur et éviter de faire du Ghana la poubelle du monde, vous pouvez soutenir une association. L’une en particulier a fait de ce fléau son propre combat : The OR Foundation. Cette organisation à but non-lucratif, fondée par l’Américaine Liz Ricketts, lutte pour instaurer des principes de développement durable dans l’industrie de la mode, et ainsi libérer le Ghana de son rôle de poubelle textile du monde. En d’autres termes, l’ONG cherche à construire une mode circulaire, à l’inverse d’une mode jetable.

Parmi d’autres actions, l’ONG a par exemple ouvert un centre communautaire à Accra, au Ghana, ainsi qu’un « labo circulaire ». Leur but est d’accompagner les locaux dans la revalorisation de vêtements de seconde main grâce à des machines dédiées, et également de leur proposer des formations professionnelles, et ainsi les qualifier à lutter pour ne pas faire du Ghana la poubelle du monde. The OR Foundation a également lancé un programme de formation, lors duquel elle place des Ghanéennes en condition de pauvreté, dans un apprentissage rémunéré aux côtés de créateurs, artistes et autres professionnels locaux. Ces formations, d’une durée de six mois, n’ont pas seulement pour but de fournir un salaire à des personnes en situation de détresse, mais également de leur fournir des compétences qui favoriseront leur insertion dans le marché du travail, loin des déchetteries sauvages du Ghana.

Parmi ses autres nombreux programmes, l’ONG organise également des levées de fonds dans le but de fournir de la nourriture aux Ghanéens impliqués dans le marché du textile de seconde main, des animations dans les pays occidentaux, pour sensibiliser les consommateurs aux dérives de la fast fashion, des examens et traitements médicaux pour les vendeurs du marché, et bien d’autres actions encore.

Ainsi, si l’on souhaite prendre part à la lutte pour arrêter de faire du Ghana la poubelle du monde, au-delà de surveiller sa propre consommation de vêtements, l’un des meilleurs moyens est de soutenir l’association The OR Foundation. L’ONG accepte les donations uniques ou mensuelles, qui serviront à soutenir les différents programmes de sensibilisation ou de réinsertion.